Source: Bulletin
SHAP, tome XIII (1886), pp. 463-504 (extraits)
ESSAIS TOPOGRAPHIQUES, historiques et
biographiques sur l'arrondissement de nontron (Suite).
Canton de nontron. — Commune de Nontron (suite).
Chapitre IV. — Institutions seigneuriales.
Il résulte de mémoires judiciaires
des XVIIe et XVIIIe siècles, au sujet de l'hommage, ainsi
que de deux sentences arbitrales des 9 et 17 floréal an II de la République, ce
qui suit :
« L'an 769,
Roger, comte de Limoges, et Euphrasie, sa femme, fondateurs de l'abbaye de
Charroux, en Poitou, avec le roy Charlemagne, firent leur testament, par lequel
ils donnèrent a- cette abbaye plusieurs biens considérables, et entr'autres
leur château et châtellenie de Nontron avec ses dépendances[1]. — Cette donation fut confirmée par les roys
Charlemagne, Louis-le-Débonnaire et Philippe Ier, et par les papes Léon, Jean, Benoit, Léon IX, Alexandre et Urbain, dans
les années 796, 899, 1041, 1061 et 1088[2]. — Les abbés de Charroux ayant eu la
propriété de Nontron, la conservèrent pendant longtemps et la transfèrent
ensuite, vers l'an 1200, aux vicomtes de Limoges, sous la réserve de l'hommage
à leur abbaye au devoir d'un palefroy ; ce qui prouve cette vérité, c'est que
Guy, vicomte de Limoges, rendit hommage à Eymeri, abbé de ladite abbaye, le
vendredy, jour et feste de l'Assomption de l'an 1240. Le même hommage fut
encore rendu par le vicomte à la même abbaye en 1256. Ces deux hommages furent
suivis d'une composition qui fit faite en 1303, entre Jean de Bretagne, vicomte
de Limoges, et Raymond de Châteauneuf, abbé de Charroux, par laquelle la valeur
du palefroy, dû à chaque hommage, fut fixée à quinze livres... Les vicomtes de
Limogée, devenus puissants, refusèrent sans doute de continuer leurs hommages de
la baronnie de Nontron à l'abbaye de Charroux. Cette résistance donna lieu à un
échange, entre Philippe-le-Bel, roy de France, et les abbés de ladilte abbaye,
qui fut fait en 1309. L'abbé céda au roy l'hommage de Nontron, réservé aux
vicomtes de Limoges, et le roy donna en contr'échange soixante livres tournois
de rente sur la ville de Charroux. En 1310, il lut fait procès-verbal
d'estimation et répartition de la rente cédée à l'abbaye par Hugues de
Lassella, commissaire exprès député. L'échange de 1309 fut confirmé par les
roys Charles IV, dit le Bel, et Charles V, dit le Sage, en 1324 et 1379... La
baronnie de Nontron, qui avoit resté pendant plusieurs siècles dans la maison
de Bretagne, passa avec la vicomte de Limoges dans la maison d'Albret, par le mariage
d'Alain d'Albret avec Françoise de Bretagne, fille aînée de Guillaume de
Bretagne, comte de Penthièvre et vicomte de Limoges. Quoique la baronnie de
Nontron fût anciennement très considérable et qu'elle fût composée de
vingt-deux châtellenies contenant soixante-douze paroisses, cependant elle ne
l'étoit pas à beaucoup près autant que la vicomte de Limoges, el que les
vicomtes possédoient en même temps les deux seigneuries, on s'accoutuma à
confondre la baronnie avec la vicomté, et à ne les considérer que comme un seul
fief. Il y a cependant plusieurs actes où les vicomtes de Limoges se
qualifiaient de barons de Nontron, preuves qu'ils reconnaissoient ces deux
terres comme très distinctes. — Il paroit qu'Alain d'Albret démembra, par une
foule d'aliénations, la baronnie de Nontron, puisque par contrat du 10 janvier
1499, il ne la vendit que 4,025 livres à Dauphin Pastoureau, à qui il avoit
déjà vendu plusieurs paroisses dépendantes de cette baronnie. II est pourtant
vrai qu'en aliénant, Alain d'Albret réservoit toujours les hommages à la
baronnie de Nontron, chef-lieu qu'il conservoit... Les tribunaux ont jugé en
faveur des seigneurs de Pompadour, barons de Nontron, que les hommages qui en
dépendoient par les anciens titres y dévoient être rapportés, et non pas au
vicomte de Limoges, quoique différents seigneurs particuliers réclamassent le
roy de Navarre, vicomte de Limoges, pour leur suzerain. — La baronnie vendue,
en 1499, à Dauphin Pastoureau, sous pacte de réméré fut retirée et demeura dans
la maison d'Albret jusqu'en 1600, qu'elle fut vendue irrévocablement au
seigneur de Pompadour... — Jean d'Albret, fils d'Alain et de Françoise de
Bretagne, eut pour fils Henri, qui épousa Catherine de Foix, reine de Navarre,
desquels naquit Jeanne d'Albret, fille unique, mariée en 1548 à Antoine de Bourbon, duc de Vendôme... Henri IV et la princesse Catherine
naquirent de ce mariage. . En 1584, la princesse Catherine étoit encore
mineure, il fut fait un partage provisionnel, par lequel Henri IV lui abandonna
la vicomté de Limoges, le comté de Périgord, la baronnie de Nontron et
plusieurs autres terres. En 1589, Henri IV parvint à la couronne, et alors la baronnie de Nontron n'était plus dans ses
mains... Le partage de 1584 fut confirmé en 1590... Au mois de janvier 1599, la
princesse Catherine épousa le duc de Lorraine et de Bar, auquel elle apporta en
dot tous les biens qui lui étoient échus en partage et, par conséquent, la
baronnie de Nontron... — Henri le Grand se trouvant, pour des besoins urgents,
Obligé de vendre, demanda à la princesse un
consentement pour aliéner la baronnie, consentement qu'elle donna le 23
septembre 1599. Par cet acte, elle consent que les commissaires du roy
procèdent à l'aliénation de la baronnie comme elle pourroit le faire elle-même,
quoique faisant partie de son partage, à la charge d'en
réserver l'hommage à elle et à ses successeurs, vicomtes de Limoges. — Le 18
août 1600, les commissaires du roy et de madame sa sœur vendirent à messire Charles-Hélie de Colonges de Pellagrue, seigneur du Bourdeix, la
ditte châtellenie et baronnie de Nontron, sise en pais de Périgord, avec toutes
ses appartenances et dépendances, hommages, droits et devoirs seigneuriaux et
pour la somme de 39,375 livres..., sous la réserve de l'hommage au roy, à
madame sa sœur et à leurs successeurs, vicomtes de Limoges... A peine le
seigneur du Bourdeix fut-il en possession de Nontron qu'il se vit accablé de
procès de toute espèce, soit pour le recouvrement de droits usurpés ou
négligés, soit pour défendre aux prétentions que forment contre lui l'abbé de
Charroux, l'évêque d'Angoulême et les traitans ou fermiers des droits du roy...
Le 17 mars 1609, arrêt du Grand-Conseil qui condamne le baron de Nontron à
rendre hommage à l'abbé de Charroux et à payer les lods et
ventes à Charles Duret, son cessionnaire. — Le baron de Nontron, persécuté par
les traitans, malgré l'arrêt de 1609, se pourvoit par roquette civille contre
cet arrêt. Le fermier du domaine en fit autant ; de son chef, le procureur
général du Grand-Conseil les imita, et, enfin, M. de La Rochefoucaut, évêque
d'Angoulême, intervint, et, sur le fondement de plusieurs hommages rendus à son évêché, demanda la mouvance de Nontron. — Le 13 septembre 1614,
second arrêt du Grand-Conseil qui cassa le premier et condamna le baron de
Nontron à rendre hommage au dit évêque et à lui payer les lods et ventes... Cet
arrêt fut suivi d'une saisie féodale sur la baronnie de Nontron, le 3 janvier
161b... Nouveau pourvoi cl renvoi devant le Parlement de Paris, qui retint la
cause par arrêt du 19 avril 1019... Le 22 février 1622, requette civile du
procureur général contre les arrêts du Grand-Conseil de 1609 et 1614 pour faire
déclarer l'hommage de Nontron dû à la couronne, conformément à l'échange de
1309... Le 23 mai 1631, l'évêque d'Angoulême ayant assigné le baron de Nontron
pour voir interposer le décret de sa terre, le 27 avril 1632, le Grand-Conseil
rend un arrêt par lequel il retient à soy la connoissance des instances d'entre
l'évêque et le baron au sujet de la mouvance de la baronnie de Nontron... Le 18
mai de la même année, arrêt du Parlement de Paris qui casse celui du
Grand-Conseil et fait défense à l'évêque, au baron et à tous autres de procéder
ailleurs qu'en la ditte cour sur les différends occasionnés pour la ditte
baronnie. Du 28 du même mois, arrêt du Conseil d'Etat qui renvoie les parties
en règlement de juges, et il y a toute apparence que l'attribution fut
confirmée au Parlement de Paris en 1633... Le roy ayant député de nouveaux
commissaires pour la réception des hommages dus au vicomte de Limoges, le
procureur assigna plusieurs vassaux de la baronnie à rendre hommage ; le baron
s'y opposa et se pourvut au Conseil, où il obtint arrêt le 18 juin 1647, nui
renvoya les instances au Parlement de Paris pour procéder suivant les derniers
errements... »
(…)
Arrivé à ce
point, il nous faut revenir en arrière, afin d'établir l'ordre chronologique
des seigneurs suzerains de Nontron, à partir du VIIIe siècle.
I. Rotgerius ou Roger, antérieurement à 769, ou 785,
époque à laquelle il donna à l'abbaye de Charroux le castrum et la châtellenie de Nontron.
II. L’Abbaye de Charroux, de cette dernière époque jusques
vers la fin du XIIe siècle et avant 1199, époque à laquelle
Richard-Cœur-de-Lion s'empara de la ville de Nontron, appartenant alors au
vicomte de Limoges, auquel le domaine utile de la baronnie avait été transféré,
sous réserve de l'hommage.
III. L'évêque d'Angoulême, d'après les arrêts cités. Quant à
l'hommage qui fut rendu par les vicomtes de Limoges, notamment par Guy, en
1243, et en ces termes :
« Guido vicecomes Lemovicensis... noverit...
tenere et habere sub homagio ligio et predecessores nostri tenuerunt et
habuerunt ab episcopis Engolismensibus... castrum de Nontronio
cum toto honore exceptis burgo Castro et feudum
aux Chabroux. »
Cet hommage fut
renouvelé en 1265, par Marguerite de Bourgogne, veuve de Guy, comme tutrice de
Marie, leur fille, et en 1275, par celle-ci et Jean de Bretagne, son mari, plus
tard et en 1505-1514 par Alain d'Albret. Le 19 juillet 1520, procuration par
Henri II, roi de Navarre, aux fins de l'hommage. (Voir aux Archives de la
Charente les hommages ci-dessus et autres documents des XVIIe et XVIIIe
siècles.)
Ce droit
d'hommage avait sans doute été cédé à l'évêché d'Angoulême par l'abbaye de
Charroux, qui l'aurait repris après 1275, pour le céder, en 1309, à Philippe le
Bel, dont les successeurs l'auraient transféré de nouveau à l'évêché,
postérieurement aux ratifications de 1324-1379 et avant 1505.
Nous lisons, à
ce sujet, dans les mémoires judiciaires déjà cités :
« Le jugement rendu par le sénéchal
d'Angoulême le 12 août 1768, condamna Monsieur de Lavie à rendre les foy et
hommage à raison de sa baronnie et châtellenie de Nontron à M. l'évêque
d'Angoulême à cause de sa dignité épiscopale et baronnie de La Penne... Par
quel sort les évêques d'Angoulême sont-ils devenus suzerains de Nontron depuis
la cession de 1309 et ont-ils pu le devenir valablement, c'est ce qu'on ignore
et sur quoi on n'a pas de notions certaines ; cependant on ne peut se
dissimuler que les droits de ces évêques sont ou paraissent bien établis. Une
sentence de la chambre du palais du Trésor a Paris, du 9 mars 1693... énonce
une quantité d'hommages rendus et de dénombrements fournis aux évêques
d'Angoulême par les ducs de Bretagne, vicomtes de Limoges et barons de
Nontron... »
Quant à la
maison noble de La Penne, où selon l'usage les rentes et les hommages étaient
portables ; elle était la demeure même de l'évêque, près de la cathédrale de
Saint-Pierre, à Angoulême, où elle existe encore en majeure partie, bien
qu'elle ait été restaurée et agrandie de beaucoup. D'après un acte de l'état-civil
de Nontron du 13 juin 1655, il existait dans le jardin de l'évêché une petite
chapelle dédiée à Notre-Dame de La Penne, dont il ne reste p us que quelques
tronçons de colonnes. Mais, pour perpétuer le souvenir de cette chapelle, Mgr
Cousseau, alors évêque, en faisant, il y a une vingtaine d'années, réparer la
cathédrale, y a placé un vitrail représentant Notre-Dame de La Penne.
IV. Vicomtes de Limoges, quant au domaine utile et à la
charge de l'hommage dont nous venons de parler. Il parait, cependant qu'en
1258, la châtellenie de Nontron passa momentanément aux mains du vicomte de
Rochechouart, d'après le recueil de dom Villevielle, déposé en 1785 à la
Bibliothèque nationale, et où on lit :
« Aimery, vicomte de Rochechouart, étoit en
litige avec Guy, vicomte de Limoges, touchant la possession et justice et mouvance
de divers bourgs, paroisses et vigueries. Pour parvenir à la paix, ils
compromirent de leurs différends entre les mains de Geoffroy Periniac, seigneur
de Jarniac, et de Guilhaume de Valenc, seigneur de Pembrock, frères et chevaliers.
Il fut dit par leur jugement du vendredi avant Letare 1258, que les bourgs de Saint-Barthélémy et
de la Chapelle-Montbrand est seroient au vicomte de Limoges, sauf les hommages
que le dit vicomte de Rochechouart y avoit; que les bourgs de Cussat, Pensou et
Maraval, avec les paroisses, vigueries, etc.... seroient au vicomte de
Rochechouart, sauf les hommages que le vicomte de Limoges y avoit ; que le
vicomte de Rochechouart tiendroit en fief du vicomte de Limoges el de sa femme
le bourg et paroisse de Rouclain, la châtellenie de Nontron et tout ce qui
échoierait de la succession paternelle de madame Marguerite, sa mère, ainsi que
tout ce que Bernard de La Poreherie et Guy de Paule de Boscheyron, chevaliers,
trouveroient appartenir au vicomte de Limoges, en la paroisse d'Oradour ; que
Hélie Flamenc, seigneur de Brusac , serait homme-lige du vicomte de
Rochechouart peur le haut château de Brusac ; et que le bas du dit château avec
le fief de Jumilhac, celui de Lamartonie et tout ce que Raoul et Beraud
Flamenc, seigneurs de Brusac, avoient au château de Brusac, seroit du fief du
vicomte de Limoges. »
La châtellenie
de Nontron revint, d'ailleurs, aux mains des vicomtes de Limoges avant 1265 et
1275, dates des hommages rendus par Marguerite, veuve du dit Guy, et par Marie,
leur fille aînée, femme de Jean de Bretagne.
Quelles furent
donc l'étendue, la composition et la valeur de ce domaine utile ?
« La baronnie de Nontron, dit un mémoire
judiciaire de 1772, étoit originairement composée de vingt-deux châtellenies
contenant soixante-douze paroisses, dont soixante-onze furent aliénées par
Alain d'Albret, de manière qu'en 1499, il ne restoit plus que la seule ville et
paroisse de Nontron, qui fut vendue à Dauphin Pastoureau. »
Cette situation
est confirmée dans un inventaire dressé par Grolhier, notaire, les 22 avril et
2 août 1789, mentionnant les anciens titres de la baronnie de Nontron, parmi
lesquels figure :
« Etat ou mémoire fait au Conseil d'Etat
du roy, le 14 juillet 1559, signé Levoyer, par lequel il est étably que de la
baronnie de Nontron dépendoient vingt-deux châtellenies. »
A défaut
de ces documents, nous allons essayer de recomposer cette situation au moyen de
titres et d'états parvenus en nos mains. Le plus ancien, recueilli par Lespine,
v. 88, est le compte du louage, dressé en 1365 par Hélie de Barnabé, receveur
de la Sénéchaussée de Périgord, dont nous extrayons ce qui suit:
« Castellania de Nontronio ; Parochie de : Quinsaco ; 2.
Sancti-Pardulphi-de-Ripperia ; 3. Sancti-Frontonis-de-Rippia ; 4. Sensaud ; 5.
Sancti-Frontonis-de-Capneriis ; 6. Capelle Montis-Maurelh ; 7. Milhaco ; 8. Sancti-Angeli;
9. Romanh ; 10. Conazaco ; 11. Javerlhaco; 12. Sancti-Roberti ; 13. Varanha;
14. Esturis ; 15. Mottier-Ferrier ; 16. La Soudat; 17. Foliata; 18. Locus de Nontronio
; 19. Sancti-Marcialis ; 20. Bondeseu et Nonlroneu; 21. Sancti-Martini-Picti ;
22. Burgi d'Ahu ; 23. Buysserola ; 24. Buxeria; 25. Podiaco; 26. Savinhaco ;
27. Abzaco ; 28. Marabella ; 29. Pleuveys ; 30. Sancti-Bartholomei ; 31.
Auginhaco ; 32. Sancti-Stephani-Ledros; 33. Campnerio ; 34. Teijaco ; 35.
Relhaco ; 36. Rossinhas ; 37. Lindozio; 38. Pensol ; 39. Monte-Branderio ; 40.
Samathio ; 41. Cuzaco; 42 Oratorio ; 43. Eyslaudo. — Castellania de Bernardiero : 44. de Campellis; 45. Campella de Pomeriis ;
46. Lussaco ; 47. Sancti-Supplicii. — Castellania de Bruxaco : 48. de Calezio ; 49. Jumilhaco; 50.
Sancti-Clementis; 51. Beate Marie de Fracto-Jove; 52. Beati
Martini-de-Freychengeas ; 53. Sancti-Pauli-de-Rupe ; 54. Sancti-Petri-de-Cola ;
53. Sancti-Romani; 56. Veonaco ; 57. Villaribus. — Castellania de Bourzaco : 58. Auriaco; 59. Bothelhat ; 60. Champanha ;
61. Fontanas ; 62. Halta-Fagia; 63. Nantolio ; 64. Rossignolio ; 65. Sancti-Pauli
: 66. Sancti-Sebastiani ; 67. Grangiis ; 68. Vendueyra[3]. »
En tout, 68
paroisses, auxquelles on peut ajouter celles de Condat et de Champagnac qui,
d'après le Dictionnaire
topographique de la Dordogne, par M. de Gourgues, relevèrent de
la châtellenie de Nontron, et enfin les paroisses de Beaussac et de Ladosse qui
relevaient du dit Nontron au XVIe siècle, ainsi qu'il résulte de
l'état suivant, mentionné dans le susdit inventaire de 1789 :
« Etat des
paroisses qui; en 1559, composoient la baronnie de Nontron ou en relevoient à hommage, suivant l'arrêt fait au Conseil du roi de Navare : 1. Nontron;
2. Saint-Martial-de-Valette ; 3. Saint-Front-de-Champniers; 4. Saint-Angel ; 5.
Nontronneau; 6. Lussas ; 7. Hautefaye ; 8. Connezac; 9. Beaussac ; 10.
Saint-Martin-le-Peint ; 11. Reilhac ; 12. Charapniers ; 13. Ladosse ; 14.
Saint-Sulpice ; 15. Javerlhac ; 16. Feuillade; 17. Varaigne; 18.
Eymoutier-Ferrier; 19. Bussière ; 20. Busserolles ; 21. Pluviers ; 22.
Saint-Barthélémy ; 23. Saint-Etienne-le-Droux ; 24. Le Bourdeix ; 25. Etouare ;
26. Teijat ; 27. Augignac ; 28. Abjat ; 29. Savignac ; 30. Romain ; 31. La
Coussière Saint-Saud ; 32. St-Front-la-Rivière ; 33. Villars; 34. Saint-Pardoux-la-Rivière;
35. Milhac; 36. Champeau ; 37. Saint-Martin-de-Fressengeas. »
Nous ne parlons
de la châtellenie de Mareuil et des dix paroisses qui la composaient en 1365
que pour mémoire, cette seigneurie ayant été détachée de la baronnie de Nontron,
dans le cours du XVe siècle, pendant lequel les aliénations se
multiplièrent et donnèrent lieu à de profondes modifications dans l'état des
diverses seigneuries. Dans son livre de La Vicomté de Limoges, M. Clément Simon dit à ce sujet :
« La châtellenie
de Nontron, qualifiée baronnie dès le commencement du XVe siècle, était la seigneurie la plus importante de la vicomté. Le revenu
n'en était pas très considérable, mais sa juridiction et ses privilèges étaient
très étendus et comprenaient un grand nombre de paroisses et de seigneuries
inférieures... 35 paroisses et 18 seigneuries particulières dépendaient de
Nontron. Quelques-unes de ces seigneuries, qui avaient justice plénière et ne
devaient que l'hommage, étaient très considérables et se qualifiaient de châtellenies
ou même de baronnies. Nous citerons les grandes seigneuries de Condat, près
Brantôme ; de Bourzac ; de Mareuil ; de Champniers; de Varaigne et La Coussière
; de Javerlhac ; de La Renaudie... La baronnie proprement dite, en dehors des
terres soumises simplement à la suzeraineté, se composait des paroisses
suivantes : 1. Nontron; 2. Abjat; 3. Augignac; 4. Bondazeau ; 5. Le Bourdeix;
6. Bourzac-Vendoire. ; 7. Busserolles ; 8. Champeaux ; 9. Champniers ; 10.
Chapelle-Montmoreau ; 11. Connezac ; 12. La Feuillade ; 13. Javerlhac ; 14. Les Grauges ;
15. Lussas ; 16. Marval ; 17. Milhac ; 18. Nontronneau ; 19. Pluviers; 20.
Quinsac ; 21. Reillac ; 22. Romain; 23. Saint-Angel ; 24 Saint-Barthélemy; 25.
Saint-Etienne-le-Droux; 26. Saint-Front-de-Champniers; 27. St-Front-la-Rivière
; 28. St-Martial-de-Valette ; 29. St-Martin-le-Peint ; 30.
Saint-Pardoux-la-Rivière; 31. Saint-Robert ; 32. St-Saud ; 33. Savignac ; 34.
Teijat; 33. Varagne ».
Mais, de 1402 à
1499, la baronnie de Nontron fut de plus en plus démembrée par la vente de la
presque totalité des paroisses, y compris le chef-lieu lui-même, cédé à Dauphin
Pastoureau.
V. Dauphin
Pastoureau, seigneur
du Breuil : habitant de Nontron, en devint le cinquième seigneur et
baron, la baronnie étant baronnante, par suite de la vente qui lui en fut
consentie par Alain d'Albret et par contrat passé à Saint-Yrieix, le 10 janvier
1499[4].
Dauphin Pastoureau étant décédé en
1505, l'action de ce rachat ne fut soulevée qu'en 1518 et donna lieu à un
procès entre ses héritiers et le roi de Navarre, ainsi qu'il résulte de divers
documents judiciaires, conservés aux Archives des Basses-Pyrénées[5].
Procès en
exécution de ces lettres patentes et, du 3.1 mai 1519, appointèrent rendu par
le Parlement de Bordeaux, entre les héritiers des détenteurs susnommés, et
ordonnant que les défendeurs « viendraient au mois dire ce qu'il appartiendra.
»
En somme, et
après diverses procédures, renvoi des héritiers de Dauphin Pastoureau devant la
Sénéchaussée de Périgord, où la cause était encore pendante er 1537, d'après
divers mémoires judiciaires conservés dans les mêmes archives. Dans l'un de ces
mémoires : « Très haut et très excellent prince Henry, par la grâce de Dieu,
roy de Navarre, comte de Périgord et viscomte de Limoges. » mettait et offrait
de prouver que lors des ventes consenties à Dauphin Pastoureau, celui-ci «
auroit dit et confessé avoir concédé le droit de rachat pendant cent ung an
encore durant... Qu'enfin, après la mort du dit Pastoureau, ses héritiers
auraient fait la même déclaration. » Bref, le rachat fut effectué, et Nontron
revint au vicomte de Limoges jusqu'en 1567, époque à laquelle il passa aux
mains d'un sixième seigneur.
VI. Jean de Campnhac. - Lequel fit, le dernier jour de
juillet 1567, saisir au préjudice de Jeanne de Navarre, la ville et seigneurie
de Nontron, dont il devint adjudicataire par décret du dernier août 1569,
ratifié par contrat du 9 décembre 1570, à charge de rachat[6]. Ce rachat fut, d'ailleurs,
effectué quelques années après, puisque Henri, fils de Jeanne d'Albret,
démembra de nouveau la baronnie de Nontron, qui ne comprenait plus alors que
les paroisses de Nontron, Savignac, Foilhade, Abjac, Gonazac, Saint-Angel,
Saint-Front, Nontronneau, Auginhac, Saint Martial et Saint-Pardoux-la-Rivière,
en vendant le 28 juin 1581 ces deux dernières à Vigier de Saint-Mathieu,
précédent acquéreur de celle de Saint-Angel. Les autres paroisses furent
ensuite aliénées successivement jusqu'en 1600, époque de la transmission du
chef-lieu de la baronnie à la famille Hélie de Colonge.
VII. Charles-Hélie de Colonge, qui, par acte du 18 août 1600, reçu
par Desmaret et Lacoste, notaires royaux au Châtelet de Paris, acquit du roi
Henri IV et de Mme la duchesse de Bar, sa sœur, tous les droits
utiles de la baronnie, alors réduite à ceux produits par la seule paroisse et
ville de Nontron, sous la réserve de l'hommage. C'est ce qui est rappelé, en
termes suivants, dans un autre mémoire judiciaire :
« Par acte du 18 août 1600, la baronnie
de Nontron fut vendue à Charles-Hélie de Colonge de Pellagrue, seigneur du
Bourdeix, pour quarante mille livres. Ce qui détermina le prix de cette
acquisition, c'est qu'on vendoit les mouvances de toutes les terres ou fiefs
qui faisoient autrefois partie de la baronnie. Mais le revenu fixe n'en étoit
pas plus considérable. Pour s'en assurer, il n'y a qu'à consulter un inventaire
de production qui fut fait après 1630 par le seigneur de Pompadour dans un
procès qu'il avoit au Parlement de Paris contre M. de La Rochefoucauld, évêque
d'Angoulême, sur la question de savoir si Nontron relevoit du rov, vicomte de
Limoges ou de l'évêché d'Angoulême. Par cet inventaire, M. de Pompadour,
parlant des prétentions du domaine, disoit que si on parvenoit à le dépouiller
des mouvances qu'on lui avoit vendues, il se trouveroit avoir acheté pour
quarante mille livres le revenu, de là baronnie, qui s'affermoit annuellement
deux cent-cinquante livres... » :
Il résulte aussi de ce dernier document
que la baronnie était passée dans la famille Hélie de Pompadour.
VIII. Hélie de Pompadour.
(…)
Mais quels
furent, au moyen-âge et depuis la renaissance, les revenus et les charges de la
châtellenie et de la baronnie de Nontron ?
/tewmw.— Par
lettres patentes, datées « apud Nontronium die martis post Invocavit me,
anno Domini m° trecentesimo quadragesimo secundo (1342), » imposition accordée
à la vicomtesse pour un an, qui estoit de lever sur toutes les marchandises qui
se vendoient en la vicomte 4 deniers par livre, 2 pour demi-livre et un pour un
quart. (Doat).
En 1367, les
seuls émoluments de justice avaient produit 300 livres.
Vers la fin du XVe
siècle, la seigneurie ne rapportait annuellement qu'environ 200 livres en
argent et 150 charges de froment, seigle et avoine.
Nous trouvons
d'autre part et dans le compte de Dauphin Pastoureau, receveur de la baronnie,
que les revenus de 1495 s'élevèrent à 300 livres.
En 1502, Alain
d'Albret, plaidant contre la dame de Montrésor, qui évaluait ces revenus à
1,500 livres, exposait dans un mémoire judiciaire :
« Ceux qui
tiennent en la baronnie de Nontron, en la vicomte de Limoges: Le Prieur, curé de Nontron,
l'aumosnerie de cette ville, les religieuses de St-Pardoux-la-Rivière, le
seigneur abbé de Peyrouse, ordre de Cistaux, et plusieurs autres églises, le
seigneur de Pompadour, Alain du Barry, a cause de la maison noble d'Espern,
Dauphin Pastoureau, les seigneurs de Lavallade, de Beaulieu, de Monceuilh, du
Breuilh, de Flamenc, deLacourt, de Lavande Puychenin, de Romain, de
Lafeuillade, de Laforest, de La Mothe, de La Maurinie, de Puyagu, de Las
Bernardières, de LaMarthonie, de Tryon de Montalembert, du Bourdeys. - Les
bourgeois de Nontron, maistre Jehan Baleston, Martial Rosseu, Thibaut Rosseu,
Johanno Maings qui sont trois frères. Pierre Camaing, Jehan Pastoureau,
Beffaninie, de Puyzillon, Pierre Jarric et ses frères Balhot, Reymonie.... Les dessus nommés et plusieurs autres....
tiennent en la dicte seigneurie de Nontron maisons nobles, reppaires, domaines,
mestairies, molins, esitfngs, garennes, mas, villaiges, borderies, tenements,
cens, rentes et aultres debvoirs et droits de fondalité et directité, dont
monseigneur et les .dens nont prins que le droit de justice.... Et les habitans
de la dicte ville ce Nontron et de troys a quatre paroisses alentour on
dancienneté et par tel et si longtemps quilriest mémoire du contraire exempts
et en franchise et liberté de ne payer point de guet.... Et vaut seulement la
dicte seigneurie en recepte deniers ordinaires VIIxx XIIl
IXd. (152 livres 9 deniers). »
Dans le
compte-rendu par Ayinaric, trésorier de la vicomté, du jour de St-Jean-Baptiste
1556 au même jour de 1559, il est dit :
« Baronnie de Nontron assensée à François de Puysillou, sous la caution
de Thibault Le Reclus, marchand du dict lieu, pour chascun an 588 livres de
principal et 72 livres pour les charges ordinaires. » (Doat, v. 246).
En 1574, d'après
le terrier du roi de Navarre, celui-ci ne possédait dans la baronnie, en fait
de redevances en blé, seigle, méture, avoine, gélines et argent, que 177 livres
12 sols et 8 deniers.
En 1630, M. de
Pompadour en affermait tous les revenus au prix de 250 livres.
Dépenses. — Le baron était tenu, outre
l'entretien de la forteresse, des routes, halles et marchés, de payer ses
officiers d'administration, dont les principaux étaient:
1°
Le prévôt, cumulant, dans le principe, les
fonctions judiciaires et militaires. Parmi ceux de Nontron, nous avons retrouvé
les suivants :
En 1274, Helias, d'après la mention
de Doat :
« Vendition
par Helias, prepositi de Nontron, a Vieme de La Noaille, veufve de Guy de La
Douze, d'une pièce de terre a Nontron pour douze deniers de rente. Quarto
junii, anno Domini m° cc° septuagesimo quarto ».
Pierre Colombel
qui, en 1326, tint les assises pour le vicomte dans les paroisses d'Abjac et
Augignac. En 1338, Ytier de Magnac, d'après Doat :
« Lettres par
lesquelles appert que le conseil de la vicomtesse de Limoges bailla le
gouvernement du chastel et chastellanie de Nontron et ressort diceux a Ytier de
Maignac. Die veneris post festum beati Laurentij, anno Domini m° ccc°trigesimo octavo.
»
« Johannis de
Montafilo », dont le sceau est appendu à un acensement, daté de Nontron le 22
mars 1351. (Sigillographie du Périgord, par Ph. de Bosredon).
Geoffroy du
Bois, d'après l'acte d'affièvement de maison du 12 mars 1353, dont nous avons
déjà parlé, qui l'était encore en 1359, dans un acte de partage, dont .nous
reparlerons et où il figure comme témoin : « Gaufrido de Bosco, preposito de
Nontronio ac capitaneo. » Enfin et en 1365, d'après Doat :
« Eymery
Alphanie vendit à Geoffroy de Bosco, prévost de Nontron, deux septiers de rente
sur le mas de Courbespine, paroisse de St-Front de Champniers ».
En 1376, Helie de Lestrada.
En 1393, Mercier, « Mercerii,
prepositus de Nontronio. »
Bertrand du
Barry, capitaine de Nontron (Nadaud). Thibaut de Conan était capitaine de
Nontron en 1490 (arch. de famille). De La Reymondie l'était en 1556. (Doat).
De cette époque
à 1600, la baronnie de Nontron ayant été complètement démembrée et le chef-lieu
vendu, la charge de capitaine dut être définitivement supprimée, les fonctions
judiciaires étant d'ailleurs exercées depuis fort longtemps par des juges
particuliers.
Cependant et
dans l'acte de baptême de Dauphin Rousseau du 24 décembre 1651, nous trouvons
cette mention : « Parain, Daulphin Pastoureau Sr du Tallet,
capitaine de la ville de Nontron » ; c'est-à-dire, à notre sens : capitaine de
cette milice nontronnaise qui se distingua pendant la Fronde.
Mais, revenons aux anciens
capitaines qui, dans le principe, résidaient dans le château et percevaient pour
gages le droit de guet, et, pour nourriture et chauffage, des prestations en
nature. Plus tard, on y joignit des émoluments en argent ; car, dans le compte
de 1556 à 1559 du trésorier, il est dit qu'on a compté au sieur de La
Reymondie, capitaine de Nontron, L.X.L (90 livres).
2° Le Receveur, qui percevait les recettes, les denrées
et les deniers produits de la justice ou des aliénations; poursuivait le
paiement des prestations en nature et des redevances ; conservait et vendait
les denrées; payait les officiers et toutes les dépenses d'ordre public, dont
il tenait registre et rendait compte au trésorier général de la vicomté.
Parmi les
receveurs de Nontron figure, notamment, Dauphin Pastoureau, qui occupait cette
charge avant 1478 et la conserva jusqu'en 1505, date de son décès. Il recevait,
pour ses gages annuels, la modique somme de vingt livres, dont il aurait pu,
assurément, se passer, puisqu'il était alors assez riche pour acquérir quatorze
paroisses et même le chef-lieu de la seigneurie, au prix de 15,095 livres. Il
n'exerça donc ses modestes et absorbantes fonctions que par dévouement au roi
de Navarre, qui l'en récompensa en l'investissant des fonctions « d'esleu au
présidial de Périgueux » et en lui attribuant ainsi le titre nobiliaire d'écuyer.
Aussi, voyons-nous que, dans ses lettres de ratification des dites ventes,
datant de Saint-Jean-Pied-de-Port, le 1er
jour d'octobre
1504,1e dit roi qualifia l'acquéreur de : « Nostre bien aymé escuyer Daulphin
Pastoureau, seigneur de Javerlhat ».
3° Officiers de justice, dont les gages pour le juge et le
procureur du vicomte furent de cent sols jusqu'en 1344, date de la création des
épices, dont nous reparlerons dans le chapitre suivant, relatif aux
institutions judiciaires.
Chapitre
V. — Institutions
judiciaires.
Dans le principe, les comtes et les
seigneurs rendaient la justice. Vers la fin du Xe siècle, fut créée
la juridiction féodale, composée de justices privées, attachées à la terre et
dépendantes du droit de propriété. La haute justice avait la plénitude de
juridiction civile et criminelle; la moyenne justice, sur toutes les causes
civiles ; la basse justice, sur les matières civiles jusqu'à concurrence de
soixante sous parisis. La juridiction seigneuriale était rendue dans des
assemblées appelées assises, et composées de trois hommes du fief, sous la
présidence du seigneur, ou de son délégué, le bailli, ou le prévôt.
Plus tard, les
seigneurs purent et durent nommer des officiers spéciaux pour rendre la justice
en leur nom, et, dit Loiseau à ce sujet :
« En la
première antiquité, les seigneurs étoient les vrais juges, aussi n'étoient-ils
lors que simples officiers du Roy ; mais ayant converti leur office en
seigneurie, qui est une espèce de dignité distincte spécifiquement de l'office,
comme ils ont pris à eux ce qui
appartenoit au Roy, a savoir la propriété de la justice, aussi ils ont laissé à
leurs juges ce qui étoit de leur ancien office, savoir l'exercice de la
justice. »
Les seigneurs
étoient, d'ailleurs, responsables des malversations de leurs juges ainsi que de
leur mal-jugé et, en cas de réformation de la sentence, ils étoient condamnés
en soixante livres d'amende, sauf recours contre le juge. Aussi avoient-ils le
soin et le devoir de n'instituer aux offices de leurs justices que des gens capables,
sujets du roi, résidant dans le royaume et ayant des biens suffisants pour
répondre des abus et malversations dans l'exercice de leur emploi. — Le serment
prêté entre les mains du seigneur ne suffisoit point pour faire un juge et en
conférer le caractère ; ces officiers étoient obligés de se faire recevoir dans
les jurisdictions royales, où ils dévoient puiser leur véritable mission.
L'article 55 de l'ordonnance d'Orléans exige que tous les officiers de
jurisdictions subalternes et des seigneurs haut justiciers soient examinés
avant que d'être reçus par le lieutenant général du baillage ou autre juge de
la justice royale du ressort.
De là deux
formalités à remplir par les officiers du seigneur avant de pouvoir exercer
leurs fonctions : l'examen et la réception par le juge royal. — La situation
des officiers de justice fut, d'autre part, irrévocable jusqu'à l'ordonnance de
Roussillon de 1563, qui accorda le droit de destitution au seigneur, mais sous
la réserve accordée à la Cour souveraine de juger la conduite du seigneur et du
juge et de la réprimer, en déclarant nulle la destitution injuste. - Enfin, et à l'égard des affaires où le seigneur étoit partie ou intéressé, les juges
n'en pouvoient connaître, suivant l'article 11 du titre 24 de
l'ordonnance de 1667. Ainsi, lorsque les seigneurs ont reçu quelqu'injure de
leurs vassaux ou emphytéotes, il faut qu'ils se pourvoient devant le juge
supérieur... Le seigneur qui abuse de la justice contre son sujet soit en la
lui déniant, soit en le vexant induement, est privé de sa jurisdiction, soit en
tout, soit en partie, soit à perpétuité ou à temps seulement... »
(Loiseau, D'Espeisses,
Ferrière,
Guyot.)
Avons-nous
jamais eu, à l'égard des juges, plus de garantie de savoir, de probité et
d'indépendance ?
Quant aux autres
officiers auxiliaires, le seigneur avait encore le droit de nommer : 1° Un
lieutenant de juge ; 2° un greffier ; 3° le geôlier de la prison, que les
seigneurs haut-justiciers furent tenus d'avoir dans leur château par arrêt des
Grands Jours de Moulins du 16 octobre 1550 ; 4° des sergents, chargés
d'exécuter les mandements et sentences des juges, savoir, dit la coutume d'Angoumois
: par le comte, jusqu'à douze ; le baron, six ; le seigneur châtelain, quatre ;
les simples seigneurs, deux seulement ; 5° et enfin, des notaires, en ce qui
concernait les barons et les seigneurs châtelains, auxquels un édit de François
Ier, de novembre 1542, avait accordé la prérogative de créer des notaires
authentiques dans leurs terres pour y recevoir toutes sortes d'actes entre-vifs
et de dernière volonté.
De cet exposé
général passons à la situation particulière de la juridiction de la châtellenie
et baronnie de Nontron, dont le prévôt, Pierre Colombet, tint, en 1326 et pour
le vicomte de Limoges, des assises à Abjat, Augignac et St-Pardoux-la-Rivière en
la dite châtellenie. Mais du XIVe à la fin du XVe siècle,
chaque seigneurie eut sa juridiction particulière, ainsi qu'il résulte du
mémoire suivant, sans date, et dont l'original est aux Archives des
Basses-Pyrénées :
« Mémoires pour
les Roy et Royne de Navarre, pour le respect de leur baronnye de Nontron et resort dicelle. — Et
premièrement est adnother qu'il y a vingt jurisdictions, ayant toutes justices
haute, mere, miste et im-pere qui en
dépend, sauf et réservé Sainct-Pardoulx, ou la dame prieuresse na que la
justice basse jusques a soixante soubs, qui sont toutes vingts subjectes au resort
arreste de la dicte baronnye. A sçavoyr est Varagne, Javerlhac, Le Bourdeys,
Puyagut, Champniers, Sainct-Saud, Bernardières, Les Combes, Lussas, Connazac,
La Renaudie, Milhac, Villars, Bruzac despuys la Colle, Marelhe, La
Rochebeaulcourt, Bourzac, Bussière Badil, Teyzac, Sainct-Pardoulx-la-Rivière,
Foilhade, Monchuel, qui de tout temps et ancienneté, quant on faict adjourner
quelcung des dictes vingts jurisdictions sans préjudices de leurs
declinatoyres, sont tenus et ont tous-jours comparu pardevant le juge de la
dicte baronnye de Nontron, sauf quil y avoit trente ou quarante ans que ceulx
de Marelhe, de La Rochebeaulcourt et de Bourzac nont obéy, et si nest que pays
douze ou quinze ans ença, un Jehan Pichon adjourna ung de Marelhe au dict
Nontron, et pour raison de quoy, le procureur de Marelhe le fit constituer
prisonnyer et par advys de M. le juge mage et de feu monsieur le juge gênerai,
le procureur de la dicte baronnye se pourta pour appelant a Segur, ou il fust
mal procédé par le dict procureur de Marelhe. Toutefoys ce nonobstant, ceulx du
dict Marelhe ne veullent obéyr. — Item aussy le seigneur de Varagne ne veult
obeyr, ains a prohibé que contre soy ses officiers de ne permettre adjourner
aulcung au dict Nontron, et despuys deux ou trois ans en ça combien que ont eu faict adjourner tousjours quelcung pour
garder la possession. — Item est adnother aussy que quant ung juge des dictes vingts
jurisdictions avoyt baille quelque sentence, on pouvoit rellever pardevant
Monsieur le juge gênerai a son assise au dict Nontron ; toutesfoys ceulx des dits Marelhe, Bourzat, La Rochebeaulcourt ne veullent permettre a leurs
subjects relever aucune sentence a la dicte assize de la dicte baronnye de
Nontron, comme aussy ne veult fere le dict seigneur
de Varaigne, tant pour raison de
Varagne que de Sainct-Saud. Toutesfoys, pour garder la
dicte autorité, y a eu des appellations, puys ung an en ça des subjects et
justiciables du dict Varagne. — Item quest adnother pour raison de ce que le dict seigneur de Varagne empescha, peut avoyr neuf ou dix ans, le prieur de Bussière qui avoyt accoustume de faire tenyr court en toute matière dans les croix du dict Bussière, le procureur pour les dicts seigneur el dame de la dite baronnye de Nontron se empara de la
dicte justice et dicelle en joyst, et les gens du dict
Bussière dans les dictes croix ne playdoyent pardevant aucun
juge ordinayre si ce n'est par devant le dict juge de la dicte baronnye, de
laquelle justice de Bussière ont joj cinq ou six ans paisiblement... Or est
adnother que despuys trois ans en ça le seigneur de Varagne a contrainct ceulx
du dict Bussière se fere t.djourner devant son juge de Varagne et que piis est
y a faict tenir la court par son juge ou lieutenant de Varagne, nonobstant la
possession des dicts seigneur et dame avoyent au dict Bussière, et que monsieur
de Planeau, comme maistre des requestes, y avt tenu lassise dans Bussière,
ensemble la court ordinayre du dict Nontron... Et seroyt grandement requis que
les dicts seigneur et dame fissent fere leurs hommages de leur compté de
Périgort et viscomté de Limoges de laquelle est membre la dicte baronnye de
Nontron, quest baronnye baronnnante... ».
A partir du XVIe
siècle et après le démembrement complet de la baronnie, chaque seigneur de
châtellenies et même de simples paroisses eut sa juridiction séparée, sauf
l'appel devant les juges supérieurs. Parmi ces dernières juridictions, nous
devons spécialement signaler les appeaux établis à Ségur en 1283 et auxquels
furent assujetties la presque totalité des paroisses et justices comprises dans
ht baronnie de Nontron. Dans le principe et jusqu'au XVIIIe siècle,
les décisions des appeaux de Ségur relevaient, en appel, du sénéchal de
Périgueux.
(…)
Dans le
principe, (…) les gages fixes de ces officiers à la charge du vicomte, furent
de cinquante livres pour le juge et pour le procureur des appeaux de Ségur, et
de cent sols pour le juge de Nontron, et autant pour le procureur. Aussi, et
pour remédier à la modicité de ces gages, ces officiers eurent-ils droit, plus
tard, à recevoir des épices, sur lesquelles
nous relevons, dans le répertoire de jurisprudence de Guyot, les détails
suivants :
« Il parait
qu'en France on suivit d'abord l'usage que les Romains y avoient établi au
sujet des épices. On lit dans les loix des Visigoths, que l'on observoit dans
toute l'Aquitaine, que le rapporteur pouvoit prendre pour son travail un
vingtième de l'objet en litige. Du temps de saint Louis, il y avait certaines
amendes applicables au profit du juge... Dans la suite, quelques ordonnances,
et particulièrement celle de 1302, défendirent aux juges de rien recevoir des
parties. Mais, par autre ordonnance du 11 mars 1344, Philippe-de-Valois
permit aux commissaires du Parlement de prendre dix sous parisis par Jour,
outre les gages du roi. L'usage s'introduisit que la partie qui avoit gagné son
procès faisoit à ses juges, en allant les remercier, quelques présents de
confitures, de dragées, etc., qu'on appeloit épices. Ce qui étoit d'abord volontaire lut dans la
suite regardé comme un droit, et enfin les épices furent converties en
argent... La taxe en fut rendue obligatoire par règlement du 18 mai 1502 et par
édit de mars 1673... Ces épices n'étoient dues, d'ailleurs, que dans les causes
contradictoires, instruites et jugées par écrit et sur rapport. Dans les
simples causes jugées à l'audience ou sur le bureau, ou qui se délibéroient sur
le registre ; ni en matière de déclinatoire ou renvoi ; ni, en général, pour
jugement interlocutoire, ou de simple instruction, sans recolement ou
confrontation préalables, les juges n'en prenoient rien... Un arrêt du
Parlement de Toulouse du 31 octobre 1530 et un autre des Grands Jours de
Clermont du 10 décembre 1665 défendirent aux juges de prendre des épices des
parties qu'ils savoient être pauvres. Enfin et comme garantie pour les
plaideurs, lorsque la taxe faite par les premiers juges étoit excessive, les
juges supérieurs, en prononçant sur l'appel, en ordonnoient la restitution et
même les condamnoient à plus grande
peine, selon les circonstances et par application de l'article 128 de
l'ordonnance de Blois et de l'article 16 de l'édit de 1673... »
Mais, revenons à
la juridiction particulière de la baronnie de Nontron, et voyons quels en
furent, jusques vers la fin du XVe siècle, les revenus attribués au
seigneur et quel en fut le personnel jusqu'en 1790 :
1° Revenus. — Dans le recueil de Doat, v. 241, se
trouve la mention suivante :
« Ascence par le vicomte de Limoges a noble Gaillard du Haa, du droict de
Faymidrech et droits
provenant de la justice et ressort de Nontron et autres revenus d'iceluy pour
la somme de trois cens livres chacun an. De l'an 1367. »[7]
Au XVe
siècle, ce revenu se trouvait considérablement réduit, puisque dans le compte
de 1478-79, il n'y figure que pour :
« La Prévosté, 18 livres ; le Greffe. 33 livres ; le
Pluçage el Leyde, pour 70 sols; les Epaves, 65 sols ; le scel de la cour, 15
sols ; les amendes, 8 livres 10 sols. »
2° Personnel. — En outre des barons de Nontron et
des prévôts, dont nous avons déjà donné les noms, il y avait :
1° Garde du scel. — Guilhem de Nobilis, en 1303; Aymery
Franc, 1305.
2° Juges. — 1292, Hugues Botinelli. — 129S, Guilhelmus de Manhaco. — 1359, Geraldo Pennauti. — 1403, Ludovic Casati. — 1414, Johanne Maltro. — 1458, Johanne de Veterimari
(Vielhemard). — 1470, Baliston. — 1471, Geraldo Marqueti. — 1478, Pierre
d'Auvergne. — 1479, Pierre de Puysillou. — 1548, François de La Bouffarie. —
1596, François Robin. — 1600. Thibault du Reclus; Jean Depuyrénier. (…)
3° Lieutenants de juge. — 1483, Jean de Puyrtnier. — 1559,
Thibaud Pastoureau, seigneur de La Grange. — 1600, François de Puysillou. (…)
4° Procureurs d'office. — 1478, Hélie Panet. — 1548, Jehan de
Puyrenier. — 1556, Jehan de Puysillou. — 1560, Jehan Maillard. — 1583, Charles
Mondineaud (…).
5° Greffiers. — En 1292, Arnaud Bary, clerc. —
1548, Lenoble. —1571, Mathieu Eyriaud. — 1590, Pierre Texier. —1597, Fourien. —
1600, Bayet. (…)
6° Notaires. — En 1306, Robini (Robin). —1313, de Pelh. —1360, Johanne
Mathei. — 1370, Helie Canuli. —1403, Guilhelmi Bazati. — 1411, de Podiozillio. —
1427, de Noualhaco. — 1440, de Veterimary (Vielhemard). (…)
7° Avocats et juristes. — De 1500 à 1538, Dauphin
Pastoureau, « esleu en l'Élection de Périgueux » : François Fourien; Hélie de
Puyzillou ; Jehan Mercier ; Pierre Rotin ; Thibaut Excousseau ; Jehan Rousseau ; Jehan de Vaulx ; autre Dauphin Pastoureau ; Jehan Rastineau
: Pierre Moureau ; Dauphin Fourien. « esleu en l'élection de Périgueux. » — De
1538 à 1600, G. Faure, garde du sceau au Présidial de Périgueux ; Jehan de
Labrousse ; Hélie de Labrousse ; Arbonneau ; Marquet ; Thibault Le Reclus, «
esleu à Périgueux. »
(…)
Quant aux
jurisconsultes antérieurs au XVIe siècle, nous en trouvons un,
désigné dans le répertoire de Guyot, V» Ministère public, en ces termes :
« Il n'y eut pas au Parlement d'avocats ou de procureurs du roi avant
1300. Jean Le Bossu et Jean Pastoureau sont cités dans toutes nos annales comme
les premiers officiers qui furent appelés avocats du roi. L'ordonnance de 1329
semble supposer qu'il n'y avait point encore de procureur du roi au Parlement.
D'autre part et dans le Dictionnaire des anoblis, on lit ceci : «
Lettres patentes portant anoblissement de Jean Pastoureau, avocat du roi, et de
Pétronille sa femme, en 1365.»
André Pastoureau
était, en 1556, conseiller au Parlement de Paris.
Or, tout nous
porte à penser que ces deux Pastoureau étaient membres de cette famille
Pastoureau, domiciliée, avant le XIVe siècle, dans la ville de
Nontron, où elle possédait divers immeubles, d'après des titres de 1357,
rapportés par Doat.
Cet état de
choses fut modifié par un décret de l'Assemblée nationale du 16 août 1790. en
vertu duquel fut établi à Nontron un tribunal de district, et, le 27 ventôse an
VIII, par la création d'un tribunal d'arrondissement, composé d'un président,
de deux juges, d'un procureur, déjuges suppléants et d'un greffier, et, enfin,
par l'établissement, dans les huit cantons de cet arrondissement, d'une justice
de paix, administrée par un juge, deux suppléants et un greffier. Les affaires
sont, comme par le passé, plaidées devant le tribunal par des avocats et
instruites par des avoués, remplaçant les procureurs d'autrefois.
(…)
Cela dit, il
nous resterait encore, pour compléter cet aperçu de nos institutions
judiciaires, à parler des centeniers,
qui, sous les
Romains et nos rois de la première race, rendaient aussi la justice. Mais comme
ces officiers remplissaient également des fonctions civiles, nous y reviendrons
dans le chapitre suivant, relatif aux institutions civiles et communales.
Nous devons
cependant, et pour clore ce chapitre, rappeler ici que le seigneur de Nontron,
en sa qualité de haut justicier, avait le droit d'avoir pilori dans la ville e; quatre fourches patibulaires au dehors.
« Les Fourches patibulaires, dit Guyot, sont
des piliers, ou colonnes de pierre qui soutiennent des pièces de bois,
auxquelles on attache les criminels condamnés à être pendus et étranglés....
Elles sont toujours placées hors des villes, bourgs et villages, et
ordinairement près de quelque grand chemin, dans un lieu exposé à la vue, afin
d'inspirer au peuple plus d'horreur du crime ; c'est pourquoi ces fourches sont
aussi appelées La Justice. »
Aussi, les
fourches patibulaires de Nontron furent-elles placées au sommet de la colline,
à l'est de Nontron, sur le bord de la Grande-Pouge et à la lisière de bois et
de bruyères désignés, dans les anciennes baillettes, sous le nom de La Justice, conservé par la matrice cadastrale,
où nous lisons à la section D, de Goulat, nos 100 à 137, divers
articles de bois, friches et bruyères portant celui de : Les Justices.
R. de
Laugardière.
(A
suivre.)
[1] Mabillon, T. 11, p. 171, donne
pour date le 14 des kalendes de juin l'an du Christ 785, au testament par
lequel Roger donna à l'abbaye de Charroux : in
Lemovicensi pago castrum Netronensem cum prefati castri castelania et
cucilagium et vadrerias.
[2]
Le
quatrième volume du recueil de dom Fonteneau contient, sur Nontron et l'abbaye
de Charroux, les documents suivants : Année 1082, vers le mois d'octobre,
charte par laquelle Philippe Ier, roi de France, confirme la
fondation de l'abbaye de Charroux et toutes les donations... parmi lesquelles
celles du comte Roger et de sa femme Euphrasie, comprenant le castrum
Nontronum, p. 59. - 1096, Bulle d'Urbain II, qui, à l'exemple
de ses prédécesseurs, met l'abbaye de Charroux sous la protection du
Saint-Siège et confirme ses privilèges, biens et possessions, parmi lesquels castrum
de Nontronum et monasterium cum ecclesiis suis, p. 89. —
Le 21 mars 1210, bulle d'Innocent III, en faveur de la dite abbaye et mention
du : castrum de Nontronio et monasterium cum ecclesiis
suis, p. 367. — 1219, 3 février, Traité entre Guy, vicomte
de Limoges, et l'abbaye de Charroux au sujet de certaines redevances dans le prieuré
de Nontron, p. 285. — 1567, Historique de l’état de l'abbaye, où
il est dit que Roger lui avait donné l'hommage et féodalité qu'il avait de son
patrimoine sur la vicomte de Limoges, mais que Philippe-le-Bel le retira à soi,
aussi bien que les hommages de Nontron, p. 509.
[3] Les paroisses portées aux numéros
15, 17, 36 et37 étaient en Angoumois ; celles des
numéros 28, 38, 40, 41 et 42, en Poitou
; celles des numéros 39 et 43 en Limousin ; toutes les autres en Périgord.
[4] « Alain, sire d'Albret, comte de
Dreuz, de Castres, de Penlthièvres et de Périgort, vicomte de Tartas et de
Limoges, captal de Buch et seigneur d'Avesne, a tous ceulx qui ces présentes
lettres verront et orront, salut. Savoir faisons que nous tant en nostre et
privé nom que comme père et légitime administrateur de nostre cher et bien amé
fils Jehan par la grâce de Dieu Roy de Navarre... de nostre bon gre et
liberalle volonté, avons vandu, cédé, délaissé et transporté perpétuellement et
par la teneur de ces présentes, par tiltre de vendition, vendons, cédons, délaissons
et perpétuellement pour nous et les nostres hoirs et successeur quelconques ...
A nostre cher et bien amé Daulphin Pastoureau, seigneur du Breuil, habitant de
Nontron, présent pour luy et les siens, hoirs et successeurs quelxconques,
stipulant solennellement et acceptant a faire de luy et les siens sa liberalle
volonté, en la vie pareillement et en la mort. Assavoir est notre ville et baronnie
de Nontron, droit de justice haulte, moyenne et basse, mere, mixte, impaire et
toutte la jurisdiction d'icelle, avecques tous ses droits, domaines, maisons,
manoirs, villaiges. maynemens, bourderies, prés, terres, bols, pasturaiges,
estangs, molins mouans, garennes, forestz, columbiers et quelxconques fonds et
heritaiges, cens, rentes, honneurs, acaptes, tenanciers, amphyteotes, guets,
droits de peaiges.de comport
et traverses, et tons autres droits et debvoirs, appartenances, appendances et
deppendances... a nous appartenant et pour le prix et somme de quatre mit
vingt-cinq livres tournois ... eue et receue du dict Pastoureau., donnons et
concédons congié et licence aux homes tenanciers et amphyteotes de la dicte
ville, terre et baronnie de Nontron et a Chacun deulx de recognoistre le dict Pastoureau,
achapteur, pour seigneur justicier, foncier et direct... et a tenir de luy
comme seigneur justicier el foncier leurs maynemens et heritaiges et luy payer
doresnavant les cens, rentes et tous et chascuns aultres droits et debvoirs a
nous esd. noms appartenans... Et en oultre, avons aud. Pastoureau ceddé et
transporté tous aultres droits, actions, peticions et demandes, nom de
seigneurie, debvoir, usaige et exploict, lesquels nous avons et
pourrions avoir en la dicte ville, terre et baronnie et dedans les fins et
limites dicelle, sans en rien par nous et les nostres retenir, sauf et réservé
a nous et a nos successeurs tant seulement le chasteau du dict Nontron, le
ressort, lauctorite de la dicte ville et les hommaiges... Réservé toujours au
dict Pastoureau la dicte jurisdiction, exercice et proficts dicelle. Et réservé
aussy lhommaige lige et serement de fidélité que le dict Pastoureau et ses
hoirs et successeurs sera a nous et a nos successeurs tenu de faire a muance de
seigneur.... Donnons en mandement par ces présentes à nostre juge, a son
lieutenant procureur de Nontron et André Alardin, nostre thesorier, et a
chascun deulx quils aient a mestre et induire le dict Pastoureau en la réelle
et actuelle possession de la dicte seigneurie et faire commandement aux subjects
dicelle de luy obéir doresnavant et comme à leur vray seigneur et justicier
dicelle. Et néanmoins voulons que le dict Pastoureau puisse mettre, instituer ou destituer
les officiers de la dicte baronnie et seigneurie, ainsy que verra estre a faire
et bon luy semblera.... (Suivent les clauses de garantie avec promesse de jamais ne
venir ou contraire en foy de prince, et
soumission par le vendeur de tous ses biens, meubles et immeubles...) Faict et
donné en la ville de Sainct-Yrieys... (Signé des trois témoins et de maistre
Guitard, notaire, et de maistre Yves Pecon, commissaire-juré de la vicomté de
Limoges. »
[5]
Lettres
patentes de François Ier, du 22 janvier
1518.
« François, par la grâce de Dieu, roy de France, a nos
amés et féaulx conseillers, les gens tenant ou qui tiendront nostre Cour du
Parlement à Bordeaulx, salut et dilection. Nostre très cher et amé frère et
cousin Henry, roy de Navarre, nous a faict exposer que par le contract de
mariage de feus nos très chers et très amés frère et sœur les Roy et Royne de
Navarre, ses père et mère, feust accordé entraultres pactes que les biens
adveniez a nostre dict feu frère et cousin par la succession testamentaire de
feue nostre cousine dame Françoise de Bretaigne, sa mère, seroient et
appartiendraient au fils ainé du dict mariage, qui est nostre dict frère et
cousin expousant... Et combien que aud. temps les terres et chastellenies et
seigneuries du Poget, Vallegot, Ribeyrac, Espeluche, Larche, Terrasson, Lisle,
Basdefol, Bourdeille, Bertric-Bering, Celles, Excideuil, Ans, Nontron. Dussac.
Chasteau-Chervis, Thiviers, la paroisse de Saint-Priest, la moitié de Corniac,
la seigneurie d'Auberoche, les paroisses de Beauregard, St-Laze, Moruscle, la
paroisse de Cossac et la paroisse de St-Méard-de-Drone, fussent des
appartenances desdicts biens et succession de nostre dict feu cousin ;
neantmoins, il a esté nouvellement adverty que depuis le dict contract de
mariage, feus nos amés François de Bourdeille, Odet Daydie, Bernard de
Salignac, Jehan de Gontaud, Dubousquet, Jehan de Gaultier de Badefol, Jehan
d'Abza, seigneur de La Douze, Poncet de Marqueyssac, Jehan d'Aubusson, seigneur
de Villac, Etienne bastard d'Albret. Jehan Chapt de Rastignac, le seigneur de Courrety,
François Coulombiers, Marguerite Vigier, Jehan de Saint-Astier, Jehan de Coignac,
seigneur de Saint-Jean-Ligourre, Daulphin Pastoureau, Mondot de la Marthonie, Germain de Bonneval et Pierre de La Vergne, se sont
emparés et enseigneurés des dictes successions, ou la
plupart dycelles. Assavoir est le d. feu de Bourdeille, des seigneuries de
Celles et Bertric ; le dict d'Aydie, des seigneuries de Ribeyrac et Espeluche ; le dict de
Salignac, de la seigneurie de Larche de Terrasson ; ledict Dubousquet, de la seigneurie
de Lisle ; le dict de Basdefol, de la paroisse de Basdefol ; le dict de
Gontauld, de la paroisse de Vallegot; le dict de La Douze,
de la seigneurie de Bering; le dict
Dubousquet, de la seigneurie du Poget; le dict de Marqueyssac, de trois paroisses, estant de la seigneurie d'Ans ; le dict Coulombeix,
de la paroisse de Dussac ; le dict Vigier, de la
paroisse de Saint-Sulpice et de la moitié de la Viguere; le dict de Saint-Astier,
des paroisses de Savignac, enla seigneurie de Thiviers, Sarailhac et Anthone,
rie la jurisdiction d'Auberoche; le dict Etienne bastard d'Albret, de la
seigneurie de Moruscle ; le dict Chapt de la seigneurie de Corgnac, avec ses appartenances, de la juridiction de Thiviers
; le dict des Arretz, de la paroisse de Saint-Méard-de-Drone; le dict de Coignac, de
Château-Chervis et de la paroisse de Sarrazac, en la chastellenie d'Eysideuil ;
le dict Daulphin Pastoureau, de onze paroisses, en la chastellenie de Nontron;
le dict Mondot de La Marthonie, de la prevosté de Thiviers et de la paroisse de
Milhac, en la jurisdiction de Nontron ; Germain de Bonneval de la paroisse de Cossac et autres appartenances
; le dict seigneur de La Vergne, de la paroisse de Saint-Priest es enclaves de
Jumilhac... Requerrant sur ce nostre provision. Pour ca est ce que nous vous
mandons.... que s'il vous appert des dicts pactes et conventions … soyent et
doibvent appartenir a nostre dict frère et cousin expousant, en ce cas contraignez lesdessus nommés ou leurs hoirs et successeurs et
autres détenteurs des dictes seigneuries et biens par toutes voies de droit et
raisonnables a eulx sen désister et despartir, et laisser
notre dict frère et cousin jouyr et user pleinement et
paisiblement en lestat questoient au temps du dict contract et a luy en rendre
les fruicts quils en ont perçus ou que nostre dict cousin et frère en eut pu
prendre et percevoir, et ce aura a prendre telles conclusions que de droit, en
faisant en cas de débat aux panies, ouyes raison et justice....
Donné à
Périgueux, le vingt-deuxiesme jour de janvier, lan de grâce mil cinq cens
dix-huict. »
[6]
« A toust
ceulx qui ces présentes lettres verront... La guarde du scel royal estably aux
contrats, en la ville de La Rochelle, pour le Boy, salut... Jean de Campnhac,
escuier, Sr de Beaumont, tant pour luy que pour Marguerite et Jeanne
damoyselles, ses sœurs, eust cédé et transporté à Jeanne Dalbret, royne de
Navarre, tous les droictz, raisons et actions qui leur compectoit à lencontre
de Bervault de Clermant Sr de Pilles, pour les causes et selon qu'il
est contenu par le contract, sur ce faict entre les dictes parties au chasteau
de Gaillan, le dernier jour de septembre mil cinq cens soixante-six... Le dict
transport faict pour et moyennant la some de six mil cinq cens livres tournois,
laqnelle soiue la dicte dame auroit promis payer au dict S' de Beaumont, dedans
le vingt-cinquiesme jour de mars lors ensuyvant. Despuis et par deffault du
dict payement, saisie auroit este faicte dès le dernier jour de juillet mil
cinq cens soixante sept, tellement que la baronnie, terre et seigneurie de
Nontron en Perigort, appartenant à la dicte dame Royne, auroit este régie par
commissaires et les criées poursuivies jusques à ladjudication et interposition
de décret, icelle dicte adjudication faicte et livrée au dict Sr de
Beaumont pour la susdite some... En vertu duquel décret, le dict Sr de
Beaumont auroit prins pocession de la dicte baronnie, terre et seigneurie de
Nontron, dès le dernier jour d'aoust mil cinq cens soixante-neuf et don il
auroit joy depuis le dict temps..... Et dauttant qne par ledict de la
pacification, les procédures faictes pondant les troubles sont cassées et
annulées, la dicte Royne disoit que son intention de rentrer en la pocession de
sa dicte terre et baronnie, nonobstant le décret comme nul, ayant a cepte un
faict donner assignation au dict Sr de Beaumont par devant le
seneschal de Perrigort ou son lieu tenant ou le dict décret auroit été donné. A
quoy par le dict Sr de Beaumont estoit dict que à la vérité le dict
décret et adjudication estoit advenu pendant les troubles, mais que la saisie
et poursuyte avoit este intentée et poursuyvie auparavant et que dailleurs la
dicte somme luy estoit deue.... ce qui estoit dényé par la dicte dame, de sorte
que les dictes parties estoient en dangier de tumber en grand procès, pour
auquel obvier … ont fait lacord tel que sensuyt : Et pour ce savoir faisons que
aujourd'huy, pardevant Arnault Paleau, notaire et tabellion royal en la ville et
gouvernement de la dicte Rochelle, ont esté presens et personnellement establys
la dicte dame Royne de Navarre de présent en cette dicte ville dune part et le
dict Sr de Beaumont.... La dicte Royne a voulu et consenty … que le
dict Sr de Beaumont, tant pour luy que pour les dictes damoyselles
ses sœurs et auxquelles il a promis faire ratifier le présent acord toutesfois
et quantes joysse de la dicte baronnie, terre et seigneurie de Nontron, jouxte
et suyvant le dict décret et adjudication qui luy en enroit esté faict en la
Cour ordinaire de Périgueux, lequel par tant que besoing seroit, elle a aprouvé
et aprouve ... nonobstant le bénéfice dudict édit de pacification ei tous
autres.... moyennant que la dicte dame pourra, elle, les siens ou délie ayant
cause, ravoir et retirer toutesfois et quantes ,a dicte terre, baronnie et
seigneurie de Nontron, en payant et remborsant au dict seigneur de Beaumont...
la susdicte somme de six mil cinq cens livres tournois. Auquel cas le dict Sr
de Beaumont a promis et sera tenu receu voir ladicte dame et luy faire
renunciation, cession et transport de la susdicte terre et baronnie....
Ce fust faict et
passé en ladicte ville de La Rochelle présents
le neufviesme jour de décembre mil cinq cens soixante-dix. »