Source : Bulletin SHAP, tome LVI (1929) pp. 285-.
SUPPLÉMENT A LA CORRESPONDANCE
D'ANDRÉ DE BOURDEILLE SENECHAL DU PERIGORD
AVERTISSEMENT
Je possède dans mes archives un grand nombre de lettres adressées par les rois Charles
IX et Henri III, le duc d’Alençon, la reine mère, Henri, roi de Navarre, et Marguerite de Valois, sa femme, à André de Bourdeille,
gouverneur et sénéchal du Périgord. Elles sont toutes originales, signées et
annotées de la main des souverains, et s’espacent entre les années 1561 et 1581.
Le dernier volume des œuvres de Brantôme consacré à cet
André de Bourdeille, contient la correspondance active échangée entre, les rois
de France et celui ci durant les guerres de religion.
Les lettres royales citées sont peu nombreuses et il en
existe beaucoup d'autres qui n'y figurent pas. Ce sont ces dernières que j'ai
songé à tirer de l'oubli et dont l’intérêt ma paru assez grand pour faire l’objet
de la présente publication.
Mis de BOURDEILLE.
I
1561, 25 mai, Paris. — Lettre du roi Charles
IX au seigneur de Bourdeille.
Monsieur de Bourdeille,
Voulant recongnoistre les services que m'a cy devant faictz
et continue encore tous les jours le sieur de la Douze, j ay advisé, à ceste
nouvelle création de chevaliers de mon Ordre, de l’honnorer dicelluy et luy faire
en cela paroistre la bonne souvenance, que j'ay de luy et combien je l'estime pour ses vertus et mérites. Et pour ceste
occasion, je vous prie de luy bailler
le collier dud. Ordre et la lettre que je luy escriptz pour cest effect, avec les cérémonies à plain déclarées au memoire et
instruction que je vous envoyé. Duquel sieur de la Douze vous retirerai après
ung acte, de l’acceptation qu'il fera dud. Ordre, en la forme, contenue par le
double que pareillement je vous envoye, que vous m’envoyerés incontinant.
Priant sur ce le Créateur, Monsieur de Bourdeilles, vous avoir on sa sainte et digne
garde. Escript à Paris, le XXVe jour de may 1561.
Charles
Et
plus bas,
Fizes.
II
1561, 25 mai, Paris. — Instructions du roi
Charles IX au seigneur de Bourdeille.
Monsieur de BourdeiIles, chevalier de l'Ordre du Roy et cappitaine
de cinquante hommes d'armes de ses ordonnances, baillera au sieur de la Douze
la lettre que sa Majesté luy escript, par laquelle il entendra comme pour ses
vertus et mérites, il a esté choisy et esleu par icelluy seigneur souverain et
autres chevaliers de l'Ordre monsieur sainct Michel estans auprès de luy, pour
y estre associé ; et s'il accepte lad. ellection, led. sieur de Bourdeilles luy fera sçavoir ou il aura à se trouver pour luy
donner led. Ordre.
Il luy fera entendre et declairera plus amplement lad.
ellection et que ce qui a meu led. seigneur souverain, et autres chevaliers dud. Ordre à l’appeller et
associer en icelle compagnie, a esté la recoignoissance qu'il a de ses vertus
et vaillance, avee espérance qu'il persévéra à l’honneur dud. Ordre et à sa
plus grande recommandation et louange.
Cella faict, le fera mettre à genoux, et luy fera promectre et jurer en ses mains, et par ses foy et serment,
sur son honneur, ses mains touchant les sainctz Evangilles de Dieu, ainsi qu'il
suit :
« Vous jurez Dieu, vostre Créateur, et sur la part que vous prétendez en paradis, que à vostre loyal
pouvoir, vous ayderai à garder, soustenir et deffendre les hautesses, droictz
de la couronne, Majesté royal et l'auctorité du souverain de l'Ordre et de ses
successeurs souverains, tant que vous vivrez et serez d'icelluy. Que de tout vostre pouvoir, vous vous employerés
à maintenir led. Ordre, estat et honneur et mectrés peyne de l'augmenter, sans
le souffrir descheoir ou amoindrir, tant que vous y pourrés remédier ou
pourveoir. S'il advenoit — que Dieu ne veuille — que en vous fust trouvée
aucune fautte parquoy, selon les coustumes dud. Ordre, en fussiés privé et sommé
en rendre le collier, vous en ce cas le renvoierés aud. souverain ou au
trésorier dud. Ordre, sans jamais, après lad. sommation, porter led. collier,
Et toutes peines, punitions et corrections que pour autre ou moindre cas vous
pourroient estre enjoinctes et ordonnées, vous parlerés et accomplirés
patiemment, sans avoir peur ne porter, à l'occasion desd. choses, hayne,
malveillance ou rancune envers led. souverain, freres, compagnons et officiers
dud. Ordre, et de tout vostre loyal
pouvoir, accomplirés tous les statuts, poinctz, articles et ordonnances dud.
Ordre. Et le promectez et jurez en spécial, tout ainsi que si particulièrement
ou sur chascun desd. pointz vous en aviés faict serment. »
Ce faict led. sieur de Bordeilles prendra le collier dud. Ordre et le
mectra autour du col dud. sieur de la Douze en luy disant: « L'Ordre vous
reçoit en son aimable compaignie et en signe de ce vous donne ce present
collier. Dieu veuille que longuement vous le puissiez porter à sa louange et service, exaltation de sa saincte Eglise,
accroissement et honneur de l'Ordre et de vos mérites et bonne renommée. Au nom
du Père, du Filz et du benoist Sainct Esprit. » A quoy il répondra : « Dieu
m'en donne la grâce. » Après le baisera en signe d'amour perpétuelle.
Retirera led. sieur de Bordeilles dud. de la Douze ung acte
de son acceptation dud. Ordre, signée de son seing et scelée de son scel, de la
teneur dont en est envoyé le mémoire, et le renvoiera après au souverain dud.
Ordre (1).
Faict le XXVe jour de may 1561.
Charles
et plus bas, fizes.
III
1562, 4 avril, Melun. — Lettre du roi Charles
IX au seigneur de Bourdeille.
Monsieur de Bourdeille,
Ayant esté adverty qu'aulcuns de mes subjetz, s'estant
assemblez en grande trouppe en armes, se sont allez saisir de ma ville
d'Orléans ; ne poulvant penser à quelle intention, sy ce n'est pour quelque
grande entreprinse contre le bien de mon service et le repos de mes subjetz ;
et que du costé de Guyenne, ils se vantent debvoir estre secouruz d'une grande
force; j'escript presentement à Monsieur de Burye, mon lieutenan géneral en
Guyenne, en l'absence de mon oncle, le roy de Navarre, de lever quelque nombre d'enseignes de gens de
pied et, avec d'elles et les forces qu'il a à assemblées, tant de gens de pied
que de cheval, empescher le secours qui, de ce costé là, leur pourroyt venir.
Et pour reste cause, s'il avoit besoing de l'ayde de tous mes bons subjectz et serviteurs, assemble le plus de la
noblesse qu'il pourra. Et d'autant que je scay et congnois la fidélité,
dévotion et bonne vollonté que vous avez au bien de mon service, je vous en ay
bien voullu escrire pour vous prier, Monsieur de Bourdeille, pour l'importance
que cela est à mon service, de l'aller trouver, et luy voulloir assister en
cela de tout ce que vous pourrez, et luy donner toute ayde et secours qui sera
en votre puissance et vous asseurer que je recognoistray ce service, faict en
mon grand besoing, envers vous, selon vostre mérite. et je prierai Dieu,
Monsieur de Bourdeille, vous avoir en sa saincte et digne garde.
De Melein, ce IVe jour de avril 1562.
Charles
et plus bas, Robertet.
1567, 7 décembre, Paris. — Lettre de la Reine
Mère au seigneur de Bourdeille.
Monsieur de Bourdeille,
Ce petit mot de lettre ne sera que pour acompaigner celle
que le Roy, monsieur mon filz, vous escript présentement, et vous assurer que
j'ay esté bien aise de participer au plaisir qu'il a eu d'entendre vostre
acheminement par deçà, avec la troupe que vous escrivez, en bon equippage de faire
service. Ne me restant à vous dire, sinon que, suivant son intencion,
vous ne bousgerez de la ville de Chartres, y estant arrivez, jusques à ce que
vous ayez de noz nouvelles. Priant sur ce le Créateur vous donner, Monsieur de Bourdeille,
ce que plus désirez.
Escript à Paris, le VIIe jour de décembre 1567.
Caterine
et plus bas, Robertet.
V
1568, 14 juin, Paris. — Lettre du roi Charles
IX au seigneur de Bourdeille.
Monsieur de Bourdeilles,
Voyant les grandes despenses que, pour raison des troubles et
divisions qui ont naguères esté en ce royaume, j'ay esté contrainct de
supporter, tant pour l’entretenement de ma gendarmerie, des estrangers, tant de cheval que de pied, que j'ay entretenuz,
jusqu'à ce que, ayant plu à Dieu me faire celltte grâce que d'establir la paix
entre mesdictz subjectz, j'ay licentié la pluspart des compaignies des gens de
pied, ensemble les reistres ; et me restant ung si grand nombre de compaignies
de gendarmerie que, oultre les vieilles et anciennes, mes bons et affectionnez
subjectz ont fait lever, suivant ce que je leur en ay escript ou commandé, il
est impossible de les pouvoir entretenir à faire paix de leurs estats, sans une
grande foulle, oppression et dommaige de mesdictz subjectz : qui a esté cause
que j'ay advisé de les réduire, scavoir est: toutes celles qui sont de cent
lances, à soixante, et celles de cinquante à trente ; dont je vous ay bien
voulu advertir, affin que vous en faites tenir pretz au nombre de ladicte
réduction, lors que je le vous manderay. Et qu'ils soient montez à 14 compaignies
qu'ilz doivent estre pour me faire service aussitost qu'il en sera de besoing. Et m'asseurant que vous satisferez, incontinent à ma volonté,
et à ce que je vous mande cy dessus, je ne vous feray plus longue lettre, que
de prier le Créateur, Monsieur de Bourdeilles, qu'il vous ait en sa saincte et digne garde, Escript de Paris, le XIIIe
jour de juing.
Charles
Et plus bas, Fizes.
VI
1568, 17 juin, Paris. — Lettre du roi Charles
IX à André de Bourdeille.
Monsieur de Bourdeilles,
Les habitans de ma ville de Corbeil se sont retirez par
devers moy, pour avoir raison d'une infinité d'insollences et villains et
infâmes actes, que ont commis et commetent ordinairement ceulx de vostre compaignye,
tant ès personnes des gouverneurs et principaulx, que ès filles et femmes de ladite
ville, oultrageant et batant les hommes, violiant et prenant par force les
filles jusques dedans l'église, faisant leur oraison, et contraignant en telle
sorte les autres, que aulcunres d’elles se sont, pour fuir et éviter leur ord
et villain désir, jectées par les fenestres sur le pavé, au grand danger et
péril de leur vie. Qui est chose si méchante, et qui me desplaist tellement,
que je ne veulx ne dois espérer de vostred. compaignye, faisant tels actes et
si desplaisans à Dieu, aucun service.
Et pour ce, je veulx et vous ordonne que vous ayez à metre ceux qui ont commis les crimes dessus dictz entre les
mains des gens de ma justice, pour estre chastiez et pugnis comme l'enormité du
cas le requiert. Et pour vérification de ce, que information en soit faicte par
le juge dudict Corbeil, pour après estre rapporté en mon conseil et ordonné sur
le faict, comme il appartiendra. Et ce pendant, je deffendz très expressément à
toute vostre compaignye, et à chascun des hommes d'armes et archers d'icelle,
de ne mal faire ni médire à aucuns desdictz habitans, sur peine d'estre privez
de leurs places et eaz, et d’estre pugnis corporellement. Et pour soullager
lesdictz pauvres habitans de tant de despens qu'ils ont portez, et portent
encore à present, et pour autres
bonnes considérations, je veulx que vous aiez à conduire incontinant vostre compaignye à la Ferté soubz Jouare, où j’ay
ordonné qu'elle tiendra garnison, jusques à ce que j'en aie autrement ordonné.
Et pour ce faire, je vous envoyée la commission et mandement nécessaires, tant
pour loger que pour avoir des vivres pour les homme et chevaulx. Priant Dieu,
Monsieur de Bourdeilles, vous tenir en sa saincte garde.
Escrit à Paris, le XVIIe jour de juing 1568.
Charles
Et plus bas, Fizes.
VI
1568, 17 juin, Paris. — Lettre de
Henri, alors duc d’Alençon, au seigneur de Bourdeille.
Monsieur de Bourdeilles,
La plaincte qui est venue à noz aureilles des malversations,
viollementz et outraiges que font ceulx
de vostre compagnie aux habitants de la ville de Corbeil est trouvée si estrange
et de si mauvaise conséquence, qu'il n'y a celluy qui n'ait horreur d'en ouyr
parler. Et d'autant que plusieurs desdicts actes ont esté commis pendant que
vous estiez par de là et sont venus à vostre congnoisssance par la plaincte que
vous en ont faicte lesdictz habitans, sans y avoir remédié ne faict aucune
pugnition ou démonstration exemplaire des dictz delinquans, je ne puis estre
content de vous ; mesmement que, quant, il n'y auroit autre chose que vous y
deust convier, que le desplaisir que vous pouvez penser que nous en avons, et que
si meschante et téméraire entreprinse se peust dire estre faicte au mespris et contentement du Roy, mon seigneur et
frère, à la porte de la ville cappitalle
de son royaume, où est sa personne, et que ne luy peult estre tenu cachée ne
cellée. Et pour ce requierctz de faire appréhender les coulpables, et en faire
la justice, et tenir la main que information en soit faicte, pour après en estre
ordonné comme il appartiendra. Au demeurant, ne faillez à faire partir vostre compagnie, suivant ce que le Roy, mon seigneur
et frère, vous mande pour aller à la Ferté soubz Jouarre, tenir garnison, et pour ce je vous envoyé le mandement, et commission nécessaire. Priant Dieu, Monsieur de Bourdeilles, vous donner sa saincte grâce.
Escript à Paris, le XVIIe jour de juing 1568.
Vostre bon amy, Henry
VIII
1569, 13 avril, Metz. — Lettre du roi Charles
IX au seigneur de Bourdeille.
Monsieur de Bourdeilles.
Mon frère le duc d'Anjou m'a mandé le debvoir que vous avez faict en la bataille qu'il
a donnée sur mes ennemis avecques
vostre ayde ; qui est cause que par le sieur d'Argence il m'a semblé vous en debvoir
remercier, et de vous prier d'estre assure que, quand l'occasion se présentera,
je vous feray paroistre combien agréable m'a esté le service que vous m'avez
faict en cest endroict, ainsi que j'ay donné charge aud. sieur d'Argence de
vous dire de ma part : dont vous le croyrez, comme si c'estoit moy mesme.
Priant Dieu, Monsieur de Bourdeilles, vous tenir en sa garde. Escript à Metz,
le XIIIe jour d'avril 1569.
Charles
et plus bas, de Neuville.
IX
1569, 14 décembre, au camp de Lure, près Tonnay-Boutonne. — Lettre du roi Charles IX au seigneur de Bourdeille.
Monsieur de Bourdeilles,
Ayant advisé de laisser mon cousin le Prince dauphin en ses
quartiers avec mes armées, mon lieutenant général en l'absence de mon frère, le
duc d'Anjou; et désirant qu'il soit accompaigné du meilleur nombre de vaillantz,
saiges et expérimentés cappitaines de gendarmes et aultres qu'il sera possible;
.je vous ay choisi et eslu pour estre au nombre d'iceulx et vostre compaignye
de celles qui demeurent en mad. armée. A ceste cause, je vous prye ne fallir
vous rendre avec vostre dicte compaignye où sera mond. cousin, et que vous
feront, entendre les marechaulx de camp, pour estre employé en ce qui se
présentera pour mon service, selon et ainsi que mond. cousin vous ordonnera. Et
m'asseurant que, pour le desir et affection que vous avez de me faire service,
vous ne fauldrez d'y satisfaire entièrement, je ne vous ferez la présente plus longue
que pour prier Dieu. Monsieur de Bourdeilles, qu'il vous ayt en sa saincte
garde.
Escript au camp de Lure, près de Thonne Boutonne, le XIVe
jour de décembre l569.
Chàrles
et plus bas, Fizes.
X
1570, 10 Février, Angers. — Lettre du roi Charles
IX au seigneur de Bourdeille. (Lettre imprimée et les noms ajoutés à la main.)
Monsieur de Bourdeilles,
Désirant donner moyen à vostre compagnie de se reposer et raffreschir, à fin que, quant il s’offrira occasion cy après de me faire service, elle puisse estre preste pour s'acheminer
incontinant la part, qu'il vous sera
commandé, j'ay advisé de l'envoyer avec plusieurs autres au gouvernement de
Limosin et Périgort. A toutes lesquelles j'ay commandé au sieur des Cars,
gouverneur dudict pays, d'assigner un certain lieu, ou elles se puissent assembler et unir pour me faire service,
et marcher tant en son armée que dans ledict gouvernement, quand il en sera
besoin, et que par moy, mon frère le duc d'Anjou, mon lieutenant général, ou
ledict sieur des Cars, vous sera commandé et ordonné ; et pour ce vous ne faudrez de vous retirer avec vostre dicte compagnie audict
pays, et entendre dudict sieur des Cars le lieu où vous aurez à vous assembler;
et quand il vous sera mandé d'amener vostre dicte compagnie, vous donnerez
ordre qu'elle soit si belle et compleicte que j'aye occasion de m'en contenter;
vous voulant bien advertir que je
ne suis pas délibéré d'en entretenir aucune par cy après si elles ne sont, bien complettes et entières. Et d'aultant
qu'il me vientplusieurs plainctes et doléances de mes pauvres subjectz, à
causes des malversations et pilleries des gens de guerre, je veux et entendz,
quant vostre dicte compagnie marchera par pays, qu'elle soit conduicte par vous ou vostre lieutenant, enseigne, ou guidon, pour respondre
des plainctes qui pourroyent estre faictes de ladicte compagnie, par mesdictz
subjectz, et qu'elle face diligence de marcher et se rendre la part qui luy sera commandé, aux meilleures et plus raisonnables journées qu'elle
pourra, sans s'arrester ne
séjourner, à fin que mon pauvre
peuple en puisse estre d'aultant plus soullaigé, suyvant mon désir et intention.
Et m’asseurant que n'y ferez faillir, je priray Dieu, Monsieur de Bourdeilles, vous tenir en sa saincte garde.
Escript à Angers, le Xe jour de février 1570.
Charles
et plus bas, Fizes.
1570, 21 février, Angers. — Lettre du roi Charles
IX au seigneur de Bourdeille.
Monsieur de Bourdeilles,
J’escriptz à la damoiselle de la Barde de Creissac le
dangier qu'il y a que sa fille luy soit
enlevée, soubz la licence engendrée par les troubles qui sont aujourd'huy en mon royaume ; et qu'elle ne sçauroit mieulx
faire pour sa dicte fille que la remettre ès mains de la dame de Bordeilles,
vostre femme, pour estre nourrye près d'elle, où elle pourra prendre et
recevoir la bonne créance qui convient à toute fille bien née, comme elle est. Vous envoyant la lettre que je luy escriptz
pour la luy faire tenir, et vous prier, si elle condesand à ce que dessus, de recommander ladicte fille à votre dicte femme, pour en avoir le soing et cure, telle que je
me suis promis de sa prudence, en sorte que la mère et les autres parens en
puisse recevoir le contentement que je leur asseure par ma dicte lettre. A laquelle me remettant, je feray fin à ceste cy, par prier à Dieu qu'il vous ayt, Monsieur de Bourdeilles, en sa saincte et digne garde.
Escript à Angers, le XXIe jour de février l570.
Charles
et plus bas, De Laubespine.
XII
1574, 8 août, Paris, — Lettre de la Reine
Mère au seigneur de Bourdeille. — (Reçue le dernier
d'août.)
Monsieur de
Bourdeilles,
Encores que je vous aye nagueires escript prendre garde et avoir
l'oeil à la conservation du païs de Périgueulx, à ceste heure q'il eu est aussy
grand besoing qu'il fut oncques ; touteffois, partant presentement pour m'en
aller à Lyon, au devant du Roy, monsieur mon fils, j'ay bien voullu vous faire
ceste recharge, pour vous prier de veiller soigneusement à maintenir ledit païs
soubz son obéissance, et empescher, tant qu'il vous sera possible, que ceux de la
nouvelle oppinion, et aultres mal attentionnez à la tranquilité publicque, n'y
puissent faire de surprinse ; commandant à ceulx de la noblesse dudit païs et aux
habitans des villes ce qu'ils auront à faire pour le bien des affaires et service
du Roy, mon dict seigneur et fils, et leur repos et conservation. Et affin que
vous aiez meilleur moien de satisfaire à ce que dessus, j'ay advisé de vous remettre
et bailler vostre compagnie de gens d'armes, que vous referez et rassemblerez
le plus tost que vous pourrez. Et vous ay aussi ordonné trois compagnies de
gens de pied, que vous ferez lever et mettre sus incontinant ; lesquelles seront
entretenues aux despens du païs, suivant, les commissions que je vous envoye,
tant pour vostre dicte compagnie de gens d'armes, celles de gens de pied, que
pour faire départir et esgaller la levée du paiement et entretenement d'iceulx
gens de guerre à pied. An quoy vous tiendray la main qu'il soif usé de bon mesnaige
et de la moindre foulle sur le peuple qu'il sera possible, l'affection que je sçay
que vous avez au bien du service du Roy, mon dict seigneur et fils, et au repos
dudit païs, me garderont de vous faire plus particulliere recommandation du
debvoir que je désire que vous rendiez en ceste charge. De laquelle me reposant
sur vostre vigillance et prudence, je prieray Dieu, Monsieur de
Bourdeilles, vous avoir en sa saincte garde, Escript à Paris, le VIIIe jour
d'aoust 1574.
Catherine
et plus bas, Pinart.
XIII
1574, l0 août, Paris. — Lettre du roi Henri
III au seigneur de Bourdeille, — (Reçue le 27 août
par le syndic du pays.)
Monsieur de Bourdeille,
Le sieur de Périgord et le scindic dudit païs s'en
retournent vous trouver, avecques la response qui a este faicte à la requeste
qu'ilz m’ont présentée, de la part des trois Estatz dicelluy; par laquelle vous
verrez que je les ay soulagez et grattiffiez autant qu'il m’a esté possible.
Vous priant les asseurer que j'eusse esté bien ayse de faire davantage, si l’estat
de mes affaires me l'eust permis ; car je scay les pertes qu'ilz ont
souffertes, aussi bien que leurs merites. Mais je me trouve si chargé de tous
costés de frays et despenses nécessaires, et si en arrière en mes finances,
qu'il ne m'a pas esté possible leur rendre, pour ceste fois, plus grand
témoignage de ma bonne volonté, qui sera tous jours aussi liberalle envers eulx
que pour nulz de mes subjectz. Et suis très dépluisant de quoy il n'a esté
pourveu, à Perigueulx ; car je voy bien que tant que Vivans y demeurera, il ne
failli pas espérer que mes dictz officiers et les habitans d'icelle y retournent
et y puissent vivre on repos et seureté. Je vous asseure que j'en ay faict ces
jours icy une bonne depesche à mon frère le Roy de Navarre, par le sieur de Lancosme,
et ne cesseray ny seray content qu'il n'y ayt esté pourveu. Priant Dieu qu'il
vous ayt, Monsieur de Bourdeille, en sa saincte garde.
De Paris, le Xe jour d’aoust 1574.
Henry
et plus bas. De Neufville.
XIV
1574, 18 octobre, Lyon. — Lettre du roi Henri III au seigneur de Bourdeille. — (Reçue le 9 novembre) (2).
Monsieur de Bourdeille,
J'ay ouy parler le cappitaine La Salle et pris en bonne part ce qu'il m'a faict
entendre, tant pour le faict de la paix que pour ce qui concerne le lieutenant
de Poictiers ; de sorte que je lui envoye les passeports qu'il m'a demandez,
affin qu'ilz se puissent au plus tost acheminer en Languedoc, suivant leur
proposition. Et vous asseure qu'il n'y a rien que je désire plus que de faire la paix, comme je feray toujours
cognoistre par effect, toutes les foys et quant que chascun fera de son costé
ce qu'il doibt. Ledict La Salle m’a dit que mes subjectz de la nouvelle
opinion, qui sont par delà, depputèrent quelques ungs d'entre eulx, pour se
rendre audict pays de Languedoc, avecques charge de recevoir ladicte paix et la
negotier, et mesme que le sieur de la Noue seroit pour estre choisy. Touttefois,
n'en estant bien certain, il me demande luy bailler un passeport en blanc pour
remplir du nom de celluy qui seroit depputé. Sur quoy, j'ay panssé de vous
addresser ledict passeport, affin que vous le faciez remplir, ainsi qu'il sera
de besoing, et qu'il ne soyt employé à aultre effect. Je desireroys fort que
ledict sieur de la Noue eust ceste charge, tant pour les grâces spécialles
qu'il a recrues de moy, et dont il m'est particullierement obligé, que pour le
cognoistre capable de raison et amateur du repoz publicq de ce royaume. Si vous
pouvez en cela quelque chose, je vous prie vous y emploier, car j'auray boune
espérance de ceste négociation, pourveu que ledict sieur de la Noue en soyt le
ministre. Et en ce cas, je serois bien ayse que, pour disposer tousjours mieulx
les choses à quelque bon effect, que vous puissiez venir ensemble avecques ledict
sieur de La Noue et aultres depputez audict paix de Languedocq, où je
m'achemine présentement. Au moyen de quoy, je vous prie adviser si c'est chose
que vous puissiez faire à me donner ce consentement, et vous me ferez bien grand plaisir. Quant à mes affaires de par delà, m'en estant du tout remis sur le
maréchal de Montluc, je attendz de ses nouvelles pour en faire quelque bonne
résolution, dont vous serez aussi tost adverty, si vous estes encore au pays. Surtout
je vous prie avancer le acheminement desdictz depputez autant qu'il vous sera
possible, affin que tant plus tost il se puisse faire quelque bonne conclusion pour la tranquillité
de mon royaume et soulagement de mes pauvres subjectz. Priant Dieu vous avoir,
Monsieur de Bourdeille, en sa saincte et digne garde.
Henry
et plus bas, De Neufville.
Je vous envoye une copie collationnée à l'original de la dernière déclaration que j'ay faicte :
laquelle je vous prie faire publier en l'estendue de vostre
seneschaussée, et me mander comme elle aura esté reçeue.
XV
1576, 9 avril, Paris. — Lettre du roi Henri III au seigneur de Bourdeille. — (Reçue le 9 avril 1576.)
Monsieur de Bourdeille,
Par voire lettre du 22e mars, j'ay esté adverty de la reprinse de la Ville et chasteau
d'Exideuil, faicte par les sieurs de Haultefort, dont, si j'ay este tres ayse,
je vous asseure aussy que je leur sçay très bon gré. Car, puisque les aultres ont
commencé à contrevenir à la tresve, je n'entendz qu'elle soict observée en
aucune manière. Je vous prye de faire entendre ausdicts sieurs de Haultefort que j'ay bien grand
contentement d’eulx et de l’affection qu'ilz monstrent par effect porter à mon
service, dont j'auray toute ma vie souvenance, accompaignée d'un singullier
désir de le recognoistre, quand le subgect s'en présentera. Au demeurant, sitost
que je seray résolu de la paix ou de la guerre, je feray partir mon cousin
l'Admiral, pour aller par delà, ainsi que je vous ay escript par mes dernières,
l'ayant retenu icy pour m'en servir en la negotiation de ladicte paix. En
l'attendant, .je vous prye, avecques tous mes bons subgectz et serviteurs, qui
sont par delà, faire au mieulx qu'il vous sera possible, pour conserver ce qui
reste en mon obeyssance, et mon pauvre peuple, duquel j'ay très grande compassion de l'oppression qu'il reçoit de ceulx qui
me font la guerre. Priant Dieu qu'il vous ayt, Monsieur de Bourdeille, en sa
saincte garde. Escript à Paris, le IXe jour d'avril 1576.
Henry
et plus bas, De Neufville.
(1)
Nos archives
conservent encore les originaux des lettres et instructions adressées à André
de Bourdeille pour recevoir dans l’ordre de Saint Michel les sieurs de Lascoux
(1er décembre 1569), de
Parcoul (21 février 1570), de
Montanceix (7 octobre 1576) et de
Couture (même date). Elles sont de la
même teneur que celles que nous reproduisons ci-dessus. Voir également dans le
Bulletin de cette année, p. 200-201, les pièces concernant la réception de
François Flamenc de Bruzac des 28 et 29 août 1570).
(2)
Cette Lettre figure dans les œuvres d'André de Bourdeille, mais incomplète.
Je crois utile de la donner avec quelles variantes