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Documents inédits sur Marguerite de Valois à Saint-Pétersbourg[1]

Professeur Vladimir Chichkine, Université de Saint-Pétersbourg

Article publié grâce à l’aimable autorisation de l’auteur :

La période des guerres de religion en France (1559-1598)[2] a toujours eu sur les historiens russes un très grand pouvoir d’attraction. Quelques-uns de leurs travaux semblent assez connus en Russie mais ils restent peu accessibles aux chercheurs français, car les échanges scientifiques et culturels franco-russes sont insuffisants, notamment en raison des problèmes de langue.

Pourquoi cette passion, en Russie, pour cette période ? L’explication se trouve sans doute dans les sous-sols des bibliothèques russes, plus particulièrement de la Bibliothèque Nationale de Russie à Saint-Pétersbourg, car on y trouve un ensemble considérable de manuscrits précieux, lettres et autres écrits personnels d’hommes et de femmes politiques français. Or, parmi quatre mille documents français, le XVIe siècle est très majoritairement représenté : on y trouve notamment quarante-deux lettres de Marguerite dе Valois, reine de la France et Navarre, première épouse de Henri IV (1553-1615). Ces missives sont adressées à diverses personnes de son entourage, plus ou moins connues, parmi lesquelles deux destinataires sont davantage présents : sa mère, Catherine de Médicis, et son frère, le roi Henri III. Trente de ces lettres ont été écrites pendant le premier séjour de Marguerite en Gascogne, de 1579 à 1581, quand elle résidait à la cour de Nérac. Toutes ces pièces font partie de la célèbre collection des manuscrits de Pierre Doubrovsky, le secrétaire-interprète de l’ambassade russe à Paris, qui, dans les premières années de la Révolution française (1789-1792), a acquis plus de onze mille autographes – beaucoup en français – datant du XIIIe au XVIIIe siècle. On trouve aussi dans cette collection une très grande quantité de livres manuscrits. Ces documents ont été rapportés en Russie, en 1805, dissimulés dans les bagages du diplomate, et se sont retrouvés pour finir sur les étagères de la Bibliothèque Impériale publique, la Bibliothèque Nationale de Russie[3] actuelle.

Toutes les lettres de Marguerite de Valois qui se trouvent à Saint-Pétersbourg faisaient partie autrefois de la collection de livres et de manuscrits de la famille de Harley, dont plusieurs membres furent présidents à mortier du Parlement de Paris aux XVIe et XVIIe siècles. La plus grande partie de ces trésors fut transmise, en 1755, à l’abbaye royale Saint-Germain-des-Prés à Paris, en accord avec la décision du dernier propriétaire, le garde des sceaux Germain-Louis de Chauvelin. Puis, grâce à l’aide du bibliothécaire royal Anne-Louis d’Ormesson de Noyseau (guillotiné en 1794), qui avait, probablement, l’idée de sauvegarder ces fonds manuscrits et ces archives de la Révolution, ces autographes se sont mêlés aux autres documents qu’avait entre les mains son ami Pierre Doubrovsky[4].

Cette riche collection d’autographes français du fonds Doubrovsky demeure très peu connue des historiens occidentaux et russes, car elle n’a pas donné lieu à un catalogue détaillé et publié. En effet, ce fonds n’existe que sous la forme d’une description sommaire, en langue russe et imprimée en petit tirage[5]. Cependant, dans les années 1950-1960, en URSS, sous la direction de la professeure d’Histoire Alexandra Lublinskaya, de l’Université de Leningrad (à présent, Saint-Pétersbourg), on a commencé à publier quelques recueils de ces documents français, y compris de précieux autographes du XVIe siècle du début des Guerres de religion (1559-1562)[6]. Bien que ce travail ait été remarquable et mené intelligemment, peu d’historiens français et étrangers se réfèrent à ces publications, et elles ne sont jamais mentionnées dans les bibliographies[7]. Rappelons encore qu’Alexandra Lublinskaya ne faisait que continuer les recherches et le travail du professeur Ivan Loutchtzky, qui fut, en son temps, le premier historien russe à s’intéresser aux lettres des hommes d’État français de la Renaissance, plus particulièrement de la période qui couvrait non seulement les Quatrième et Cinquième guerres de religions (1572-1574) mais aussi le temps de la Ligue Catholique[8]. Leurs travaux et ceux de leurs successeurs ont permis de recenser près de 1300 documents relatifs à la période 1569-1599[9]. La plus grande partie de ces autographes sont les lettres des rois de France : on compte plus de 200 lettres de Charles IX, plus de 350 pour Henri III, plus de 500 pour Henri IV, etc. Plusieurs de ces lettres sont encore inédites[10].

Nous n’aborderons pas, dans cet article, l’histoire de la publication des lettres de Marguerite dе Valois en France et en Russie. Nous renvoyons les lecteurs curieux aux travaux que nous avons fait paraître en 1997 ainsi qu’à la vaste introduction qu’Éliane Viennot y a consacrée dans son édition de la correspondance de la Reine Marguerite, publiée un an après notre travail[11]. Il est à noter que l’historienne française indique très justement que tout n’a pas encore été publié à ce jour, car il reste, nous le savons maintenant, encore beaucoup d’écrits à découvrir parmi les collections privées. Les archives des bibliothèques françaises et étrangères, notamment, n’ont pas encore livré tous leurs secrets, et certains fonds, à l’instar de ceux du Vatican, ne peuvent être visités que par de rares personnes[12]. Du reste, la diffusion des informations sur Internet nous permet aujourd’hui de constater qu’il n’est pas rare que des lettres de la reine soient mises en vente aux enchères[13]. Et les chercheurs continuent, de temps à autre, à publier des inédits, comme Daniel Christiaens l’a fait tout récemment, en publiant dans la Revue de l’Agenais une lettre de 1613 relative à la mort du dernier compagnon de la reine, Bajaumont, seigneur de Lafox, personnage mentionné plusieurs fois dans sa correspondance et celle de Henri IV[14].

 

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Avant d’aborder les lettres inédites de Marguerite de Valois conservées à Saint-Pétersbourg, il convient de faire une place particulière à un autographe inconnu, d’un statut différent : une simple signature de la reine de Navarre, mais apposée sur un document de grande valeur, La Bible historiale[15] de Guiard de Moulins, confectionnée pour la famille d’Albret et conservé par elle depuis le XIVe siècle. On la trouve en effet à l’intérieur même de la couverture du livre manuscrit et illuminé. Les représentants de cette famille, qui sont devenus les rois de Navarre à la fin de XVe siècle, conféraient à cette Bible une valeur toute particulière puisque, par tradition, ils faisaient inscrire les signatures des propriétaires successifs à l’intérieur du livre sacré. Ainsi, à côté de la signature de Marguerite, peut-on distinguer celle de « Henry », son mari, et de « Jehanne », sa belle-mère. Ce document exceptionnel se trouve aujourd’hui à la Bibliothèque Nationale de Russie, à Saint-Pétersbourg. Nous pouvons donc dire avec précision qui l’avait eu entre les mains, et conclure que la reine de Navarre la détenait en dernière instance, la lisant probablement pendant son séjour à Nérac[16].

Venons-en à présent aux autographes de Saint-Pétersbourg, et aux précieux renseignements que l’on y trouve, tant sur certains de leurs destinataires que sur la vie de Marguerite de Valois. Ces lettres seraient par conséquent à lire concomitamment aux Mémoires et à la correspondance déjà publiée, afin d’en tirer « la substantifique moelle ».

La première lettre est une missive de Marguerite de France, duchesse de Savoie, adressée à Charles IX, son neveu, frère de Marguerite, rédigée pendant l’été 1572. La duchesse de Savoie avait été mariée en 1559 au duc Emmanuel-Philibert de Savoie, à l’époque où l’on concluait la paix entre la France et l’Espagne, peu avant la mort du roi Henri II. Femme d’une grande culture, elle prônait l’hégémonie de la France et partageait avec Catherine de Médicis une grande amitié dont les marques se retrouvent dans sa correspondance jusqu’en 1574, date de son décès. Il ne reste malheureusement que peu de témoignages directs de Marguerite de France, si ce n’est les quelques lettres que l’on connaît, qui témoignent assurément de la qualité de sa plume, et qui valent tant d’un point de vue historique que littéraire. Une grande partie de ces documents se trouve à la Bibliothèque Nationale de Russie, dans le fonds de Pierre Doubrovsky (Autographe, 46). Dans la seconde moitié de XIXe siècle, ses lettres furent publiées en France par Ivan Loutchitzky, en collaboration avec Tamizey de Larroque[17]. Mais les deux chercheurs ont oublié d’insérer la lettre de l’Autographe 34/1 dans leur publication. C’est elle que nous faisons ici découvrir.

 Cette lettre est entièrement autographe. Elle est reproduite ici dans son orthographe d’origine : les seules modifications apportées concernent les apostrophes (ajoutés), les majuscules (homogénéisées selon l’usage actuel) et la ponctuation (ajoutée). Marguerite de France l’a écrite en juin 1572. Elle remercie Charles IX de l’invitation au mariage de sa nièce, Marguerite de Valois (« Madame ») avec Henri de Bourbon, qu’elle appelle encore le « prince de Navarre », sans savoir que Jeanne d’Albret, sa mère, était tout juste décédée (9 juin 1572). Elle y exprime le regret de ne pas pouvoir venir plus prestement, car elle n’est pas remise d’une grave maladie. À côté à ces nouvelles d’usage, elle se montre particulièrement heureuse de l’accord « entre messieurs de Guyse et Monsieur l’Admiral », en conformité avec sa tolérance religieuse, aujourd’hui bien connue. Dans l’étude qu’elle a consacrée à Marguerite de France, Jacqueline Boucher fait référence à cette lettre en la paraphrasant (« Invitée aux noces du roi de Navarre et de sa nièce Marguerite (1572), la duchesse de Savoie répondit toutefois par un refus plein de regrets, adressé à Charles IX : elle dit qu’elle n’était pas remise d’une grave maladie[18] »), mais sans citer les sources. Sans doute existe-t-il en France une copie de cette épître. Quoi qu’il en soit, nous la transcrivons dans son intégralité :

Au Roy.

Monseigneur, l’honneur qu’il vous a pleu me faire de me mander par monsieur de Pomiers[19] les bonnes et heureuses nouvelles de la conclusion du marriage de Madame et Monsieur le Prince de Navarre m’ont aporte ung si grand heur et contantement qu’il me seroit inposible de vous represanter par laitre la grande aubligation que je vous en ay car par la vous me faictes bien congnoistre, Monseigneur, la bonne souvenance qu’il vous plaist avoir de moy dont je ne vous en puys asses tres humblement remertier, et quant au conmandement qu’il vous plaist me faire de me trouver aux nopces je vous suplie de croire, Monseigneur, que ce me seroit le plus grand heur qui me pourroit arriver de pouvoir ester mays la maladie que j’eus dernierement ne me peult permettre de jouyr d’un si grand bien ne m’ayant encores laise reprendre les forces de pouvoir faire ung si long voyage dont je suys tres marrie.

Il est vray, Monseigneur, que je ne vivrois point contante si je n’avois esperance de vous voir encores une fois avant que de mourir pour[20] l’acomplisement de tous mes[21] souhais, je vous remersie ausi tres humblement, Monseigneur, de ce qu’il vous a pleu me mander la restitusion de vos villes et de l’accord qu’aves faict entre messieurs de Guyse[22] et Monsieur l’Admiral[23] qui sont bien les milleures nouvelles que j’eusse peu recepvoir, Monseigneur, car tout cela aportera une parfaicte union et repos entre vos sugectz de quoy je me resjouys infiniment conme celle qui n’a aultre bien ne contantement que par le vostre, aussi que j’ay prie ledit sieur de Pommiers [sic] vous faire plus amplement entendre de ma part sur lequel me remetant je ne vous ennuyray de plus longue laitre si n’est pour vous baiser tres humblement les mains et prier Dieu, Monseigneur, vous donner aultant l’heur et de grandeur que vous en desire.

Vostre tres humble et tres obeisante tante et sugette,

Marguerite de France

[Mention d’une main anonyme du XVIe siècle: « …Madam[e] de Savoy[e]… »]

 

Bibliothèque Nationale de Russie. Fonds Dubrovsky

Autographe 34/1, n° 81

 

Les trois autres documents que nous souhaitons mettre en lumière concernent le retour de la reine de Navarre auprès de son mari entre 1583 et 1584. Ils ont été rédigés par « Carolo Birago », c’est-à-dire Charles de Birague († 1591), agent de Catherine de Médicis, d’origine italienne comme elle et parent du chancelier de France, René de Birague (1507-1587). Ces lettres sont adressées à la reine mère et à Henri III. Elles sont reproduites avec les mêmes modifications que la lettre précédente.

C’est à partir de 1562 que Charles de Birague fut au service de Catherine de Médicis, qui comptait sur lui pour ses affaires diplomatiques. Comme toute la famille Birague, Charles était un fidèle négociateur pour le compte de la couronne et avait très tôt intégré le Conseil Royal. C’est lui qui négocia auprès du roi de Navarre les conditions de retour de Marguerite de Valois à Nérac après les événements de 1583, qui eurent une très grande influence sur le destin de la reine de Navarre et sont le point de départ de ses mésaventures ultérieures. En effet, Henri III était mécontent de l’attitude de sa sœur, qui avait pris le parti de son frère cadet, François d’Anjou. Aussi le roi lui ordonna-t-il de quitter Paris et de retourner auprès de son mari, en Gascogne, en accompagnant cet ordre de mots et d’actions humiliantes qui blessèrent la reine. Henri de Navarre, pour qui Marguerite représentait sa meilleure carte politique contre la couronne, se servit judicieusement de cette situation scandaleuse pour faire pression contre le roi et la reine mère. En réponse à l’affront que venait d’essuyer Marguerite de Valois, il ordonna à ses troupes de prendre la ville de Mont-de-Marsan (le 21 novembre 1583) dont la population catholique refusait vertement de regarder le roi de Navarre comme son seigneur. La riposte ne se fit pas attendre, puisque le maréchal de Matignon, lieutenant général du roi en Guyenne, ordonna à son tour d’installer de nombreuses garnisons dans les principales villes du sud de la France, plus particulièrement à Bazas et à Agen. Le roi de Navarre, se trouvant alors en mauvaise posture, accepta de négocier. Henri III et Catherine de Médicis, de leur côté, ne s’attendaient pas à ce que les événements prissent de telles proportions et tentèrent de pacifier la situation avec Henri de Navarre en faisant alors quelques concessions afin de contenter les belligérants et de réunir le couple royal navarrais[24].

Ces lettres témoignent de la progression des négociations de Charles de Birague avec Henri de Navarre, et elles présentent de nombreux détails sur les événements politiques. La Couronne avait, parallèlement, envoyé sur place un autre de ses habiles diplomates, Pomponne de Bellièvre, rappelé spécialement des Flandres, pour appuyer Birague et accélérer les pourparlers. Les deux diplomates comprirent très rapidement que Henri de Navarre n’était prêt à accueillir sa femme qu’à la condition de conserver la ville de Mont-de-Marsan ainsi que l’autorité sur les garnisons royales de Bazas et des autres villes de Gascogne (exigences justifiées, puisque la plupart de ces villes entraient dans la dot de la reine de Navarre). Après moult retardements et lenteurs dans les négociations sur les compensations demandées, Henri de Navarre et ses plus proches compagnons, Du Plessis-Mornay et Lavardin, ainsi que le secrétaire Le Pin, tant détesté par Marguerite de Valois (il avait brutalisé tout un groupe de catholiques après une messe que la mémorialiste décrit dans ses Mémoires), s’accordèrent avec la cour par l’intermédiaire de Charles de Birague. Aussi le roi de France fit-il évacuer toutes les troupes des villes prises, laissant seulement une petite garnison à Bazas. En avril 1584, la reine de Navarre revint auprès de son mari, qui, ayant reçu tout ce qu’il voulait du roi de France, pardonna alors à ce dernier l’humiliante offense. Tous acceptèrent de faire bonne figure et de considérer l’incident comme clos :

1. A la Royne maire du Roy.

Madame, par la darniere despeche VM [Votre Majesté] aura entendu on quel estatz estions les affaires, et que j’estoit demeure avec le Roy de Navare lequel m’a retenu cinq jours après le depart de Monsieur de Bellievre[25], se plaignant souvant des garnisons misses a Bazas et autres villes, disant q’on le voloit fair faire les choses par force, et par ce qu’il m’avoit deja dit, d’y parler librement.

Je luy remostray que c’estoit luy que pencoit forcer le Roy ayant prins Mont de Marsan par force, et envoye Monsieur de Bellievre a Bazas ou il n’avoit pouvoir ny autorite, sans l’ouyr come il n’a aussy faict despuis et la renvoye sans response [aux ?] question [et ?] en dignitez [indignités] grandes faictes non seullement au seigneur de Bellievre, mais au Roy qu’est le mestre, que la envoye pour satesfaire avec toutes honestetes, a ce qu’il avoit recherche et demande conseil et davantaige, qu’il retardoit encores a veoyr la Royne de Navare soubz preteste de Bazas que n’avoit rien de comun ensemble, que c’estoit un autre affront faict a la ditte Royne que par consequent touchoit a Voz Majestes que l’ont prye de la recevoir au plus tost, et avec honeur come seur de son Roy, et que maintenent la retarder a la recevoir quatre jours seullement, c’estoit la deshonorer, et faire parler tout le monde, et penser que ce fust plus tost pour la maupriser que autrement, dont Voz Mtes n’en recevriont aucun plesir, que se n’estoit pas aussi le moyen, que Voz Mtes fissent quelque chose pour luy, mais bien que en seriez tros mal content et qu’il faloit prendre autre chemin, et ne iryter poinct le Roy que avoit moyen de faire du bien et du mal, et me semble qu’il estoit quasi en poyne, car il me dict qu’il envoyoit un gentilhome a Voz Mtes pour y satisfaire [ ;] que je fisse que la Royne fille de Votre Majeste vous racomandast ces affaires et moy bon office.

Je luy replicay que la Royne [de Navarre] et moy ferions ce que pourions, mais que je doubtoys que ce fust [trop] tard, parce que le Roy seroit deja agry pour les indignities fautes [faites], et que ne savois pas ce [si] Sa Majeste voudroit veoyr noz letters, ny ouyr ce luy qu’il envoye, peut ester [peut-être] luy respondra quelque chose aygre que me despleroit grandement, se chaschant [ne sachant] ce qu’il fera, quant il l’aura telle, car s’il pensoit puis après dire qu’il ne recevra la Royne sa fame qu’il fera la guerre que l’un et l’aultre seroit peut ester sa darniere ruine, et qui fallout qu’il print garde que quele un quy luy donne conseil, ne fust bien ayxe de le veoir faire chose si mal a propos, qu’il ce rompit du tout avec le roy, dont il me respondit qu’il ne prendroit pas ce conseil, et autres bonnes paroles.

Et enfin il m’a despache ver la Royne sa fame avec une lettre, doble della quelle Votre Majeste l’aura joy [ici] enclose, et me la l’eust, dont je le supliay de me dire librement ce soubz cest affaire de Bazas il y estoit encores quelque autre chose et se pour retard de la Royne. Il ne desiroit autre chose que la garnison de Bazas fust ostee luy disant ne savoir pas se le Roy le vouloit faire. Il me replica qu’il avoit promis sa parole a ceux de la religion quant il n’ont [l’ont] rendu, qu’il ny seroit mis garnison, et que le jour mesmes o l’autre après que elle sera ostee [,] qu’il viendra recevoir sa fame [,] ouyra Monsieur de Bellievre et fera tout ce qu’il devra faire, et que je la deusse asseurer aussi de ca part, et la prier de soliciter de son coste qu’elle fust ostee, que je l’asseurasse de son amitye, et qu’il l’aymoit plus que jamais, come il l’y feroit conoistre par les effetz.

La crainte que nous avions c’estoit, que le roy de Navare eust volonte de faire la guerre et qu’il ne fust pas encores prest qu’il pensat nous faire coler [couler : perdre] ce temps, disant aujourduy une chose demain un autre, et come il fust prest qu’il nous dit librement, ne vouloir recevoir la Royne sa fame, o demander des choses grandes et impossibles et pour en savoir ce qu’en estoit. J’ay employe personages de qualitez de l’un et l’autre religion, serviteurs de Voz Majestes et affectionez a la Royne votre fille, que m’ont asseure qu’il ne pensent point a faire guerre sy le Roy ne la comence, Le Plesis[26] et Le Pain[27] la vouloriont et precipite[nt] tout car il m’a este asseure que quant Monsieur de Laverdin[28] a dit fort affectione ce que Son Altesse luy a comande et que le Roy de Navare un peu fache ladict [l’a dit] aud. Plesis, qu’il a responda,[« ] bien il faut prendre par force cette Royne et qyieter [quiéter : rester tranquille] pour cest heure mais dans un an ou deux, sy vous vous devissiez faire esclave du turc ou de Casemire[29] et fault remuer et remerser san su desoubz [sens dessus dessous »]. Mais que quant au Roy de Navare qu’il ne desire point la guerre et qu’il n’ont pas moyent et que les eglises luy ont mande et resoulu, encores de peu de temps en ca qu’il ne veulont poinct de guerre contre le Roy sy Sa Majeste leur mantient led. et en livrer exercice della religion, et les ministres, l’ont fort persuade a recevoir an plustost la Royne, et autres choses, qu’il est bien vray que sur la prinse de Mont du Marcan, et pour les indignities usees, craignent que le Roy puisse ester bien corosse [courroucé] et qu’il ne fait la guerre, veoyant aussi que aux villes icy a leur tour il y a des garnisons qu’il y met suspect, il a escrit en Xantonge [Saintonge] et autres lieus a des gentilhommes de averter a ces avis et prendre garde aux enterprises que ce pouriont [qui se pourraient] faire, sy la guerre venoit, et l’avertir de tout sans toutefois rien enterprendre sans son comandement ne vouland entrer on guerre sy on ne la luy faict et m’ont aussi dict que plusieurs della religion sont en poyne de ces indignitez et mal proceder, disant librement si le Roy de Navare ne receoyt la Royne sa fame et que Sa Majeste luy fist la guerre, qu’il ce retireront du coste de Sa Majeste et se que me faict aussi croire qu’il ne pensent a la guerre.

C’est que le Roy de Navarre m’a dix fois parle fort librement et particulairement de tout ce qu’est passé et n’ay peu conoistre, qu’il aya [ait] le moindre agreur du monde contre la Royne sa fame de laquelle il m’en a souvant parle, et enfin prie faire en sorte que elle ne se aflige ny tormente pour si peu de temps et que je l’asseure qu’il la recevra avec tout honeur et contentement. Vray est que souvant il se dict des choses, et principalement icy et puis s’en faict d’autres, mais il m’a parle de telle facon et [nous avons] tant de fois replique luy et moy que s’il eust en autre volonte il me semble qu’il y seroit echape quelque mot, et ne meauroit, par son honeur dict, come il a faict si affectionement d’en asseurer la Royne sa fame et je pense qu’il la recevra avec honeur et bonne volonte, et peut ester il ny parlera des choses passees, come en bonne occasion je l’ay aussi persuade et fait les bons offices que j’ay peu hor [ores : maintenant] pour le faict de Bazas, [.] se n’est pas pour donner conseil a Voz Majestes, qu’il ne m’a partient pas, mais come tres humble serviteur que desire leur contentement et pour sortir d’un affaire de telle importance je diray que je suis este, et l’ay bien veu [l’ : Bazas], il ne vault pas gran chose.

Il y a la maison des evesques qu’est un demy chateau, que les ugnotz n’aviont abatu une partye que l’evesque a faict refaire, de fason qu’il est en defence [,] non pas, qu’il soit gran chose ny du tout bien asseure mes il est telle que y estant loges l’evesques et chanoines, s’il ont six ou huict serviteurs et qu’ilz prenent garde a leur affaire come il peuvent faire sans bruit. [,] Ilz n’est pas en puissance des ugnotz dela ville, que sont le plus fort et quant ilz auriont encores quelque autre petite ayde de l’eforcer si tost, qu’il ne puisse ayxemt [aisément] estre secoura en un jour de Bourdeaux [ ;] vouland enferer [inférer] que s’il plesoit au Roy, n’avoir pour cest heure esgard aux indignitez, puis qu’il a tout jour moyent de s’en vanger, et sortir de cest affaire, il me semble qu’il y a deux moyent pour le faict dud. Bazas, et pour s’asseurer della volonte du Roy de Navare que se conoistra assez quant il recevra avec honeur la Royne sa fame.

L’un des quels moyent est que s’il pleut au Roy que Monsieur de Bellievre et moy prometons aud. Roy que le jour après qu’il aura receu la Royne, que la garnison della ville sortira et nous demeurer avec luy quasi come pour ostaige. Je pense qu’il le fera et adjoutera fois a ce qui led. Sieur de Bellievre luy dira et a moy aussi quelque peu et s’il s’opiniastratz, come il doubte, que la garnison fust la primiere a sortir. Il me semble que le tout se peut faire avec honeste seurte [sûreté] puis que cest un faict que ne doit partir que deux o troys jours de temps [, à] savoir que la garnison sorte aujourduy et que demain le Roy de Navare, que faict que soit a Nerac, quatre lieu d’icy recevue [reçoive] la Royne et cependent l’evesque de Bazas est seur dans son chateau, s’il receoit lad. Royne. Je pense qu’il soit grande asseurance que le tout ira bien, et qu’il ne pense a la guerre [ ;] et s’il ne la receoit, l’on conoistra sa volonte, y protestera et remettra la garnison, avec seurre [sûreté], de facon que n’aurons rien perdu, mais pour faire cela, si eussi plesoit a Sa Majeste, il faut qu’il luy plaise en escrire a Monsieur de Matignon[30] et a Monsieur de Bellievre et regardrons, de faire les choses avec le plus de seurte et reputation que nous sera possible et pour le mains [moins] nous en veoyrons une fin car de demeurer long temps les choses come elles sont il n’y a point de reputation et sy le Roy de Navare ne voura puis après le faire aussi il faudra bien qu’il se resolue [résolve] en change [à changer] de langaige. Il est vray que sa lettre a ce que j’ay porte de bouche est quelque chose pour eviter le parler des persones [.] Voz Majestes en feront ce que mieux leur semblera, et me honoreront de ses bons comandements la suplyant tres humblement qu’il luy plaise oster au plustost coste povre Royne d’afliction.

Madame, je suplye le Createur donner a Votre Majeste en parfaicte prosperite le complissemente de ses desirs.

De Gen [d’Agen] ce XVIIe jour de decembre 1583.

De Votre Majeste tres humble, tres fidelle et tres obeisant serviteur

Carolo Birago

[Mention d’une main du XVIe siècle : « le Sr Charles de Birague du XVIIe decembre 1583 »].

 

Bibliothèque Nationale de Russie. Fonds Dubrovsky

Autographe 98/4. № 82

 

2. A la Royne maire du Roy.

Madame, le gentilhome que j’ay escrit a Votre Majeste que la Royne votre fille a envoye visiter le Roy de Navare son mary, est de retour et a aporte, par response de ma lettre, ce que Votre Majeste s’il luy plait veoira par le double icy enclose, que n’ay voulu failir d’y envoyer, et je pense bien qu’ils y ont mis quelque motz en consideration que je l’envoyerois a Votre Majeste. Il a escrit a la Royne sa fame qu’il envoyera vers elle en continant qu’il a response de Sa Majeste et semble qu’il doubte quelle soit aygre come il doit, que a este la primiere que a este envoyee a Monsieur de Bellievre et qu’il continue pour le reste comme il luy a envoye par Bosanval[31], qu’est ce que Votre Majeste vera par l’aultre miene lettre, [.] je continue en mon opinion qu’il ne pensent a faire guerre et qu’il n’ont moyent de la faire, et s’il plesoit au Roy coller [couler : laisser tomber] le faict du Mont de Marsan, et a passer le tout, qu’il seroit bien tout [bientôt] faict, car j’ay escrit a Votre Majeste la cause que a faict interprendre le Roy de Navare, aprendre led. Mont de Marsan [.] bien est vray que ceux qui luy ont consille, aliont a chemin [allaient à chemin : dans le sens, dans l’intention] que par ce moyent la, les choses, se rompissent du tout, et principalement l’amytye entre le Roy de Navare et sa fame, [.] et maintenant qu’il conoissent que cela ne se fera pas. [,] Je croy qu’ilz voudriont que le tout sa passast.

Madame, je suplye le Createur donner a Votre Majeste en parfaicte prosperite le complissement de ses desirs.

D’Agen ce VIme jour de decembre 1583.

De Votre Majeste tres humble, tres fidelle et tres obeyssant serviteur

Carolo Birago

 

Bibliothèque Nationale de Russie. Fonds Dubrovsky

Autographe 98/4, n° 83

 

3. Au Roy.

Sire, par la depesche de Monsieur de Bellievre Votre Majeste veoira en quel estatz est demeure l’affaire della Royne de Navare, et que luy y a procede suivant sa prudence et tres fidelle affection acostumee, en telle facon que le Roy de Navare seme [ce me] semble aveu tres giuste occasion de ce contenter et demeurer satisfaict. J’ay entendu da bon lieu quelque chose qu’il ma semble meriter le faire savoir a Votre Majeste par home espres et par ceste cause je envoye Ludovic present pourteur, lequel raportera fidellement a Votre Majeste ce que il luy ay comande dont elle y fera la consideration que mieux plaira a Votre d. Majeste laquelle je remaroye[32] tres humblement della benigne lettre qu’il y a pleu m’envoyer par le sieur de Praillion[33], la suplyant tres humblement qu’il luy plaise de croire que combien que mes moyents soyent fort petits, come Monsieur de Bellievre mesmes a coneu que je les employeray avec ceux de mes amis et ma vye de telle facon que Votre Majeste par sa bonte conoistra la tres fidelle affection que j’ay de luy faire tres humble service et aussy a la Royne sa seure a…t[34] cest heur et honeur qu’il alla [qu’il a] pleu a Votre Majeste le me commander et ne abandoneray point la Royne de Navare, quelle ne soit on [] Votre Majeste desire, et tant que je pouray trouver du credit et engageray tout ce que j’ay et les propes [et [m]es propres] enfans, pour satisfaire alla volonte de Votre Majeste.

Sire, je suplye le Createur donner a Votre Majeste en parfaicte prosperite le complissement de ses desirs.

D’Agen ce XXIIIme jour de jenvier 1583.

De Votre Majeste tres humble, tres fidelle et tres obeyssant serviteur

Carolo Birago»

[Au verso mention d’une main anonyme du XVIe siècle : « Mr Charles de Birague du XXIIIe janvier. R[eçu]e le VIIe febrier 1584 »]

 

Bibliothèque Nationale de Russie. Fonds Dubrovsky

Autographe 98/4, n° 84

 

Ces lettres de Saint-Pétersbourg furent pour la première fois mentionnées par le comte Hector dе La Ferrière lorsqu’il préparait l’édition de la correspondance de Catherine de Médicis, mais progressivement il les perdit de vue, non sans regret comme il le dit lui-même dans son compte rendu de sa mission à la Bibliothèque Impériale[35] qui devait durer deux ans. Son collègue Gustave Baguenault de Puchesse, qui termina en 1901 l’édition des lettres de la reine mère, écrivit un article détaillé sur le retour de Marguerite de Valois à Nérac. Il étaya celui-ci grâce à un inédit de la correspondance de Catherine de Médicis s’adressant à Pomponne de Bellievre. Il souligna alors que c’était « la seule source, qui nous perm[ettait] d’apprendre toute la marche des négociations[36] ».

Aujourd’hui nous pouvons nous appuyer sur une autre source, les lettres de Marguerite de Valois elle-même, qu’Éliane Viennot a réunies dans un seul ouvrage. Nous y découvrons quarante lettres[37] consacrées à ces événements, qui confirment une grande partie des informations rapportés par Charles de Birague avec une masse impressionnante de détails. Tous ces documents se trouvent désormais à notre disposition. Ils nous aideront à compléter l’histoire de cet « affront » et à mieux comprendre toute la complexité du conflit noué autour de la reine de Navarre. D’ores et déjà, on saisit mieux, en filigrane, une autre guerre, celle des « trois Henri », qui s’étalera de à 1585 à 1588.

J’adresse mes cordiaux remerciements à Éliane Viennot et à Laurent Angard pour leurs conseils et les corrections qu’ils ont apportées à cet article, afin qu’il puisse voir le jour en français.



[1] Une première version de cet article a paru, en russe, dans Marguerite de Valois, Mémoires. Lettres choisies. Documents inédits, éd. sous la direction de V. Chichkine en collaboration avec É. Viennot et L. Angard, Saint-Pétersbourg, EURASIA, 2010 [en russe et français pour articles et documents].

[2] Cette périodicité est celle de l’École historique de Saint-Pétersbourg.

[3] M. François, « Pierre Dubrovsky et les manuscrits de Saint-Germain-des-Prés à Leningrad », dans Mémorial du XIVe centenaire de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés, Paris, 1959, p. 333-341; P.Z. Thompson, « Biography of a Library : the Western European manuscript collection of Peter P. Dubrovskiy in Leningrad », dans The Journal of Library History, V.19. № 4, Fall, 1984, p. 477-503; A. Parent-Charon, « Les acquisitions de manuscrits de Doubrovski à la vente Loménie de Brienne (1790-1792) », dans Occidentalia manuscripts and collections [Западные рукописи и традиция их изучения], Saint-Pétersbourg, 2009, p.15-19.

[4] Nous renvoyons à notre article, V. Chichkine, « Trois lettres inédites de Marguerite de Valois conservée à la Bibliothèque nationale de Russie », Histoire et Archives, n° 2, Paris, 1997, p. 141-150.

[5] Recueil des documents de la collection de Pierre Doubrovsky, éd. T. Voronova et Т. Louisova, Leningrad, 1979 [en russe et français pous les noms propres].

[6] « Documents pour servir à l’histoire de France au milieu de XVIe siècle (1559-1560) » [Документы по истории Франции середины XVI века], éd. Т. Voronova et E. Gugari, sous la direction d’A. Lublinskaya, dans Srednie veka, n° 12-15, 19, Moscou, 1958-1961, 77 documents ; Documents pour servir à l’histoire des Guerres civiles en France (1561-1563) [Документы по истории гражданских войн во Франции], publiés par A. Lublinskaya, Moscou-Leningrad, 1962, 127 documents.

[7] Voir, par exemple, la partie « Sources et Bibliographie » d’A. Jouanna, dans Histoire et Dictionnaire des Guerres de religion, Paris, éd. R. Laffont, 1998, p. 1407 et suiv. Lors de la préparation de l’édition des lettres du cardinal de Lorraine, D. Cuisiat fut très surpris d’apprendre qu’une partie des autographes avait été déjà publiée. Nous renvoyons à l’ouvrage qu’il a dirigé, Lettres du Cardinal Charles de Lorraine (1525-1574), Genève, éd. Droz, coll. « Travaux Humanisme Renaissance », 1998, n° 665, 689, 736.

[8] Voir « Documents inédits et originaux. Quatrième guerre de Religion (1572-1573) ; Cinquième guerre de Religion (1574). Lettres extraites des manuscrits de la Bibliothèque Impériale de Saint-Pétersbourg », éd. J. Loutchitzky, Bulletin de la Société de l’histoire du protestantisme français, n° 22, 187, p. 252-268, 299-311, 352-374, 401-413 ; Documents inédits pour servir à l’histoire de la Réforme et de la Ligue, Paris-Kiev, 1875.

[9] A. Lublinskaya, « Introduction », Documents pour servir à l’histoire des Guerres civiles en France (1561-1563), p. 6.

[10] En guise d’exemple, il nous suffira d’indiquer que, dans le VIe volume des Lettres de Henri III, éditées par J. Boucher, aucune mention n’est faite aux lettres du roi adressées à Villeroy, qui se trouvent à la Bibliothèque Nationale de Russie à Saint-Pétersbourg.

[11] V. Chichkine, « Trois lettres inédites de Marguerite de Valois », op.cit. ; Marguerite de Valois, Correspondance. 1569-1614, éd. Eliane Viennot, Paris, éd. H. Champion, 1998.

[12] É. Viennot, « Introduction », dans Marguerite de Valois, Correspondance, op.cit., p. 20-21.

[13] Ces informations pouvant être volatiles, je livre ici deux lettres inédites actuellement en ligne. La première a été mise en vente chez Christie’s (Sale 7411, lot 416). Elle est partiellement reproduite sur le site de cette maison (www.christies.com) et entièrement sur celui du Musée des Lettres et Manuscrits (www.museedeslettres.fr). Elle porte la mention d’une main anonyme : « 1579. La Reine Marguerite au Roy Henry III » :

Au Roy Monsigneur et frère.

Monsigneur, encore qui n’i ait pas longtems que je vous aie escrit si ne laiserai je perdre cette occasion sans prandre la hardiesse de me ramantenoir toujours en votre bonne grasse et de vous supplier qui vous plaisse me tant honorer que de vous assurer que je mettrai peine de mi conserver par tous les moiens que je pourai avoir de vous faire le treshumble servisse avoir de vous doitz et si ma puissance et mes effaitz ne peuvent tout se que vous desires croies si vous plaist, Monsigneur, que je suis celle qui en resoit plus de desplaisir comme vous poura temoigner se jantilhomme qui est au Roi mon mary qui sait unne partie des peines enquoi je suis pour la division qui est entre le roi mon mary et monsieur le marechal de Biron pour obeir au commandemant qui vous a pleu me faire j’ai fait et fais encoire se que je puis pour les remettre bien ensemble mais tant d’unne part que d’autre je i voi si peu daparanse que je n’an puis rien esperer de bien je vous supplie tres humblemant ma faire tant d’honneur que de panser qui m’en deplait extrememant car les chose qui sont pour v[ost]re servisse et pour v[ost]re contantemant je les desirerai et mi enploirai toujours avecque le zelle et devotion que doit faire la plus affectionnee de toutes nos treshumbles servants et comme telle Monsigneur je vous baisse treshumblemant les mains.

[Monogramme]

La seconde a également fait l'objet d'une vente chez Christie's (Sale 7411, lot 415) et elle est également addressee à Henri III. Elle porte la mention d’une main anonyme : « 1er janvier 1580 ». Elle n’est que partiellement transcrite :

Au Roy Monsigneur et frère.

Monsigneur, s’an alant Monsieur de Miosans pour quelques sienes aferes je n’ai voulu fallir de l’accompagner de cete letter tant pour estre si heureuse de me ramantenoir an v[ost]re bonne grase que pour vous rafraichir la souvenanse de la fidelite et tres humble servise qui vous a voue de quoi il vous a comme la roine sa peut resovenir de lontans randu preuve qui me fera vous supplier tres humblemant Monsigneur et pour les bons ofices que j’ai resus de luy qui vous plaise de favoriser et gratifier an ce que ses aferes an aront besoin de quoi Monsigneur je ne vous an are moins d’aubligation qe si c’etoit an mon particulier et vous an demeurere toute ma vie la plus tres humble et fidele de toute vos servante…

Marguerite

[14] C. Daniel, « Une lettre inédite de Marguerite de Valois sur la mort de Bajaumont, seigneur de Lafox », Revue de l’Agenais, n°3, 2009. p. 307-324.

[15] Bibliothèque Nationale de Russie. Code: Fr. F.v.I/1-2.

[16] T.P. Voronova , A. Sterligov, Western European Illuminated Manuscripts of the 8th to the 16th Centuries in the National Library of Russia, St. Petersburg: France, Spain, England, Germany, Italy, The Netherlands, Trad. par M. Faure. Bournemouth, Parkstone Press, Saint-Pétersbourg, Аurorа, 1997. p. 82 et als.

[17] « Lettres inédites de Marguerite de France », éd. G. Bertrand dans Revue des sociétés savantes. 5e série, t. IV, Paris, 1873. p. 457- 484 ; « Lettres inédites de Marguerite de France », éd. J. Loutchitsky et T. de Larroque, dans Revue historique, Paris, 1881 (mai-août), Année 6, t. 16. p. 304-326.

[18] J. Boucher, « Marguerite de France », dans A. Jouanna, J. Boucher et al., Histoire et dictionnaire des Guerres de religion, op. cit., p. 1080.

[19] Philippe de Grillet, seigneur de Pommiers (?).

[20] Le mot « sugects » est ensuite rayé.

[21] Le mot « la » est ensuite rayé.

[22] Maison de Guise-Lorraine.

[23] Gaspard de Coligny.

[24] Nous renvoyons à l’ouvrage capital d’É. Viennot, Marguerite de Valois. Histoire d’une femme. Histoire d’un mythe, Paris, éd. Payot, 1993, p. 154-157 [rééd. Tempus, 2005, p. 204-208], ainsi qu’aux pages de la Correspondance de la reine correspondant à cette négociation (op. cit., p. 256-291, 619-620). Voir également J.-P. Babelon, Henri IV, Paris, Fayard, 1982, p. 215-220.

[25] Pomponne de Bellièvre.

[26] Philippe de Mornay, seigneur Du Plessis-Marly.

[27] Jacques Lallier, seigneur Le Pin ou Du Pin.

[28] Jean de Beaumanoir, seigneur de Lavardin.

[29] Jean Casimir de Bavière, comte Palatin.

[30] Jacques de Goyon, maréchal de Matignon.

[31] Paul Choart, seigneur de Grand-Champ, dit Buzenval.

[32] Déformation probable du futur du verbe ramentevoir, rappeler.

[33] Jacques de Praillon, sieur de Sorbey.

[34] Illisible.

[35] H. La Ferrière (Comte de), Deux années de mission à Saint-Pétersbourg, Paris, éd. Imprimerie impériale, 1867, p. 32-34.

[36] G. Baguenault de Puchesse, « Le renvoi par Henri III de Marguerite de Valois et sa réconciliation avec le Roi de Navarre d’après documents inédits (août 1583 – avril 1584) » dans Revue des questions historiques, Paris, 1901, n° 70, p. 399.

[37] Ce sont les lettres qui portent les numéros 176 à 214 dans Marguerite de Valois, Correspondance. 1569-1614, op.cit., p. 255-295.

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