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nous intéressant simultanément à la genèse de la mouture et à l'archéologie
en général, ces deux centres d'intérêt se sont rejoints autour du charronnage
ou art de la roue et de son moyeu, lorsque nous abordâmes la protohistoire. Depuis nous
nous interrogeons à propos de l'apparition de cetle pièce mécanique que l'on
appelle anille ou fer à moulin, et qui fut selon nous une révolution
technologique qui bouleversa en son temps les performances en matière de
rendements pour l'obtention de la farine. Possibles représentations : Jean
ABELANET dans son ouvrage Signes Sans Paroles, chez Hachette 1986, qui
répertorie l'art rupestre de toute l'Europe occidentale, pourrait bien avoir
sans le savoir retrouvé les premières
représentations des meules circulaires dont deux avec logement d'anille.
Représentations associées à d'autres représentations agraires courantes
depuis l'âge du bronze. Origine de la fausse rumeur : En compulsant
l'ouvrage culte "Historique de la meunerie et de la boulangerie
depuis les temps préhistoriques jusqu'à l'année 1914", édition Le
chancelier 1948 ; écrit par le premier professeur de laboratoire de l'école
française de meunerie Marcel ARPIN, on peut lire page 106 :
"l'invention de l'anille ne date que du XVIII ème
siècle...". Paradoxalement, page 20 du même volum Fig. 11 est présentée
une paire de meules gallo-romaine trouvée à Clermont-Ferrand où la catillus
"de dessus" comporte le logement caractéristique d'une anille alors
que la meta "de dessous" est percée pour recevoir un pivot, page
suivante Fig 12 une meule courante gauloise du musée de
Saint-Germain-en-Laye, piquée et rayonnée comporte un logement identique mais
cette fois côté intérieur. Preuve irréfutable de la suspension ajoutée au
guidage en rotation qui sont les caractéristiques
même de la novation étudiée ici. Première preuve écrite : Vitruve,
architecte romain (1er siècle avant notre ère), accompagne les
légions en Gaule et en Espagne, et dans son traité d'architecture "De
architectura libri decem", explique ; " ... qu'une roue
entraîne un axe en fer en forme de hache, pour actionner la meule de
dessus...". Il faut lire que le gros fer ou axe de rotation représente
le manche et l'anille traversée en son centre par l'extrémité carrée avait la
forme d'une hache à double tranchant, contrairement à la logique de l'outil
contemporain servant de comparaison, dans un plan horizontal. Bien
d'autres preuves évidentes de l'antériorité de cette invention par rapport au
XVIII ème siècle ont jalonné notre longue quête d'informations sur
l'histoire du métier de meunier, la dernière en date étant la découverte
relatée par "Histoire médiévale" n° 47, à Chalon-sur-Saône,
d'une meule en grès comportant une empreinte caractéristique coté interne en
forme de X, datée des environs de 760 de notre ère par Daniéla Gräf
spécialiste des moulins sur bateaux. Limitons-nous volontairement aux preuves archéologiques énoncées
ci-dessus pour nous consacrer à une description du système : D'abord nous vous proposons la définition suivante de l'anille. C'est une pièce métallique, matérialisant l'un des diamètres du trou
central appelé oeillard de la meule de dessus. Ce "fer à moulin"
est incrusté et scellé. Sa fonction primordiale est de transmettre la
rotation du gros fer à la tournante. Il faut voir là
le premier entraînement en rotation permettant de régler l'écarlement des
meules par translation verticale. Plus tard les tournantes s'alourdissant, le trou central du fer à
moulin sera circulaire et borgne. Il recevra le "grain ou téton",
extrémité de l'axe de rotation ou "gros fer". Le progrès par
rapport au système précédent sera de mettre la meule en équilibre, dans le
but de réduire son usure. Le réglage est assuré par le système dit des leviers de la trempure ;
qui produit l'écartemenl ou le rapprochement des meules par action sur la
mobile en la soulevant ou en la laissant descendre par l'anille. Le mouvement
de rotation, est transmis par cette dernière qui est alors chevauchée par une
chape en forme de U clavetée sur l'extrémité du gros fer, qui a pour rôle de
faire tourner la courante. Il
est à remarquer que sur les moulins à eaux, ce "cavalier" est en
dessous et que sur ceux à vent il est en dessus. Ce système d'anille servant
de point d'équilibrage de la meule est le plus fréquemment utilisé depuis le
XVIII ème siècle jusqu'à nos jours. Après
la démonstration de l'évidence de l'antériorité de la découverte technique
majeure du fer à moulin par rapport au XVIII ème siècle nous
allons tenter de retrouver le cheminement intellectuel qui a conduit à
l'invention de l'anille, par nos expérimentations archéologiques. Aux
origines une molette est mue en translation sur une gisante creusée,
contenant le produit à moudre. Nous avons abordé la rotation de la meule de
dessus par le moulin Olynthien. Bref rappel du principe ; la fixe est
surmontée par une courante où pour la première fois au mouvement de
va-et-vient se substitue une semi-rotation. Très vite par la pratique nous
déplorons avec ce système le manque de guidage en rotation qui nuit au bon
rendement. Jean ORSATELLI dans Les Moulins, édition Lafitte 1979, nous
propose une reconstitution Fig 5 page 14, où l'un des manches se transforme
en barre de rotation en s'articulant autour d'un axe vertical cylindrique,
fiché dans le plan de la meule réceptrice. Cette intelligente interprétation
nous fait entrevoir le premier degré qui immanquablement doit déboucher sur
notre invention. Nous vous proposons de continuer le cheminement. Pour obtenir une
rotation complète d'abord furent conçues des pierres
tournantes incrustées dans la fixe, le guidage en rotation se faisant par la
périphérie n'étant pas des plus pratiques ni des plus fiables. Puis vint le moulin de type
"berbère" : Bref rappel du principe : Une pierre gisante discoïdale plate avec un
trou central dans lequel est fiché un axe en bois qui traverse l'œillard de
la tournante identique à celle de dessous et munie d'une poignée excentrée. L'inconvénient de l'axe libre dans l'œillard est qu'il induit une
rotation non concentrique, l'utilisateur regrette l'absence d'un système
emprisonnant la pierre vers le haut, ce qui est extrêmement pénalisant
surtout pour la mouture de graines à forme plus ou moins sphérique tel le
froment, et compte tenu du faible poids de l'élément trituraleur. Naturellement vint une astuce qui consiste à peser de son poids sur
deux mancherons incrustés diamétralement et à égale distance du centre. Mais
l'expérimentation démontre l'impossibilité de faire une rotation complète. Pour palier à cet inconvénient il suffit de rejoindre par une traverse
le guidage central et les deux poignées, en donnant la rotation par
l'extrémité débordante de cette traverse. La force est ainsi démultipliée, et
le mouvement devient parfaitement concentrique Je prétends qu'ici se trouve un paléosystème d'anille. En effet la
mouture circulaire devient alors parfaite, et l'écartement des meules peut
être réglé en jouant sur la hauteur du pivot central par un jeu de trous et
de goupilles. Reste alors à résoudre l'inconvénient de l'obligation de pression pour
moudre qui peut être résolu par l'utilisation d'une autre goupille au dessus
de l'anille. La pierre de
dessus s'alourdit ; il est alors plus facile pour obtenir une bonne rotation
et un bon équilibrage d'abaisser le point de suspension et tout naturellement
pour ce faire le fer à moulin passe en dessous de la courante, et s'incruste
dans la pierre pour ne pas nuire à la mouture. Arrive
la force hydraulique directe par une roue à cuillères simples à axe vertical
"rodet hydraulique" -260 avant notre ère, par cette machine la
seule façon rationnelle d'entraîner la meule du dessus passe par la
combinaison "papillon carré / anille". Pour
conclure nous pensons que ce sont les paysans de l'âge du bronze qui ont fait
tourner les meules de dessus. Les pré-celtes (dont les derniers descendants
sont les berbères) qui les ont guidées en rotation par un axe central. Les gaulois et
plus précisément les ibères ont transformé cet axe en pivot et ont relié ce
dernier à la meule par une pièce traversière. Les gallo-romains ont incrusté
cette anille dans la partie active des meules et s'en sont servis d'élément
de transmission du mouvement. Et enfin c'est au moyen âge que cet élément central du mécanisme d'un
moulin est devenu le point d'équilibrage permettant un meilleur parallélisme,
donc une meilleure mouture avec une usure réduite. |
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