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L’Estat de L’Eglise du Périgord depuis le christianisme,

 

(2ème volume)

 

par le R.P. Jean Dupuy, Récollect

 

A Périgueux,

par Pierre & Jean Dalvy Imprimeurs

& marchands libraire, 1629,

avec approbation.

 

 

Table des matières.

 

 

Arnaldus Vitabrensis, Evesque. ― Guillaume, Duc d’Aquitaine.

1

Geraldus de Gordonio, Evesque. ― Guido Duc d’Aquitaine.

9

Guillelmus de Monteberulpho, Evesq. ― Guill. Geoffroy Duc d’Aquitaine.

14

Reginaldus De Tyberio, Evesque. ― Guill. Geoff. 8. Duc d’Aquitaine.

20

Guillelmus de Albaroca, Evesque. ― S. Guillel. IX, Duc d’Aquitaine.

26

Guillelmus de Nauclard, Evesque. ― S. Guillau. IX, Duc d’Aquitaine.

35

Gaufridus de Cauzé, Evesque. ― Louys VII, Roy de France & Duc d’Aquitaine.

44

Reymondus de Maiolio, Evesque. ― Lovys Le Jeune, Duc d’Aquitaine.

46

Joannes d’Asside, Evesque. ― Henr. II. Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

55

Petrus Minetis, Evesque. ― Richard, Duc d’Aquitaine.

59

Adzemarus, Evesque. ― Richard, Duc d’Aquitaine.

64

Radulphus de Turribus, Evesque. ― Phil., Roy de France & Duc d’Aquitaine.

73

Raymundus de Pons, Evesque & Cardinal. ― Louys VIII, Roy de France & Duc d Aquitaine.

80

Petrus de S. Asterio, Evesque. ― S. Louys, Roy de France & Duc d’Aquitaine.

83

Helias Paletisis, Evesque. ― Henry IV, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

93

Raymundus Dauberoche, Evesque. ― Edouard, Roy d’Angl. & Duc d’Aquit.

95

Audoinus, Evesque. ― Philippe, Roy de France & Duc d’Aquitaine.

100

Raymundus, Evesque. ― Edouard II, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

104

Petrus, Evesque. ― Edouard III, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

107

Raymundus, Evesque. ― Edouard III, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

107

Guillelmus, Evesque. ― Edouard III, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

111

Petrus Evesque. ― Edouard, Prince des Galles & Duc d’Aquitaine.

117

Gabriel, Evesque. ― Henry IV Roy d’Angleterre, Duc d’Aquitaine.

128

Raymundus Joannes, Evesque. ― Henry IV Roy d’Angleterre, Duc d’Aquitaine.

128

De Bretenous Evesque. ― Henry IV, Roy d’Angleterre, Duc d’Aquitaine.

128

Berengarius, Evesque. ― Henry V, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

130

Elias Serven, Evesq. ― Charles VII, Roy de France, Duc d’Aquitaine.

136

Petrus de Durfort, Evesque. ― Charles VII, Roy de France, Duc d’Aquitaine.

136

Raymundus Laubariensis, Evesq. ― Charles VII, Roy de France, Duc d’Aquitaine.

136

Godefridus Berengarius darpajou, Evesq. ― Charles VII, Roy de France, Duc d’Aquitaine.

136

Elias de Bourdeille Evesque, Cardinal. ― Charles VII, Roy de France & Duc d’Aquitaine.

140

Radelphinus, Evesque. ― Louys XI, Roy de France & Duc d’Aquitaine.

153

Godefridus de Pompadorio, Evesque. ― Louys XI. Roy de France.

158

Gabriel Dumas, Evesque. ― Charles VIII, Roy de France.

158

Godefridus de Pompadorio, Evesque. ― Louys XII, Roy de France.

158

Joannes Auriens, Evesque. ― François I, Roy de France.

164

Guido de Castro-Novo de Bretenous, Evesque. ― François I, Roy de France.

164

Jacobus Murisso de Castro-Novo, Evesque. ― François I, Roy de France.

164

Joannes de Plagnies, Evesque. ― François I, Roy de France.

167

Fulco de Bonneval, Evesque. ― François I, Roy de France.

171

Claudius Givry, Evesque, Cardinal. S. R. E. ― François I, Roy de France.

171

Joannes de Lustrac, Evesque. ― Henry II, Roy de France.

174

Godefridus de Pompadour de Chasteau Bouchet, Evesque. ― Henry II, Roy de France.

174

Guido Bouchard d’Aubeterre, Evesque. ― Henry II, Roy de France.

174

Augustinus de Trivulcis, Card. S. R. E., Evesque. ― Henry II, Roy de France.

174

Petrus Fournier, Evesque. ― Charles IX Roy de France.

182

Franciscus de Bourdeille, Evesque. ― Henry III, Roy de France.

206

Joannes Martin, Evesque. ― Henry IIII, Roy de France.

216

Franciscus de la Beraudiere, Evesque ― Louys XIII, Roy de France.

219

Advertissement aux catholiques de ceste province sur le profit qu'ils pourront

recueillir de la lecture de cét opuscule.

228

Sancti provinciae Petrochorensis.

234

Diptyca Episcoporum Petrochorensium.

235

Capitula dioecesis Petrochorensis

236

Archidiaconatus.

237

Abbatiae

237

Praepositurae

237

Archipresbiteratus

237

Prioratus

238

Conventus

239

Les roys d’Aquitaine, depuis l’an 419 jusques à 852 suivant les Annales d’Aquitaine,

& la Chronique Bourdeloise.

239

Ducs d’Aquitaine François depuis l’an 852 jusques à 1137

240

Ducs d’Aquitaine Anglois jusques à l’an 1200

240

Les comtes du Perigord, recueillis des livres de Piton, Choppin, Corlieu, Belloy, Meynard,

Catel, & tiltres de la Generalité de Bourdeaux, de la maison de ville de Perigueux,

de Nerac, & des plus anciennes noblesses.

241

Notes critiques et historiques sur l'ouvrage du P. Dupuy par M. l'abbé Audierne

243

 

 

 

 

 

 

― Page 1 ―

 

Arnaldus Vitabrensis, Evesque.

Guillaume, Duc d’Aquitaine.

 

Le Successeur de Rodolphus (en marge: L’an de Jesus-Christ 1014) fut Arnaud de Vitabre, qui la mesme année receut la chaire du Perigord (en marge: Chenu. Gal. Chri. Ma. sc.), & fut sacré Evesque à S. Benoist de Nantueil (en marge: son sacre) par Seguin jadis Moyne, & pour lors Archevesque de Bourdeaux, avec d’autres Evesques. Estant promeu à l’Episcopat il se rendit reccommendable & pour la paix & pour la guerre, pour le spirituel & temporel. l’Année d’après son ordination il fut convoqué à la consecration de l’Eglise du Monastere d’Userche (en marge: Eglise consacrée), qui fut consacrée par Guillaume Duret, Evesque de Lymoges, où il faut remarquer que desja les Chrestiens, suyvant l’ancienne religion, pour les dédicaces des Eglises, avoient acoustumé de faire un grand convoy, pour rendre l’action plus magnifique (en marge: Magnificenses). Baronius (en marge: Baro. an. 393, Ex Sozon. lib. 8 c. 17) l’observe mesme dés l’an 393 ce qui ne se faisoit sans une grande despence (en marge: Et Greg. mag. ep. 54; vid. conc. Aurel.), mesmes avec dons, & li­beralités generales, envers les pauvres. La solemnité presente fut faicte à la faveur de la paix, dont l’Eglise jouyssoit en Aquitaine (en marge: 1017 Heretiques), laquelle

 

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neantmoins l’ennemy vouloit desja troubler, y envoyant quelques hérétiques (en marge: Ex frag. hist. aquit. ex Pit. ma. sc.), où plustost Epicuriens, environ l’an 1017 pour estre avancoureurs de la doctrine des Petrobrusiens & Albigeois qui quelque temps apres infesterent plusieurs quartiers du Perigord, comme nous dirons.

Guillaume 6. Duc d’Aquitaine mourut l’An 1025 (en marge: Guido 7. Duc daq.) son frere Guy succeda (en marge: 1025), & se rendit recommendable en son zele, lors qu’une partie du chef de Sainct Jehan Baptiste, praecurseur de Jesus-Chrift, fust trouvée au monastere d’Angeraye, où Angery, dans un cercueil de pierre (en marge: La teste Sainct Jean Baptis.): car il convoqua de toute l’Aquitaine tous les ordres re­ligieux pour venir honnorer ce Sacré reliquaire, auquel lieu non seulement les Aquitaniens vindrent par devotion: mais encore les peuples de France, de Bourgongne, de Bretaigne, de Lombardie (en marge: Extat. post vit. Rober. in apend. ad glab.), & quod etiam magis videtur, omnes congregationes sermorum Dei ex Aquitania cum sanctorum corporibus & reliquiis, & apparatu ecclesiastico psallentes processerunt ad memoriam sancti praecursorum Christi dict un fragment de l’histoire d’Aquitaine (en marge: Processions). Il ne faut poinct doubter qu’il n’y faille comprendre les communautes religieuses du Périgord à cause du voisinage (en marge: Bar. hoc anno; Dupl. to. 2 p. 35), quoy qu’ils n’y pareussent avec la magnificence des moines de S. Martial de Lymoges.

Je crois aussy qu’a ce temps le comte de Perigord Gérard estoit mort (en marge: Corl. chron. eng. Meynard arr; li. 9), son fils aisné Elie luy succede à la charge (en marge: Crime Sacrilege), & pleust a Dieu qu’il eut

 

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hérité lintegrité de son pere (en marge: Elie Com. de Per.): car au contraire il se treuve coulpable d’un crime tres noir. Cest que Ebles Evesque de Lymoges frere, où selon Guydonis oncle de Guillaume Duc d’Aquitai­ne (en marge: Guido in tab. ep. Lemov.), estant desja cassé de viellesse, nomma pour Evesque & son coadjuteur Benoist, qu’il avoit eslevé des son bas aage, à ce qu’il eut ladministration de l’Evesché, auquel il luy succederoit apres sa mort. Elie ne pouvant supporter qu’un sien ennemy fust eslevé à cette dignité, luy dresse une embuscade, le prent & le tenant en prison luy creve le yeux, le relaschant apres telle cruauté. Duquel forfait Ebles eut eu reparation, poursuivant le Comte criminelement (en marge: Annal. du Bou. 3 p. c. 1); mais bien tost apres il mourut en l’abbaye de S. Michel en lair; le Comte peu après bourrellé de la synderese, se resolut pour expiation de son crime sen aller à Rome demender au S. Pere labsolution de son peché (en marge: Penitence); & lors qu’il y alloit en habit de pénitent, il mourut par les chemins (en marge: Ma. sc. S. Anth.). Dautre part il fit battre dans la ville certaine monoye nommée, Helianensis, laquel­le après sa mort causa beacoup de troubles & fut descriée par l’Evesque comme nous verrons. Dans la mesme Année 1025 soubz le regne de Robert Roy de France (en marge: 1025) l’abbaye de Tourtoyrac en Perigord fust fondée par Guido Vicom­te de Lymoges & Imma sa femme (en marge: Abbatia Tortoyracensis fundatur Anno 1025), en consideration d’un de leurs enfans Richard qui fut le premier Abbé de ce lieu, ses freres Ademarus avec Senegundis sa femme; & Pierre avec Sulpi-

 

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cia sa femme, contribuerent notablement à ceste saincte action pour honorer l’Ordre de S. Benoist, auquel lieu plusieurs bons Religieux randirent leurs voeus (en marge: Ma. Sc. Cartul. dioeces. Petroch.). L’ancien Cartulaire du Dioceze nous marque, que jadis il y avoit les Offi­ces suivens, le Prieur claustral , le Sacrestain, le Camarier & 34 Moynes, Stephanus fut le seçond Abbé, toutes aultres memoires sont perdues dans les ruines generales du catholicisme.

Revenons à l’Evesque Arnaldus lequel, à ce que je crois, nous trouverons à Lymoges, à lassemblée des Evesques convoqués pour leslevation du Corps de S. Martial, & la consecration de l’Eglise S. Estiene (en marge: Sacre d’Eglise), l’An 1018 au moys d’Aoust, au rapport de Gaufredy, & comme portent les actes de ceste assemblée où concile: je dis avec beaucoup de probalité (sic) que nostre Evesque y assista pour lors, puis que la mesme année au moys de Novembre nous le trouverons dans la solennité faite pour l’Eglise royale de S. Sauveur, bastie par Pepin, comme il appert par l’inscription du sacre, portant le nom d’onze Evesques desquels Arnaldus est le 4 (en marge: Inscrip. Lemov. cons. 1028) (en marge: Adsistans).

ANNO DOMINI 1018. CONSACRATA EST BASILICA REGALIS SALVATORIS LEMOVICAE, V. CAL. DECEMBRIS, IDQVE AB EPISCOPIS VNDECIM. IORDANVS LEMOVICENSIS, IZEMBERTVS PICTAVIENSIS, ROHO ENGOLISMENSIS, ARNALDVS PETROCHORENSIS, PETRVS GERVNDENSlS, DEODATVS CADVRCENDIS, AEMILIVS ALBIENSIS, ARNALDVS ROTENENSIS, FVLCO

 

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CARCASSONENSIS, ELVS SANTONENSIS, GODEFREDVS ARCHIEPISCOPVS BVRDIGALENSIS. HOC FACTVM EST IN TEMPORE ROBERTI REGIS FRANCORVM; ET IMPERATORVM CONSTANTINI GRAECORVM, ET CONRADI ROMANORVM.

 

Je trouve aussi qu’en la mesme année, ce bon Evesque fut au convoy funebre de Guillaume Taillefer, Comte d’Angolesme, suivant la remarque de Corlieu (en marge: Corl. chr. Engol.). Quittons Engolesme pour passer à Bourges (en marge: Consiles), & y veoir comme un concile d’Evesques y est assemblé du nombre desquels estoit nostre Evesque l’An 1034 le 3 du moys de Novembre (en marge: 1034), pour faire plusieurs bons reglemens Ecclesiastiques, & remedier a beaucoup d’incidens; mais je soubsçonne fort qu’is forgearent là certains articles, qui sentent trop leur rigeur & severité, qu’ils vouloient auctoriser soubs pretexte de zele (en marge: Glaber. lib. 4 ch.), & pour obeir à quelque pretandüe revelation que quelqu’un de ces bons Evesques disoit avoir eu, lesquels arti­cles du despuis furent casses. Repassons à Ly­moges au jour anniversaire du sacre de l’Eglise S. Sauveur pour veoir vn 2. Concile provinci­al auquel les Evesques sont convoqués (en marge: Ex act. cons. 2 Lemov.), premi­èrement pour acoiser les troubles & seditions esmeuës contre les Ecclesiastiques par les perturbateurs du repos public (en marge: Tom. 3 cons. p. 2). La première seance fut conclue par une estrange commination (en marge: Conclusions), contre tous ceux qui enfreindroient la pais publicque, & seroient recogneus autheurs des seditions, les Evesques commandans au Diacre qui avoit leu

 

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l’Evangile, de lire hault & clair la presente malediction (en marge: Excommunication) (en marge: Act. ep. Cad. sub. Deod. Episc.). Ex authoritate Dei patris omnipotentis & filii & spiritus sancti, & Dei genitricis Mariae, & S. Petri Apostolorum principis, & beati Martialis, & aliorum Apostolorum, atque omnium Sanctorum Dei, nos Episcopi in nomine Dei secialiter congregati Aerno Archiepiscopus Bituricensis Jordanus antistes Lemovicensis, Stephanus Aniciensis, Rorico Arnernensis, Ragamundus Mymatensis, AEmilius Albiensis, Deus dedit Cadurcensis, Izembertus Pictavienfis, Arnaldus Petragoricensis, Roho Engolismensis: ex communicamus illos milites de isto Episcopatu Lemovicensi, qui pacem & institiam Episcopo suo firmare, sicut ipse exigit nolunt, aut noluerunt. Maledicti ipsi, & adiutores eorum in malum, &c. (en marge: Ex. Glab. lib. 4) Pour lors les Evesques jetterent en terre & estegnirent les cierges qu’ils tenoient allumés; exhortans au-surplus les peuples à garder la paix & concorde avec leur Evesque. La seconde seance fust pour donner conclusion au grand debat survenu pour le tiltre d’Apostre donné à S. Martial (en marge: Nom d’Apostre), premier Evesque des Lymosins. Contraste qui avoit du­plusieurs ans nonobstant la conclusion faicte au premier Concile tenu il y a cinq ans au mesme lieu (en marge: Scol. ser. Binij. in to. 3 Conc.), & renouvellée au Concile de Bourges, auquel les lettres du Pape Jean avoient esté leües, qui decidoient la cause, & declaroient qu’il meritoit le tiltre d’Apostre; & mesme avoit envoyé l’Oraison ou il estoit nommé Apostre. On faict en suitte lecture des 20 Canons soubscrits par eux à Bourges il n’y avoit que quelques jours,

 

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en outre l’on donna audience aux plaintes que l’Evesque proposoit (en marge: Plaintes). La première fut qu’un Comte de Tholose, puis Comte du Perigord & Vicomte de Combort, avoit par auctorite donné un Abbé laique à l’Abbaye de Beauvais (en marge: Baro. ex M. S. anno 1032 n. 2). Action qui fut detestée par tous les Evesques qui deposerent cet Abbé, disant ces beaux mots, Ecclesiastica officia non secundum carnis orignem, sed secundum meritorum virtutem distribui oportere. Se plaignoit aussi de ce que les excommuniez par les Evesques alloient demander au Pape l’absolution, & plusieurs autres particularitez rapportées dans le troisîesme tome des Conci­les (en marge: Vid. tom. 3 Conc. p. 2), le collecteur desquels l’a emprunte de Baronius, & Baronius partie de Glaber, partie d’un manuscript que j’ay eu nagueres entre mes mains, auquel plusieurs autres propositions sont contenues, lesquelles Baronius juge in­dignes des Evesques François, tant elles sont hardies contre le sainct Siège.

Il se presenta aussi à nostre Evesque une noble occasion en laquelle il fit paroistre son courage & sa vaillance au faict des armes contre les Normans (en marge: Faict d’armes), qui environ ce temps voulurent prendre terre à S. Michel en l’air, in sancto Michaele de Eremo, qui est au bas Poictou contre la mer avec leur fiere & cruelle resolution de venir encore un coup saccager toute l’Aqui­taine. Cet Evesque faict levée de gens d’armes, lesquels comme Capitaine il conduit au danger (en marge: Ma. Sc. S. Anth.), & ayant joinct ses forces avec Guillaume

 

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Comte de Poictou, homme tres-vaillant: on livre la bataille contre l’ennemy, où les Normans furent presque tous taillez en pieces. Je trouve aussi que l’argent venant à manquer, à nostre Evesque pour l’entretien & solde de ses gens de guerre; il fut contraint d’engager à Anthoine Evesque de Lymoges l’Archiprestré d’Eyssideuilh pour quelque somme d’argent (en marge: Archiprestré engagé), avec laquelle il recompensa ceux qui l’avoient servy. Le vieux cartulaire remarque, que long temps par le peu de soing de l’Eglise du Peri­gord, cest Archiprestré a esté perdu & mis en oubly par ce Dioceze, sans qu’on fut soigneux de le rachapter & reunir comme il est aujourd’huy. Les anciens manuscripts suivis par Chenu (en marge: Chenut. in Ta. ep.) mettent la mort d’Arnaldus l’an 1036 le 14 Juillet (en marge: 1036): mais je le trouve encor en vie l’année après soubscrivant aux lettres du Duc d’Aquitaine Guillelmus (en marge: 1037), comme il se voit dans le cartulaire de S. Jean d’Angeric (en marge: Pet. Ma. Sc. S. Joan Angeriac). Il fut depuis ensevely (en marge: Mort) dans l’Eglise du Monastere Sainct Front, où reposoient les os de ses predecesseurs. (aa)

 

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Geraldus de Gordonio, Evesque.

Guido, Duc d’Aquitaine.

 

Apres la mort d’Arnaldus (en marge: L’an de Jesus-Christ 1037), Gérard fut mis en sa place (en marge: Chenu. Gall. Christ. ma. sc.): il gouverna cet Evesché tout autant de temps que son devancier; mais non avec pareil suc­cez: car le demon embraza & alluma une estran­ge querelle (en marge: Querelle) entre luy & le Comte du Perigord Audebert Cadoyrac (en marge: Audebert Cadoyrac Comt du Perig.), qui avoit succedé à Elie son frere mort au voyage de Rome sans laisser d’enfans (en marge: Comt. d’Angol. par Corl. Ma. sc; don. comm.). Voicy le subject de la combustion. L’Evesque voyant que le Comte Elie durant son vivant avoit faict battre de la monnoye qui avoit eu mise (en marge: Monnoye), peut estre parce qu’il avoit usurpé le pouvoir de l’Abbé de S. Front qui pouvoit faire battre monnoye comme j’ay veu en des pieces d’argent, où d’un costé il y a les ar­moiries du Chapitre, qui sont cinq ronds, & de l’autre une Croix, portant autour Ludovicus. Tant y a que l’Evesque descria le cours de la monnoye d’Elies, suivant la puissance judiciaire qui estoit pour lors aux Officialitez des Eves-

 

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ques. Ce qui anima tellement Audebert qu’impatient de cet affront, desja il met des gens en campagne pour aller assieger & prendre l’Evesque, qui sembloit avoir chocqué sa puissance. D’autre part l’Evesque ne pouvant supporter les ravages du Comte son ennemy & pour l’asseurance de sa personne met aussi des soldats sur pied pour s’opposer à ceste furie, jette des garnisons dans ses chasteaux Episcopaux bastis par Froterius contre les Normans l’an 980. Le desordre dura long temps, puis que l’Evesque pour entretenir ses gens sur pied & les soldoyer, fut contraint d’engager (en marge: Engagemens) & aliéner de sa mense Episcopale deux chasteaux d’importance, Agonac & Auberoche, lesquels furent desengagez du depuis, comme nous trouverons en peu de temps par les hommages rendus pour ces places aux Evesques à muance de Seigneur.

Guido septiesme Duc d’Aquitaine (en marge: Ann. aquit. Chron. Burd.) n’avoit guieres long temps vescu en son Duché (en marge: Duché), succedant à Guillaume teste d’estouppe, l’an 1025 (en marge: 1025) si que je conjecture que son fils Guillaume surnommé Geoffroy (en marge: Guil. Geof. Duc d’Aquitaine) estoit de present le huictiesme Duc d’Aquitaine 1’an 1045 (en marge: 1045).

Nous trouvons dans le Calendrier du grand livre de sainct Sillain (en marge: Ma. sc. S. Syll.) que l’an 1047 (en marge: 1047) l’Archevesque de Bourges Aymo consacra (en marge: Sacre d’Eglise) & dedia le grand Monastere de S. Front, Chenu (en marge: Chenu in Ta. ep. Pet.) l’appelle Aymo de Solliaco le cinquantiesme Archevesque de Bourges, adjoustant que pour lors il faisoit la visite de la province de Bourdeaux, comme

 

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Primat de toute l’Aquitaine, il faut advoüer qu’il s’est porté assez passionné en ceste cause, qui est en l’itispendance dés long temps, sçavoir-mon s’il falloit donner la primauté de l’Aquitaine à Bourges ou à Bourdeaux; car pour la Métro­pole sur les Evesques de la seconde Aquitaine, ceux de Bourges ne nous la disputent point; mais asseurent que le Primat ou Patriarchat est à eux; car le nom de Patriarche chez les Grecs est la mesme chose que Primat chez les Latins (en marge: Primace), suivant la docte remarque d’Azor (en marge: Azor. Just. moral. p. 3 c. 35), qui cite le chapitre Cleros dist. 21. & le chapitre Urbes dist. 80. & le chapitre Provinciae dist. 99 (en marge: Alberic. in Rub. de stat. hom.; Card. Alex. In cap. de sin. dist. 22). La dispute doncques de ce Patriarchat est en Litige dés long temps entre les deux Archevesques, comme il appert par le chapitre dernier de Majoritate & obedientia, & du chapitre exposuit, de dilatationibus tit. de dolo & contumacia; & a attiré plusieurs Docteurs à divers partis, chacun de son costé citant plusieurs rescrits des Saincts Peres, comme l’on peut voir dans Nicolaus Boerius (en marge: Boerius in add. ad tract. in m. conc. num. 14 p. 1) aux additions sur le traicté faict pour l’authorité du grand Concile. Je ne veux donc examiner si l’Archevesque de Bourges faisoit bien ou mal en ceste consecration, je diray en passant que tousjours lors que les Archevesques de Bourges ont voulu s’attribuer ces jurisdictions spirituelles sur la seconde Aquitaine: ceux de Bourdeaux ont reclamé specialement l’an 1052 & l’an 1024 comme il appert par la Chronique Bourdeloise (en marge: Chronic. Burdig.), qui cite aussi une

 

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definitive determination baillée par le Pape Cle­ment cinquiesme l’an 1036 (F.B. lire 1306). adjugeant le Pri­mat d’Aquitaine à l’Archevesché de Bour­deaux.

Je trouve qu’au mesme jour du Sacre de l’Eglise Sainct Front se rencontre le Sacre de l’Eglise cathédrale de S. Estienne (en marge: Chapitre Cathedral), je ne sçay pourtant s’il fut faict en mesme année, & par le mesme: l’antiquité du bastiment me donne à conjecturer que desja ceste Eglise estoit sur pied, quoy qu’elle soit esté bastie à diverses reprises, comme l’on peut voir à l’oeil, sans que nous sçachions ny ses fondateurs, ny ses ampliateurs, contents de dire qu’autres fois ce Chapitre a esté de l’Ordre régulier de Sainct Augustin; & puis que je suis sur ce subject je ne veux obmettre ceste ancienne inscription que nous voyons gravée dans la grande Nef au costé droict de l’Autel, qui fut admirée par le docte Jofeph Lescale estant à Périgueux avec le docte Pythou l’an 1583 (en marge: Josep. scul. 7. de emend. temp. papirius masso de not. Epis. Gall.) de laquelle inscription paschale il advoüe ne sçavoir la raison. Voicy ses mots rapportez par Papirius Masso, dans le Notitia Episcopatum Galliae. Neque causas scimus periodi cujusdam paschalis quam Petrachoriis vidimus una cum Pythaeo nostro, in dextro latere altaris Ecclesiae Majoris, insculptae erant dominici paschalis litterae, meliores quam ut longe infra tempora Justiniani descriptae videantur. Titulus ita conceptus erat. HOC EST PASCHA SINE TERMINO ET NUMERO. CUM FINIERIT A CAPITE REINCIPE.

 

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MARCIVS XXIIII. APR. XII. APR. IIIV. AP. XXIIII. MR. XXXI. AP. XX. & ITA, DEINCEPS IN FINE AUTEM. MR. XXVII. ... IIII. AP. XVI. MR. XXXI. AP. XX. Et mediocriter docto patet initium esse à Cyclo Paschali Dionisiano XVI. Solari XXIIII.

Parmy le calme de l’Eglise la ferveur des Evesques de ce temps se ralentit presque dans toute la France, plusieurs mauvaises coustumes se glissant insensiblement (en marge: Arag. de gest. Rom.). Le sacrilege des Symonies (en marge: 1055) infecta presque tous les Sièges Episcopaux, si que l’an 1055 le Pape Victor tousjours pere commun envoya Hildebrand à Lyon pour assembler un Concile notional (en marge: Epis. 45 Conc. Lugd.) & remedier à ces maux (en marge: Concile), comme de faict plusieurs Evesques Symoniaques se deposerent volontairement de leur charge, ayant veu le miracle qui arriva en la personne d’un d’entr’eux.

Je n’ay rien plus de particulier touchant cét Evesque, si ce n’est sa mort qui fut l’an 1059. Le XXI. Mars après avoir gouverné l’Eglise du Perigord vingt & deux ans quatre mois, & vingt & un jour (en marge: 1059; Mort), il fut ensevely au susdict Mo­nastere de S. Front.

Audebert le Comte du Perigort son andagoniste (en marge: Comtes) estoit desja mort (en marge: Corl. chron. Engol.), n’ayant de gueres survescu son frère Elie, & je croy que ce fut un juste jugement de Dieu, que celuy qui avoit si hostilement traversé le bon Evesque & tout le Clergé, qu’il devoit honnorer comme ses peres, fut troublé après son decez par les siens pro­-

 

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pres: car laissant son fils Bernard pour héritier du Comté, son frere Bozon (en marge: Bozon, Com. du Perig.), Comte de la Mar­che, ne pardonnant au sang & à l’amitié qu’il devoit à son nepveu, s’usurpa le Comté du Perigord par toute voye d’hostilité (en marge: Meyn. 3 par liv. 9 arr.), depossedant son nepveu; & comme un malheur par une entresuitte preste la main à un autre, il perit peu apres par poison qui luy avoit esté donné (comme il est à croire) par ses propres parens, laissant son fils Elie Comte de la Marche & du Perigord. (bb)

 

 

Guillelmus de Monteberulpho, Evesq.

Guill. Geoffroy, Duc d’Aquitaine.

 

Ce n’est pas grand’ merveille d’estre bon parmy les bons: mais de se rendre recommandable en saincteté dans un siecle perverty (en marge:Chenu. Gall. Christ. ma. sc. S. Anthon.); c’est une belle rose remarquable parmy les frimats de l’Hyver, qui attire sur son tein presque miraculeux les amours & les yeux de tous. Je dis cecy en faveur du sainct Prelat Guillelmus (en marge: L’an de Jesus-Christ 1059), qui l’an 1059 incontinent apres le decez de Gerard print

 

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possession de l’Evesché du Perigord, estant desja recommandable par son extraction (en marge: Origine) prinse de la maison illustre de Montberon en Engoumois, de laquelle sont sortis plusieurs Evesques, principalement pour Engoulesme (en marge: Che. in tab. ep. Engol.), Robertus l’an 1255 & un autre Robertus l’an 1420. Mais encor nostre Evesque fut plus remarquable par sa saincteté qui reluisoit comme un Soleil dans un siecle tout ténébreux, Nous avons veu com­me l’an 1055 le Pape Victor fit remedier a la symonie (en marge: Symonies) qui gastoit presque tous les Evesques de France, mais le remede fut seulement palliatif, & ne couppa le mal à sa racine: car l’an 1075 le Pape Gregoire (en marge: 1075) considerant l’estat de tous les Evesques de France (en marge: Desordres), Allemagne & Italie en est presque à mourir de regret, comme il se lamante dans une de ses epistres (en marge: Greg. pap. epist. 49 lib. 2). A peine dict-il, vois-je des Evesques legaux en leur entrée, & en leur vie, gouvernans le peuple Chrestien par l’amour du Chrift, & non par l’ambition du siecle &c. Si qu’estant agi­té de diverses tempestes. Quoquo modo moriens vivo. Je vis en mourant aucunement & comme en regret (en marge: Regret). Parmy le petit nombre de bons Evesques François de ce temps il faut mettre le nostre, puis que Dieu l’honoroit par plusieurs mira­cles signalez, entr’autres que sa malediction avoit telle puissance qu’estant fulminée de sa bouche elle estoit confirmée visiblement du ciel par la punition: Dieu se rendant executeur de ses anathemes, quidquid maledicebat, a Domino erat maledictum dict le vieux manuscript (en marge: Ma. sc.) comme il

 

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parut lors qu’il estoit en ces quartiers de Villeboys, il donna sa malediction sur quelques moulins de la riviere de Nisone, j’en ignore la cause, au moins elle fut si juste devant Dieu, que tout d’un coup & moulin & meusnier, & tout l’attirail s’abismerent miraculeusement.

Depuis peu d’années l’on a faict rencontre dans quelques vieux sepulchres des Moynes Religieux de l’Abbaye de S. Front d’une rare­té, qui monstre la pratique de l’Eglise de ce temps-là: c’est une Croix de plomb (en marge: Croix de plomb, 1072) de la longueur de huict ou neuf poulces, dans laquelle d’un costé estoit gravé (en marge: Inscriptio plumbea 1072) SACRO FONTE BAPTISMATIS DONATVR ILLIANTE, ELIE VOCATVR, OBIIT AVTEM KALENDAS MAII ANNO DOMINI MILLESIMO SEPTVAGESIMO SECVNDO, REGNAN­TE PHILIPPO FRANCORVM REGE, & au milieu il y a un O. & une N. de l’autre costé d’icelle DOMINVS DEVS OMNIPOTENS QVI POTESTATEM DEDIT SANCTIS APOSTOLIS SVIS LIGANDI ATQVE SOLVENDI IPSE TE DIGNETVR ABSOLVERE F. ELIA A CVNCTIS PECCATIS TVIS, ET QVANTVM MEAE FRAGILITATI PERMITTITVR SIS ABSOLVTVS ANTE FACIEM ILLIVS QVI VIVIT ET REGNAT IN SAECVLA SAECVLORVM. De premier abord j’ay creu que c’estoit l’absolution de l’excommunication qui auroit esté donnée à Frere Elie natif d’Heilac en Perigord apres fon trespas: & ce suivant le stile de l’Eglise, qui pour donner de la terreur par l’excommu­nication , & specialement pour declarer aux

 

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fidèles qu’ils peuvent faire prieres publiques pour le deffunct qui estoit mort avec repentance de la faute pour laquelle il estoit tom­bé en la censure, sans pouvoir recevoir son absolution; l’Eglise pour le foro extérieur, comme on dict, se servoit de quelques céré­monies baillant l’absolution sur la sepulture: ce que les Docteurs apres le droict Canonique appellent absolvere mortum ab excommunicatione (en marge: Absolution d’un mort). Non que l’Eglise militante lie & deslie en sa propre signification ceux qui desja sont trespassez, comme il est amplement traicté dans le décret de Gratian (en marge: Dec. 2 p. caus. 24 q. 2), part. 2. caus. 14. quaest. II. cap. Damnationis, §. his auctoritatibus, mais en denonçant que les decedez sont morts fide­les, & que l’excommunication a cessé par la mort: remarque faicte par Covarruvias (en marge: Cova. in c. al. mat. § II n. 8), Ledesma (en marge: Led. 24 qu. 2 6 ar. I), Henriques (en marge: Henric. lib. 13 de exc. c. 25 § post.), Sayrus (en marge: Say. th. lib. I c. 8) & autres Canonistes: & pource non sans subject dans ceste Croix de plomb est faicte mention de son baptesme: car l’Eglise ne peut exercer sa jurisdiction punitive & relaxative sur d’autres que sur ceux qui luy sont subjects par le sainct Bap­tesme, comme le declare le Concile de Trente (en marge: Conc. Trid. S. 14 c. 2). Mais apres tout, dans ceste absolution gravée sur la Croix, je n’y remarque aucun mot d’ex­communication, & aymerois mieux dire que peut estre ceste marque estoit la communion & viatique d’absolution (en marge: Viatique), dont parle le (en marge: Conc. Arans. c. 3) Concile d’Aurange can. 3. qui recedunt de corpore poenitentia accepta, placuit sine reconciliatoria manus impositione

 

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cos communicare, quod morientis sufficit consolationi, secundum deffinitiones patrum, qui hujusmodi communionem congruenter viaticum nominarunt: Sur lequel passage deux doctes lumières de l’Eglise Gallicane (en marge: M. d’Orleans obs. II; M. Coiff. des noms de l’Euc. p. 239) ont de nostre temps remarqué que le mot de communion & viatique ne doit estre entendu de l’Eucharistie adorable (en marge: Viatique); veu que le Concile parle d’une sorte de communion qui estoit baillée sans la reconciliation qui se faisoit par l’imposition de mains, & neantmoins sans icelle on n’eust osé administrer les mysteres sacrosaincts. Partant on conclud que viaticum doit estre entendu en ce lieu tant seulement de labsolution, qui seule quelquesfois estoit donnée aux penitents, mesmes à l’article de la mort, sans administrer l’Eucharistie suivant les rigueurs de la primitive Eglise. Absolution & viatique qui en tesmoignage public de la repentance du decedé seroit pour lors esté gravée sur ceste Croix de plomb, & mise pour accompa­gner le mort au sepulchre.

Revenons à l’histoire, mettant la remarque de Papyrius Masso (en marge: Papir. Mass. lib. de not. episc.), qu’en divers temps plusieurs de Conciles d’Evesques furent assemblez dans le voisinage (en marge: Conciles), sans qu’il en soit faict mention dans les tomes des Conciles, ny par les Annalistes de l’Eglise. Entr’autres il rapporte par les epistres Conc. d’Ildebert (en marge: Hild. epist. Conc. Engol. anno 1060), que l’an 1060 un Concile fut convoqué à Angoulesme par Bertrand second du nom, Archevesque de Bourdeaux , avec les Evesques ses comprovinciaux, soubs la Presi-

 

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dence de Rogerius Cardinal Diacre: comme aussi que l’an 1079 du temps de Gosselin (en marge: 1079) aussi Archevesque de Bourdeaux (en marge: Conc. Burdig. anno 1079), il y assembla un grand nombre d’Evesques, tant suffragans qu’autres convoquez au Concile par Amatus Evesque d’Oloron & Vicaire du pape Gregoire septiesme qui y presida avec son adjoinct nom­mé Hugues Evesque de Digne en Provence, & ce pour arrester & mettre un frain au luxe des Clercs, & reformer leurs moeurs depravées. La Chronique Bourdeloise (en marge: Chronic. Burdig. anno 1095) met plus tard ce Concile l’an 1095. De plus il dict que l’année après il fut convoqué un autre Concile à Xaintes (en marge: Chenut. in Tab. Arch. Burdig.) par le mesme Legat Apostolique & mesmes Evesques. Il nous faut adjouster un Concile (en marge: 1073) tenu premier que ces deux derniers (en marge: Conc. Pictav. anno 1073), à sçavoir l’an 1073 l’Archevesque gosselin ayant assemblé ses Evesques à Sainct Maixant en Poictou contre les fauteurs de l’heresie de Bourges qui desja gastoit la basse Guyenne; nous conjecturons avec beaucoup de probabilité que nostre Evesque Guillelmus avoit seance dans ces Conciles, desquels je n’ay peu trouver les actes dans le thresor de l’Archevesché.

Durant le Pontificat de nostre Evesque (en marge: 1077) & l’an 1077 Guinamondus Moyne de l’Abbaye de la Chesedieu, tres-bon sculpteur de ce temps (en marge: Ma. sc. S. Anth.), fit une riche architecture (en marge: Scupture) dans le coeur de l’Eglise de S. Front sur le sepulchre du sainct Apostre. Iterius appellé Canonicus Divi Frontonis & Cellariarius, fournit aux frais pour ceste

 

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fabrique. Je ne sçay s’il faut conclurre de là que desja la secularisation eut esté faicte.

Je conjecture aussi qu’environ ce temps le Monastere de nostre Dame, de Castris, de la Chastre, de l’Ordre regulier de S. Augustin eut ses premiers fondemens (en marge: Fondation). Le bastiment de ses tours dont il a pris sa denomination monstre son antiquité (en marge: Fund. Abbatiae de Castris), & dans ses ruines prochaines, demande un bon Abbé qui rappelle la premiè­re ferveur de ses fondateurs. Je trouve dans l’ancien cartulaire du Dioceze (en marge: Cart. Episco. Petrac.) qu’il y avoit jadis ces dignitez, le Prieur Claustral, le Chantre, le Cellarier, & treize Moynes, avec plusieurs Priorez & Curez de la collation de l’Abbé en divers Diocezes. Je trouve ceste Abbaye avoir esté en ruine environ l’an 1440 à raison des guerres & malheurs dont nous parlerons.

En fin Guillaume de Montberon ayant gouverné l’Evesché (en marge: Ma. sc.) durant vingt ans, onze mois & trois jours (en marge: Meurt), rendit son esprit à Dieu le neufiesme Fevrier de l’an 1081 (en marge: 1081) & fut ensevely au lieu de sa naissance à Montberon dans l’Eglise de S. Alduric, laissant un general regret à tous ses enfans d’avoir perdu un si bon & si sainct Pre­lat, mais le mal fut flatté par le merite de son successeur. (cc)

 

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Reginaldus De Tyberio, Evesque.

Guill. Geoff. 8, Duc d’Aquitaine.

 

Dans le champ de l’Eglise (en marge: L’an de Jesus-Christ 1081) les lys & les roses y croissent a foison, la paix & la guerre ont leurs propres guirlandes & tousjours verdoyantes couronnes pour salarier les soldats de Jesus-Christ (en marge: V. Bed. S. 18 de sanct.). Il nous faut maintenant enlasser un tortis de fleurs de lys d’innocence, & de roses empourprées par le sang de ce glorieux Martyr Reynald, (en marge: Origine) de la noble maison de Tyviers (en marge: Chenut. Gall. Chri.): il nous ouvrira un champ assez ample pour escrire ses merites, lequel sera encor de plus grande estenduë (en marge: 1086) si nous prenons garde que l’an 1086 Guillaume Geoffroy Duc d’Aquitaine meurt (en marge: Annal. Aquit. 3 p. c. I; Chron. Burd.), laissant S. Guillaume son fils pere de Heleonor (en marge: S. Guillaume Duc d’Aquit.), pour estre le neufiesme Duc d’Aquitaine: car dans ces siecles infortunez nous verrons de grands schismes, revolutions & malheurs qui grossiront contre l’Eglise & l’estat de l’Aquitaine; & auparavant de nous embarquer au voyage d’outremer, remarquons premierement, (en marge: Cart. episc. Pet.) comme nostre sainct Evesque fit bastir l’Eglise de S. Jean de Colle (en marge: Fundation), le bourg de ce lieu prenant son

 

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nom de la riviere Colla, qui le traverfe: il y fon­da en suitte un Prioré Conventuel de Chanoi­nes Réguliers de S. Augustin, où jadis suivant la Pancarte estoient les Offices suivans, le Secretain, le Chantre, le Prevost, l’Infirmier, & l’Aumosnier. Le nombre des Religieux estoit de seize residents: jugez combien fut magnifi­que la libéralité de cét Evesque pour l’entre­tien & fondation de ce Chapitre.

Environ ce mesme temps (en marge: 1095), au rapport de Sigisbert (en marge: Chron. Sygisb. in fin.), un estrange mal fut presque general dans toute la France (en marge: Les Ardans), causé par un feu occulte qui brusloit & consommoit, au moins mutiloit & defiguroit les membres du corps. Contagion qui donna occasion à la charité d’un noble Viennois d’instituer l’ordre des Freres Servans à ces malades dans les Hospitaux, qu’il erigeoit, & d’autant que le secours des Reliques du grand S. Anthoine apportées à Vienne (en marge: Histoir. Anthon. p. 2 c. 33) estoit le plus souverain remede contre ce mal, les Religieux prindrent ce Sainct pour leur titulaire, portans pour marque sur leurs manteaux un T. le Perigord fut infecté de ce feu S. Anthoine, comme j’ay remarqué dans un manuscript vieux de plus de quatre cens ans, qui jadis servoit de Breviaire dans l’Abbaye de S. Martial de Lymoges (en marge: Brev. Lemo.), où sont rapportez quelques miracles de Sainct Front faicts en faveur de ces ardans ou bruslans; c’est pourquoy nous trouvons à Aubeterre (en marge: Fundation) une Commanderie de cét Ordre, qui a dans ceste province deux Priorez dependans.

 

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Il est temps de porter sa pensée sur les maux & calamitez (en marge: Maux des Levantins) que les pauvres Chrestiens de la Terre Saincte enduroient soubs la tyrannie du Roy de Perse & des Sarrazins, le rapport qu’un bon Ecclesiastique d’Amiens, nommé Pierre l’Hermite, en fit au retour de son pèlerinage, toucha tellement le coeur du pere commun de tout le Christianisme, qu’il indiqua un Concile à Clermont en Auvergne (en marge: Conc. Claremont. to. 3 conc.) pour y conclurre les remedes favorables pour secourir nos Freres du Levant. Ce fut donc le Pape Urbain second qui y venant en personne sur la fin de l’an 1094 (en marge: 1094) arriva à Lymoges (en marge: Plat. in Urb. 2), & le penultiesme jour de cét an, consacra l’Eglise Cathédrale de S. Estienne, & le premier de l’an 1095 (en marge: 1095) consacra l’Eglise Royalle de S. Martial avec grande magnificence (en marge: Chron. S. Mart.), & concours de plusieurs Prélats, Entr’autres de nostre Evesque Reginaldus. Il faut cependant prendre garde comme ceste dedicace n’est incompatible avec le Concile (en marge: Gall. Christ. in tab. epis. Lemo.) que nous avons dict cy-dessus l’an 1028 (en marge: Vide sup. anno 1028). De là ils se rendent a Clermont pour tenir le Concile la mesme année 1095 où parurent treize Archevesques avec leurs Evesques suffragans, & l’on y compta deux cens cinquante bastons Pastoraux (en marge: Concile). Platine dict (en marge: Plat. ibid.) que tous les Evesques de France y comparurent, au moins nostre Evesque n’y fit point defaut, & ce fut là que ceste divine arangue du Sainct Pere, faicte sur la miserable condition des Chrestiens de la Syrie mit le coeur au ventre d’une infinité de Seigneurs

 

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qui se croiserent, pour aller restablir par armes les Chrestiens en leur liberté; concluant par une affectueuse exhortation aux Prelats, à ce qu’ils se rendissent à leurs Eveschez pour porter leurs peuples à l’exécution d’une si saincte entreprise (en marge: Croisade).

L’on conclud aussi dans ce Concile trente-deux articles importans pour les moeurs du Clergé (en marge: Lamb. ep. Atrebat.), afin d’en bannir la symonie, le sacrilege & le concubinage (en marge: Bellef. lib. 4; Ann. Franc.). Je ne veux aussi obmettre que ce fut là qu’il fut commandé que l’Office & les Heures de nostre Dame seroient recitées dans l’Eglise; & afin d’advancer la resolution d’outre-mer, le Sainct Pere vint en personne visiter plusieurs Eglises d’Aquitaine (en marge: Ann. Aquit. 3 p.).

Desja toute sorte de peuples (en marge: 1096), de tous aages & de toutes conditions prennent la Croix, deslogent de toutes parts, ou soubs la conduite de plusieurs vaillans Capitaines, ou à la suitte de leurs Evesques, Prestres & Religieux (en marge: Guill. tyr. hist. sac. c. 25 lib. 3). Reynald nostre Evesque fut du nombre, prenant avec les siens la route vers Constantinople, qui estoit le general rendez-vous des Croisez. Godefroy de Billon ayant contrainct avec puissante armée l’Empereur Alexius fidele de nom: mais notablement infidèle aux vrais fideles de recevoir la paix avec les Occidentaux, passe vers l’Hellespont avec resolution de donner vers la Bithynie, où ayant subjugué la ville de Nicée, l’on pousse dans la Syrie, passant le pied sur le ventre à l’armée de Solimand, composée de trois cens soixante mille archers à cheval (en marge: Soliman défaict): &

 

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comme un torrent impetueux forçans plusieurs villes & places d’importance (en marge: Guill. Tyri. l. 4 c. 11), on vint en fin poser le siege devant Antioche (en marge: Siege d’Antioche) qui pour lors estoit gouvernée par Acxianus, en quoy Duplex (en marge: Duplex ann. t. 2) se semble, a esté trompé, disant que c’estoit Corbagath, lequel de vray fut envoyé par son pere Soliman avec une-très puissante armée de Sarrazins (en marge: Secours) pour fondre sur les nostres. Les nouvelles de cét effroyable orage qui venoit sur le camp des Chrestiens r’alluma leur courage (en marge: Tyr. li. 5 c. 14), tous se met­tent en devoir de soustenir le choc, & n’aban­donner leur entreprise. Les Ecclesiastiques ont recours aux prieres & larmes: nostre Evesque sçachant que la victoire sur les ennemis vient d’en-haut, commence à celebrer le divin sacrifice de la saincte Messe, & tandis qu’il estoit à l’Autel, dans ceste action sacrosaincte les ennemis donnent l’assaut si brusquement qu’ils for­cerent nos Chrestiens à ce rencontre (en marge: Ma. sc. S. Anth.), & parmy les boucheries sanguinaires, trouvent nostre sainct Pontife avec ses habits Sacerdotaux, le massacrent cruellement, luy tranchans la teste sur le mesme Autel où il disoit la Messe (en marge: Martyre): ainsi par son martyre il mésla son sang avec le sang de l’Aigneau sans tache Jesus, plus triomphant & annobly par la souffrance de ceste mort, que le vainqueur par sa première victoire, laquelle il achéta bien cherement: car nos Croisez se rallians donnent sur l’ennemy avec horrible tuerie, restans maistres de la ville d’Antioche, dont Bohemond Prince de Tarente & Normand de nation eut

 

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le gouvernement. Ainsi mourut (en marge: 1099) glorieusement le sainct Evesque le huictiesme Septembre l’an 1099 apres avoir gouverné le Dioceze dix-sept ans, quatre mois, vingt & un jour (en marge: Gall. Christ. in ep. Pet.): son corps fut inhumé à Sainct George de Romas, & nous rencontrons son nom parmy les Abbés de Sainct Martial de Lymoges estant surnommé Lastros. (dd)

 

 

Guillelmus de Albaroca, Evesque.

S. Guillel. IX, Duc d’Aquitaine.

 

Mais (en marge: L’an de Jesus-Christ 1099) comme tousjours les plus grandes prosperitez sont destrempées de malheurs inopinez, du­rant ces longs voyages & sieges nos Croisés ayant souffert beau­coup de disette, & tout d’un coup se trouvans dans l’abondance des provisions conquises sur les Sarrazins, se laissans aller à leur appétit, contracterent plusieurs maladies pestilentielles qui dans peu terrasserent plus de Chrestiens (en marge: Guill. Tyr. lib. 10 de bell. S. c. 12), que le glaive ennemy n’avoit faict par le passé. La mort d’Ademarus Evesque du Puy en Vellay (en marge: Ademarus Eves. meurt) porta un notable regret & perte (en marge: Odo de Giff.), qui pourtant revint au profit spirituel & bon-heur de ceste province du Perigord; damant que les nostres

 

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estans desja possesseurs des principales villes où les Chrestiens avoient d’autres fois conservé les precieuses reliques des souffrances de Jesus-Christ, rencontrerent par divine revelation le precieux fer de la lance qui avoit percé son costé adorable apres son trespas. De plus ce noble Evesque Eymard, comme il estoit puissant & signalé dans l’armée, avoit recouvert un des suaires où Jesus-Christ avoit esté enveloppé apres sa mort lors que Joseph d’Arimathie & Nicodeme rendoient à leur Dieu les honneurs funeraux (en marge: S. Suaire), linge sacré qui estoit le suaire honorai­re qui enveloppoit les autres linges qui estoient baignez de baume. Thresor sacré par la vertu duquel, mesme la maison des infideles avoit prosperé à veuë d’oeil, comme il est insinué dans le venerable Bede (en marge: Bed. tom. 3 lib. de loc. saint.), au livre De Locis Sanctis. Cét Evesque auparavant mourir le donna en garde pour le transporter de deçà à un sien Prestre le plus affidé, lequel estant sur mer pour son retour mourut dans la navire, laissant ce sacré depost entre les mains d’un Prestre du Perigord qui le porta à son Eglise (en marge: Porté en Perigord), où Dieu manifesta ce grand thresor par signalez miracles. L’ancien & autentique tiltre qui est aujourd’huy agraffé à l’Eglise de Cadouin (en marge: Inscript. tabell. in Abb. Cad.) nous apprend ce que dessus, disant que le sainct Suaire trouvé dans Antioche, AB EPISCOPO ANICIENSI, QUI IN PARTIBVS VLTRA MARINIS TRANSFRETAVERAT EST HABITVS, ET ILLVD IPSE MORIENS CVIDAM SVO SACERDOTI TRADIDIT, QVI CVM ESSET SVPRA

 

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MARE VENIENS ETIAM MORTVVS EST, RELINQVENS PRETIOSVM MUNVS CVIDAM CLERICO SERVIENTI SVO; HIC CVM ESSET IN FINIBVS PETROCHORENSIBVS , UNDE ERAT NATVS POSVIT DOMINICVM SVDARLVM IN QVADAM ECCLESIA SIBI COMMENDATA QVAE ERAT PROPE CADUNIVM SITA.

Apres la mort du Martyr Reynald, Guillelmus (en marge:1099) d’Auberoche, la mesme année avoit esté pourveu de l’Evesché du Perigord & Abbaye de S. Front.dans laquelle parut grandement le sainct & venerable Robert d’Asdebrezelo, fondateur des Dames de Frontevaux. Ce fut l’an mil cent quatorze (en marge: 1114), que ce docte & Apostolique Prédi­cateur monta en chaire en la presence de l’Evesque, & fit un si divin Sermon, qu’on le jugea digne de le recompenser par une donation (en marge: Donat. Cap. pro ord. font. ebra. Ma. Sc.) que fit l’Evesque & le Chapitre de S. Front d’une terre qu’ils avoient en propre au bourg de Cadouin pour y fonder un Convent pour des Religieuses de l’Ordre qu’il avoit institué: ausquelles de plus les Sieurs de Bainac, & de Biron donnerent ce qui est des biens laicques. L’année 1115 d’après (en marge: 1115) ceste place fut resignée par ledit Robert & par Petronille Abbesse de Frontevaux en faveur de Guido de Salis Docteur (en marge: Donation), intime amy de Robert (en marge: Cont. pro fund. Abb. Cadun.), puis qu’il l’appelle son fidèle compagnon fidele conserviteur au service de Dieu: il vesquit avec ses condisciples comme heremitiquement dans ce lieu, jusques à ce que l’an d’après (en marge: 1116) ils se mirent soubs la jurisdiction d’Henry

 

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Religieux de Pontigny, premier Abbé régulier de Cadouin: & a raison de ce, ceste Abbaye se recognoist la septiesme de la filiation de Pontigny, & l’onziesme de l’Ordre de Clervaux.

Ce fut là que ces saincts Religieux dans les commencemens de leurs premieres ferveurs menoient une vie Angelique: & Dieu voulut les consoler par le sacré thresor du sainct Suaire (en marge: Ma. Sc.). L’histoire en est telle; le bon Prestre qui l’avoit apporté estant absent de son Eglise champestre, le feu s’embrasa par tout le village du lieu, con­sommant le toict & tout ce qui estoit dans la pe­tite Eglise, sans que les voisins accourus à l’incende peussent arrester sa furie: neantmoins, ô miracle! (en marge: Miracle) tous prennent garde comme le feu n’osoit aborder le sacré escrain ou coffret qui estoit pres de l’Autel, Dieu renouvellant le mi­racle de la victoire qu’eut jadis le sainct Suaire sur les flammes, rapporté par Bede (en marge: V. Bed. tom. 3 de loc. Sanct.) au lieu allegué: les Religieux de Cadouin y accourent pour estre spectateurs de la merveille, & passans à travers les flammes enlevent ce joyau inestimable (en marge: Relique prinse), le portent à leur Monastere, auquel ce bon Ecclesiastique quelques jours apres vint faire ses humbles suppliques de luy rendre ce qu’il avoit apporté au péril de sa vie; & ne l’ayant peu obtenir, supplia affectueusment le Superieur de le recevoir au nombre de ses Re­ligieux; ce qu’ayant obtenu il consacra le restant de ses jours pour vivre & mourir aux pieds de ceste saincte Relique (en marge: Inscrip. tabell. in abb. Cad.); Apres son decez il fut en-

 

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sevely honnorablement dans le sepulchre qui releve deux pieds sur le pavé de la Chappelle de la Magdeleine, ce fut 1’an mil cent dix-huict (en marge: 1118) qu’ils commencerent à bastir l’Eglise qui est aujourd’huy sur pied, & fut parachevée & consacrée l’an mil cent trente-neuf. (en marge: 1139)

Revenons à l’an mil cent (en marge: 1100), nous souvenans comme l’un des motifs qui avoient obligé le Pape Urbain second (en marge: Conciles) de tenir le Concile à Clermont (en marge: Conc. clar. to. 3), fut pour remedier aux pechez (en marge: Guibert. lib. 2 c. 3), scandaleux par un double adultere du Roy Philippe, qui rejettant & exilant sa propre femme, avoit ravy Bertrande de Monfort femme du Comte d’Anjou, de laquelle il avoit eu deux enfans & une fille. Le Roy espouvanté par la foudre de l’excommunication quitta pour lors son adul­tere; Mais apres la mort du S. Pere il r’appella avec plus grand scandale sa concubine. Paschal second successeur à la chaire succeda aussi au zele Pastoral, envoyé en France les Cardinaux Jean & Benoist pour ses Legats, lesquels indirent un Concile à Poictiers (en marge: Conc. Pict. to. 3 anno 1100) au vingt-neufiesme Juillet de l’an mil cent, pour juger cét affaire, & reïterer l’exommunication contre le Roy (en marge: Notae Binii ex Baro. hoc anno num. 19), & il est plus que vray semblable que nostre Evesque y fut present: sur quoy les Annales de Dubouchet (en marge: Annal. aquit. 3 p. c. 2) citées par les Collecteurs des Conciles, & par Baronius, remarquent que le Duc Guillaume vouloit empescher ceste assemblée d’Evesques dans sa ville, comme de faict il leur com­manda de se retirer: mais en fin il acquiessa à la

 

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vision qui avoit paru à l’un des Legats du sainct Pere. Ainsi dans les conclusions de ce Concile nous y trouvons plusieurs bons reglemens presque conformes à ceux de Clermont, & le Collecteur des Conciles indique un second Concile de Poitiers (en marge: Conc. Pict. to. 3 anno 1109) tenu par les mesmes Legats l’an mil cent neuf (en marge: 1109), le premier de Decembre, contenant seize articles qui specialement visent ad reformandos mores Ecclesiae. Et certainement le desordre estoit grand pour lors en tous ces quar­tiers (en marge: Symonie), causé par la symonie & sacrilege usurpation des biens Ecclesiastiques, & trocque du bien du Crucifix; puis que si souvent & a tous ces Conciles les Evesques taschent d’arracher les malheurs qui attirerent le fleau de Dieu sur plusieurs endroits, notamment sur le bourg & Abbaye du Puy S. Front, laquelle tout d’un coup en punition des pechez fut embrasée d’un grand feu (en marge: Incende), si violent que les cloches se fondi­rent au clocher, & encore aujourd’huy l’on re­marque en plusieurs endroits de l’Eglise du costé de l’Abbaye, les marques d’un grand incende qui reduisoit voire les pierres en cendres: voicy les mots d’un vieux & asseuré manuscript (en marge: Ma. Sc. S. Anth.). Hoc tempore burgus Sancti Frontonis Monastenum cum suis ornamentis repentino ïncendio, peccatis id promerentibus constagravit, atque signa in clotario igne soluta sunt, erat tunc temporis monasterium ligneis tabulis coopertum.

Callixte second l’an mil cent vingt (en marge: 1120) estant promeu au Pontificat (en marge: Galt. in Chro. in Calix.) donna au siege Archiepis-­

 

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copal, de Vienne la primauté sur six provinces & sieges Archiepiscopaux, de Bourges, de Bourdeaux, d’Aux, Narbonne, Aix & Aubrun (en marge: Privileges), il donna aussi un Bref à nostre Evesque Guillelmus (en marge: Lib. hom. Episc.), par lequel il confirma a son Eglise tous les privileges faveurs & indults qui luy avoient esté donnez par Paschal second.

L’Eglise du glorieux Confesseur Avitus (en marge: Vide Anno 507) dont nous avons parle aux siecles passez fut consacrée par nostre Evesque Guillaume (en marge: Consecration d’Eglise), l’an mil cent dix-sept (en marge: 1117), comme nous lisons dans l’inscription gravée dans la muraille près de l’Autel qui est à costé droict (en marge: Inscript. lap. anno 1117), ANNO M. CXVII. GVILLELMVS EPISCOPVS PETROCHORICENSIS DE ALBA RVPE IN HONOREM BEATI IOANNIS BAPTISTAE ET SAN. IOAN. EVANG. SEXTO KALENDAS IANVARII HOC ALTARE CONSECRAVIT.

L’année d’après (en marge: 1118) le corps de ce sainct Anacho­rète Avitus, qui avoit esté ensevely & reposoit depuis cinq cens ans dans l’Eglise qui est au pied de la montagne, fut transferé à ceste nouvelle Eglise suivant l’inscription gravée (en marge: Inscript. lap. anno 1118) au costé droict ANNO MILLENO CENTENO TERQVOQVE SENO, AD MONTEM SANCTI TRANSFERTVR CORPVS AVITI.

Il est aussi averé que cét Evesque benist & consacra le Cemetiere pour les pauvres (en marge: Cemetiere) qui est au delà le pont de la ville de Périgueux, vers la riviere de l’Isle. Plusieurs avoient mis sa mort l’an mil cent vingt-trois (en marge: 1123): mais je suis contraint (en marge: Ma. Sc. S; Anth.) de luy prolonger la vie de cinq ou six ans pour un oeuvre tout sainct & religieux.

 

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Desja dés quelques années plusieurs bons Ecclesiastiques s’estoient retirez dans un desert prés de Périgueux, où estoit une fontaine close de grilles de fer, appellée Fons Cancellatus. Ils vivoient là soubs la direction de Folcaudus Abbé de Sellefroin (en marge: Fondation), qui s’estoit associé avec ces hommes de bien pour vivre heremitiquement & pauvrement, n’ayans pour Eglise qu’un petit Oratoire basty de terre & de bois à l’honneur de la Vierge Marie, prés de la fontaine qui dans peu donna le nom à l’Abbaye (en marge: M. Sc. Abb. Canc.): car l’odeur de leurs rares vertus parvint à l’Evesque, qui trouva bon d’agréer la supplique qu’ils luy font (en marge: Abbé), demandans pour Abbé un de leur corps, nommé Geraldus de Montelauduno, lequel il consacra vo­lontiers dans le petit Oratoire pour leur Abbé, & print tellement à coeur ce lieu devot, qu’il y donna souvent les Ordres sacrez , leur benist un Cemetiere tout contre, & pour leur entre­tien leur donna l’Eglise de Beurona, & le lieu de Bord (en marge: Donation), apres y avoir beny le Cemetiere prés duquel cét Abbé fit bastir l’Eglise qui aujour­d’huy est sur pied, & y celebra depuis la pre­mière Messe en la presence du Seigneur Evesque.

Mais apres tout ceste Chappelle & Oratoire basty de terre estoit trop à l’estroit pour ces bons Moynes, il fallut desseigner un nouveau & plus ample edifice (en marge: M. Sc. Abb. Canc.): Ce fut l’an mil cent vingt-huict (en marge: 1128), Domino Guillelmo de Albarupe venerabili Episcopo Petrachoricensem Episcopatum pro-

 

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curante. Ainsi parle l’ancien Cartulaire de l’Abbaye duquel nous apprendrons le nom des pre­miers Religieux qui baillerent le commence­ment à l’Abbaye de Chancelade (en marge: Premiers fundateurs). In nomine summae individua sanctae Trinitatis Patris & Filii & Spiritus sancti, & in honore beatae & gloriosae semper Virginis Mariae genitricis Dei, & Domini nostri Jesu Christi, & in honore sanctae Mariae Magdalenae, atque omnium sanctorum. Bonae memoriae Geraldus de Montelauduno, Venerabilis & primus Abbas de Cancellata, & frater Gerardus Bernardi sacerdos, primus ejusdem loci prior, & frater Helias sacerdos, qui postea fuit secundus Abbas, & Geraldus de Cauze sacerdos, & frater Folcherius Archans sa­cerdos, & frater Gerardus Ranulphi sacerdos, & frater Elias Laoudries Laicus, & frater Gerardus Guiberti Laicus, & frater Guillelmus de Mallesec dignus memoriae Laicus, Monasterium de Cancellata divina virtute & auxilio roborati aedificare coeperunt, atque in festivitate Sanctorum Apostolorum Petri & Pauli quam Catholica Ecclesia tertio Kalendas Julii venerabiliter toto orbe celebrat, magno gaudio spirituali repleti primos lapides in fundamento hujus aedificis in Deo omnium bonorum cum majore firmitate sperantes, posuerunt, anno ab Incarnatione Domini 1128 indictione septima, &c (en marge: Fund. Abbatiae Beatae Mariae Cancell.). Quelque temps apres l’Evesque du Perigord mourut le second d’Avril, & fut ensevely dans 1’Eglise de S. Front (en marge: 1128).

Pour ce qui est du comté du Perigord (en marge: Helie Comte du Perigord), il y avoit grande contraste entre Elie fils de Bozon Comte

 

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de la Marche, & Bernard legitime heritier du Comté (en marge: Comté) que son oncle avoit ravy à son pere Audebert (en marge: Corle. Chron. Engol.). Et le bon-heur fut pour arrester ceste discorde que Elie estant laissé jeune, eut pour curateur Sainct Guillaume Duc d’Aquitaine (en marge: S. Guillaume, Duc d’Aquit.), qui mit la paix entre les deux cousins germains, ordonnant que le Comté de la Marche demeureroit à Bernard, & que Elie seroit Comte du Perigord (en marge: Arrest. Meyn. 3 p. l. 9.), partage un peu injuste, advantageant Elie estranger sur le Seigneur naturel. (ee)

 

 

Guillelmus de Nauclard, Evesque.

S. Guillau. IX, Duc d’Aquitaine.

 

Cependant (en marge: L’an de Jesus-Christ 1130) un grand & no­table malheur se prepare contre l’E­glise d’Aquitaine, dans lequel nous serons enveloppez par la faction du Duc Guillaume: lequel favorisant Roger le Normand & l’Antipape Anaclet (en marge: Vit. S. Bernard lib. 2 c. I) contre le vray Pape Innocent second, causa un notable schisme dans l’Eglise (en marge: Schisme), les uns tenant le party de Pierre Leon surnommé Anaclet, les autres d’Innocent (en marge: Du Bouch. annal. Aqui. 3 p.). Mais ce qui attisa davantage cét incende fut Gerard Evesque d’Angoulesme qui avoit esté

 

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faict Legat Apostolique par le Pseudopape. Cettuy-cy se servant de l’authorité du Duc sur les Evesques d’Aquitaine, en avoit tiré plusieurs du voisinage à son party, espouvantez par la cruauté qu’il exerçoit sur les Evesques contretenans lesquels il n’avoit peu fleschir (en marge: Pet. Clu. lib. 2 mira. c. 14), d’autant qu’ils portoient trop à contre-coeur, que l’innocence fut opprimée en la persecution d’Innocent, & que l’abomination fut erigée dans la maison de Dieu, comme parle S. Bernard (en marge: Bern. ep. 124). Ainsi Guillau­me Evesque de Poictiers, Eustorgius de Lymoges & Guillelmus de Nauclard nostre Evesque, demeurerent inebranlables à la rage de ce meschant Semei (en marge: Ann. Aquit. 3 p. c. 2), faux Legat d’un faux Pasteur: mais aussi exposez à la furie du Duc d’Aquitai­ne qui les malmema au possible, les chassa de leurs Eveschez, mit d’autres en leurs places, apres mille outrages & violences.

Pour remede souverain à tous ces malheurs Dieu se voulut servir du grand & non jamais assez loüé S. Bernard (en marge: Vit. Bern. lib. 2), lequel espousant la querelle de Dieu offensé en la personne de son Lieutenant (en marge: S. Bernard), à la prière de plusieurs gens de bien se porta à Rome pour adoucir par paroles ce meschant Diotrephes qut desiroit tenir le haut bout parmy nous: mais n’ayant peu r’amollir ce coeur de Pharaon s’en revint en France, & sçachant l’oppression que Gérard, pour le spirituel, & Guillaume pour le temporel donnoient à nos Eves­ques deffenseurs de la Justice il leur escrit pour consolation l’epistre cent vingt fix, l’une des

 

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plus eloquentes qui jamais sortit de ceste plume dorée (en marge: Les console), dont voicy le tiltre. Domninis & Patribus honorandis Lemovicensi, Pictaviensi, Petrachoricensi, & Xantonensi Dei gratia Episcopis sanctis, frater Bernardus Abbas dictus de Claravalle Constantiam in adversis (en marge: Bern. ep. 126). Il sembleroit presque necessaire de la mettre icy tout au long, n’estoit sa prolixité, en voicy quelques traicts les plus remarquables traduits en François, commence ainsi. La vertu s’acquiert par la paix, s’esprouve par l’angoisse, est approuvée par la victoire: Il est temps que la nostre se fasse voir maintenant, si tant est qu’il y en ait en vous, elle ne peut demeurer oyseuse. Mes Reverends Peres, & dignes d’honneur: car le glaive de l’ennemy qui en ce temps semble derechef menasser de mort le corps de Christ est pointé speciale­ment sur vos testes, & rage contre vous d’autant plus vivement, qu’il vous attaque de plus prés: si que vous estes contraints ou de resister courageusement, ou de ceder honteusement aux insultats journaliers, &c (en marge: Oppressions). Peu après il leur explique la cause pourquoy Gerard d’Angoulesme avoit abandonné Inno­cent, pour se ranger à l’Antipape, d’autant qu’il avoit esté honteusement refusé de la legation qu’il luy avoit demandé, l’ayant acheptée par symonie du faux Pape, par laquelle puissance il les depossedoit & vexoit à outrance (en marge: Ambition ridicule). Maintenant, dict-il (en marge: ibidem), ce nouveau Legat forge de nouveaux Evesques, afin que son Pape ne soit Pape pour soy seulement, ne mettant pas des successeurs aux deffuncts, ains s’appuyant de sa puissance tyrannique il intruse

 

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des invaseurs sur les vivans, prenant l’occasion de la malice des Princes, qui haissent à mort les Evesques de leurs villes. Au surplus il accuse le faste de ce partisan d’iniquité, lequel, dict-il, est à blasmer en tous, mais specialement à un Evesque. Ambition qui l’eslançoit à deposseder ceux qui ne vouloient fleschir le genouil devant la beste qui avoit ouvert la bouche pour blasphemer le nom du Seigneur & son sainct tabernacle (en marge: Apocal. 13). Voila les couleurs dont il peint ceux qui opposoient Autel contre Autel, Evesques contre Evesques, Abbex. contre Abbez, opprimant les Catholiques, advançant les Schismatiques. Mais après tout il asseure ces Prelats comme la plus grand part, voire tous les vrais Superieurs de la chrestienté recognoissoit Innocent pour legitime Pasteur, desquels il faict un long denombrement (en marge: Obeissans), adjoustant encore les plus celebres Abbayes, & parmy ceux de son ordre il nomme Cadumenses, lesquels je conjecture, avec le commentateur de ses epistres (en marge: Not. F. J. Picard. in epist. S. Bern.), avoir esté les Religieux de l’Abbaye de Cadouin qui pour lors estoient en odeur de saincteté, sans recourir en Normandie à l’Abbaye Sancti Stephani Cadomensis. Enfin S. Bernard conclud ceste epistre par une forte exhortation à ces bons Evesques pour perseverer à la deffense de la cause de Jesus-Christ (en marge: I. Cor. I), La vertu & sagesse duquel estoit avec eux, qui ne permettrait pas qu’ils fussent esprouvez au delà de leurs forces.

Ce ne fut que les commencemens des travaux de Sainct Bernard (en marge: Conc.), il s’employa à ceste

 

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reunion durant sept ans, avec un très heureux succez. Le Pape Innocent chassé de Rome vint en France, assemble en divers lieux plusieurs Conciles pour dissoudre ce schisme (en marge: Conciles). Le premier fut tenu à Clermont en Auvergne (en marge: Claromo. anno 1130 t. 3 p. 2), composé des Evesques des Gaules & de Germanie (en marge: Otto friginsen. l. 7 c. 18), l’an mil cent trente (en marge: 1130). Les Annales d’Aquitaine (en marge: Ann. Aquit.) remarquent que specialement les Evesques de Lymoges & Poictiers depossedez par le Pseudolegat y assisterent; jugez si nostre Evesque en estoit absent? pour condamner avec tous les Peres Pierre de Leon, & recevoir le Pape Innocent, lequel vint à Orleans, fut accueilly par le Roy de France Louys le Gros, la Royne & ses enfans (en marge: Vinc. lib. 27 c. 6). Par apres (en marge: 1131) le sainct Pere fit assembler un Concile à Estampes (en marge: Contre l’antipape), qui fut conclu par son approbation (en marge: Conc. stanp. ann. 1131), comme vray Pape. L’année d’après le sainct Pere en tint encor un plus general à Rheims, auquel suivant la remarque de Robert qui continuë la Chronique de Sigisbert (en marge: Rob. con. Sygis.), ab omnibus Galliae & Germaniae Episcopis, Petrus Antipappa anathematizatur. Peu apres Geoffroy est envoyé en Guyenne, comme Legat Apostoli­que du Pape Innocent, par l’authorité duquel & l’exhortation de S. Bernard (en marge: Vit. S. Ber. lib. 2), accompagnée de signes & prodiges miraculeux, le Duc d’Aquitaine Guillaume se remet à l’obeyssance de l’Eglise, r’establit les Evesques depossedez (en marge: Retour).

Pour lors le Perigord receut le sien à bras ouverts, & plusieurs ressentirent les effects de son zele, specialement les Moynes de Chance-

 

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lade ausquels il bailla plusieurs tesmoignages d’amitié, consacrant plusieurs Autels dans leur nouvelle Eglise (en marge: Ma. Sc. Cancell.): celuy qui est au costé gauche, in nomine summi, & omnipotentis Dei, & in honorem beatorum Apostolorum Petri & Pauli & omnium Apostolorum (en marge: Dedicace). Quelques années apres celuy du costé droict , in nomine Dei omnipotentis, & in honorem beati Protomartyris Stephani, & sancti Laurentii, & sancti Vincentii, atque omnium Sanctorum. De plus il choisit souvent ce lieu pour y conferer les Ordres sacrez, & pour l’entretien de l’Abbaye, leur donna l’Eglise Sancti Sulpitii & Sanctae Innocentiae (en marge: Voeux solamnels). Tandis que l’Abbé Gerard de Montleau cultivoit à la pieté ces nouveaux Religieux, animez par sa saincte parole, ils prennent resolution de voüer entre ses mains la vie religieuse soubs l’Ordre canonical & re­gulier de Sainct Augustin. (en marge: 1133) Ce fut l’an mil cent trente-trois jour de Sainct Pierre & S. Paul, auquel estat ils perfevererent presque tous en odeur de saincteté jusques à la fin.

Revenons au Pape Innocent, qui passe en Italie (en marge: 1134): estant à Pise l’an mil cent trente-quatre il assemble tous les Evesques de l’Occident au rapport de la vie de S. Bernard (en marge: Bernard. in Vit. S. Ber. lib. 2 ca. 2), & quoy que les actes de ce grand Concile soient perdus (en marge: Concile), neantmoins nous avons tesmoignage que nostre Evesque Guillelmus de Nauclard y fut present pour la quatriesme ou cinquiesme condamna­tion d’Anaclet, & reception d’Innocent.

Mais si l’assemblée de tant de nobles Prélats

 

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& leurs conclusions avoient esté triomphantes pour toute l’Eglise, le retour du voyage de ce Concile fut tout autant funeste pour l’Eglise de France (en marge: Tyrannies), a raison des soldats inhumeins qui favorisoient la tyrannie de Conrad, usurpateur de l’Empire sur Clotaire. Ces desnaturez se ruerent sur les sacrées trouppes des Peres du Concile qui s’en revenoient en France, les pillerent, blesserent, massacrerent, les firent prisonniers pour les rançonner, au grand scandale de la Chrestienté. Nostre Evesque de Nauclard fut enveloppé dans ceste calamité, comme nous apprenons de Pierre Abbé de Cluny, l’un des prisonniers, qui au nom de tous escrit au sainct Pere une missive qui arra­che les larmes des yeux du lecteur (en marge: Pet. Cluniac. lib. 3 Epist. 27). Spectacle horrible, dict-il, de voir tirasser, dissiper, blesser, & poursuivre de toutes parts avec les espées, des grands personnages si necessaires à l’Eglise de Dieu; plusieurs des Evesques & Abbez furent violemment traisnez, aux prochaines places, & quelques uns d’iceux après avoir esté battus & blessez, furent jettez. en prison par une cruauté barbare. Entre lesquels Monseigneur de Rheims ayant receu beaucoup de blessures & de playes, est tenu renfermé dans une tour, sans avoir esgard ny à son aage, ny à sa dignité; l’Evesque de Perigueux a esprouvé choses semblables, &c. adjoustant de plus l’infortune de plusieurs Evesques du voisinage.

Mais Dieu jugeant que nostre Evesque nous estoit encore necessaire (en marge: Ma. Sc. St. Anth.) le nous conserva & ren-

 

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dit à son Dioceze, pour esprouver une rebellion estrange, ou sedition qui arriva (en marge: Sedition) contre l’Abbaye de S. Front par la faction du Comte de Perigord Elie Rudel, fils putatif du feu Comte Elie (en marge: Elie Rudel Comt. du Perigord), lequel animant les bourgeois se met en teste d’une trouppe armée, va enfoncer & brusler les portes des greniers qui estoient dans les Cloistres, pille & enleve tout le grain gardé pour la nourriture des Religieux: action si noire que sa propre mere la Comtesse Guasconia en punition de son fils, fit une action qui est bonnement sans exemple: car n’estant retenuë de son propre honneur & interest, au jour de la Cour Ecclesiastique, suivant les formalitez de ce temps: elle vint en face de l’assemblée declarer au Sieur Evesque, que Helie Ru­del son fils naturel n’estoit fils legitime du feu Comte Elie son mary (en marge: Vangeance extraordinaire), ains bastard, conçeu d’adultere, & partant elle demandoit son ex-heredation.

Je trouve aussi que cét Evesque pour la collation des Ordres sacrez (en marge: Ma. Sc. ibid.), primus instituit fieri scrutinium in sacris ordinibus. J’advoüe ne pouvoir comprendre ce Scrutinium, quand bien il s’entendroit de l’examen aux Ordres sacrez, qui suivant les Conciles estoit auparavant en pratique: non plus aussi puis-je sçavoir quelle fut ceste sienne ordonnance, Ut omnes agricolae darent Convivium pro pace obtinenda (en marge: Annal. Aquit. p. 3 c. 3).

Portons maintenant nostre pensée sur le Duc d’Aquitaine Guillaume (en marge: S. Guillaume), de loup devenu plus

 

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doux qu’un aigneau, qui pour penitence d’avoir mal-traicté nos Evesques,. estant à Galice dissimule une maladie, comme disent les Annales d’Aquitaine (en marge: Dup. to. 2 sub. Claud. Crass.), & par la feinte de sa mort se retire à Rome au S. Pere: de là en Hierusalem pour vivre dans le desert en Anachorete. Auparavant sa retraite il faict son testament, donne à Louys le Jeune fils du Roy Louys le Gros le Duché de Guyenne (en marge: Louys le Jeune, Duc d’Aquitaine), à condition qu’il espouseroit sa fille Heleonor: article qui fut receu avec un general applaudissement. Le Roy envoye son fils en Guyenne, arrive à Bourdeaux, celebre le mariage: ainsi le Duché d’Aquitaine (en marge: Duché) fut derechef uny à la Couronne de France: car Louys le Jeune dixiesme Duc, estoit dés quelques an­nées sacré pour Roy de France par le Pape Innocent second au Concile de Rheims dont nous avons parlé.

Ce jeune Prince voulant captiver les bonnes graces du Clergé leur donna une ample descharge & exemption du droict des regales par une Pancarte (en marge: Donation des regales) que du Bouchet dict avoir veu & leu en son original (en marge: Dubouc. ibid.), Choppin la rapporte tout au long (en marge: Choppinus lib. I de sac. polit.), Baronius aussi (en marge: Baro. anno 1134), Pasquier dans ses recherches l’attribue premièrement à son pere Louys le Gros (en marge: Pasquier rech. de fra. lib. 3 c. 31), elle est concleuë en ces mots (en marge: Chenut ex. Chopp.), In nomine sanctae & individuae Trinitatis, Amen. Ludovicus Dei gratia Francorum Rex tibi dilecte in Domino Gaufride Burdigalensis Archiepiscope, cum suffraganeis Episcopis Raymondo Agennensi, Lamberto Engolismensi, Guillelmo Xantonensi, Guillelmo

 

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Pictaviensi, Guillelmo Petrachoricensi, nec-non Abbatibus Burdigalensis Provinciae, vestrisque successoribus in perpetuum, &c. Leur donnant pouvoir d’eslire les futurs Archevesques, Evesques, & Abbez de ladite Province de Bourdeaux sans le congé du Roy ny de ses successeurs, Datum Parisis in palatio nostro, anno Incarnationis M. C. XXXVII (en marge: 1137). Pasquier dict que la mesme remise fut confir­mée par son fils Louys le Jeune en la mesme année estant à Bourdeaux, d’où il conclud que le droict de regale devoit appartenir aux Ducs d’Aquitaine durant leur souveraineté.

Ce mariage avoit de trop heureux commencemens pour une suitte si sanglante & funeste (en marge: Ma. Sc.). Arrestons la vie de cét Evesque en l’année d’a­près ce traicté (en marge: Meurt), le vingt-neufiesme Decembre mil cent trente-huict (en marge: 1138), il fut ensevely en l’Eglise de l’Abbaye de S. Front. (ff)

 

 

Gaufridus de Cauzé, Evesque.

Louys VII, Roy de France

& Duc d’Aquitaine.

 

Geoffroy de l’ancienne & noble maison de Cauzé (en marge: Gall. Christ.; Chenut) fut successeur de l’Evesché la mesme année (en marge: L’an de Jesus-Christ 1138) du decez de Guillelmus. Il ne tint que deux ans la

 

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chaire Episcopale, & pour ce peu de temps il laissa assez de ses marques, tant en ses bastimens, que pour le bien du Clergé (en marge: Zele): specialement tesmoignant son affection envers les Ordres reli­gieux. Pour-lors les Chevaliers du Temple estoient desja celebres par le secours & service religieux qu’ils rendoient aux pelerins du sainct Sepulchre (en marge: Guill. Tyri. lib. 12 c. 7), & dans ce peu de temps depuis leur establissement ils s’estoient rendus redoutables aux infidèles par leurs heureux exploicts d’armes (en marge: Templiers), & recommandables aux Prélats de toute la Chrestienté (en marge: Roderigues de orig. templ.): si que tous à l’envy leur donnoient du fonds pour s’establir soubs le nom des Frères de la Milice du Temple. Ils vindrent en Perigord du temps de cét Evesque qui leur donna l’Eglise de S. Maurice d’Andrivaux (en marge: Ma. Sc. S. Anth.), auquel lieu avoit esté basty jadis un Monastere de Religieuses (en marge: Fondation), qui par le laps du temps vivans trop libertinement avec un notable scandale de leur incontinence, avoient enfin aban­donné la closture. Les Religieux Templiers, qui pour lors estoient en bonne odeur de zele & vertu, comme nous pouvons voir dans le Concile de Troyes (en marge: Concil. Trec. to. 3) en Champagne, furent envoyez pour le repeupler.

Cét Evesque à l’imitation de ses predecesseurs continua ses affections envers l’Abbaye de Chancelade (en marge: Ma. Sc. Cancell.), pour laquelle il consacra le se­cond Abbé Elie, lequel fit bastir l’Eglise qui est au lieu nommé Delandia (en marge: Donation), dans laquelle l’Evesque Geoffroy dict la première Messe, & y benit

 

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un Cemetiere. Il unit aussi à l’Abbaye le lieu de Merlandia, avec toutes ses appartenances: & apres avoir gouverné l’Eglise du Perigord du­rant deux ans huict mois & onze jours, il mou­rut le vingt-huictiesme Aoust de l’an mil cent quarante-deux (en marge: 1142). Il fut ensevely en la mesme Eglise que ses predecesseurs (en marge: Ma. Sc. S. Anth.). (gg)

 

 

Reymondus de Maiolio, Evesque.

Lovys Le Jeune, Duc d’Aquitaine.

 

Les merites de Raymondus de Maiolio le firent trouver digne de succeder à Geoffroy (en marge: L’an de Jesus-Christ 1142), & augmentans de plus en plus l’esleverent jufques à l’Archevesché de Bourdeaux (en marge: Chenut Gall. Christ.), aussi estoit-il tres-bon Prelat, tout pieux & de bon genie; en voicy des marques par l’affection qu’il portoit aux Religieux de Chancelade (en marge: Affection), ausquels il bailla & annexa à leur manse les Eglises de S. Martial de Artentia, de S. Sernin de Blis, & de S. Vincent (en marge: Ma. Sc. Cancell.): consacra leur Eglise qui est hors l’Abbaye (en marge: 1147), In nomine sanctae & indiuiduae Trinitatis, & in honere beati Joannis Bapt. & Sancti Frontonis Patris nostri, anno Domini 1147. quarto

 

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idus Octobris (en marge: Dedicace). De plus il celebra la première Messe en leur Eglise de Marnac, y benit le Ce­metiere. Mais le plus signalé bien-faict qu’ils receurent de sa main fut la pretieuse Relique d’une pièce de la vraye Croix qui luy avoit esté envoyée par Fulcherius faict Patriarche de Hie­rusalem ceste mesme année mil cent quarante-sept (en marge: Reliques). L’inscription ancienne gravée sur une petite lame d’argent, attachée sur la Croix qui sert de Reliquaire dict ainsi (en marge: Inscript. lam. argenteae), HAE SVNT RELIQVIAE QVAS MISIT FVLCHERIVS PATRIARCHA HIEOROSOZOLIMITANVS REYMONDO PETRACHORICENSI EPISCOPO.

Ce Fulcherius estoit natif d’Aquitaine, jadis Abbé de la Selle à Poictiers (en marge: Guill. Tyri. lib. 16 c. 1), & n’agueres avoit esté pris de l’Evesché de Tyr , & durant le temps qu’il tenoit ce Siège à sçavoir l’an mil [cens] quarante-six (en marge: 1146), un Concile avoit esté tenu à Chartres, auquel Louys le Jeune Roy de France avec Eleonor, se croizerent pour la conqueste de la Terre Saincte (en marge: Sugerius), & partirent l’année dapres avec tel nombre de Seigneurs, specialement des Aquitaniens, que les villes & chasteaux, à ce qu’escrit S. Bernard (en marge: Bernard. ep. 246), demeurerent vuides. Il est vray semblable que le present du bois sacré de la Croix fut envoyé & apporté à nostre Evesque au retour de ce voyage d’outremer.

Retour (en marge: 1152) qui ne fut si triomphant ny si heureux que le départ: car ce Roy Louys le Jeune (en marge: Annal. Gall.) couvoit en son coeur la répudiation de sa femme Heleonor (en marge: Repudiation), malheur funeste à la France, conçeu

 

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soubs je ne sçay quels ombrages de desloyauté. En fin le maltalent esclate: il assemble à Bougency les Princes de son Royaume, convoque plusieurs Archevesques & Evesques, speciale­ment il prie Geoffroy Archevesque de Bour­deaux de s’y rendre avec ses Evesques suffragans.

L’Archevesque (en marge: 1152) pour sçavoir plustost l’inclination de ses Evesques & leur sentiment sur un cas si extraordinaire les assemble à son Concile (en marge: Conc. Burdig.), & apres quelque contraste qui y intervint sur la presseance qui fut adjugée à Lambert Evesque d’Angoulesme (en marge: In tab. episc. Engol. Corl.), on conclud de se servir d’un secret non cogneu à tous (en marge: Conciles), si tant est qu’il fallut venir au mal de la dissolution du mariage (en marge: Chron. Burdig.): de là ils se rendent au Concile de Bougency (en marge: Conc. Bogenc. ex Abb. Sugerio), où la proposition de ce divorce & rupture de mariage fut impugnée au possible par Geoffroy & les siens, qui soustenoient le party d’Heleonor; mais l’oppression donnant la Loy, il proposa son expedient pour dorer la pillule, & ne ren­dre ceste separation si douleureuse, maintenant avec ses Evesques, qu’il y avoit parenté entre le Roy & la Royne du costé de pere & mere dans les degrez prohibez par l’Eglise, ce qu’ayant clairement & moyennant serment verifié, l’on condud la solution du mariage qui fut confir­mée par le Pape Eugene troisiesme. Le Duché d’Aquitaine revenant à Heleonor; elle s’y retira, & bien tost apres condud un second mariage (en marge: Thom. Vualfing.) avec Henry Comte d Anjou, & Duc de Nor­mandie (en marge: Ducs Anglois)

 

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mandie declaré heritier du Royaume d’Angle­terre, auquel il parvint dans deux ans; ainsi le Duché d’Aquitaine passe à la Couronne d’Angleterre (en marge: Ann. Aquit. 3 p. c. 4).

Fascheux eschange (en marge: 1153), de perdre son Seigneur naturel pour subir les loix & caprices d’un estranger (en marge: Henri Roy d’Angleterre & Duc d’Aquit.); qui nonobstant toutes ses protestations vouloit abolir toutes les franchises & immunités que les Roys & Ducs precedents nous avoient donné, comme il parut bien tost, après le decez de ce grand personnage (en marge: 1158) Gaufridus Archevesque de Bourdeaux l’an 1158 (en marge: Chenu. in Tab. Archiep. Burd.). Pour lors il y eut un debat & presque sedition (en marge: Debats) pour l’élection d’un successeur, les Evesques & Chanoines voulans jouyr des privileges donnez par Louys le Jeune, & son pere Louys le Gros: & à ce que le mal n’empirast par sa course (en marge: Compromis), on arresta par compromis que celuy que les Evesques d’Angoulesme, de Poictiers, de Perigueux & d’Agen nommeroient seroit receu pour Archevesque (en marge: Vide sup. anno 1137).

Ces Evesques estans assemblez a Bourdeaux (en marge: Chron. Burdig.), le Roy d’Angleterre Henry second, & mainte­nant nostre Duc, esperant par authorité mener à sa volonté ces Pères, leur propose, avec recommandations & prieres Jean Sochius, Principal du Collège de Poictiers (en marge: Corl. in Tab. Episc. Engol.), homme qui n’avoit cognoissance des divines lettres, encore qu’il fut capable pour les humaines. Nos Evesques demeurerent inebranlables en leur droict pour la cause de Dieu, respondans ces beaux

 

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mots, Honores Ecclesiastici non precibus, non largitionibus, sed virtute & doctrina comparandi (en marge: Courage sans saveur). Ainsi avec le refus ils representent au Roy l’insuffisance de celuy qu’il proposoit. Response qui luy despleut fort, il sort de l’assemblée avec cholere qui coutera cher à l’Eglise de Perigueux: car je conjecture que Reymondus fut pour lors esleu Archevesque (en marge: Chenu. in Tab. Archiep. Burdigal.), quoy que je ne le trouve dans les tables de l’Archevesché de Bourdeaux: ains apres la mort de Godefroy mise l’an mil cent cinquante huict, l’on met Harduin Doyen de l’Eglise de Sens choisy l’an mil cent soixante (en marge: Ma. Sc. Cancell.), & Bertrand Evesque de Lectoure peu de temps apres. Au moins nostre Reymond estoit Archevesque de Bourdeaux l’an mil cent cinquante neuf (en marge: 1159): ainsi le Roy tourna sa passion contre nostre Evesché, si que pour l’appaiser on luy donna du thresor de S. Front une placque d’argent où les douze Apostres estoient en relief.

Sans nous arrester a ces biens temporels prenons garde aux maux spirituels qui avoit bien avant gasté ceste Province, dans laquelle nous voyons un estrange desordre du costé qu’elle regarde le Toulouzain, causé par l’heresie des Petrobrusiens (en marge: Heretiques), fomentée par ce faux Moyne de Toloze Henry (en marge: Geneb. Innoce. 2), avantcourrier de ceste ver­mine d’Albigeois. Impieté si fort accréditée, que comme escrit S. Bernard (en marge: Vit. S. Bernardi. lib. 3 c. 5), Desja l’on trouvoit à tous pas les Eglises sans le peuple, le peuple sans leurs Prestres, les Prestres sans la deüe reverence,

 

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bref les Chrestiens sans leur Christ. Ce sainct homme envoyé de Dieu (en marge: Sainct Bernard) pour estre l’elexitaire des here­sies de son temps, & le Docteur pour le rappel des desvoyez, vint à Toulouze contre l’Heresiarque, comme jadis S. Pierre à Rome contre Simon Magus, de là passant par les pays les plus infectez d’heresie vient en Perigord se rend à Sarlac, & fut passé plus avant vers nous, sans que ce vray humble pour eviter les applaudissemens qu’on luy rendoit se retira comme à la desrobée, specialement pour se garantir du concours des malades qui venoient à luy de toutes parts pour estre participans du grand miracle raconté par l’autheur de sa vie Guillelmus Abbas qui est tel (en marge: Gill. in Vit. S. Bernardi).

Sainct Bernard estant à Sarlac (en marge: Vient à Sarlat) fit une docte predication en presence du Prelat Apostolique Geoffroy Evesque de Chartres, dans laquelle il refutoit par visves raisons les faux dogmes qui avoient infecté plusieurs de ce pays, & comme à la fin de sa predication on luy presenta selon sa coustume des pains pour les benir, alors faisant le signe de la Croix il dict tout haut, vous tous cognoistrez, que ce que je vous presche est vray, & que ce que disent les heretiques est faux, si vos malades ayant gousté de ce pain reçoivent la santé (en marge: Miracle), Le Legat Apostolique adjousta, pourveu qu’ils le reçoivent avec la foy: Sainct Bernard replique, Je ne dis pas cela; mais que tous ceux qui gousteront de ce pain seront gueris, à ce qu’on cognoisse que nous sommes messagers de la vérité, qui vient de

 

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la part de Dieu. De faict si grand nombre de malades après avoir mangé de ce pain furent gueris (en marge: Miracle), que la nouvelle en parvint par toute ceste province, & l’homme sainct rebroussa son chemin par les lieux les plus proches, evitant le concours in­tolerable du peuple, craignant de passer plus avant, dict l’autheur ja cité (en marge: Ibidem in fine).

Le voyage de S. Bernard en ceste Province attira du Clergé de Perigord un homme de condideration nommé Alquerius, pour aller se rendre Religieux à Clervaux, soubs sa reigle. Estant dans ce faux-bourg du Paradis, jouyssant du repos de la solitude, il escrivit une missive à tout le Clergé de ceste Province, exhortant ses compatriotes à donner du pied au monde, & faire un serieux divorce avec sa vanité, se retirans à son imitation dans la solitude de Clervaux. Nous trouvons ceste belle missive (en marge: Missive) dans le second tome de la Bibliothèque des Peres (en marge: To. 2 Bibl. patrum auctu. p. 3) escrite par le Frere Nicolaus Cisterciensis, Secretaire de Bernard (en marge: Nicol. Cist. epist. 36), qui avoit charge de faire la response à toutes les lettres qu’on adressoit aux Religieux de l’Abbaye, Dilectis suis Petrachoricensibus Clericis, frater Alquerius, illam vivere qua in coelo vivitur vitam. Traduisons quelques lignes qui nous serviront pour l’histoire. J’escris à vous d’un pays esloigné, quoy que vous ne soyez gueres loing de mon coeur: car la charité qui r’assemble dans le sacraire de la dilection & l’amy & l’ennemy pour l’amour de Dieu ne me permet pas que pour quelque petite heure vous soyez absens de moy. Je vous attaque

 

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courageusement avec icelle, en icelle, & pour elle mesme, &c. Que faictes-vous donc, mes tres-chers? pour quoy ne vous rendez-vous à ceste maison où les en­fans. d’Israel sans danger & sans se lasser passent le Jourdain en bon equipage, &c. Ceste Religion n’est pas comme les Religieux qui sont en vostre pays, lesquels ressentent plus à des seculiers, tirans à mespris & oppro­bre le nom d’une Religion incorporée a l’estat du siecle. Pour les nostres ils ont du tout rejetté & le monde, ce qui est du monde, &c. Il n’est pas trop asseure pour vous d’avoir la cure des ames, sans soigner le bien des ames. Vivre du patrimoine de Christ, & ne servir point à Christ. Veritables paroles (en marge: Exhortation), autant necessaires pour ce temps icy, voire encore plus que pour lors. Quant à ce qu’il dict de l’estat deplo­rable & mesprisable de nos Abbayes, tousjours il y en avoit quelqu’une où la devotion & ferveur rendoit les Religieux recommandables envers les grands (en marge: Dedicace), comme nous voyons que l’Evesque Raymond estant faict Archevesque de Bourdeaux, voulut laisser aux Religieux de Chancelade (en marge: Ma. Sc. Cancel.) un memorial de ses affections. La mesme année de son decez il fut les visiter, & consacra l’Autel de la Chappelle de l’Infirmerie, l’an mil cent cinquante-neuf, Idibus Aprilis, indictione septima, estant au Chapitre avec l’Abbé & Religieux fut ordonné que tous les jours de l’an, hors du Vendredy Sainct, l’on y celebreroit une Messe basse pour les deffuncts.

Nous apprenons par la table imprimée au pied de S. Bernard (en marge: Vid. in fine), à la dernière impression,

 

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comme dés son vivant (en marge: D. Bernard. Abbatiae) & l’an 1153 l’Abbaye de Petrosa (en marge: 1153), de Peyrouse fut fondée le 39 Mars (sic; il faudrait lire 29 Mars), & se trouve la 69. en rang de l’Ordre de Clervaux (en marge: Fundatio Abb. Petrosae anno 1153) qui est la troisiesme fille des Cisteaux; c’est merveille de 1’authorité que ce sainct Patriarche avoit acquis dans ce peu de temps depuis sa re­formation dans la Chrestienté pour l’establissement de son Ordre, pour lequel tous contribuoient par une saincte aemulation. L’Abbaye de Peyrouse dans peu fut splendide en grands revenus desquels elle dota l’Abbaye de Boschaud (en marge: Fund. Abb. Bosco Cavo), de Bosco Cavo, qui receut pour son establissement une partie de ses revenus de sa liberalité: mais le sacré thresor du corps d’un sainct Martyr, estoit le plus riche gage de l’Abbaye de Boschaud, lequel on voit encor aujourd’huy dans les ruines deplorables de cét ancien edifi­ce soubs le grand Autel sans qu’on sçache son nom (en marge: Martyrol. Rom.). Ce grand amy de Dieu S. Bernard mourut la mesme année de la fondation de Peyrouse le vingtiesme d’Aoust.

Adrian quatriesme l’année suivante qui fut la première de son Pontificat (en marge: 1154), expedia une Bulle à nostre Evesque Reymondus (en marge: Bull. Ad. 4 ad ep. Petroch.) qui luy confir­me tous les revenus que les Papes ses predecesseurs luy avoient donné.

Nous trouvons aussi que de ce temps le Comte du Perigord (en marge: Comté) fit bastir une forte & haute tour prés de l’amphiteatre, peut estre pour se munir à l’encontre des incursions des Rouptiers (en marge: Ma. Sc. S. Anth.), meschans heretiques qui bien tost nous donne-

 

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ront de la peine. Raymond de Maiolio meurt l’an mil cent cinquante-neuf, n’ayant gueres demeuré au Siège de Bourdeaux, où il fut ensevely dans l’Eglise Metropolitaine de Sainct André. (hh)

 

 

Joannes d’Asside, Evesque.

Henr. II, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

 

Le Poictou n’ayant peu donner d’Archevesque A Bourdeaux sur la recommandation du Roy d’Angleterre, bailIa à Périgueux un Evesque de l’Eglise de Poictiers. Je ne sçay s’il est le mesme que Joannes Sochius Gimnasii Pictaviensis Ludimagister, refusé pour Bourdeaux; il fut recogneu pour nostre Evesque l’an mil cent soixante, auquel temps l’heresie avoit notablement gasté les esprits de ces quar­tiers, si que desja des paroles ils venoient aux armes, se saisissoient des fortes places, exerçoient toutes hostilitez possibles contre les Catholiques: specialement à l’encontre des Religieux qui tousjours ont esté persecutez par les ennemis de l’Eglise.

 

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Le chasteau de Gavaudun en Agenois (en marge: Ma. Sc. S. Anth.), forte place à raison de son assiete servoit de retraicte à tels brigandages (en marge: Gavaudun), & apportoit notables dommages à leur voisinage. Nous trouvons par memoire que nostre Evesque Jean monstra qu’il sçauoit plus que fueilleter son Breviaire; faisant levée de gens de guerre, il alla assieger ceste pla­ce qui sembloit inexpugnable à raison de sa position, comme il se void encores aujourd’huy: si est-ce pourtant qu’il la força, la print, la fit razer rez pied rez terre (en marge: Prins), humiliant ceste canaille d’heretiques qui desja estoient appellez Ruptaris, parce qu’ils brisoient, rompoient, froissoient les Croix, Images & Autels sacrez, comme on peut voir dans l’epistre première & seconde du venerable Pierre Abbé de Cluny (en marge: Pet. vener. lib. I ep. I & 2); lequel d’un costé par sa doctrine s’estoit opposé à ceste im­pieté faisant brusler à S.Gilles l’autheur de ceste doctrine (en marge: Ma. Sc. ibid.), nostre Evesque en ces quartiers s’opposa aussi par armes a leurs efforts, suyvant dict de luy un vieux manuscript.

Quippe Gavaudunum cui par vix credo nec unum Destruxisse solo constat.

Tous ces desordres avoient bien desbauché l’Eglise en Aquitaine, & nos Annales (en marge: Ann. Aquit. dub. 3 p. c. 4) asseurent que lors que le Pape Alexandre troisiesme assembla son Concile à Rheims (en marge: 1163; Conciles), 1’un des principaux motifs fut pour la reformation des moeurs des gens d’Eglise d’Aquitaine (en marge: Sygebert. contin.). Il est vray que la principale cause estoit pour condamner & exterminer l’Antipape Victor avec ses adherans,

 

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mesme derechef l’an du Seigneur mil cent soixante & trois il assembla à Tours un Concile (en marge: Conc. Turo. t. 3 anno 1163), auquel furent dix-sept Cardinaux, cent vingt-quatre Evesques, & les mesmes annales disent que tous les Archevesques & Evedques d’Aquitaine s’y trouverent; partant disons quelque mot des articles qui y furent conclus (en marge: Conclusions). Specialement fut prohibé aux Ecclesiastiques de s’engager dans le peché sordide de symonie, deffendu aux re­ligieux le meslange trop familier avec ceux du monde, les religieux du dioceze du Perigord avoient bon besoing de ceste reformation (en marge: Reformation necessaire), comme nous avons veu par la missive du religieux de Clervaux (en marge: Vid. sup. epist. Alquer.). Le chapitre quatriesme recommande affectueusement aux Evesques & Curez de ces quartiers de veiller contre les detestables heresies de Tholoze, qui desja avoient glissé comme un chancre dans la Gascongne & Provinces voisines, & partant, disent-ils (en marge: Vid. infra 1220). Nous commandons à tous les Sieurs Evesques & Presres qui demeurent en ces quartiers de veiller à l’encontre d’eux , & prohiber par la menace de l’anatheme qu’aucun n’aye à donner retraicte en son pays, ny secours à ceux qui seroient recogneus sectateurs de ceste heresie (en marge: Eviter les heretiques): mais dans peu il faudra porter des remedes plus forts & violens; l’opiniastreté de l’estiomene ne cedant à la force de ces medicamens anodins, mettra en main le fer & le feu contre sa malice.

Je trouve encor que nostre Evesque Joannes Pictavienfis fit des donations (en marge: Ma. Sc. Cancell.) au Sieur Elie

 

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Abbé de Chancelade & à ses Religieux des Parroisses appellées Lateira & Saccus (en marge: Donation), pour y bastir des Eglises. Bref ayant tenu la chaire Episcopale durant neuf ans moins sept jours (en marge: 1169), il deceda l’an mil cent soixante-neuf, & pour sa sepulture il y eut notable different & procez entre le Clergé de l’Eglise Cathedrale Sainct Estienne & Collegiale S. Front, les premiers pretendans avoir droict pour le corps de leur Evesque l’enleverent par violence, & l’ensevelirent en leur Eglise (en marge: Ma. Sc. S. Anth.), dont les autres firent un grand procez, qui couta beaucoup de part & d’autre. Nous voyons son epitaphe gravé dans un pilier de l’Eglise Cathedrale prés de sa sepulture en ces mots (en marge: Sepulture). ANNO AB INCARNATIONE DOMINI M.C.L.D.X. NONO. SECVNDA DIE MAII OBIIT DOMINVS IAANNES HVIVS ECCLESIAE EPISCOPVS, SEDIT AVTEM IN EPISCOPATV NOVEM ANNIS SEPTEM DIEBVS MINVS (en marge: Inscript. lapid. epitaph.).

Un peu à costé on peut lire le commencement de la poesie qui ressent la rudesse de ce siecle.

PICTAVIA NATVS HIC PAVSAT PRAESVL HVMATVS FILIVS ERGO DEI PROPITIETVR EI. (ii)

 

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Petrus Minetis, Evesque.

Richard, Duc d’Aquitaine.

 

Nous pouvons apprendre de Petrus Blesensis (en marge: L’an de Jesus-Christ 1169), homme celebre en l’Eglise, le pays & parantele de Pierre Minetis ou Minetz, au­quel il escrivit une epistre qui est parmy ses oeuvres, la trente-quatriesme, par laquelle il se recognoist son cousin & parent proche. Ce fut lors qu’il se retiroit des estudes, ses pere & mere estans decedez (en marge: Origine), lesquels, comme il dict en une autre epistre, estoient des plus nobles de la petite Bretagne: voicy ses mots traduits (en marge: Petrus Blesensis epist. 34). Mon pere & ma mere ont prins leur origine des plus apparents de la petite Bretagne, ce que je ne dis pas par jactance, mais je repute la vraye noblesse des vertus estre plus recommandable lorsqu’elle est conjoincte avec la noblesse de l’extraction, son epistre porte ceste suscription, Reverendissimo Patri Petro Petrachoricensi Episcopo Petrus Blesensis suorum consanguineorum imo servorum mini­mus salutem & continuos ad vota succeffus (en marge: Pierre de Blois). Ce bon

 

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Prelat l’avoit prié voire conjuré de venir faire sa residence avec luy dans son Palais, tant pour honorer ses merites, comme aussi pour se servir du rare sçauoir & conseil de celuy qui fut trouvé digne non seulement d’instruire l’Eglise en ge­neral par ses doctes escrits (en marge: Doctrine); mais par special fut choisi pour precepteur du fils du Comte du Perche qu’il conduit à la Royne de Sicile, où il fut trouvé capable d’enseigner son fils voire & tout celuy du Roy d’Angleterre (en marge: Comment. ex Epis. 49). Ayant donc suivy la fortune qui se presentoit par le Comte du Per­che, il s’excusa envers nostre Evesque, com­mençant par les loüanges de la sacrée dilection plus forte que la mort, puis qu’elle unit les coeurs absens (en marge: Amitié), & la mort separe l’ame d’avec le corps. (en marge: Ep. 34) Et j’ay recogneu cecy en vous, dict-il, à la faveur de l’expérience, puis que vous m’avez regardé d’un oeil plus favorable, moy qui suis le plus petit & comme l’avorton de la magnificence de vostre parantele. Vous m’avez escrit, si tant est que je me souvienne fidelement de vostre commandement, que je me rendisse au plustost à vous pour y demeurer comme vostre domestique & commensal. Soudain mon esprit tressaillit d’applaudissement par la parole de vostre benignité, & desja j’avois deliberé de me rendre à vous, lors que, &c.

Quelque temps (en marge: Chroni. Engol. Corl.) apres la promotion de nostre Evesque (en marge: 1171), il se presenta un employ fort honorable (en marge: Employ) pour luy à raison du mariage d’Heleonor fille du Roy d’Angleterre, & d’Heleonor Duchesse d’Aquitaine, avec Alphonse second Roy

 

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d’Espagne, où elle fut conduitte accompagnée de l’Archevesque de Bourdeaux (en marge: Honorable), & des Evesques de Poictiers, Engoulesme, Xaintes, Perigueux, Agen & Bazas, de Raoul de la Faye Seneschal de la Guyenne, du Comte de Perigord Elie fils de Bozon, & plusieurs autres Sei­gneurs ausquels le Roy d’Espagne fit de beaux & riches presens (en marge: Chronic. Burdig.): l’on proposa aussi le mariage de Richard second fils du Roy Henry avec la fille du Comte de Barcellonne (en marge: Meynard arrest.), luy donnant le Duché d’Aquitaine, & pource Richard surnommé coeur de Lyon (en marge: Dub. Ann. Aquit. 3 p. c. 4), est le douziesme Duc d’Aquitaine (en marge: Richard coeur de Lyon Duc d’Aquit.).

Desja les seigneurs de ces quartiers souspirent apres le gouvernement des François impatiens d’estre opprimez par la domination de l’Anglois, ils se saisissent des places les plus fortes, agissent hostilement contre ceux qui tenoient leur party, ce qui appella Henry Roy d’Angleterre pour venir maintenir en obeyssance ce pays du Perigord qui desja s’estoit revolté contre luy (en marge: Ma. Sc. S. Anth.). Il y vint avec ses fils Henry Duc de Normandie, & Richard Duc d’Aquitaine, assisté du Roy d’Arragon, du Comte de Bre­tagne Geoffroy, & d’Hergamonde Dame de Narbonne pour assieger le Puy S. Front (en marge: Siege faict par les Anglois), & s’il faut agir par conjecture; je crois que la place leur demeura, car nous trouvons que l’an mil deux cens deux ceste ville estoit soubs leur puissance (en marge: Dub. ibid. c. 6), puis que la trahison pretendüe contre Poictiers y fut tramée par les Anglois avec

 

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le Clerc du Maire de Poictiers.

Les actions de pieté furent ordinaires à nostre Evesque, nous en trouvons des marques aux sacres de plusieurs Autels (en marge: Dedicaces); il en sacra un dans Chancelade (en marge: 1171), In honorem sancta Trinitatis, & in honorem sanctae Crucis, & in honorem beatae & gloriofae Virginis Mariae, & sanctorum Apostolorum Philippi & Jacobi, & sanctorum Martyrum Sebastiani & Blasii, & sanctorum Confessorum Augustini & Nicolai, & sanctarum Virginum Agnetis & Caeciliae anno Domini 1171. sexto nonae Maii (en marge: Ma. Sc. Cancell.). En presence du troisiesme Abbé Gérard qui avoit esté beny par ce mesme Evesque quelque temps auparavant.

Je trouve une inscriptîon pour l’année suivante qui marque le sacre de l’Eglise de la glorieuse Martyre Saincte Alvera ou Alvenera (en marge: Sainte Alvere), fille de ceste noble maison de Sainct Alvere en Perigord, & donna le nom à la famille qui a esté plus honorée par son haire, par sa discipline, & par sa mort sanglante, ayant esté martyrisée pour la gloire de Dieu (en marge: Sancta Alvera mart.), que par l’antiquité de sa race. Nous ne sçauons rien du temps de son martyre, les actes ayans esté perdus par les laps du temps, seulement nous voyons aujourd’huy en ce lieu son sacré chef, auquel il y a une ouverture de quatre doigts, faictc d’un coup de cou­telas qui luy emporta sa benite ame. L’inscription du sacre de ceste Eglise (en marge: 1172) gravée au mur parle ainsi (en marge: Inscript. lapid.), AB INCARNATIONE DOMINI M.C.L. XXII ... PETRVS DEI GRATIA

 

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PETRACHORENSIS EPISCOPVS IN HONOREM B. MARIAE, ET S. IACOBI APOSTOLI, ET S. MARII, ET S. BLASII, ET S. CATHARINAE VIRGINIS VI. NO. IVL. HOC ALTARE CONSECRAVIT.

De plus l’an mil cent septante-sept (en marge: 1177) l’Eglise de Sainct Amand de Boisse est dediée par Bernard Archevesque de Bourdeaux, accompagné des Evesques Jean de Poictiers, Pierre de Périgueux, Aymard de Xaintes, Lambert d’Angoulesme, & les Abbés Pierre de S. Jean d’Angeri, Jordain de Charroux, Bernard de Nantuil, Raymond de Baigne, Julien de la Cou­ronne, avec celuy de Sarlat & de Sellefroin (en marge: Chron. Engol. Corl.).

L’année apres (en marge: 1178) r’appelle encore nostre Evesque à Chancelade pour le sacre d’un Autel (en marge: Ma. Sc. Cancell.), In nomine Dei, & honorem S. Crucis, & S. Marci, & S. Martini, & S. Catharina Virginis, & S. Thomae Cantuarensis (en marge: Dedicaces). Il y avoit seulement sept ans de­puis son martyre, & les Anglois estans maistres de ceste Province l’honnoroient desja grande­ment, comme j’ay veu dans plusieurs vieilles peintures de nos Eglises. Il confera aussi à ceste Abbaye les lieux de Cantamerlé, de Fata, de Capefrico, de Giranno, esquels lieux l’Abbé Gérard fit bastir des Eglises.

Il ne faut obmettre le soing Pastoral (en marge: Action pieuse) qu’eut nostre Evesque de r’affembler tous les ossemens des Evesques ses predecesseurs ensevelis dans l’Eglise S. Front (en marge: Ma. Sc. S. Anth.), lesquels il transporta avec grande solemnité dans des cercueils de pierre qu’il fit poser autour de la Chappelle qu’il de-

 

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dia & consacra a Saincte Catherine, faisant peindre au dessus leurs effigies, qui commençoient depuis Bertrandus, jusques à Gaufridus de Cauzé, avec les inscriptions de leurs noms. Dans ceste action toute pieuse il peut apprendre la leçon de bien mourir (en marge: Meurt) pour la pratiquer l’an mil cent huictante-deux (en marge: 1182), l’onziesme d’Avril, ayant tenu la chaire douze ans cinq mois vingt & deux jours (en marge: Chenu. in tab. episc.), il fut ensevely dans son Egli­se Cathedrale S. Estienne. (jj)

 

 

Adzemarus, Evesque.

Richard, Duc d’Aquitaine.

 

Desja le cours du temps & des affaires avoit apporté de l’ambarras à la cognoissance des droicts de l’Evesque (en marge: L’an de Jesus-Christ 1182); c’est pourquoy deslors qu’Aymard fut promeu à l’Evesché il eut recours au Sainct Siege, obtenant du Pape Urbain troisiesme une Bulle tres-autentique, par laquelle ce Pape à l’imita­tion de ses predecesseurs Alexandre & Lucius, met soubs sa protection & sauvegarde l’Eglise du Perigord, & déclare au long plusieurs droicts qui requierent que je l’insere icy tout au long.

 

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(en marge: Bulla Urbani Papae anno 1187) Urbanus Episcopus servus servorum Dei venerabili fratri Ademaro Petrachoricensi Episcopo, ejusque successoribus canonice substituendis in perpetuum. In eminenti sedis Apostolica specula dispositionis dominio constituti, fratres nostros Episcopos tam propinquos quam longe positos fraterna debemus charitate diligere, & Ecclesiis à Deo sibi commissis paterna sollicitudine providere. Ea propter venerabilis in Christo frater Ademarus Episcopus, tuis justis postulationibus clementer annuimus & foelicis recordationis praedecessorum nostrorum Alexandri & Lucii Romanorum Pontificum vestigiis inhaerentes, Petrachoricensem Ecclesiam cui auctore Deo praesse dignosceris, sub B. Petri & nostra protectione suscipimus (en marge: Sub apostolicae sedis, protectione), & praesentis scripti privilegio munimus. Statuentes ut quascumque possessiones, quaecunque bona eadem Ecclesiae in praesentiarum juste & canonice possidet, vel in futurum concessione Pontificum, largitione Regum, vel Principum, oblatione fidelium, seu aliis justis modis praestante Domino poterit adipisci, firma tibi, tuisque successoribus illibata permaneant, in quibus haec propriis duximus exponenda vocabulis (en marge: Bona & pheoda episcopatus). Ecclesiam S. Aviti senioris, Ecclesiam S. Joannis de Cola, Ecclesiam S. Cypriani, Ecclefiam de Plazaco, Ecclesiam de Peyraco, cum omnibus earum pertinentiis. Phoedum insuper eum debito do­minio quod habet a Petrachoricensi Episcopo vicecomes Lemovicensis, & Dominus de Gordon, & illi de S. Asterio, & illi de Agonaco, & illi de Roca S. Christophori, & illi de Albaroca, & illi de Bordelia, & caetera pheoda quaecumque à Petrachoricensi Epis-

 

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copo teneantur, unum quoque Molendinum & caeteros reditus quos in tuo Episcopatu juste habere dignosceris: (en marge: Ne distrahantur) Statuimus praterea ut nullus cujuscumque ordinis Clericus Ecclesias in vita sua tantum sibi con­cessas ad jus Episcopale pertinentes, faciat censuales, neve monachi, aut canonici seu quilibet aliis c1erici in Ecclesiis ad hunc Episcopatum pertinentibus, sine tua auctoritate vel removere audeant, vel instituere capellanos, nisi forte privilegiis Romanorum Pontificum vel antiqua vel justa consuetudine committantur. Sensemus etiam ne canonici majoris Ecclesia (en marge: Pro canonicis cathedralis Eccle.), canonicos vel clericos in ea ponere, thesaurum distrahere, vel minuere, seu bona ipsius Ecclesia te inconsulto alienare ulla ratione praesumant. Decernimus insuper ut tam clerici majoris Ecclesia (en marge: Et colleg. S. Front.), quam clerici S. Frontonis in omnibus tibi obedientiam & honorem impendant, institiam tuam tibi cum integritate conseruent. Praterea quod communi consensu capituli vel sanioris partis consilio in utraque Ecclesia per te canonice fuerit institutum, id ratum & firmum volumus permanere. Cemeteria quoque Ecclesiarum & Ecclesiastica beneficia nullo haereditario jure nemo audeat possidere: Paci quoque & quieti Petrachoricensis Ecclesia providentes inter dicimus ut infra terminos canonice ad jus ejusdem Ecclesiae specialiter pertinentes (en marge: Immunitates & inalienationes domorum), domibus Episcopi & clericorum deputatis nulli laico liceat mansionem habere, vel alicui fas sit etiam domum quam ibi habet, dare, vendere, vel cuilibet dimittere nisi Ecclesiae, vel saltem clerico, & non sine assensu Episcopi, qui pro tempore fuerit (en marge: Pro monachis). Porro quia quidam monachorum jus suum Episcopis

 

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aufferre contendunt, prohibemus ne monachi in Dioecesi Petrachoricensi capellanias teneant, saceredotis capellani officium seu benefcium non assumant, sed praasbiteris capellanis integre conserventur quacumque ad jus capellania pertinere noscuntur. Auctoritate quoque Apostolica interdicimus ut nec clerici, nec monachi, seu quilibet religiosi interdictos sive excommunicatos Petrachoricensis Episcopi (en marge: Pro excommunicatis), vel ministrorum ejus in Ecclesiis scienter recipiant, vel illis praesentibus divina celebrent officia, nec ad religionis habitum eosdem excommunicatos sine satissactione suscipiant, si satisfaciendi potestatem habeant, nec si mortui fuerint eos sepelire praesumant. In parochialibus siquidem Ecclesiis (en marge: Pro parrochis & capellanis), Petrachoricensis Dioecesis ad Episcopum pertinentibus, absque licentia & assensu Episcopi presbyter capellanus minime statuatur. Prohibemus autem ne presbiteri capellani Ecclesiarum ad jus Petrachoricensis Episcopi distrahere vendere vel obligare praesumant, seu alio quolibet titulo alienare, & si factum fuerit irritum habeatur. Sacrorum quoque canonum auctoritatem sequentes, interdicimus ut nullus Episcopus vel Archiepiscopus (en marge: Pro Archiepisc. & Episc.) absque assensu Petrachoricensis Episcopi in Dioecesi Petrachoricenfi conventus celebrare, causas & Ecclesiastica negotia ejusdem Dioecesis tractare praesumat, possessiones etiam seu quaelibet dona Petrachoricensis Episcopi, vel qua ab ipso in pheudo vel alio modo tenentur, nulli Ecclesia seu persona contra aliquam & rationabelem consuetudinem, & sine assensu ejusdem Episcopi liceat conferre, impignorare, vendere, seu cuilibet dare, vel quolibet alio titulo alienare.

 

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Quartam vero partem decimarum (en marge: 4. pars decimarum pro Episc.) juxta canonicam sanctionem, sicuti antecessores tui hactenus habuerunt, tibi tuisque successoribus auctoritate Apostolica confirmamus: Decernimus ergo ut nulli omnimo hominum fas sit praefatam Ecclesiam temere perturbare, aut ejus possessiones auferre, vel ablatas retinere, minuere, seu quibuslibet vexationibus fatigare, sed omnia integro conserventur eorum pro quo­rum gubernatione ac sustentatione concessa sunt usibus omnimodis profutura, salva sedis Apostolica auctoritate, & Burdigalensis Episcopi debita reverentia. Si qua igitur Ecclesia in futurum, vel secularis persona hanc nostrae constitutionis paginam sciens con­tra eam temere venire tentaveris, secundo tertiove commonitus nisi praesumptionem suam digna satisfactione correxerit (en marge: Comminationes), potestatis honorifique sui careat dignitate, reumque se divino judicio existere de perpetrata iniquitate cognoscat, & a sacratissimo corpore & sanguine Dei, ac Domini Redemptoris alienus stat, atque in extremo examine districtae ultioni subjaceat, cunctis autem eidem Ecclesia sua jura servantibus sit pax Domini nostri Jesu Chrifti, quatenus & hic fructum bonae actionis percipiant, & apud districtum judicem praemia aeterna pacis inveniant. Amen.

(en marge: Signaturae) Ego Urbanus Catholicae Ecclesiae Episcopus. Ego Petrus Debutz Presbiter Cardinal tituli S. Susannae. Ego Laborans Presbiter Cardinalis Sanctae Mariae Transtyberim, tituli Calixti. Ego Presbyter Melior Cardinalis SS. Joannis & Pauli tituli Pamachis. Ego Adelardus tituli S. Marcelli Presbiter Cardinalis.

 

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Ego Henricus Albaniensis Episcopus. Ego Paulus Praenestinus Episcopus. Ego Theobaldus Hostienfis Zelletinensis Episcopus. Ego Jad. Diaconus Cardinalis S. Mariae in Tosnudum. Et ego Cratianus SS. Cosmae & Damiani Diaconus Cardinalis. Ego Radulphus S. Georgii Ad velum aureum Diaconus Car­dinalis. Datum per manum Alberti S. Romanae Ecclesiae Presbiteri Cardinalis & Cancellaris decimo Kalendas Octobris indictione sexta Incarnationis Domini anno 1187. Pontificatus vero Domini Urbani Papa tertii anno secundo. (en marge: 1187)

Ceste Bulle Apostolique signée par douze Cardinaux, assoupit beaucoup de querelles entre le Clergé de ceste province.

Je conjecture avec beaucoup de probabilité que dés quelques années le Monastere des Dames Religieuses de Ligueurs en Perigord (en marge: Fund. monilium lygurii ord. S. Bene.) avoit esté fondé par nos Roys (en marge: Ligueulx), soubs la reigle estroicte de S. Benoist. Les premieres asseurances que j’en trouve apres les ruines des siecles passez, sont la Bulle du Pape Clement troisiesme don­née en leur faveur à l’arrivée de son Pontificat. tertio Kalendas Junii anno 1188. Pontificatus anno primo (en marge: 1188), par laquelle plusieurs privileges sont conferez à ceste Abbaye (en marge: Bull. Clem. 3. an. 1188), la quelle estant accreüe par les liberalitez de plusieurs Seigneurs du voisinage, ce Pape la met soubs sa protection pa­ternelle, donnant à l’Abbesse le droict de presentation aux Eglises dependantes de leurs manses & autres privileges, qui furent derechef confirmez par le Pape lnnocent quatriedme dans

 

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sa Bulle (en marge: Bull. Inn. anno 1243) baillée à Lyon decimo quinto Kalendas Julii anno 1243. Pontificatus anno secundo (en marge: 1243). Et ce sans prejudice de la jurisdiction & droicts appartenans à l’Evesché.

N’advançons tant le pas, sans prendre garde que nostre Evesque l’année mil cent huictante-neuf (en marge: 1189) fut à la compagnie de plusieurs Archevesques & Evesques assemblez au transport des Reliques de S. Estienne de Muret (en marge: Reliques honorées), fondateur de l’Ordre de Grandmont, comme tesmoigne Guido en ces mots (en marge: De Cruce in Tab. Episc. Cadurc. ex p. Guid.), Circa finem mensis Augusti sub annum Domini millesimum centesimum, octuagesimum nonum celebravit digno cum honore relevationem corporis S. Stephani Confessoris cum processione solemni convocatis & praesentibus ibidem tribus Archiepiscopis scilicet Henrico Bituriensî, Helia Burdigalensi, & Raymondo Apamiensi qui apud Grandimontem de Partibus tranfmarinis exul advenerat; nec non sex Episcopis, Silvando Lemovicensi, Guillelmo Pictaviensi, Adzemaro Petrachoricensi, Gerardo Cadurcensi, Bernardo Agennensi cum multis Abbatibus & Religiosis.

L’année après nous apportera la paix en ses commencemens, & finira en guerres & oppressions: car Richard Duc d’Aquitaine surnommé Coeur de Lyon (en marge: Richard Duc d’Aquitaine), est faict Roy d’Angleterre (en marge: 1190) l’an mil cent nonante (en marge: Ann. Aquit. 3 p. c. 5), & desja la Croizade avoit esté conclüe au Concile de Paris (en marge: Concil. paris. to. 3. anno 1190) contre Saladin, qui avoit pris sur les Chrestiens la ville de Hierusalem, ce qui avoit obligé le Roy de France Philippe de faire paix avec Henry & Richard (en marge: Duché), ils

 

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s’en vont de compagnie au voyage d’outremer avec tres-puissante armée (en marge: Gagni. lib. 6). Mais nostre Roy pour certaine cause rebroussant chemin vint en Normandie assieger des villes qui appartenoient au Roy d’Angleterre. Richard vint au secours, & prenant terre est prins prisonnier par le Duc d’Austriche qui le met à rançon de cent cinquante mille marcs d’argent (en marge: Rançon): payement qui vint fondre sur les benefices, sur les croix, calices, chasses , & joaliers des Eglises d’Aquitaine. Ceux qui en cachette les peurent sauver firent un bon coup (en marge: Ann. Aquit. ibid.), ce que je n’espere des Eglises de ceste province trop asservie soubs la puissance Angloise.

Nous pouvons en suitte apprendre qui estoit en ce temps le Comte du Perigord par l’autentique inscription du sacre de l’Eglise de Sainct Martin de Limueil (en marge: Dedicace), faict par nostre Evesque l’an mil cent nonante-quatre (en marge: Inscript. lapid.; 1194). ANNO AB INCARNATIONE DOMINI MILLESIMO CENTESIMO NONAGESIMO QVARTO, INDICTIONE DVODECIMA CONCVRRENTE QVINTA, EPACTA XXVI. TERTIO KALEND. FEBRVARII DIE DOMINICA, LUNA QVARTA, DEDICATA EST HAEC ECCLESIA ET ALTARE A DOMINO ADEMARO PETRACHORICENSI EPISCOPO, IN HONOREM S. TRINITATIS, ET S. MARIA VIRGINIS, ET S. MARTINI EPISCOPI ET CONFESSORIS, ET B. PAVLI APOSTOLI, ET B. THOMAE ARCHIEPISCOPI ET MARTYRIS ET S. CATHARINAE VIRGINIS ET MARTYRIS, ET OMNIVM SANCTORVM DEI.

 

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HEBRARDO DEVILLARS HVIVS ECCLESIAE DIACONO EXISTENTE, PHILIPPO REGE FRANCORVM IMPERANTE, RICHARDO REGE ANGLIA DVCATVM AQVITANIAE TENENTE, ELIA TALEYRANDO PETRACHORIORVM COMITE, IN METRAPOLICA BVRDIGALENSI ELIA RESIDENTE (en marge: Helie Taleyrand Comte de Perigord; Comté).

Quelque temps apres ce Roy Richard fut tué à Chalus (en marge: 1200) en punition de son avarice (en marge: Ann. Aquit. 3 p. c. 5; Chron. Burdig.). Jean sans terre succede au Royaume & au Duché (en marge: Jean sans Terre Duc d’Aquit.; Duché), lequel bien tost apres fut reuni à la couronne de France, d’autant qu’il fut convaincu des cri­mes d’avoir faict mourir son nepveu le Duc de Bretagne, & de rebellion audit Roy Philippe.

Ademarus restoit encore nostre Evesque l’an mil deux cens neuf (en marge: 1209), & fut choisy avec l’Arche­vesque de Bourdeaux Elie (en marge: Arbitres) pour arbitrer & ac­corder les differens survenus entre les Abbés de Pontigni & de Cadouin (en marge: Ma. Sc. Cadun.), & fut déclaré par eux que Cadouin estoit de la filiation de Pontigni la septiesme en rang des Abbayes qui luy sont subjectes en divers diocezes.

Je ne puis obmettre la saincte resolution de trois nobles freres de ceste province, de la mai­son de la Faya, qui ceste mesme année 1209 consacrerent leur maison & tout leur bien (en marge: Fondation), qui estoit és Parroisses de Laguliac & de Mensegniac pour eriger un Prioré Conventuel de l’Ordre S. Augustin (en marge: Fund. priorat. convent. de la Faya anno 1209), dependant de l’Abbaye de la Couronne prés Angoulesme, soubs le tiltre Beatae Mariae de Faya. Arnaldus l’aisné des trois freres estoit Chanoine de S. Front (en marge: Ma. Sc.);

 

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Joannes estoit Moyne de la Grand Selve; & Guillelmus le troisiesme renonça à l’heritage & à son patrimoine pour en faire une offrande à Dieu & à sa saincte mere, Pro se & toto genere suo, in suarum & suorum patris & matris, & omnium parentum remedio animarum, dict le tiltre de la fondation, qui fut confirmé par Archambaud qui fut dans peu Comte du Perigord. (kk)

 

 

Radulphus de Turribus, Evesque.

Phil., Roy de France & Duc d’Aquitaine.

 

Nous descouvrons un peu tard (en marge: L’an de Jesus Christ 1209) le mal tout chancreux de l’heresie Albigeoise (en marge: Catel. lib. 2 Com. Tholos.), qui adjoustant sa malignité sur les escarres de la Vaudoise & Petrobrusienne (en marge: Heretiques), rendit enfin les parties nobles de ce pays irremedia­bles; le voisinage de l’Agenois nous communi­qua le venin qui l’avoit tout à faict infecté (en marge: Darn. Antiqui. Agenn. c. 12), d’autant qu’il appartenoit au Comte de Tholoze Raymond (en marge: Rebelles), assez diffamé pour estre le fauteur & promoteur de ceste detestable impieté (en marge: Aeneas Sylv. ex Sygib.), qui fut mesmes appellée Agennoise, aussi bien que Albigeoise. Durant prés de cent ans l’Eglise fut

 

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affligée par ce party rebelle à Dieu & au Roy. Enfin l’an mil deux cens dix (en marge: 1210) le S. Pere fit publier contr’eux la Croizade (en marge: Geneb. Chronol.), dont Symon Comte de Montfort fut general (en marge: Guill. Nang.), & apres plusieurs no­bles exploicts de guerre faicts dans le Languedoc (en marge: Humiliez) il vint subjuguer en Aquitaine les places re­belles (en marge: Paulus aemil.). Cassaigneul qui est en Agenois estant pris sur les ennemis le Comte passe au Perigord, vint au Chasteau de Domme ou Domnis (en marge: 1213), trouve qu’à son arrivée ces heretiques enragez l’avoient abandonné, & partant il ordonna qu’on demolist une grande tour du chasteau.

Demy lieuë au delà le chasteau de Montfort estoit commandé par Bernard de Casnac, à qui la cruauté naturelle à l’heresie, n’avoit rien laissé d’humain que la face. Sa femme estoit soeur du Vicomte de Turaine, qui de beaucoup encor surpassoit la cruauté felonne de son mary, & partant la memoire de ces deux Lestrigons sera à jamais en malediction dans ceste province (en marge: Pet. vall. Sern. hist. Albi. c. 142); tous deux notables pilleurs de nos Eglises, meurtriers inhumains des soldats croisez, qu’ils surprenoient aux passages, lors qu’ils s’alloient joindre aux armées du Comte Montfort, bour­reaux inhumains des pauvres Catholiques, desquels le Comte Montfort trouva au Monastere de Sarlac plus de cent cinquante refugiez, qui ayans esté pris par ce tyran leur avoient couppé les pieds & les mains (en marge: Cruautés), poché les yeux (en marge: Noger. lib. 2 c. 25); & la femme plus sanguinaire avoit arraché les mammelles aux femmes, couppé les poulces

 

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pour les rendre inhabiles au travail, & plusieurs autres inouys phalarismes que deux anciens historiens escrivans ceste persecution des Catho­liques, s’excusent si plus au long ils n’osent dire de plus grandes inhumanitez: desquelles la natu­re la plus desnaturée auroit horreur. Au bruict de l’arrivée du Comte Montfort ces sanguinaires quittent la place, s’enfuyent au devant de sa furie justiciaire, le chafteau est donné pour estre demoly à l’Evefque de Carcassonne, tres-zelé en cét oeuvre de Dieu.

De plus le chasteau de Castelnau n’estant guere loing de ceste place forte & dangereuse (en marge: Places remises), fut d’abord abandonné par les Routiers (en marge: Chron. de Sym. de Montfort): ainsi estoient encore appellez les rebelles, pour la raison desducte cy dessus (en marge: Vid. sup. anno 1163). Le Comte ne voulut faire démolir ceste forteresse: ains y fit dresser une citadelle pour la garnison qu’il y mit. Le quatriesme lieu estoit le chasteau de Beynac ou Bariac, appartenant à un Seigneur signalé persecuteur de l’Eglise (en marge: Persecuteurs d’Eglise), qui avoit pillé, volé, bruslé plusieurs Temples & biens Ecclesiastiques. Le Comte de Montfort luy envoya le choix, ou de rendre aux Eglises ce qu’il avoit si injustement & violemment ravy, ou bien de se resoudre à voir son chasteau desmoly, luy assignant temps prefix pour se resoudre. Cependant il se saisit de la place abandonnée comme les autres.

Beynac tardoit trop a la response sur l’esperance que le Comte laisseroit son chasteau comme le precedent pour estre frontiere contre

 

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l’Anglois, qui tenoit tout ce qui estoit au delà en sa domination contre le Roy de France Philippe (en marge: P. Vall. ser. c. 143 & noger. ibid.); mais il commanda la demolition des Tours & murailles (en marge: Demolitions); de forte que la prinse de ces quatre chasteaux où l’heresie avoit regné, dont ils sont appellez le Siège de Sathan, apporta beaucoup de repos & de paix non seulement à nostre pro­vince (en marge: Paix), mais encor à l’Agenois, Quercy & Limousin, suivant la remarque des Autheurs dont je me suis servy, specialement de la Chronique ancienne, qui depuis quelques années a veu le jour à la fin des Comtes de Tholoze faicte par Catel (en marge: Siege de Sathan). In praedictis quatuor castris, scilicet Doma, Monteforti, Castro novo, Beynaco, Petrachoricenfis Dioecesis, à centum annis, & ante a sedes fuerat Sathana ab iis egressa fuerat iniquitas super faciem terrae illius, quibus subjugatis reddita est pax & tranquillitas non solum Petrachoricensibus, & Cadurcencibus; sed & Agennensibus & Lemovicensibus pro magna parte: quoy que la guerre contre les heretiques ne finit qu’environ l’an mil deux cens quarante & trois, selon Paul Aemile (en marge: Paul Aemil. l. 7; Chronic. incerti auth. ab anno 1202 ad 1311 apud cat. comit. Thol.).

Cependant dés l’année mesme (en marge: 1213) de ce grand bien apporté à ces quarties par le Comte Montfort, 1’Archevesque de Bourdeaux avec nostre Evesque & celuy de Bazas, escrivent au Pape Innocent (en marge: Epistol. Arch.) la paix comme asseurée en ceste pro­vince, pourveu que le Comte Reymond ne fut remis dans les terres, dont il avoit esté justement depossedé; Cum enim, disent-ils, in partibus dictis pestis haeretica gravitatis jam adeo pullu-

 

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lasset, quod eisdem corruptis poenitus partes affines affectura morbo simili videbatur, cumque Rothariorum violentia principibus omnibus ejusdem terrae consentientibus & hoc idem facientibus, Ecclesias, fidemque Catholicam, omnemque Religionem Christianam nostris impugnaret, vestrae providae discretioni placuit has incommoditates sapienti consilio refraenare, quo fidelium signatorum, & Comitis Montisfortis mediante labore per mandatum vestrum in parte maxima tam haereticos quam Rotharios de sedibus suis dejecit; ita quod divinus cultus & pax Ecclesiastica videatur in dictis partibus restorere, &c (en marge: Burdigal. & Episc. Petroch. & Vasat. ad Inno. Pap.; Advertissement necessaire). l’encourageant au surplus, & suppliant qu’il ne se laissast fleschir par les prieres du Roy d’Arragon, de peur que l’oeuvre de Dieu de­meurast acroché par la remise de la confiscation du Comté de Tholoze, & qu’ainsi error novissimus esset peior priore & excidium inde clero & Ecclesia immineret (en marge: Ibid.). Le semblable fut escrit par plusieurs autres Prelats de ces quartiers soubs la crainte de ceste remise, laquelle aussi ne fut aucunement accordée.

Mais ce n’est pas tout d’apporter les remedes temporels contre le poison des ames (en marge: Remedes spirituels), les spirituels sont encore plus necessairees (sic) affin de rappeller les desvoyez par doctrine & bon exem­ple. Dieu pour lors avoit donné du ciel à son Eglise deux plantes alexipharmaques contre la secte Albigeoise, les deux grands Patriarches S. François & S. Dominique fondateurs des deux ordres celebres, l’un des Prescheurs, &

 

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l’autre des Mineurs, lesquels dés leur naissance toutes les provinces vouloient transplanter à l’envy dans les villes & lieux opportuns pour antidote de l’infidelité. Raouil de Lastours estoit en ce temps (en marge: 1217) nostre Evesque (en marge: Chenu in tab. ep.; Gall. Christ. ib.), voire dés l’an mil deux cens dix-sept, auquel il avoit esté arbitre sur les differens intervenus entre les habitans de la ville de Périgueux & ceux de la cité (en marge: Ma. Sc. dom. publ.). Il fut soigneux pour la singuliere & tres-rare pieté de l’ordre du glorieux Pere S. François (en marge: Convents de S. Franc.) d’appeller à sa ville les Freres Mineurs (en marge: Fundatio com. fra. min.), qui dans peu se peuplerent beaucoup dans son Diocese: ce Convent fut le trentiesme en rang de fondation dans la province d’Aquitaine appellée Recentior, ayant soubs sa custodie six Convents du mesme ordre; celuy d’Aubeterre fondé par le Seigneur du lieu, de saincte Foy, d’Essideul, de Sarlac, de Montignac, de Bergerac (en marge: Ordo. Seraphic. Gonzag.), qui tous de nostre siecle ont notablement senty les rages & ravages des successeurs à la malice de ceux qui pour lors estoient impugnez & convertis par les armes spirituelles de ces saincts ouvriers. Ce fut l’an mil deux cens vingt (en marge: 1220) que l’Evesque Raoul posa la premiere pierre de l’Eglise du Convent de Perigueux (en marge: Wandi. t. 2 ann. minorum), bastiment qui fut tres superbe, comme nous lisons dans le relief de mazures qui sont encor sur pied.

Je juge qu’en suitte au mesme temps (en marge: Religieuse S. Claire), l’establissement des Filles de Sainct Claire fut faict (en marge: Fund. Con. S. Clarae), par le don que le chapitre (en marge: Ma. Sc. cap. Sanc. Steph.) de S. Estienne fit de l’Eglise & bastiment de l’Hospital S. Jacques

 

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tout proche la riviere de l’Isle, où jadis un pont la traversoit: cest’ Eglise, bastimcnt & clos leur furent donnes à la charge qu’à la muance d’Abbesse, elle porteroit par hommage au grand Autel de S. Estienne un cierge d’une livre allu­mé durant la grande Messe (en marge: Hommage); comme aussi que tous les ans elle donneroit de rente un Marbotin d’or, vallant vingt sols, & deux livres d’en­cens: ce qui me faict conjecturer que ce Mo­nastere fut estably pour les Religieuses qui vivoient soubs la modification de la première reigle que Sainct François donna à Saincte Claire (en marge: Reg. S. Clarae) & à ses filles. Choppin dans son Monasticon (en marge: Chopp. Monasticon lib. I), faict mention dun arrest du grand Conseil, donné le dix-huictiesme Janvier l’an 1595 (en marge: Arrest) par lequel l’Abbesse de ce Convent nommée par les suffrages des Religieuses est confirmée contre celle qui avoit esté nommée par le Roy: d’où il infere que ceste Abbaye, ny toutes celles des pauvres Dames de Saincte Claire ne peuvent tomber soubs la nomination des Roys de France. (ll)

 

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Raymundus de Pons, Evesque & Cardinal.

Louys VIII, Roy de France & Duc d Aquitaine.

 

Henry Roy d’Angleterre por­tant à contre-coeur que le Duché d’Aquitaine avoit esté (en marge: L’an de Jesus-Christ 1223), quoy que tres justement, osté à Jean son frère & predecesseur, envoye à Bourdeaux son frère Richard avec trois cens vaisseaux. Le Roy Louys huictiesme ayant besoing de la faveur du Perigord pour le passage de son armée contre ses ennemis, donna au Seneschal de ceste province commandement expedié l’an mille deux cens vingt & trois (en marge: Ma. Sc. do. comm), de conserver & honorer les habitans de Perigueux, parce qu’il les avoit retenus perpetuellement annexes à la couronne de France; En suitte il depeche à l’encontre de l’Anglois son Mareschal (en marge: Ann. Franc.), qui pour traverser la Dordougne met le siege devant Limeul (en marge: Anglois depossedez), qui luy resistoit, & descendant plus bas contraint Bragerac de se mettre en l’obeyssance du Roy (en marge: Math. Paris.): ainsi l’arrivée de ce foudre de guerre fit flechir tout le Perigord, &

 

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presque toute la Guyenne luy obeyt (en marge: Dubouch. p. 3 c. 7): si que Richard fut contraint de revoir l’Angleterre avec ses vaisseaux chargez de honte & confusion. L’an 1226 S. Louys succede à la couronne de France (en marge: 1226), & sur l’an 1230 nous avions pour Evesque Raymond de Pons (en marge: 1230), de ceste ancienne & tres-illustre maison (en marge: Andr. le Chesne recher. des vill. de France), qu’on croit tirer son origine de Helius Pontius nepveu de Pompée (en marge: Sieur de Pons). Nostre prelat estoit fils de Bertrand de Pons, qui fut tué au premier voyage de la terre Saincte dans le siege de Hierusalem baillant l’assaut, & forçant la tour de David avec les trouppes qu’il conduisoit de son oncle Raymond Comte de Tholoze quatriesme du nom (en marge: Catel. compt. de Thol. lib. 2 c. 1), parrain de nostre Evesque. Il fut le premier des trois Cardinaux qui se trouvent dans la genealogie de ceste famille (en marge: Ma. Sc.), qui contient aussi plusieurs Evesques de Xaintes & d’Angoulesme. Je conjecture aussi qu’il ne fit residence en son Evesché, estant ordinairement occupé à la Cour du Pape Gre­goire neufiesme.

L’an 1231 (en marge: 1231) marque Archambaud premier du nom pour Comte de Perigord (en marge: Archambaud I, Comte du Perigord), & l’année suivante met Elies Taleyrand Comte (en marge: Helies Taleyr.; Com. Augenius Comte du Perigord), il fut mary de Brunisande fille d’Augenius jadis Comte de la mesme province.

Il ne faut obmettre en ce lieu ceste divine & toute extraordinairement prodigieuse punition (en marge: 1233) qui arriva l’année suivante 1233 à ce blasphemateur & mespriseur sacrilege de la saincte Croix au bourg de S. Leon prés de la Vezere

 

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en Perigord. L’inscription sur la pierre nous faict foy comme B. Boni seruiteur domestique de la Peyronnie en deqpitant la saincte Croix qui est hors le bourg, lança un dard qu’il avoit en la main contre le sainct Crucifix, dont sou­dain le sang rejallit; pour accuser l’impieté de ce nouveau deicide, qui soudain tomba roide mort sur la place (en marge: Punition divine), ayant son visage tourné derrier devant. J’ay veu le sepulchre de ce sacrilege, qui n’est guieres loing du piedestal de ceste Croix de pierre, prés duquel il y a quelques années on trouva l’inscription suivante (en marge: Inscription lapid.) qu’on a de nouveau gravé sur la porte de l’Oratoire.

L’AN DE GRACIA 1233. ET LO 5. DE NOVEMBRE SAVI ET MALVAT B. BONI SERVITOVR DE LO PEYRONNIO EN IVRAN. DIV SE COVRROVÇANT CONTRE LA CROVX DE L’HOSPITAL, GITET DARD QVE SANNET ET LO VISA­GE LI TOVRNET DAAN DARRE, ET MOVRIET AQVO EN PRESENCE DE THEVE TALONARY ET IEAN THEVLETI, ET FO FAOT UN BEL MIRACLE , SIGNE. B. FILIOV. (en marge: 1233)

Sans doubte le blasphemateur estoit Albigeois, qu’on appelloit Rouptiers (en marge: D’un Albigeois) pour les raisons cy-dessus alleguées (en marge: Vid. sup. 1160). Du depuis ce lieu a esté dans le pays fort en vénération. (mm)

 

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Petrus de S. Asterio, Evesque.

S. Louys, Roy de France & Duc d’Aquitaine.

 

Pierre de S. Astier (en marge: L’an de Jesus-Christ 1233), issu de la noble maison de l’Isle (en marge: Chenu Gall. Christ.; Origine), marqua bien avantageusement son zele & sa pieté envers son dioceze durant trente & trois ans, & sa fin sera couronnée du martyre non sanglant de la vie religieuse. Il estoit Evef­que de Perigord dés l’an 1233 & fut tellement accredité parmy les eiens, qu’és affaires les plus importans pour le public on luy deferoit toute la decision, comme au pere commun de tous.

Desja plusieurs contrastes survenoient entre ceux qui habitoient le Puy S. Front & l’ancienne cité (en marge: Ma. Sc. dom. comm.), d’autant que le nombre des maisons du bourg redifié depuis qu’il fut bruslé, surpassoit de beaucoup ceux de l’ancienne ville; & partant ils vouloient attirer à eux les droicts & jurisdictions de la maison commune (en marge: Debats); voire bien sou­vent les uns tenans le party Anglois, les autres celuy du Roy de France, mettoient tout en sedition implacable par tout autre que par leur Evesque. Ainsi l’an 1240 il fut nommé arbitre (en marge: 1240)

 

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avec Elies de Valbec Donzellus, & le Majeur ou Maire de la ville (en marge: Arbitres), par lesquels fut arresté que doresnavant ces deux communautez ne seroient qu’un mesme corps sans se faire guerre: mais ceste playe se r’ouvrira dans peu; au moins en l’année suivante 1241 le bon-heur & comme la branche de l’olive pacifique (en marge: 1241), fut posée entre les deux villes par restablissement de l’Ordre des Freres Prescheurs (en marge: Freres Prescheurs), au lieu où jadis Sainct Euparche fils du Comte du Perigord avoit basty une Abbaye (en marge: Vid. sup. anno 850), & du depuis les Chanoines reguliers de S. Jean de Colle avoient un Prioré & Eglise dediée à S. Martin. Joannes Balistarius Lymosin, conduisant les premiers Religieux de son Ordre depuis peu estably par S. Domini­que pour l’antidote de la secte Albigeoise, qui encore repulluloit de tous costez, se vint presen­ter à l’Evesque, qui le receut avec sa troupe religieuseuse à bras ouverts, & Bernard Guidonis qui escrit ceste fondation (en marge: Ma. Sc.; Bernard. Guido. in thes. F. Praed. Burdig.), remarque que pour lors dans le Chapitre Cathedral, multi reverendi & magna probitatis veri florebunt: lesquels unanimement s’accorderent avec l’Evesque pour faire un eschange avec les Chanoines de Sainct Jean (en marge: Eschange), jugeans que leur Prioré & Eglise sembloit convenable pour l’edifice d’un Convent de l’Ordre des Freres Prescheurs, ils leur donnerent au commencement en eschange l’Eglise du Toulon, & depuis l’Eglise de S. Martin prés des murs de la ville. Commençans donc leur Eglise en ce lieu, ils y trouverent la precieuse

 

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relique du Cranne de S. Denis l’Areopagite (en marge: vide sup. ann. 850), qui avoit esté conservée depuis le temps des Normans dans les ruines de ces bastimens, anciens comme nous avons dïct.

Délors que S. Louys fut appellé à la couronne (en marge: Revolte), & la Regence fut donnée à sa mere; plusieurs seigneurs mescontens couvoient dans le coeur la rebellion (en marge: Annal. Aquit. p. 4 c. I), specialement le Comte de la Marche & Angoumois, qui poussé par la superbe de sa femme accreut ce malheur (en marge: Joinville), après le mariage d’Alphonse frere de S. Louys avec la fille de Raymond dernier Comte de Tholoze. Pour lors le Roy erigea le Comté de Poictou en Duché (en marge: Nangis), & le donna à son frère, ce qui mit le fumet dans ces deux esprits tous disposez à la rebellion (en marge: Paul. Aemil.). Ils appellerent en Guyenne Hen­ry Roy d’Angleterre avec une puissante armée navalle, qui traina apres soy le soulevement de tout le pays, dans lequel le Comte du Peri­gord Elie, comme aussi nostre Evesque furent enveloppez, tenant le party de l’Anglois, sans en demordre ny par la victoire que S. Louys emporta sur eux à Taillebourg, ny par la dou­ceur ayant accordé tresves à ses ennemis (en marge: 1246): veuque l’année 1246 Pontius Seneschal du Perigord par vertu de la commission qu’il avoit du Roy, se presenta avec main forte au chasteau de Rolphius (en marge: Sieges), qui estoit proche de l’amphiteatre, sommant le Comte de rendre la place au Roy (en marge: Ma. Sc. domus comm.), & sur ce refus il somma l’Evesque de rendre aussi son chasteau Episcopal qui estoit proche, mais

 

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il n’y receut que du refus & injures, voire des tours en avant on blessa son cheual; dequoy irrité il fit dresser sur le champ les machines de batterie contre le chasteau Episcopal, deffendant de tirer contre l’Eglise Cathedrale qui estoit contigüe. Je ne sçay l’issue de ces sieges, seulement trouve-je que l’année suivante (en marge: 1247) fut faict un traicté de paix entre Elie Comte de Pe­rigord, le Chapitre de S. Estienne, les chevaliers & bourgeois de la ville, & quelques habitans du Puy S. Front (en marge: Paix): mais cela ne fut de longue durée (en marge: 1250); car l’an 1250 une estrange sedition derechef s’allume entre les deux communautez, & pour l’estouffer en sa course, ils font un compromis de croire le Sieur Evesque en ce qu’il ordonneroit sub poena duodecim mille solidorum. Par sa sentence il condemna les habitans de la cité d’aller en procession à l’Eglise des Freres Prescheurs tous en chemise, & que là à ge­noux ils demanderoient pardon à ceux de la vil­le, veu qu’ils les avoient notablement offencez (en marge: Satisfaction).

L’an 1258 nous apprend (en marge: 1258) qu’Archambaud second du nom estoit nostre Comte (en marge: Archambaud 2, comte du Perigord; comté); il eut pour femme Marie fille de Raymond quatriesme du nom Comte de Tholoze (en marge: Belloy l’est. de la mes. darm.), a laquelle Alphonse Duc de Poictiers, & successeur de la Comté de Tholoze, donna en dot la terre de Labardat. Et l’année suivante (en marge: 1259) nous presente une notable union entre les deux communautez si souvent divisées (en marge: Ma. Sc. D. C. titul. & ne nos.); elle fut traictée à la promotion de nostre Evesque, & ce en suitte

 

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de l’accord general que fit le Roy S. Louys avec le Roy d’Angleterre, lequel il avoit attiré en France, avec ses femme & enfans, & les princi­paux de son Royaume: & pour satisfaire à quel­que scrupule de sa conscience (en marge: Math. Paris.), neantmoins con­tre l’opinion de son conseil, il luy donna à hommage une partie de l’Aquitaine (en marge: Paul. aemil.), qu’il appella Guyenne, prenant l’ethimologie des Ducs Guielmes. L’estenduë de ce Duché comprenoit seulement trois Seneschaussées, Bour­deaux, Bazas, les Landes, ou Bayonne, avec Xaintonge, Perigord, Agenois & Lymosin. Auparavant cet accord, qui est plustost un don faict gratuitement à l’estranger (en marge: Donation à l’Anglois), le Roy avoit envoyé Thomas de Monthalairdon chevalier, maistre de ses arbalestiers vers le Comte de Pe­rigord pour le sommer derechef en presence de l’Evesque de remettre son chasteau à l’obeyssance du Roy avec Geoffroy du Pont qu’il y tenoit prisonnier (en marge: Ma. Sc. do. comm.). Le Comte demanda un jour pour y deliberer (en marge: Sommation), mais ne pouvant gaigner la volonté des soldats qui tenoient la place, vo­lontairement il se rendit prisonnier soubs esperance de fléchir les rebelles qui tenoient sa maison. Le tiltre qui testifie ce narré est seellé du cachet Episcopal, & commence par son nom Petrus.

Enfin la paix entre les souverains fit que tout le pays jouyt d’une grande tranquillité (en marge: Paix), dans laquelle nostre Pasteur s’estudia aux actions de pieté, specialement d’avancer la fabrique du

 

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Convent des Freres Prescheurs (en marge: Bern. Guido. Ma. Sc.), pour laquelle il donna bonne somme d’argent, unde non imme­rito, dict le manuscrit, D. Episcopus fuit conventus fratrum Praedicatorum vere pater & patronus. (en marge: 1260) Et augmentant de plus en plus en affection l’année 1260 il ordonne (en marge: Fondation) l’establissement d’un Convent de cét Ordre dans la ville de Bragerac (en marge: Fund. Conv. F. Praed. Brager.). Il fut secondé de Marguerite de Turene, femme de sire Renaud de Pons seigneur de la ville, & leur donna cinquante livres de rente annuelle pour un commencement. Elias Bruneti bour­geois donna par pieuse liberalité le fons & place où le Convent fut basty soubs la premiere dire­ction de Frere Bernard de Porcheres. Deux ans apres F. Guillelmus de S. Asterio, cousin de l’Evesque, fut le premier Prieur de ce nouveau Convent composé de douze Religieux.

Mais parmy toutes ces sainctes occupations (en marge: Ma. Sc. Guid.) nostre Evesque aspire par un sainct eslans au repos spirituel (en marge: Desir de Religion), les grandeurs luy sont à contrecoeur, la perfection religieuse l’attire puissamment à la retraicte; desja il sollicite les Papes Gregoire neufîesme, Innocent quatriesme, Alexandre quatriesme, à ce qu’ils receussent la cession de son Evesché, & luy accordassent la liberté de la retraicte dans l’Ordre de S. Domi­nique. Ainsi l’an 1266 il fut demeurer au Convent des Freres Prescheurs à Lymoges (en marge: 1266) atten­dant la grace, qui luy estant accordée par le Pape Clement quatriesme, il print l’habit de cét Ordre, auquel il vesquit sainctement durant

 

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huict ans quatre mois & demy, où il mourut le huictiesme Juillet l’an 1275 fut ensevely au milieu du cheur de leur Eglise, ou nous voyons à costé gauche un tableau posé comme pour epitaphe , qui contient l’epitome de sa vie en ces mots (en marge: Epitaphe; Inscript. tabellae), F. PETRVS DE S. ASTERIO EPISCOPVS PETRACHORICENSIS, summa scientia & eloquentia praeditus, magnus ac solemnis vir, utique bo­nus ac devotus: filius DOMINI DE INSVLA prope PETRACHORAS, venit ad hunc Conventum PRAEDICATORVM LEMOVICENSIVM prima die Marcii 1266. Et in habitu Episcopali mansit ibidem per annum, tandem magna cum difficultate praecibus im­portunis cessionem sui Episcopatus obtinuit à Domino CLEMENTE QVARTO, dignitate EPISCOPALI in omnibus & per omnia reservata, quam cessionem non potuerat obtinere à tribus summis Pontificibus praefatis Clementi, scilicet GREGORIO NONO, INNOCENTIO QVARTO, et ALEXANDRO QVAR­TO, post paucos dies a dicta cessione obtenta, habitum ordinis reverenter accepit & honorabiliter in eo Deo & ordini militavit annis octo, mensibus quatuor, cum dimidio: fecit multa & infinita bona Conventui tam in ornamentis Ecclesia quam in libris & edificiis, fecitque edificare domum DE BALALEV. Obiit autem pridiè IDVS IVLII, ANNO DOMINI 1275 ET EST SEPVLTVS IN ECCLESIA HVIVS CONVENTVS IN MEDIO CHORI. ANIMA EIVS REQVIESCAT IN PACE.

Il ne faut ensevelir la memoire d’une action tres-saincte, qui comme une belle perle enri-

 

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chit sa thiare l’an 1261 auquel temps soubs les doubtes & conjectures touchant le lieu où reposoit le corps du glorieux Apostre S. Front, plusieurs asseurans qu’il estoit perdu dans la furie des Normans és siecles passez: d’autre part ceux de l’Abbaye de S. Pons en Provence asseurans (en marge: Chrono. insulae Lerinensis), comme ils disent encore, que ce corps sainct estoit chez eux: mais aussi Dieu mesmes avoit baillé à quelques saincts personnages cer­taines revelations & visions que ce thresor nous restoit encor dans son sepulchre (en marge: Invention du corps sainct). Pour vuider ces differens l’Evesque de S. Astier assembla son Clergé avec les principaux bourgeois pour fai­re l’ouverture du sepulchre du sainct, dans le­quel estans descendus, ils trouvent un cercueil de bois, qui renfermoit un coffre de plomb, à l’ouverture duquel ils virent les ossemens du glorieux sainct, ensemble deux lames, l’une de plomb, & l’autre de cuivre, dequoy il fit ostension au peuple le lendemain dans son Sermon, ordonnant que la veille des Apostres S. Jacques & S. Philippe on celebrat anniversairement ceste translation avec Indulgence de 40 jours. Le procez verbal merite d’estre inseré en ce lieu (en marge: Procès verbal).

(en marge: Rescriptum Petri Episcopi Pet. anno 1261) Petrus Dei gratia Petrachoricensis Episcopus viris venerabilibus & discretis Abbatibus, Prioribus, Ecclesiarum Rectoribus, Clero ac populo universo Petrachoricensis Dioecesis ad quos praesentes litterae pervenerint, salutem in Domino Jesu Christo. Cum de corpore beatissimi Frontonis primi Pontificis Pe-

 

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trachoricensis longis retro temporibus fuisset a pluribus dubitatum, utrum in Ecclesia sua esset in sepulchro quod tumba S. Frontonis vulgariter appellatur, quibusdam ex ignorantia, aliis ex malitia dicentibus ipsum à Normannis fuisse ablatum. Nos & Capitulum & burgenses podii Sancti Frontonis volentes de hoc habere certitudinem pleniorem, auditis primitus & plenius intellectis quorundam proborum virorum revelationibus seu visionibus ostenfis à Domino ad ho­norem Sancti, de hujusmodi veritate: pridie Kalendas Maii devote praedictum sepulchrum intrantes, assistentibus nobis infra sepulchrum multis fratribus minoribus & Praedicatoribus, & multis Canonicis Sancti Frontonis, & duobus Burgensibus; exterius autem circa sepulchrum existentibus & assistentibus aliis multis Canonicis, Presbiteris, & Clericis, & Consulibus villae pradictae, aliis multis Burgensibus, cum magnis luminaribus cereis; aperuimus cum magno labore tumulum lapideum, in quo per famam publicam & alias conjecturas dictum sacratissimum corpus requiescere firmiter credebamus & invenientes in praedicto tumulo magnam capsam ligneam fortem & bene ferratam ipsam aperuimus, reperientes in ea magnam aliam capsam plumbeam, in qua invenimus sicut sperabamus sanctissima ossa corporis in­tegra, & per Dei gratiam incorrupta, & magna frusta capitis solida atque firma; & antequam de praedictis reliquiis aliquid tangeremus ambas capsas cum omnibus contentis in eis de praedicto tumulo extraximus, & ante oculos omnium praedictorum, & plurium aliorum de praedicta capsa plumbea, cum

 

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ingenti gaudio & devotione circumstantium, extraximus ossa singula, & universa reposuimus in quodam pulcherrimo novo instrumento ligneo, interius panno cerico involuto: quibus peractis & magnis laudibus & gratiarum actionibus Domino persolutis, praedictis omnibus videntibus, dictas reliquias reposuimus in sepulchro & tumulo de quibus extraxeramus (en marge: Vid. infra anno 1463, sub Elia Bourd. epis.), easdem servandas ibidem quousque in capsa nobili reponantur, quod erit in brevi Deo concedente. Poft istam autem translationem hora tertia de concilio cleri & populi, festum translationis incoavimus ad honorem Domini Jesu Christi, de beato Frontone missarum solemnia solemniter celebrantes innumerabili populo qui ad Ecclesiam istam confluxerat; finito sermone omnia supradicta fideliter exponendo, ostendentes eidem po­pulo laminam plumbeam in qua littera hujusmodi erant scripta (en marge: Inscript.), HIC IACET CORPVS BEATI FRON­TONIS IESV CHRISTI D1SCIPVLI, ET BEATI PETRI IN BAPTISMATE DILECTI FILII. Item ostendimus eidem populo aliam laminam cupream, vel aeream, litteras hujusmodi continentem (en marge: Vid. anno infra ad capit. I. Sanct. Fronton.). HIC IACET CORPVS BEATISSIMI FRONTONIS IESV CHRISTI DISCIPVLI, ET BEATI PETRI APOSTOLI IN BAPTISMATE FILII, EX LICAONIA REGIONE ORTI, DE TRIBU JVDA, EX SIMONE ET FRONTONIA. OBIIT OCTAVO KALENDAS NOVEMBRIS ANNO QVADRAGESIMO SECUNDO POST PASSIONEM DOMINI IESV. Istae duae laminae inventa fuerunt à nobis in capsa plumbea cum sanctissimo corpore supradicto, & quasdam alias literas invenimus in ipsa capsa plumbea inscriptas, multos

 

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versus ad laudem praedicti sancti compositos continen­tes. Cum igitur totus clerus & populus dictae dioecesis Petrachoricensis de tanto patrono, quisdem Catholicam primus in istis partibus praedicavit (en marge: Contra abbatem Solemnia censem in concilio Lemo. anno 1034), & populum ad Christum convertit gaudere debeat in immensum, universitatem vestram attente requirimus & rogamus, vobis in virtute sanctae obedientiae firmiter jungentes, quatenus festum praedictae translationis in vigilia Philippi & Jacobi ad honorem Dei, & beatissimi Frontonis perpetuis temporibus solemniter celebretis, nos enim omnibus pradictum festum pie & cum devotione celebrantibus quadraginta dies de injunctis sibi poenitentiis misericorditer relaxamus, datum sexto nonas Maii anno Domini 1261. (nn)

 

 

Helias Paletisis, Evesque.

Henry IV, Roy d’Agleterre (sic) & Duc d’Aquitaine.

 

Cependant (en marge: L’an de Jesus Christ 1269) le coeur du grand & tousjours sainct Louys (en marge: Joinville c. 62) demeuroit transpercé du regret sur l’infortune du premier voyage d’outremer (en marge: Voyage d’outremer) sans avoir peu suffisamment secourir les Chrestiens Levantins (en marge: G. nangis). Il assembla à Paris les principaux de

 

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son Royaume, se croize derechef avec ses trois enfans, se met au voyage, passe en Perigord pour aller s’embarquer à Aygues-mortes (en marge: Paul. Aemil.): estant à Sourzat il fit bastir l’Eglise de la Parroisse qui s’appella à raison de ce la Bastille de S. Louys. De là il fut à Cadoin pour rendre ses voeux au S. Suaire, & honorer ceste Abbaye par ses libera­litez. Je conjecture qu’en ce voyage il adoucit les coeurs de ceste province, qui par le passé avoit tenu le party de l’Anglois contre luy; si est-ce pourtant qu’après sa mort ceux du Pe­rigord se souvenans des maux passez soufferts par ses Officiers, refusoient de le recognoistre pour sainct.

Alors Elies Paletisis estoit nostre Evesque (en marge: Chenu. Gall. Christ.), & je trouve que ceste mesme année 1269 le dernier de Septembre (en marge: Dedicace) il consacra le grand Autel du Convent des Freres Mineurs de ceste ville (en marge: Consecratio altaris f. min.), In honorem Sancti Frontonis Apostoli B. Laurentii B. Francisci, & B. Agnetis Virginis. J’ay veu aussi dans le livre des hommages de l’Evesché une transaction qu’il fit avec l’Abbé & Reli­gieux de Sarlac, pour le Prioré de Sainct Leon qui luy fut assigné pour rachepter quelque ren­te qu’ils luy devoient: passons à plus amples mémoires. (oo)

 

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Raymundus Dauberoche, Evesque.

Edouard, Roy dAngl. & Duc d’Aquit.

 

Edouard premier du nom (en marge: L’an de Jesus Christ 1283), successeur de son pere pour la Couronne d’Angleterre & Du­ché de Guyenne (en marge: Nangis) estoit souvent troublé par les Seigneurs ses vassaux en la posseffion de ce qui n’agueres avoit esté baillé à son pere. L’an 1283 Raymond de la maison d’Auberoche tenoit ce siege Episcopal. Je trouve dans le thresor de la generalité de Guyenne (en marge: Ma. Sc. generali. Aquit. anno 1283), que ceste mesme année le Sieur de Bonnes obeyt au jugement de cét Evesque (en marge: Arbitrage), en rendant son hommage au Roy d’Angleterre pour la Seigneurie de Lymeuil, & chasteau & ville de Sainct-Drieux: le tiltre est cacheté du sceau Episcopal (en marge: Cachetes), portant d’un costé un Evesque gravé, & Raymundus autour, de l’autre l’effigie de S. Estienne: surquoy je prens occasion de faire deux remarques pour les escritures publi­ques & privées: la première est, que presque dans tous les tiltres de ce temps il n’y avoit de signature; ains seulement divers sceaux ou

 

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cachets pendus à des rubans ou lassets. Ceste pratique s’observe (en marge: Bern. Epistr. 330) dans S. Bernard en l’Epistre 330. Sygillum non erat ad manum, sed qui leget agnoscet stilum quia ipse dictavi. Il repere (en marge: Et ep. 339) le mesme en l’Epistre 339 ce qui est commandé par l’ordonnance de Philippe le long de l’an 1319. & encor aujourd’huy est pratiqué dans l’Allemagne & Suede (en marge: Vid. Pasquier en ses rech. lib. 4. 611). Secondement il estoit assez ordinaire à la pieté de ce siecle de deferer la decision des affaires temporels aux Ecclesiastiques (en marge: 1286): comme l’an 1286. Archambaud Comte de Perigord, ayant different avec les Magistrats de la nouvelle ville de Perigueux sur leurs jurisdictions (en marge: Ma. Sc. domus comm.), nomment avec plain pouvoir decisif le Pere Prieur des Jacobins, & Estienne de Juvenals, avec puissance d’augmanter ou diminuer aux articles de la transaction pendant deux ans, laquelle ils ratifierent, & Philippe le Bel l’approuva par ses lettres l’an 1293 (en marge: Acord).

Dés la première année du regne de ce Roy en aoust 1286 fut faict accort entre luy & ledit Roy Edouard (en marge: Du tillet recueil des traictés des Franc. avec les Anglo.), par lequel fut convenu que tout ce qui estoit des pays de Lymosin, Perigord, Quercy, seroit pour le regard du Roy Philippe audit Edouard specialement Brantosme en Perigord, excepté les acquets faicts par les Roys de France depuis la paix de l’an 1259.

L’Abbaye de Ligueulx (en marge: 1287) avoit esté honorée de la precieuse Relique d’un bras de S. Symeon apporté de Constantinople (en marge: Reliques): & d’autant qu’il ne falloit pas que ceste seule province jouyst

 

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de ce bras celuy qui de ses doigts soustient l’univers, l’Abbesse nommée Eyna print des lettres de l’Evesque (en marge: Lit. Reymond. episc. pro brach. S. Sim. anno 1287), expédiées & scellées, Octavo Kalendas Martias anno 1287 rendant tesmoignage à l’Archevesque de Bourdeaux, & à l’Evesque de Xaintes de la vérité de ceste Re­lique, conformement à ce que son predecesseur en avoit escrit, recommandant ceux qui l’apporteroient aux liberalitez des fideles. Dubouchet escrit (en marge: Dubouc. p. a. anno 815) que Charlemagne apporta de Jerusalem & de Constantinople entr’autres Reliques, un Suaire de Jesus-Christ, la chemise de la Vierge, & un bras de Sainct Simeon, neantmoins ce voyage est impugné par les plus doctes. En suite nous trouvons environ l’an 1191 que Louys fils unique du Roys Philippe II estant à Paris (en marge: Paulus aemil. in Phil. 2), attaint mortelement de la dysenterie, on luy apporta en procession un clou du crucifiement de Jesus Christ, la Saincte espine, & un bras de Sainct Simeon (en marge: Joa. Meyer), lequel on appliqua sur le ventre du Dauphin, & soudainement il reprint sa vi­gueur & sa vie (en marge: Miracle); je ne sçay si ce fut le mesme bras gauche qui est aujourd’huy honoré à Ligueulx.

En suitte de ce temps nous trouvons la fondation du Monastere de S. Pardoux la Riviere (en marge: 1291) faicte par Marguerite fille du Duc de Bourgongne pour les Religieuses de Sainct Dominique (en marge: Funda. Convent Sanct. Pardulp.). Gérard de Malmont, Abbé de Brantolme, tres-honorable Ecclesiastique, avoit esté nommé executeur testamentaire par ladite Dame; ce pourquoy il transigea avec le Prieur du Con-

 

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vent de Périgueux, se reservant quelques biens de la defuncte, & assignant pour la fondation & dotation du Monastere des filles plusieurs grands revenus (en marge: Fondation); or pour affermir le repos de ces servantes de Dieu, ledit de Malmont supplia le Roy Philippe le Bel qui estoit à Melun, de met­tre ceste maison religieuse soubs sa protection, & ratifier la transaction qu’il avoit faicte avec ledit Supérieur de l’Ordre. Ce qu’il luy accorda par les patentes qui commencent (en marge: Litt. Philip. Reg. Gal. ann. 1291). Philippus, concluant en ceste façon (en marge: Confirmée), Nos autem ipsius Magistri Gerardi devotis supplicationibus pro salute animae nostrae, & progenitorum nostrorum piè condescendimus, in hac parte volentes & concedentes quod Prior issa, & conventus praedicti loci pacifice gaudeat assignatione, concessione, & donatione praedictis, & praefatum Monasterium cum omnibus praedictis sibi assignatis acquisitis seu etiam acquirendis sub nostra tuitione suscepimus & ea recepimus in nostra custodia, & gardia speciali, & ut liceat famulantibus Domino in dicto Monasterio sub nostra & successorum nostrorum Regum Francorum Gardia & custodia in pace & tranquillitate vivere, & pro salute nostra & stabilitate regni nostri liberius contemplationi & orationibus vacare, praedictum Monasterium cum omni­bus sibi concessis, assignatis, & datis de praedictis, gardia & custodia speciali per hoc nostrum regale privilegium ad robur praemissorum, & ad aeternam rei memoriam communivimus, salvo in aliis jure nostro, & jure quolibet alieno, &c, Actum apud Meledunum, anno Domini millesimo ducentesimo nona-

 

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gesimo primo, mense Februarii.

L’année après (en marge: 1292) Raymond estoit encore no­stre Evesque, suivant les tiltres de Chancelade, il estoit surnommé Bardus, si je ne me trompe (en marge: Bardus): car dans l’afieusement du Sieur de Cugniac de Biron faict à Gérard de Fumel l’an 1285 (en marge: Ma. Sc.) il est dict Regnante Domino Edouardo illustri Rege, & Bardo Episc. Petrachoricensi, où nous remar­querons en passant la saincte coustume prati­quée durant plus de cinq ou six cens ans, de marquer dans les actes publics le nom de l’E­vesque, & de les cacheter du seel Episcopal, & du Chapitre Cathedral (en marge: Nangis), qui estoit gardé par le Capischol ou maistre-schole de l’Eglise.

L’Anglois trop impatient d’avoir n’agueres rendu l’hommage pour le Duché de Guyenne (en marge: Paul Aemil.) au Roy Philippe, dresse ceste année une armée navalle pour surprendre la Rochelle qui appartenoit aux François (en marge: Ann. de Franc.), lesquels d’autre-part estans opprimez soubs la domination de cét estranger se reclament au Roy de France (en marge: Plaintes). Le Perigord (en marge: 1293) fut des premieres provinces à se plaindre (en marge: Dubouchet pa. 4 c. 2). Surquoy nostre Roy envoya sommer Edouard de luy envoyer à Perigueux (en marge: Delest. recher. des Gaul.) ceux qui luy avoient voulu surprendre la Rochelle (en marge: Dutill. traict. entr. les Franc. & Angl.); en suitte le faict adjourner à comparoistre en personne à la Cour des Pairs par deux Chevaliers & le Seneschal du Perigord & Quercy Jean Darrablay. Sur son deffaut & contumace la Guyenne est saisie par le Connestable de Nefle, lequel venant à Bourdeaux est receu presque de tout le pays (en marge: Guienne aux François), & le

 

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Roy Philippe le Bel en recognoissance de la particuliere fidelité du Perigord, voulut que le Puy Sainct Front fut entouré de murailles pour estre la ville capitale de ceste province (en marge: Ville bastie), leur baillant les tailles d’icelle, qui montoient douze mille livres par an (en marge: Ma. Sc. do. com.), pour commencer & conti­nuer ceste fabrique. Il approuva aussi par les patentes de ceste mesme année la transaclion que le Comte Archambaud avoit faict avec les habitans pour les limites & bornes de leur jurisdiction. (pp)

 

 

Audoinus, Evesque.

Philippe, Roy de France & Duc dAquitaine.

 

(en marge: L’an de Jesus Christ 1294) Nous rencontrons Audoin pour nostre Evesque dés l’an 1294 & lan 1300 & trouvons que pour la police & bon reglement de son Chapitre Cathedral, il fit plusieurs bonnes ordonnances & statuts capi­tulaires. Pour lors Elie Talairand cinquiesme du nom (en marge: Elie 5 com. du Perigord), fils d’Archambaud second, & de Marie de Tholoze, estoit nostre Comte; il fut marié en premières nopces à Philippe Vicomtesse d’Auvilar & de Loumagne (en marge: Ex Beloy en l’estat de la maison d’Armagnac), de laquelle provint

 

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Marqueze de Perigord, laquelle desdaignant les grandeurs de sa naissance en parangon des thresors de la pauvreté religieuse, se cloistra par une saincte resolution dans le Convent des filles de Saincte Claire à Périgueux (en marge: Religieuse), où elle fit donation de tous ses biens à son Ordre: mais le Roy cassa ceste donation , & voulut que ces grands biens fussent donnez au Comte son pere, qui en secondes nopces espousa Brunezinde, fille de Rogier Bernard Comte de Foix (en marge: Ma. Sc. do. com.), duquel mariage sortirent les trois lumières de ceste province, Archambaud, le Cardinal Thaleyrand, & Rogier Bernard. Le gouvernement du Compte Elie fut assez paisible (en marge: 1302), mesmes l’an 1302 il ratifia la transaction que son pere Archambaud avoit faicte avec les habitans de la ville.

Son fils Archambaud troisiesme du nom fut marié à Jeanne de Pons (en marge: Archambaud 3, Com. du Per.), & demeura peu de temps Comte de ceste province: neantmoins dans ce temps il tesmoigna sa pieté en la fondation de la Chartreuse de Vauclaire en Perigord (en marge: Fund. Carthus. vallis Clarae), & après avoir bonnement posé la première pierre de ce bastiment il deceda (en marge: Fondations); mais son frère le Cardinal Evefque d’Albe, homme incompa­rable en pieté, continua munifiquement le dessein de son frère; comme aussi il se rendit signalé par la fondation du Collège de Peri­gord à Tholoze; sa mémoire est encore plus celebre dans tout l’Ordre des Pères Chartreux, lesquels ordonnerent dans leur Chapitre gene-

 

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ral qu’à perpétuité dans toutes les Chartreuses de la Chrestienté on diroit tous les ans apres son decez (en marge: Concessio Triennarii Card. Petroch. Taleyrando) un trigennaire de Messes pour son ame (en marge: Tricennaire): l’un des motifs de ceste ordonnance fut parce que ipse domum, seu Monasterium Vallis Clarae nostri ordinis inchoatum, per inclitae recordationis principem Archimbaudum Comitem Petrachorensem germanum suum praeclarissimum, quasi in primo lapide praematura morte, sed tamen devota & Deo grata sublatum erexit, munivit, magnificeque dotavit, & nihilominus quasi desuper abundanti pro supplemento aliquorum edificiorum restantium, duodecim millia florenorum in manibus ordinis novissime numeravit, & ut tenemus haud dubie maturius ma­gnificentiusque consummasset nisi guerrae quae ibidem perseveraverunt inter Reges Franciae & Anglicae viginti quinque annis & amplius obstitissent. Remar­quons icy comme le trouble de l’estat tempo­rel mettoit en desarroy l’Eglise de ceste province: ce qui m’obligera d’arrester quelque peu dans la suitte.

Roger Bernard troisiesme fils de Elie Taleyrand succeda a son frère (en marge: Rogier Bernard Com. du Perig.), il fut mary de Heleonor, fille de Bouchard Comte de Vandosme (en marge: Belloy ibid.) dés l’an 1308 jusques à l’an 1323 duquel mariage provint Archambaud quatriesme Comte du nom (en marge: Archambaud 4 Com. du Per.).

(en marge: 1305) L’an 1305 nous mena en ceste province le Sainct Pere Clement cinquiesme au retour de son sacre faict à Lyon pour revoir son pays originaire de l’Aquitaine (en marge: Vita summ. Pont.); il passe de Lymoges

 

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à Perigueux; de là vient à Bourdeaux où il avoit esté Archevesque l’année auparavant (en marge: Genebr. anno 1305): peu après il deposa Gautier Evesque de Poictiers, & le remit dans son Cloistre des Freres Mineurs (en marge: Concile); la cause estoit arrivée l’année auparavant, lors que le Pape estant Archevesque visitoit les Egli­ses de Poictou, il intervint de grands debats entre ces deux Prelats, à raison de leurs jurisdictions. Papirius Masso (en marge: Papir Mass. Not. Episc.) remarque que ceste année-là 1304 un Concile de ses Evesques suffragans avoient esté convoqué par cét Ar­chevesque au bourg de Rouffignac en Poictou (en marge: Conc. Pictav.), si que l’année suivante, ayant l’authorité en main, il deposa son andagoniste (en merge: Ann. Aquit. 4 p. c. 2). Ce qui ne fut approuvé du Ciel; comme le Pape recogneut après la mort du S. Religieux, suivant le rapport de S. Anthonin (en marge: Anthon. 3 p. tit. 24 c. 10). Peu de temps apres l’Evesque de Cahors Raymond Pauchelly fit avec plus de liberté cession de son Evesché (en marge: Demission), n’ayant peu supporter les oppressions contre les immunitez Ecclesiastiques: toutesfois il se vist contraint de demander au Pape quelque charité pour son entretien, desirant finir ses jours en repos sans aucune charge Ecclesiastique. Le Sainct Pere sur sa supplique, & du Cardinal son successeur à l’Evesché (en marge: 1312), expédia un Bref aux Archidiacres de Périgueux, Lymoges & Sarlac, specialement à l’Archiprestre de Sainct Meard (en marge: De cruce act. ep. Cadurcens.), à ce qu’ils donnassent à Raymond du bien d’Eglise jus­ques au revenu de trois cens francs (en marge: Breve Clem. 5), de peur qu’au préjudice de la dignité Episcopale il ne fut à

 

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raison de son zele reduit aux angoisses d’une amere pauvreté & honteuse mandicité. Commence Clemens Episcopus servuus servorum Dei dilectis filiis Lemovicensi Sarlatensi Petrochoricensi Archidiaconis & Sancti Medardi Petrachoricensis dioecesis Archipresbitero Ecclesiarum salutem & Aposlolicam benedictionem, &c. Le nom & la pratique des pensions estoit pour lors incogneuë. (qq)

 

 

Raymundus, Evesque

Edouard II, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

 

(en marge: L’an de Jesus Christ 1306) Edouard premier du nom, Roy d’Angleterre estoit mort dés l’an 1306 (en marge: Polidorus; Du tillet), laissant le Royaume à son fils Edouard second sans qu’il jouyt du Duché de Guyenne jusques à l’an 1308 lors Philippe le luy rendit moyennant hommage (en marge: 1308; Duché), & ce à raison du mariage qu’il luy accorda avec Izabelle fille de France.

Jean vingt & deux (en marge: 1316) natif de Cahors fut Pape l’an 1316 (en marge: Geneb. hoc anno) & d’autant que dans peu nostre Evesché changera de face, je veux dresser un tableau racourcy des lineamens qu’il avoit conservé

 

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durant plusieurs siecles (en marge: Estat du dioceze), disant comme auparavant les demembremens. Il y avoit dans le dioceze de Perigord sept Archidiaconez (en marge: Ma. Sc. cap.). Le premier & grand Archidiacre avoit soubs soy cinq Archiprestres, à sçavoir de la Quinte, de Tyviers, d’Issidueil, de Champagnac &d’Avaleuil. Le second Archidiacre en avoit trois, celuy de Neuvic, deVilades & de Velines. Le troisiesme Archidiacre en avoit trois, Perdurix, Vieux Marueil & Piliac. Le quatriesme avoit deux Archiprestres, Sarlac & Castelnau. Le cinquiesme en avoit deux, Limeuil & Beauregard. Le sixiesme en avoit trois, Montreuil, Galiardon & Caprasium. Le septiesme Archi­diacre avoit trois Archiprestres, Villebois, de Gouts & de Ladouble: mais il fallut sur ce corps mettre deux testes (en marge: Division). Le Pape Jean 22 or­donna un nouveau Evesché dans le Perigord, luy donnant ce qui est de ceste province au delà des rivieres de la Vezere & Dordongne, depuis l’Arche jusques au Fleix, soubs tiltre d’Evesque de Sarlac. La mesme multiplication fut faicte par luy dans plusieurs lieux de l’Aquitaine (en marge: Chron. Eccl. S. Pauli Narbonn.), l’Evesché de Tholoze estant erigé en Archevesché avec six nouveaux Evesques fuffragans (en marge: Extrav. Joannis Papae 22), Mirepois, Montauban, Lavau, Rieux, Lombés, & Sainct Papoul. Dans l’Archevesché de Narbonne il multiplia deux Evesques à l’Abbaye d’Alet, & à Sainct Pons de Thoumieres. Castres fut mis en deux. Il démembra aussi Alby; Agen eut de nouveau l’Evesché de Condom (en marge: Nouveaux Eveschez), Lymo-

 

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ges donna Tulle, Clairmont a de surcroy S. Flour, & Rodez eut Vabres, Poictiers receut deux nouveaux Eveschez, Maliezé & Lusson. Tout ce remuëment & multiplication sembla rude & fascheux à plusieurs, veu mesme l’ordonnance du Pape Anaclet (en marge: Epist. Anacl. Pap.), Episcopi in castellis aut modicis civitatibus ne constituantur, sed presbiteri per castella & modicas civitates & villas ab Episcopis ordinentur singuli tantum per singulos titulos suos, &c. Nonobstant ce (en marge: 1317), dans l’Abbaye de Sarlac sur estably un Evesché (en marge:Ma. Sc.), duquel Raymundus de Roca fut le premier l’an 1317. J’ay rencontré dans un vieux manuscript ses successeurs, comme aussi le nom des Abbés ses predecesseurs (en marge: Abbés), Raymundus de Felendou commençant l’an 1160 jusques au dernier Abbé Arnaldus de monte Elemardo; & d’autant que ceste chaire Episcopale & ses Prelats doivent se recognoistre estre sortis de nostre matrice; voicy leurs noms (en marge: Chenu ex quo Gall. Christ.) qui sont aussi rapportez dans le Gallia Christiana (en marge: Evesques de Sarlac). Le second Evesque de Sarlac fut Bertrandus Berengarius. 3. Arnaldus Ramiard. 4. Guillelmus de Sendrieus. 5. Petrus Berengarius. 6. Petrus de Mirolac. 7. Petrus Iterius. 8. Elias de Saligniac. 9. Asterius de Sancta Columba. 10. Joannes de Roussillon. 11. Giraldus de Paleirac 12. Raymundus de Bretenous. 13. Joan­nes Amici. 14. Joannes Arnaldi. 15. Bertrandus Lacropte. 16. Petrus Bonaldi. 17. Bertrandus de Rouffignac. 18. Pontius de Saliniaco. 19. Carolus de Bonavalle. 20. Guido

 

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de Idie de Ribeirac. 21. Arnaldus de Gontaud de Biron. 22. Franciscus de Bourgeul. 23. Joannes de Rolliac 24. Jacobus de Larmendia. 25. Cardinalis Nicolaus de Gaddis. 26. Fran­ciscus de Sancto Nectorio. 27. Franciscus de Saligniaco. 28. Ludovicus de Saligniaco. 29 Ludovicus de Saliniaco, qui aujourd’huy tient ce Siege Episcopal.

Au temps de ce demembrement Raymundus estoit Evesque de Perigueux, & suivant le livre des hommages il occupoit le Siege depuis l’an 1314 jusques à l’an 1328. (rr)

 

 

Petrus, Evesque

Raymundus, Evesque

Edouard III, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

 

(en marge: L’an de Jesus Christ 1328) Charles le Bel Roy de France mourant sans enfans (en marge: Nangis), appella à la couronne Philippe de Valois, comme son plus proche (en marge: Froissard I Vol.). Souvent il fut aux prises pour le Duché de Guyenne avec le fils d’Edouard (en marge: Duché), qui estoit mort en prison la mesme année du decez du Roy de France (en marge: Ann. de Franc.). Ce nouveau Prince Edouard troisiesme pretendant de grands

 

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droicts sur tout nostre Royaume, se fit apeller Roy de France, ce qui causa de grands soulevemens dans tout le pays, mesmes, ô malheur! Archambaud quatriesme du nom, fils de Roger Bernard & de Heleonor, se rendant au party de l’Anglois (en marge: Comté), obligea le Roy Philippe de Valois (en marge: 1328) de confisquer le Comté du Perigord l’an 1328. Ce que depuis fut revoqué, & le Comté rendu à Roger Bernard Chanoine de Paris (en marge: Rogier Bernard, Com. du Perig.), nepveu de Archambaud, duquel je trouve plusieurs actes 1’an 1331 & 34 specialement dans la generalité de Guyenne; nous voyons la transaction qu’il faict avec le Roy Philippe de Valois, pour l’eschange de Bragerac avec la Seigneurie de Monscuq l’an 1339 (en marge: Ma. Sc. de la general. de Guien.).

La revolte du Comte avoit mis du desordre par toute ceste province, mesme nostre Evesque nommé Pierre, est aux prises contre les Magistrats de la ville (en marge: Division), se maintenant estre en droict & possession de garder les clefs de la por­te de la ville ancienne, nommée Bourderie, pour son service de nuict & de jour (en marge: Ma. Sc. domus comm.): ce qui fut une bluette qui dans quelques ans embrazera & demolira la maison Episcopale, quoy que pour lors d’un commun accord les clefs furent don­nées à son Official & au Vicaire general, avec pouvoir de decider ce differend, lequel compromis fut violé par les Officiers de la ville qui firent mettre une ferrure à ceste porte; ce qui donna occasion à nostre Evesque de fulminer contr’eux par son Official la sentence d’excom-

 

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munication, de laquelle s’estans rendus appellans au Sainct Pere, le mal couva quelques ans (en marge: 1333), jusques à ce qu’il se presenta un second affaire plus fascheux, qui porta le sieur Evesque à jetter une seconde excommunication contre les officiers & les habitans. Le subject fut que le Roy Philippe de Valois ayant dressé une puissante armée par mer & par terre contre Edouard troisiesme (en marge: Froiss.; Du Till. I vol. in Phil.), & ses finances desja epuisées, pour avoir de l’argent, non seulement il mit à la presse les banquiers Italiens, signalez uzuriers dans son Royaume: mais encore il imposa sur son peuple des notables sommes, dont les officiers de la ville voulurent faire contribuer les Ecclesiastiques contre toute sorte de droicts & immunitez. L’Evesque ayant donné son excommunication contr’eux (en marge: Excommunication); ils s’en plaignent au Roy, qui l’an 1333 envoya commission au Seneschal de Perigord (en marge: Ma. Sc.) pour mettre le temporel de l’Evesché en la main du Roy, & retenir le bien jusques à ce que les Ecclesiastiques eussent payé: tant la necessité oblige souvent les grands d’enfraindre les loix les plus sacrées.

L’Evesque Raymond ne tient long temps l’Evesché. Je trouve son nom & Episcopat l’an 1336 parmy les tiltres de Chanselade (en marge: 1336). L’an 1339 est marqué par un acte tout pieux (en marge: 1339), c’eut la première fondation de la maison-Dieu en la ville nouvelle, soubs le tiltre de Saincte Marthe par le tres honorable & charitable Chanoine Brunet. Le tiltre de sa fondation est datté du

 

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Vendredy apres la Feste Sainct Barthelemy, soubs le Pape Boniface, disant comme le Chapitre Collegial de Sainct Front (en marge: Fondation de l’Hospital), composé de Jean Chalignac Chantre, Guillaume du Puy Rudel, Guillaume de Montardy, Girard de Armagnac, Pierre de Leiguié, Gérard de Mont-Preignac, Archambaud du Puy, Pierre Brunet, Maffre de Vigier, Jean de Chatillon, & Itier Boudin, Chanoines capitulairement assemblez, recognoissent qu’il y a une Aumosnerie en tiltre d’office dans leur Chapitre (en marge: Fundatio Zenochii Petroch.), d’où dependent certains revenus pour la nourriture journaliere de cinq pauvres, avec quelques au­tres charges annexées à cét office; & d’autant qu’il n’y avoit de maison pour retirer ces pauvres & les aumosmer, Pierre Brunet declare avoir faict eslever un Autel prés une maison qu’il avoit acquis, en intention de la consacrer pour recevoir les pauvres qu’il vouloit entretenir journellement, jusques au nombre de treize dans la maison de Sainct Amans, & à cét effaict il baille plusieurs belles rentes & revenus (en marge: Ma. Sc. dom. comm.), qui s’agrandirent apres, tant par l’union d’autres cinq Hospitaux du voisinage (en marge: Unions), qui fut faicte l’an 1552 comme aussi par les liberalitez des particuliers. (ss)

 

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Guillelmus, Evesque.

Edouard III, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

 

Dans peu de temps (en marge: L’an de Jesus Christ 1342) plusieurs & trop importuns changemens ne nous marquent rien de recommandable, fors que Guillelmus l’an 1342 & 1346 reçoit quel­ques hommages (en marge: Liber homm. episc.), comme Evesque de Peri­gueux (en marge: 1346). Rapelons en memoire le Cardinal du Perigord Taleyrand, qui voulut laisser dans sa ville un memorial de ses bien faicts, fondant la Chapelle qui aujourd’huy est apellée de S. Anthoine (en marge: Fondation); & pour le service d’icelle y establit douze Vicairies (en marge: Fund. 12 capel. S. Anth.), comme porte la supplique faicte au Pape Clement 6 qui demandoit à sa saincteté d’agréer ceste fondation, avec les statuts & bons reglemens qu’il avoit dressez pour polisser les douze Chapellains (en marge: Bulla Clem. 6), ce qui fut faict par Bulle expédiée l’an 1347 (en marge: 1347).

Nous voicy insensiblement engagez dans les funestes desordres de la guerre (en marge: Froiss. I vol.), qui troublerent l’Eglise de ceste province durant les vingt ans ja mentionnez (en marge: Guerres): car dés l’an 1344 (en marge: Paul Aemil.) Edouard troisiesme est au prinses contre le Roy de

 

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France, envoyant à Bourdeaux le Comte d’Herby avec une puissante armée (en marge: Bell. Forest.): d autre-part le Comte de l’Isle Gouverneur de Guyenne pour s’opposer aux ennemis, rassemble à Bragerac l’eslite de la Noblesse du party du Roy pour s’opposer à l’estranger, qui dans peu les assiege, les bat en ruine; le Comte Valantinois y est tué à l’assaut, le Comte de l’Isle blessé, les principaux des nostres saisis d’effroy abandon­nent de nuict la ville; ainsi les habitans se ren­dent le lendemain entre les mains de l’Anglois. Le siege d’Auberoche est encore plus funeste aux François (en marge: Infortunées): car dix mille furent surpris par mille; plusieurs Seigneurs sont faicts prison­niers, entre lesquels fut le Comte du Perigord. De là à quelque temps le vainqueur repasse dans ceste province, ravageant comme un tor­rent débordé rout ce qui s’opposoit à sa furie. Toutesfois peu apres Philippe reconquit plusieurs places dans la Guyenne, & mourant l’an 1350 le Roy Jean luy succede (en marge: 1350). Ces malheurs grossirent par la perte de la bataille de Poi­ctiers, les Anglois demeurans vainqueurs sur les François. Auparavant que ces deux gros nua­ges vinsent à s’entrechocquer par la bataille, le Sainct Pere Innocent 6 natif du Lymosin (en marge: Vie des Papes Inn. 6), envoya en diligence deux Cardinaux ses Legats (en marge: Legats Apostoliques), pour dissiper cét orage, & empescher que les armes du Roy de France & du Prince de Galles ne s’entrechoquassent (en marge: Froiss. c. 155 & 160 t. I), le Cardinal Taleyrand, l’un des deux Nonces (en marge: 1356), porté d’un zele particu­lier

 

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lier envers son pays, se rendit en diligence aux deux armées, abouchant à diverses reprises les deux generaux, avec des paroles qui pouvoient tout à faict dissiper la tempeste (en marge: Pour appaiser); puis que sur le poinct de donner le signal de la bataille il obtint surceance d’armes pour un jour: voire desja le Prince des Galles luy avoit donné parole de se retirer, son honneur & celuy des siens demeu­rant sauve: mais l’impatience naturelle aux François, le desir de reparer la honte du passé, specialement le Cardinal du Perigord leur semblant suspect, d’autant qu’il avoit trois grands Seigneurs ses proches parens dans l’armée des Anglois, les fit totalement resoudre à livrer le lendemain la bataille (en marge: Bataille) à leurs ennemis (en marge: Ann. Aquit. 4 p. c. 3), qui à la faveur de ceste surceance d’armes s’estans en­core mieux revanchez (en marge: 1357), soustindrent l’assaut, & en suitte se ruerent tres-funestement sur nos trouppes (en marge: Du Till.): si que le Roy Jean demeura leur pri­sonnier ayant perdu la bataille (en marge: Belleforest). Le Cardinal de Perigord l’année apres ne perdit courage de poursuivre le traicté de paix à Bourdeaux (en marge: Chron. Geneb.), où le Roy avoit esté mené prisonnier; mais il est remis en Angleterre, où le Roy fut conduit pri­sonnier, jusques au traicté de Bretigny faict l’an 1359 par lequel il est dict specialement (en marge: 1359) que le Poictou, l’Agenois, Perigord, Lymosin, Quercy & Angoumois seroient donnez en souveraineté à l’Angleterre (en marge: Traicté).

Jaçoit que ces lugubres desordres divertissent grandement les sainctes intentions du Cardinal

 

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Taleyran, si est-ce pourtant que de coup à coup il portoit son souvenir sur le bien spirituel de ceste province (en marge: Cardinal Taleyran), dés l’an 1342 il obtint une Bulle du Pape Clement 6 en faveur de l’Eglise Collegiale Sainct Front, par laquelle le Cha­noine qui est en Hebdomade a puissance de reconcilier l’Eglise & le Cemetiere lors qu’ils sont pollus. Plusieurs autres sainctes actions de ce grand Prelat sont celebrées dans l’acte de la fondation du Trentenaire (en marge: Concessio Triennarii in brevario Carthusianorum) qui luy eet accordé par les Peres Chartreux dont nous avons parlé cy-dessus, comme aussi nous voyons en plusieurs lieux ses armories, qui marquent le soing qu’il a eu des edifices Ecclesiastiques, tant dans l’Abbaye de Chancelade dont il estoit Abbé, comme en plusieurs autres endroicts.

Le Pape Innoccnt 6 estant à Avignon (en marge: Vita Pontif. Gallice) donna le chapeau de Cardinal à quelques Prelats de France: Pierre Iitier Evesque d’Acqs, originaire de ceste Province (en marge: Ma. Sc. Cancell.), fut faict Cardinal le 16 Septembre l’an 1361 (en marge: 1361).

Nous avons veu comme par le traicté de Bretigny nous demeurions subjects à l’Anglois: rnais il estoit bien rude de flechir les volontez de nos François. Jeanne fille du Comte Roger avoit demeuré heritière de son pere (en marge: Meyn. 3 part. l. 9), a raison dequoy elle porta à son mary Jean d’Armagnac second du nom le Comté du Perigord (en marge: Jean d’Armagnac, Com. du Perigord). Ils s’opposerent fortement avec plusieurs autres Sei­gneurs à ceste distraction l’an 1364 ce que fit aussi Archambaud estant remis en grace (en marge: 1364), & ses

 

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enfans furent honorablement dans l’employ pour les François sans vouloir flechir à l’estranger: toutesfois l’instante prière de Charles cinquiesme depuis peu Roy de France (en marge: Froiss. t. I) les porta à recognoistre l’Anglois pour le bien de la paix, mesmes lors que le Prince des Galles fut secourir le Roy de Castille Pierre le cruel (en marge: Dupl. t. 2), le Comte Archambaud luy fit compagnie avec le Seneschal du Perigord.

Papirius Masso (en marge: Papir. Mass.) remarque que l’année suivante 1365 Elie Archevesque de Bourdeaux assembla les Evesques ses suffragans dans un Concile (en marge: Not. Episc. Gall.) pour remedier par la faveur de la paix aux desordres de l’Estat Ecclesiastique (en marge: Conc. Burd. anno 1365). Aujourd’huy nous ne trouvons les actes de ce Synode, le tout estant perdu dans les confusions qui se preparent: car les playes à demy consolidées se r’ouvrirent dans peu, lors que le Duc (en marge: Annal. Aquit.) voulut imposer sur toute la Guyenne le droict de foüage (en marge: 1369; Fouage), le Comte de Perigord avec quelques autres Seigneurs forment leurs oppositions pardevers le Roy Charles (en marge: Chronic. Burdigal.) qui les receut à bras ouverts (en marge: Froiss. t. I), les mit soubs sa protection, tant cét appel estoit juste, par l’adveu mesmes des Historiens Anglois, quia, dict Polidore Virgile (en marge: Polyd. lib. 19 Hist.), nimis vectigalium exactionibus ab Anglis pramebantur. Le Roy Charles pour faire droict aux plaignans envoya à Bourdeaux adjournement personnel (en marge: Adjournement) au Prince de Galles pour comparoistre à la table de marbre (en marge: Chronic. Engol. Corl.), auquel il respondit, qu’il comparoistroit de vray, le bassinet en teste, accompagné de soixante

 

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mille hommes de guerre (en amrge: Ma. Sc.). Soudain Louys fils & Lieutenant du Roy en Guyenne, faict Taleyrand frere & fils du Comte de Perigord General de son armée, avec commission de faire telle levée de gens de guerre qu’il seroit requis: commande aussi à Archambaud cinquiesme du nom (en marge: Archambaud 5 Com. du Per.), de faire la plus forte guerre qu’il pourroit contre l’Anglois.

Ces tristes nouvelles mirent le miel en bou­che du Roy d’Angleterre pour couvrir la rigueur dont son fils nous avoit voulu traicter, il expedia ses patentes qu’il fit publier à Bourdeaux (en marge: Chron. Burdig.), disant avoir esté adverty, que son fils le Prince de Galles molestoit l’Aquitaine (en marge: 1370); partant qu’il luy commandoit de cesser ces exactions, & de restituer ce qu’injustement estoit pris (en marge: Litt. Edouardi Regis Anglorum), & si aucun de nos feaux amis & subjects, tant Prelats comme gens d’Eglise, Universitez, Colleges, Evesques, Comtes, Viscomtes & Barons, Communautez, gens de ville, se sont retournés, & se sont voulus tenir par mauvaises informations & pauvre advis au Roy de France nostre adversaire, nous leur pardonnons le mesfaict, si ces lettres veuës ils retour­nent à nous, ou dans un mois apres, &c. Ce que nous avons solemnellement juré sur le corps de le Jesus-Christ le cinquiesme Novembre l’an 1370 (en marge: 1370). Voila les inventions d’Angleterre pour arrester les esprits de l’Aquitaine qui tournoient leurs affections vers Charles cinquiesme, qui aussi de son costé par ses patentes données la mesme année 1370 promettoit aux habitans de Périgueux de les

 

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traicter avec les mesmes immunitez, franchises & privileges que les bourgeois de la ville de Paris, les exemptant de tailles, d’estre subjects à l’appel du ban & arriere-ban, permis d’acquérir fiefs nobles sans finance, & autres grands advantages (en marge: Litt. Carol. 5 anno 1370 sub nota Socii), partie desquels ils avoient desja accordé l’année precedente. Ainsi l’Anglois ne peut adoucir ceux de ceste province, c’est pourquoy il envoya fondre sur eux le Comte Pennebrot (en marge: Froissard t. I) avec une puissante armée qui nous fit sentir des premiers la cholere de son Roy (en marge: Furie Angloise), les voisins confederez en eurent leur bonne part, Lymoges est mis à feu & à sang, l’Evesque de la ville fut compagnon de l’eschaffaut à trois mille habitans: bref tout est en desolation qui par son hor­reur me faict arrester la plume. (tt)

 

 

Petrus, Evesque.

Edouard, Prince des Galles & Duc d’Aquitaine.

 

(en marge: L’an de Jesus Christ 1370) Charles cinquiesme recognoissant la fidélité du Comte de Peri­gord, en foy & parole de Roy, luy promet par ses patentes, que luy ny ses successeurs à la couronne de France, ne mettroient jamais hors leurs souverainetez (en marge: Meynard p. 3 lib. 9) les

 

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terres feodales de son Comté, desquelles il luy avoit rendu hommage: mais, ô jugement de Dieu! ce fidel vassal deviendra rebelle à son souverain peu de temps après; mesme sa soeur Eleonor fut mariée à Gaillard de Durford, sieur de Duras, laquelle mourant laissa sa fille Marguerite de Perigord Comtesse Doné en Poictou, qui luy estoit substituée pour le Com­té du Perigord, laquelle dés l’an 1364 fut ma­riée à Renaud de Pons, à condition qu’il tiendroit le party de l’Anglois; à quoy pourtant il ne s’arresta lors que Charles cinquiesme envoya Duguesclin son Conestable dans la Guyenne (en marge: Hist. Duguesc. c. 50): pour lors le Comte Sire de Pons se met de son party, & se trouve avec honneur pour la France dans nos histoires (en marge: Froissard): à raison dequoy (en marge: Confiscation) Edouard donna & confisqua à sa femme Marguerite de Perigord les biens de son mary (en marge: Paul. Aemil.), par lettres que j’ay veu, expédiées à Xaintes le septiesme de May l’an 1371 (en marge: Litterae Edouardi anno 1371) dans lesquelles Edouard se nomme fils aisné du Roy de France & d’Angleterre, Prince d’Aquitaine & des Galles.

Desja le Duc de Lenclastre faict descendre à Calais une seconde & tres-puissante armée contre la France (en marge: 1373), & comme un torrent debordé, forçant & renversant tout, traversa l’Auvergne, Lymosin (en marge: Polyd. Virgi.), & vint en Perigord, desolant tout le plat pays (en marge: guerres), jusques à Bourdeaux, où il fit sa retraitte (en marge: Ann. de Franc.). L’année suivante 1374 nous trouvons pour Evesque du Perigord un Petrus (en marge: 1374), lequel siegera plus long temps dans son Pontificat que

 

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ses predecesseurs (en marge: Ma. Sc. Cancell.), quoy que non si paisiblement, à raison des malheurs publics qu’il nous faut poursuivre.

La mort du Prince des Galles (en marge: 1376) l’an 1376 mit un peu d’eau au vin boüillant de 1’Anglois (Annal. Aquit. 4 p. c. 6), estant suivie du decez de son pere Edouard: joinct que Richard fils du Prince des Galles, heritier du Royaume d’Angleterre, estoit assez jeunet ce qui donna occasion au Duc d’Anjou frere de Charles, de venir soudain avec nouvelles for­ces dans la Guyenne (en marge: 1377), commençant des conquestes par Bragerac en Perigord, contre lequel il pose le siege (en marge: Bell. Forest.; siege), le bat de furie: l’Anglois qui vient au secours est mis en pièces (en marge: Froiss. t. 2), les assiegez se rendent, & sont suivis de plusieurs places de ceste province, comme d’Auberoche, de l’Abbaye de Cadouin & autres (en marge: Paul. Aemil.). Il est à croire que nostre Evesque tenoit le party de l’Anglois, & les habitans de la ville celuy de France: puis qu’ils se ruent sur la maison Episcopale (en marge: Ma. Sc. dom. comm.), la bruslent, la demolissent, se servent des materiaux pour renfermer leur ville (en marge: Evesché demoli). A raison dequoy l’an 1379 à la faveur de quelque tresve il les actiona (en marge: 1379), le procez fut devolu pardevant Clement septiesme (en marge: Chronol. geneb.), qui estoit a Avignon, recogneu par les François pour Pape. Apres plusieurs contrastes le Roy de France accorda ce differend, ordonnant que les habitans payeroient à l’Evesque trois mille Francs d’or, desquels le Scindic paya mille contents, les autres deux mille payables dans un an: mais ne pouvant acquiter ceste fomme l’année

 

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suivante, ils eurent recours au Roy, lequel manda à l’Evesque qu’il se rendoit plaige de ce debte, lequel il vouloit payer à la descharge de la communauté (en marge: Accord unique), pour laquelle il luy demandoit acquit: ce que l’Evesque refusant, le Roy mande au Seneschal de l’y contraindre; mais lors qu’il voulut proceder contre luy, l’Evesque l’excommunia, & sur l’apel interjetté pardevant le Roy, sa Majesté s’obligea à l’Evesque, & luy fit donner quittance du debte à la communauté. Que falloit-il esperer de mieux en ce temps déplorable? auquel la France avoit colloqué l’idole dans le Siège de S. Pierre, qui n’avoit d’yeux pour voir l’oppression de l’Eglise, point de langue pour crier, point de mains pour la deffendre: cepen­dant le Seneschal demeuroit dans l’excommu­nication, jusques à ce qu’elle fut levée (en marge: 1382) par Monsieur le Cardinal d’Ans l’an 1382.

A peine ceste querelle estoit assoupie, que la mesme année un autre (en marge: Querelle) se r’alume entre l’Evesque & la maison de ville (en marge: Ma. Sc. Ibid.) sur l’estenduë de leurs jurisdictions, l’Anglois cependant se saisit du chasteau des Rolfies, qui appartenoit au Com­te Archambaud, comme nous avons souvent dict, celuy qui commandoit dedans ayant traistreusement abbatu le pont au Seigneur de Mussidan Anglois: ceste place estant tout contre la ville de Périgueux, qui tenoit pour les Fran­çois, contraint les habitans de composer avec le preneur, à la somme de trois mille francs d’or, ainsi la place fut remise.

 

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Mais quoy? la desloyauté du Comte Ar­chambaud demeurera elle impunie? non sans doubte; car l’an 1391 le Roy Charles envoye mandement (en marge: 1391) au Seneschal de ceste province pour le prendre prisonnier (en marge: Comte) avec ses complices hors de lieu sainct. De plus Robert de Betune Viscomte de Meaux, Lieutenant du Seigneur de Coussi, qui estoit Capitaine general du Roy en Guyenne, faict demolir le chasteau de Rolphius (en marge: Ma. Sc. dom. comm.) , duquel le seul emphiteatre à retenu le nom de Cacorotta: en suitte dequoy les officiers de la ville degagés de ceste oppression font serment de fidélité au Roy de France dans l’Eglise de Sainct Front entre les mains dudit Sieur Viscomte, & d’Aymeric de la Roche Choüard Seneschal: ainsi ceste année donne un peu de respir à la paix. Mesmes l’accord est arresté sur la querelle desja intervenuë entre la maison de ville & le Sieur Evesque pour les bornes des jurisdictions (en marge: Bornes), estant convenu qu’aux limites accor­dez on releveroit des grandes pierres, qui d’un costé porteroient les armes de la ville gravées, de l’autre celles de l’Evesque, qui sont trois bezans traversez d’une barre lesquelles nous voyons en plusieurs endroits, pour marque que ce Prélat avoit contribué notablement aux bastimens Ecclesiastiques.     

Tous ces maux racontez cy-dessus (en marge: Schisme) n’estoient rien au prix de celuy du Schisme qui attaqua le chef de toute l’Eglise par l’Antipape nommé Clément (en marge: Plat. in vita pont. Paul Aemil. Naucler.), lequel avoit excommunié, fulminé,

 

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& anatematizé Urbain 6 avec les Anglois qui luy adheroient. De ceste generale combustion nasquirent mille desordres; en voicy un notable. Nous avons veu comme un des saincts Suaires de la sepulture de Jesus-Christ fut apporté à l’Abbaye de Cadoin en Perigord, il y a tantost 270 ans: de present ceste Abbaye estoit sur la frontière du pays qui tenoit pour l’Anglois, lesquels toute la France reputoit pour excommuniez & fauteurs de l’Antipape: comme reciproquement les Anglois nous reputoient pour tels, & partant indignes de posseder ceste sacrée Relique: ainsi ils estoient desja aux aguets pour l’envahir. L’Abbé de Cadoin Bertrand de Molinis trouva bon de prendre secretement ce S. linge, & le porter en lieu d’asseurance (en marge: Sainct Suaire à Tholoze): la ville de Tholoze (en marge: Ma. Sc. domus comm. Tholosae) luy sembla convenable pour ceste garde, & ce sera des nobles memoriaux de leur maison de ville que j’emprunteray le recit de ceste histoire, apres ce que Nicolaus Bertrandi (en marge: Histor. Tholoz. Nicol. Bert. anno 1392) en dict en ces mots, Anno Domini 1392 cum Reverendus in Christo Pater Dominus Bertrandus de Molinis Abbas de Cadunio, certificaretur quod aliqui schismatici, de partita adversaris Domini nostri Regis nitebantur per vim à dicto Monasterio de Ca­dunio abstrahere sanctum Sudarium, in que Dominus noster Jesus Christus in sancto Sepulchro fuit involutus quod per ducentos septuaginta annos in dicto Monasterio permanserat, causa ipsum translatandi in aliquem locum obedientiae adverfaris Antipapae Domini nostri Regis Gallia. Considerans etiam di-

 

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ctus Abbas dictum Monasterium esse in fronterio dictorum schismaticorum, & pluribus aliis rationibus, dictum sanctum Sudarium secrete portare voluit in praesentem civitatem: quelques autres conventions entre le Sieur Abbé & le Chapitre de S. Sernin de Tholoze sont accordés, entr’autres, que le sainct Suaire seroit mis en l’Eglife du Taur pour y estre veneré, & que le Chapitre achepteroit un logis tout contre pour la residence de l’Abbé & de ses Religieux.

Cela condud, au jour de S. Simon & Jude, la solemnité de la translation du sainct Suaire de Jesus-Christ fut faicte par l’Archevesque de Tholoze Pierre de Molendino, lequel accom­pagné de neuf Evesques le porta par la ville (en marge: Ostension) où plus de trente mille ames, soit forains ou habitans, s’estoient assemblez (en marge: Ma. Sc. domus comm. Tholosae), & pour l’ostension il choisit l’Eglise depuis peu bastie hors la porte d’Arnaud Bernat, in Cernio Sancti Quentini. De là il fut remis en l’Eglise du Taur, & gardé fort religieusement: toutesfois les Tholozains ne nous raviront si impunément ce sacré thresor; car les habitans de ceste province se liguent avec l’Ordre de Cisteaux, font un Scindicat pour poursuivre leur droict devant le S. Pere contre le Chapitre de S. Sernin (en marge: Ma. Sc. domus comm. Tholosae), comme j’apprens de ce qui suit (en marge: 1394), Anno Domini 1394 die I 10 mensis Maii, Domini de Capitulo praedicti, fecerunt plures fieri legationes ad Dominum nostrum Pappam, & ad Dominum nostrum Regem, & ad Dominum Abbatem Cisterciensem; & quia gentes Petrachoricenses

 

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petebant restitui in loco de Cadunio dictum sanctum Sudarium asportatum huc; super quibus in curia Romana diu fuit litigatum inter gentes partitae praedictorum Petrachoricensis, procuratorem fiscalem Do­mini nostri Papae, procuratorem generalem Ordinis Cisterciensis ex una parte, & scindicum Dominorum de Capitulo, & dictum Dominum Abbatem ex parte altera.

Durant ces contraires faisons une reveuë (en marge: 1394) chez le Comte Archambaud devenu un peu plus sage par sa perte (en marge: Ma. Sc. do. com.), l’an 1394. il traicte avec leViscomte de Meaux, luy remettant en sa puissance soubs l’obeyssance du Roy les chasteaux d’Auberoche, Roussille & Bourdeille (en marge: Paix): ainsi tout demeure en calme, mesme le ciel semble promettre une gratieuse paix à tout le pays (en marge: Chron. Burd.), par l’entreveuë de Richard Roy d’Angleterre, avec Charles sixiesme, le mariage de l’Anglois conclu avec Isabeau fille de France (en marge: Du Till.), la solemnité parachevée elle est conduite en Angleterre par son espoux (en marge: Froiss t. 2), qui commit au Duc 1’Enclastre son oncle le duché de Guyenne (en marge: Juvenal des Ursins): lequel neatmoins ne fut au goust des Bourdelois (en marge: Polid. Virgil.), qui refusent de recevoir tout autre pour Gouverneur que le Roy Richard (en marge: 1395); mais estant peu après depossedé de son Royaume par Henry son cousin germain le duc de l’Enclastre (en marge: Froiss. t. 2 c 110), fut en suitte reduit à la perpétuelle prison.

Henry (en marge: Henricus 4 duc Aquit.) se voyant de nouveau receu à la couronne d’Angleterre ne voulut recevoir tous ces traictez que ses predecesseurs avoient conclu

 

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avec les François, ains regaigna doucement les affections des principaux Seigneurs de la Guyenne: voire il attira à son party le Comte de Perigord (en marge: Comte), lequel s’eschappa à plusieurs actes d’hostilité (en marge: Ma. Sc. do. com. munis.), mesmes contre l’Abbaye S. Front & tout le Clergé de ceste province (en marge: Ma. Sc. dom. de Pons.), dequoy ils forment leurs plaintes à Charles Roy de France, qui luy manda de se tenir coy, sans traicter hostilement ses subjects, à quoy il n’obeyt; ains se declara tout à faict ennemy de ceste couronne, faisant plusieurs felonnies contre les serviteurs du Roy, specialement la lubricité de son fils Archambaud (en marge: 1396), desja recogneu pour Comte, causa un sanglant desordre au Puy S. Front; ayant jetté l’oeil de concupiscence sur une fille d’une honorable famille. Il se resolut de la ravir par l’assistance de ses satellites (en marge: Archambaud 6 comte du Perig.); mais ses parens avec les habitans du lieu se mettent en deffence, dont plusieurs furent massacrez, & en suitte continua plusieurs violences. Les Maire & Consuls forment leurs plaintes au Roy de France, obtiennent contre le Comte condemnation a trente mille livres d’amende à la fondation de de deux Chapellanies destinées pour prier Dieu pour les ames des tuez; tous les adherans bannis hors du Royaume fors un Moyne qui fut laissé à la justice de son Ordre, le chasteau de Roussille où se tenoient les brigands conquis au Roy.

Cecy effaroucha davantage le Comte & les siens (en marge: 1398), qui s’esleverent (en marge: Juvenal des Ursins) à de plus grands desor-

 

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dres: surquoy le Roy envoya à l’encontre une armée conduitte par le Mareschal de Bousicaud qui le cita, & sur la contumace le condamne cri­minel de leze Majesté avec tous ses adherans, & que les chasteaux de Montignac, de Bourdeille, Auberoche, Causade, & autres seroient razez. Bientost apres il le cantonna dans le chasteau de Montignac (en marge: Prisonnier), le contraignit de se rendre, & se soumettre au jugement du Parle­ment de France, auquel il est amené & con­damné attaint du crime de felonnie, le Comté du Perigord est confisqué au Roy.

Ceste punition du Comte (en marge: Condamnation) fut de beaucoup plus severe que celle qui avoit esté obtenue par les mesmes Magistrats contre le Comte Elie Taleyrand l’an 1247 par nous obmise (en marge: Vid. sup. 1247): car pour lors, soit à raison de violences, razemens de maisons, & meurtres des habitans du Puy S. Front, que pour les ruines causées à l’Eglise Cathé­drale S.Estienne, soustenant le siege dans son chasteau des Rolphies, il fut seulement con­damné envers les parens des deffuncts au revenu du Comté qui proviendroit dans trois ans dans l’enclos du Puy S. Front: mais encor les citadins fauteurs de sa rebellion furent condamnez à la fondation d’une rente notable pour prier pour l’ame des murtris (en marge: Ma. Sc. dom. comm.); aussi le menu peuple executeur de sa fougade perdit les biens qui estoient dans l’enclos du Puy, & fut banny hors la banlieue; de plus les autres habitans de ce lieu qui tenoient le party du Roy contre le Comte,

 

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pour avoir lancé par leurs machines de batterie des quarreaux contre l’Eglise Cathedrale, quoy que par mesgarde, furent condamnez à donner un ciboire d’argent doré du poids de sept marcs. Ainsi ceste punition avoit esté divisée a plusieurs; mais maintenant tout l’orage vint fondre sur le Comte. Bref (en marge: 1397) la justice de la ville & banlieue fut adjugée à la maison de ville par arrest de l’an 1397 (en marge: Arrest du Parlement de Paris l’an 1397) à raison des trente mille livres d’amende non payée (en marge: Justice adjugée). Pour le Comté du Perigord (en marge: Comté confisqué) le Roy le donna à son frère Louys en partage de la maison de France (en marge: 1399) avec le Duché d’Orléans & Comté des Vertus le vingt-quatriesme Janvier 1399 nonobstant toutes les oppositions qui furent formées par les successeurs d’Archambaud, & de ses soeurs Eleonor & Brunisande, qui encore aujourd’huy suivant l’observation de Choppin (en marge: Chopp. de Dominio lib. 3 tit. 12 & lib I, tit. 7, num. 4), demandent au Parlement de Paris leur estre faict droict pour leurs légitimes assignées sur le Comté de leur frère.

Le Roy Charles sixiesme par notable accident estant tombé en frenesie (en marge: Ann. Galliae), qui sembloit irrémédiable au secours humain, manda à son Conestable Louys de Sanserre, qui pour lors estoit à Toloze (en marge: Hist. Thol. Bertrand), qu’il luy envoyast le S. Suaire de Jesus-Christ, priant ceux du Chapitre de Sernin de vouloir faire compagnie a la saincte Relique (en marge: Saint Suaire à Paris); l’Archevesque se met en chemin avec l’Abbé de Cadouin, & les députez de la ville, & du Chapitre, craignans que le Roy retiendroit ce qui nous appartenoit; toutesfois ils

 

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furent congediez apres que le Roy eut faict ses devotions (en marge: 1399), & reviennent en triomphe dans Tholoze au jour de S. André (en marge: Rendu à Tholoze). Le nombre sans nombre des grands & autentiques miracles que Dieu voulut operer dans tout ce pays Tholozain lors que ce gage sacré leur fut rendu sont incroyables, je veu les fragmens de leur verification, &m’estonne grandement qu’en ce siecle nostre ferveur soit tant attiédie, puis que nous avons maintenant en nostre puissance ce que les Roys, les Princes & les villes ont d’autresfois si esperducment desiré. (uu)

 

 

Gabriel, Evesque.

Raymundus Joannes, Evesque.

De Bretenous, Evesque.

Henry IV, Roy d’Angleterre, Duc d’Aquitaine.

 

(en marge: L’an de Jesus Christ 1399) Nous apprenons par l’information qui sera faicte d’icy à six vingts ans pour la saincte vie & moeurs du Cardinal de Bourdeille (en marge: Inquisitio de vit. & morib. Card. anno 1526), comme soixante ans auparavant l’an 1447 auquel il fut appellé à nostre Evesché, aucun

 

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Evesque n’avoit ozé resider dans le Perigord, à cause de la cruauté des guerres qui ne pardonnoient mesmes au Clergé (en marge: Desolation), veu que les Anglois les traictoient hostilement, & comme schismatiques. Desja l’Abbaye de Brantosme avoit esté demolie par le Sieur de Mucidan (en marge: Ex Ma. Sc. abbat. anno 1463), plusieurs autres lieux saincts desolez., & presque toutes les Eglises ou démolies, ou polluës de meurtre. Il est vray (en marge: 1400) que le commencement de ce centenaire 1400 fut adoucy par quelques petites tresves pour la Guyenne, interrompues de coup à coup par les attentats des François: l’an 1405 Gabriel estoit Evesque en ce Siège (en marge: 1405).

Mais d autre-part (en marge: Paul Aemil.) le Duc de Bourgongne ayant faict assaziner Louys son cousin germain, & frere de Charles sixiesme (en marge: Du Till.), r’alluma dans le gros du Royaume de plus en plus le malheur des desordres passez. Louys estoit Duc d’Orleans & Comte du Perigord (en marge: Monstrelet, t. I, c. 36). Il laissa trois enfans, Charles, Jean & Philippe: le second (en marge: Jean de Valois, com. du Perigord) eut pour son partage les Comtés du Perigord & Angoumois. L’an 1407 & l’an 1408 nous presente Raymond de Bretenous (en marge: 1497 et 1408), qui comme nostre Evesque reçoit les hommages deus à son Evesché (en marge: lib. hommag. episcop. pet.). Je conjecture qu’il estoit de la maison de Bretenous, qui aujourd’huy est incorporée ou dans la famille des Sieurs de Roquefeuil, ou du Comte de Clermont. J’apprens des documents de la maison de ville (en marge: Ma. Sc. dom. comm.), que ceste mesme année Jean fut promeu à cet Evesché, & sans faire d’autre rencontre je parviens à l’an 1413.

 

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auquel les trois fils du deffunct Duc d’Orléans (en marge: 1413) appellerent à leur party l’armée Angloise pour vanger la mort de leur pere contre le Bourguignon: mais la paix intervenuë congedia les Anglois sans coup ferir, lesquels pourtant ne veulent se retirer sans avoir composé avec ceux qui les avoient apellez à la somme de cent quarante mille escus pour leurs frais de la guerre; dont le Duc d’Orléans paya cent quarante mille contents, & pour le restant deux cens quatre vingt mille livres, monnoye de France, selon Monstrelet, le Comte de Perigord fut donné en ostage aux Anglois, qui le menerent en Angle­terre sur la nouvelle de la mort de leur Roy Henry quatriesme, estant succedé par Henry cinquiesme son fils. (vv)

 

 

Berengarius, Evesque

Henry V, Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine.

 

Tandis que le restant de la France est ampourpré du sang de ses propres enfans, l’Anglois demeurant plus souvent vainqueur que vaincu, la guyenne demeure en sa profonde paix soubs

 

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Henry cinquiesme, lequel fut de surcroy telle­ment favorisé de la fortune (en marge: Anglois insolens), qu’ayant eu en mariage la fille de France, il se faict declarer administrateur & legitime heritier de ceste couronne, & abusant de l’incommodité d’esprit du bon Roy Charles cinquiesme, prend son advantage contre Charles le legitime successeur: si que le voila eslevé à lapogée de ce que ses predecesseurs avoient tant ambitionné, s’establissant dans le throsne d’autruy jusques à sa mort (en marge: 1422), qui fut l’an 1422 suivie de prés par Charles sixiesme. Ainsi Charles septiesme & Henry sixiesme fils des deffuncts, restent pour demesler ces de­bats implacables. L’Anglois estoit presque generalement recogneu par toute la France (comme si la couronne des fleurs de lys pouvoit tomber en que­nouille, & la loy Salique fondamentale du Royaume estre si facilement renversée) (en marge: Annal. de Franc.). Il n’en sera pas ainsi, Dieu retirera ce Royaume bien aymé du bord du tombeau: car il pleut au ciel (en marge: Remede divin) d’envoyer à Charles septiesme ceste pucelle d’Orléans Jeanne Darc, tant renommée, affin d’affermir par ceste foible main la couronne branlante & demy élochée de dessus sa teste (en marge: 1428). Comme de faict ce jeune Roy suivant & pressant les Anglois pied à pied, reprenant ville apres ville, enfin ses ennemis estans deconfits à plusieurs rencon­tres , il fut recogneu pour Roy de France, mesmes dans la capitale de sa Monarchie, avec le tiltre de Charles le victorieux: mais il estoit desja temps qu’il soignast la police & le calme de son

 

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Royaume, reparant dans l’estat Ecclesiastique & civil les bresches causées par la malice des siecles passes.

De faict le Pape Martin cinquiesme, soubs la faveur du Roy Sigismond, & à la sollicitation du Roy de France (en marge: 1430), 1’an 1430 indiqua un Con­cile oecumenique en la ville de Basle (en marge: Concil. Basilense, anno 1430), & ce suivant les decrets du dernier Concile tenu à Constance (en marge: Conc. Constanciense). Le subject pour convoquer les Prélats de toute la Chrestienté fut pour mettre la reformation des moeurs dans le Christianisme, pour accoiser les troubles survenus en Boesme: mais par special pour mettre meilleur ordre au stile de la Cour Romaine. Le Cardinal Julianus Caesarius est deputé Legat du sainct Siege pour presider à la tenue du Concile, & bonnement sur le poinct de l’ouverture, le Pape Martin cinquiesme mourut (en marge: 1431), & Eugène qui le succeda en commanda la première seance au dix-neufiesme Juillet l’an 1431. Berengarius Evesque de Périgueux fut à ce grand Concile, homme bien en­tendu & rccommandable dans les affaires; puis que dans la cinquiesme seance où l’on proceda à la nomination des Juges pour les causes de la foy, des Promoteurs & Notaires du Concile; il fut choisi avec autres deux Evesques pour examiner generalement toutes les causes devolues au Concile (en marge: Juges), hormis celles qui appartiendroient a la foy. Voicy les termes (en marge: Sess. 5 Conc. Basil. memb. 3) de cét article, constituit, ordinat, & deputat Judices seu commissarios ad audiendum omnes causae ad dictam sanctam

 

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Synodum devolutas seu desoluendas, causis fidem concernentibus exceptis, venerabiles Berengarium Petrachoricensem, Petrum Augustensem provinciae Mogunciae, & Delphinum Parmensem Episcopos. Tout alloit assez heureusement dans ceste venerable assemblée (en marge: 1438), jusques à l’an 1438 auquel le Pape Eugene piqué par la conclusion de quel­ques articles qui derogeoient à l’authorité du sainct Siege, commanda aux Peres soubs paine des censures Ecclesiastiques de se transporter à Ferrare pour la continuation du Concile: mais la plus-part des Evesques se roidissent contre ce commandement, excommunient les Prelats qui se rendroient à Ferrare (en marge: Conciliabule), voire dans la seance trente & uniesme (en marge: Sess. 31), tenuë le neufiesme Febrier; ils declarent le Pape Eugene contumace aux commandemens du Concile, 1e suspendent de l’administration du Pontificat, tant au spirituel qu’au temporel. Hardie & inouye entreprise! mesmes ils dresserent des articles & reglemens au Roy Charles septiesme, le suppliant de vou­loir les verifier dans son Royaume (en marge: Articles), les princi­paux Canons estoient (en marge: Gaguin, lib. 10), que le Pontife Romain de dix en dix ans indiquera un Concile general au lieu qu’il luy plairra que s il est négligent à le convoquer ceste puissance passera aux Peres de l’Eglise; que le Pontife ne changera sans necessité le lieu qui aura esté indiqué pour l’assemblée; que l’authorité du Concile de Basle avec ses droits demeure inviolable; que ja­mais aucun, ny mesme le Pontife Romain, n’attente de les oster, infirmer, ou transporter. Avec plusieurs

 

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autres chefs qui estoient extraits de ce que desja avoit esté conçeu dans le Conciliabule de Basle.

Le Roy Charles voyant que le trouble luy donnoit beau jeu faict une assemblée à Bourges de plusieurs Evesques de son Royaume (en marge: Conciliabulum Bituricense, to. 4 conc.), qui justement est appellé Conciliabulum Byturicence, d’autant que la pragmatique cension y fut concluë suivant les articles proposez (en marge: Pragmatique cension). Ce fut le septiesme Juillet de l’an 1438 auquel jour (en marge: 1438) l’authorite Pontificale receut un notable deschet; mais comme Dieu laisse tousjours des Phinées zélés pour sa querelle (en marge: opposition), lors que son party semble plus desesperé; aussi il sussita Pierre Archevesque de Bourdeaux (en marge: Gaguin, ibid.), qui envoya ses deputez à Bourges avec nostre Evesque Berengarius pour maintenir l’authorité du S. Pere (en marge: Paul Aemil.), & s’opposer à la pragmatique cension (en marge: Du Till.), entreprise toute courageuse! qui pourtant ne peut reussir: car par authorité Royale elle fut promulguée au Parlement de Paris le treiziesme du mesme mois de Juillet (en marge: Vignier).

Ce ne fut pas seulement pour lors que le Pape reclamoit contre ces injustes usurpations, mais encor du depuis les Papes ses successeurs l’ont euë en horreur tout autant qu’une pernicieuse heresie. Ce sont les mots de Gaguin, aucun d’iceux ne l’ayant jamais vouluë approuver: mesme le Roy Louys onziesme successeur de Charles estoit sur le poinct de l’abolir, voire l’avoit accordé à la persuasion de Jean Balue

 

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Evesque d’Evreux, sans que le Procureur general, Jean de sainct Romain, s’opposa à la verification de ceste revocation (en marge: Annal. Aquit.), jusques à ce que François premier fit le concordat avec le Pape Léon dixiesme avantageant après plusieurs an­nées le droict de S. Pierre, qui pour lors n’avoit peu estre conservé par nostre Evesque.

Tandis que le Comte du Perigord & des Vertus fut retenu en ostage en Angleterre pour le payement de 280000 livres (en marge: Chronic. Comitum Engol. Corl.), son Comté estoit administré soubs le nom du Duc d’Orléans tuteur, jusqu’à ce qu’après plusieurs ans de sa retenuë il fut contraint de la vendre à Jean de Bretagne Sieur de Legle, Viscomte de Lymoges 25000 florins (en marge: Jean de Bretagne, comte du Perig.), ou seulement selon Chopin (en marge: Chopp. lib. 3 de Domin. titul. 12) seize mille escus sans que jamais ses freres l’eussent voulu secourir. Quelque temps après l’Advocat du Roy au Parlement de Paris, soustint ceste vendition estre nulle (en marge: C. imperialem § praeterea de prohibit. feud. alienat. per Frideric. in feudis), & que le possesseur du Comté à tiltre d’apanage, avoit les mains liées pour l’aliéner, si ce n’est avec congé & permission du Roy: de plus, que le Comté du Perigord faisoit une bonne partie de l’apanage donné au pere de Charles pour un temps, & a la charge de reversion, & quoy qu’elle eut esté purement donnée, neantmoins qu’il ne luy estoit loisible de l’ipotequer: toutesfois ceste vente & achapt ont demeuré pour valables. (xx)

 

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Elias Serven, Evesq.

Petrus de Durfort, Evesque.

Raymundus Laubariensis, Evesq.

Godefridus Berengarius darpajou, Evesq.

Charles VII, Roy de France, Duc d’Aquitaine.

 

Dans moins de huict ou neuf ans (en marge: L’an de Jesus Christ 1438) nous changeons quatre ou cinq fois de Prélat, desquels nous ne trouvons bonnement l’année de leur reception; comme s’il n’eut fallu faire memoire d’eux dans la posterité puis qu’ils n’avoient residé en leur Evesché par defaut de courage (en marge: Changemens importuns). Elias Serven succeda (en marge: 1437) à Beranger dés l’an 1437. Ce qui me baille soupçon que son predecesseur avoit suivy le party du pape Eugene puis que l’année 1438 Beranger se trouva au Conciliabule de Bourges (en marge: Vid. sup. anno 1438) pour s’opposer à la pragmati­que

 

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que sanction; & neantmoins celuy-cy qui est apellé son successeur, est marqué nostre Eves­que un an auparavant; & pour continuer les conjectures peut estre Berengarius d’Arpajou que nous trouverons dans peu sur les rangs de nos Evesques, sera le mesme Berengarius qui auroit esté remis a l’Evesché, lors que Charles septiesme s’accorda avec le Sainct Pere, haec dubitanter.

Pierre de Durfort succede à Elies; plusieurs ont estimé que Durfort est la maison de Duras; il fut promeu par le Pape Clement qui l’avoit pris de l’Ordre des Freres Prescheurs, & nous conjecturons (en marge: Mort) que l’epitaphe gravé dans la muraille de l’Eglise Cathédrale du costé gauche du Choeur luy appartient (en marge: Epitaph. Pet. Episc.).

 

Praesul erat Petrus, jacet hic in puluere puluis,

Sit coelum requies sit tibi vita Deus

Obiit die 10. Aprilis.

 

Raymundus Laubariensis auparavant Eves­que de Sarlat fut advancé à cét Evesché par le Pape Benoist. Auquel succeda Geoffroy Berangarius d’Arpajou pourveu par le Pape Jean.

Souvenons-nous des dessains que l’Evesque Pierre faisoit l’an 1261 (en marge: Rescript Pet. episc. anno 1261) pour colloquer plus honorablement le corps de l’Apostre S. Front, lesquels pourtant n’avoient encor esté executez sans le vouloir du S. Siège; c’est pourquoy le Pape Eugene expedia la Bulle suivante (en marge: License de lever le corps sainct) qui nous maintient sur le possessoire contre l’Abbaye de Sainct Pons (en marge: Chronol. Insulae Lerin.), & donne plusieurs tiltres

 

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d’honneur à nostre Apostre (en marge: Bulla Eugenii anno 1441).

 

Eugenius Episcopus servus servorum Dei, dilectis filiis Capitulo Ecclesiae S. Frontonis salutem & Apotolicam benedictionem. Piam sanctorum memoriam recolendam, qui Christi sequendo vestigia, aeternae beatitudinis praemia consequenti, cuncti fideles Christi eo debent libentius honorare, quo in eorum merita gloriosa uberior justis tribuitur gratia & peccatoribus delictorum suorum venia ipsorum intercessionibus facilius indulgetur; propter qua fideles populos ad eorumdem venerationem sanctorum tanto attentius invitamur, quanto id efficacius eis proficere novimus ad salutem. Sane sicut ex serie petitionis pro parte vestra nobis nuper oblatae percepimus, licet bonae memo­riae Petrus Petrachoricensis Epis. revolvens & pie considerans quod altissimus ipsius sancti qui in illis partibus patronus, & Christicolarum intercessor praecipuus habetur meritis plurima miracula operari dignatus est (en marge: Miracula S. Front), prout in dies operatur, quodque ejusdem sancti corpus in loco minus decenti requiesceret (en marge: Vid. sup. anno 1261); cupiensque summopere ut corpus hujusmodi decentius, & venerabilius conservaretur ac per amplius exaltaretur, quandam argenteam satis pulchram, & preciosam thaecam, ad hoc quod corpus ipsius inibi collecaretur, ac de loco ubi consistit ad aliquem alium in praefata Ecclesia locum pro illius veneratione magis convenientem atque congruum fieri procuraverit, & diem translationis sive exaltationis (en marge: Festum translationis) dicti sancti ultima die mensis Aprilis singulis annis solemniter ibidem celebrare instituerit, & ordinaverit; pro eo ta­men quod dictus Episcopus dudum , sicut Domino

 

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placuit, debitum naturae persolvit praemissa ad effectum nondum deducta fuerint, nec perduci potuerunt; quare pro parte vestra nobis fuit humiliter supplicatum (en marge: Supplica capituli), ut vobis corpus hujusmodi in theca praedicta reponendi, & etiam transferendi licentiam concedere de benignitate Apostolica dignaremur. Nos igitur institutionem & ordinationem hujusmodi aliorumque per eundem Episcopum circa venerationem & exaltationem ipsius corporis factam plurimum in Domino commendantes (en marge: Concessio), ac cupientes ut illud a Christi fidelibus congrue veneretur, & decenter conservetur, ejusmodi quoque supplicationibus inclinati. Vobis cor­pus praedictum juxta intentionem, institutionem, & ordinationem Episcopi in dicta theca reponendi (en marge: Translationis), necnon de loco in quo existit, ut praesertur ad aliquem altum decentem, & ad id congruentem in ipfa Ecclesia locum de quo melius videatur transferendi, ac etiam caput dicti sancti de corpore hujusmodi per aliquem Catholicum Antistitem separandi (en marge: Et separat. capitis), in aliquo condecenti tabernaculo seu vase precioso, necnon supra majus Altare, vel alibi ubi in dicta Ecclesia congruentius videbitur, ut populo melius & decentius ostendi possit, quotiescunqne vobis videbitur, etiam reponendi licentiam auctoritate Apostolica tenore praesentium largimur. Nonobstantibus, &c. Nulli ergo hominum, &c. Datum Florentiae anno Incarnationis Dominicae 1441 decimo septimo Kalendas Januarii, Pontificatus nostri anno undecimo.

Berengarius d’Arpajou finit ses jours l’an 1447 (en marge: Ma. Sc.) nous laissant en sa place un tres digne ouvrier pour reparer les ruines de l’estat Ecclesiastique. (yy)

 

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Elias de Bourdeille, Evesque, Cardinal

Charles VII, Roy de France & Duc d’Aquitaine.

 

Combien le Ciel fut liberal de ses grace envers ce dioceze (en marge: L’an de Jesus Christ 1447), lors qu’il luy donna pour Pasteur celuy qu’il avoit faict naistre (en marge: Chenu, Gall. Christ. in Tab. ep. Pet. & Archie. Turon.), non tant pour soy-rnesme, que pour servir d’eschole de vertu à la noblesse, de modelle aux bons Prelats, de prototype à l’austerité des Religieux, de pourtraict de saincteté pour tout le Christianisme (en marge: Loüange). Ce fut Elie de Bourdeille, qui dans le cours de sa vie fut loué pour sa saincteté, obey pour sa prudence, respecté pour sa gravité, aymé pour sa douceur, & par le violent esclat de tant de grandeurs, la grandeur de tant de ferveurs, la ferveur de tant de sainctes actions de lumière, se rendit plus esclatant dans ce siecle tenebreux, que les lumières & flambeaux qui apres sa mort brusloient continuelement dans l’Eglise de Tours devant son sainct sepulchre (en marge: Ma. Sc. Ann. 1526), plus que le cierge ardent qui estoit posé prés du grand Autel de l’Eglise S. Front

 

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devant son chapeau de Cardinal qui luy fut en­voyé sur ses derniers ans par le Pape Sixte quatriesme. Il semble que la recherche que nous avons faict des Evesques ses predecesseurs de­puis cinquante ou soixante ans ne soit que pour rehausser davantage l’esclat de ses perfections, comment cognoistroit-on la rareté des diamans? s’il n’y avoit d’autres cailloux, & la beauté de l’or si le cuiure n’estoit en usage? aussi luy estoient-elles données d’en-haut pour maistriser les coeurs des plus grands, specialement pour retenir les pieces du debris de ce pauvre dioceze desolé par les guerres contre l’Angleterre, pour lesquelles ceste province servit souvent de funeste theatre, ce qui avoit obligé les Evesques durant 60 ans, de s’en absenter.

Tout ce que nous dirons de ce grand Prelat aura pour garand les auteurs anciens & modernes: mais par special sera averé par treize tesmoings jurez (en marge: Tesmoings), tous gens de marque, qui furent interrogez juridiquement quarante ans apres sa mort (en marge: Inquisitio pro Elia Card. anno 1526), lors qu’on procedoit à l’inquisition de ses vie & moeurs (en marge: Speciatim ex Ma. Sc. Petri de Boys), ce sera de leur deposition (en marge: Morin à secretis & confessionibus d. Card.) que nous recueillirons l’eslite des fleurs qui embaumerent pour jamais l’ancienne & noble famille des Sieurs de Bourdeille, desquels il print naissance.

Arnaud de Bourdeille, Seneschal & Lieutenant du Roy en Perigord eut cinq enfans (en marge: Origine), entre lesquels Elie dès son bas aage donna des augures de sa saincteté future (en marge: Origo nobilis), ce sainct enfant mesme

 

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à l’aage de sept ans (en marge: Vocatio in septemnio), ayant veu souvent dans le chasteau d’Agonac le Pere Bertrand de Combort de l’Ordre des Freres Mineurs, fut saisy d’un violent desir, qui porta son courage plus grand que son corps à embrasser la saincte Re­ligion de S. François; déclare son desir à ses parens tous estonnez de la resolution de cét en­fant: Madame sa mere est encore plus aux affres de perdre son fils, & met en jeu tous moyens possibles pour divertir ce qu’on croyoit du commencement ou despit, ou fantaisie puérile: mais sa perseverance de trois ou quatre ans fit paroistre qu’il n’avoit rien d’humain dans son desir; mais plustost qu’il venoit du ciel, auquel son pere craignant de s’opposer; d’autre-part pressé des importunitez de l’enfant parvenu desja à l’aage de dix ans (en marge: Novitiatus in decennio); se resolut de le mener au Convent des Religieux de S. François à Pe­rigueux. Et d’autant que les troubles des guerres estoient fort eschauffés dans tout le pays, Monsieur le Seneschal assembla soixante ou septante chevaux pour la conduite de son fils, lequel donna bien de l’estonnement à toute ceste noblesse, lors qu’après les derniers adieux donnez à sa mere, on luy amena un bon cheval pour le monter: ce devot enfant s’opiniastre à ne pren­dre de cheval pour son voyage, disant qu’il ne vouloit qu’un asne pour sa conduitte, à l’imita­tion du Pere S. François, auquel il se vouloit desja conformer. Il est mené en cét equipage, & mis dans le Novitiat, apres lequel il estudia

 

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en Philosophie, de là envoyé à la Théologie dans le grand Convent de l’Observance à Toloze (en marge: Doctrina in Theolog.), où il fit paroistre la rareté de son esprit à l’aage de dix-neuf ans, soustenant durant huict jours les Theses du Chapitre general celebré en ce lieu, composé de l’eslite des plus doctes de ce temps: de là il fut conduit au Convent refor­mé de Mirepoix pour y faire les premiers essais de ses prédications.

Durant ce temps l’Evesché de Périgueux vaqua par la mort de Geoffroy Berengarius d’Arpajou (en marge: 1447), l’an 1447 le droict des nominations restant encore aux Chapitres par la pragmatique cension, les Chanoines unanimement eslevrent F. Elie pour leur Evesque (en marge: Fit episc. aetat. 24 anno), qui à ces nouvelles s’effaroucha, & se disant incapable de ceste charge se roidit pour ne l’accepter (en marge: Faict Evesque); mais afin qu’il ne peut se desgager, on deputa deux Chanoines vers son Provincial, à ce qu’il luy commandast par obedience de les suivre vers le Pape Eugene, qui pour lors estoit à Boulogne, où estans arrivez les Deputez supplient sa saincteté d’agreer leur eslection, & dispenser à ce qui manquoit sur l’aage de vingt-sept ans pour l’Episcopat; mais la docte & eloquente harangue de F. Elie fut plus admirable, desadvoüant les vingt-sept ans d’aage que les Deputez luy donnoient, & qu’il estoit seulement au vingt & quatriefme, partant qu’il supplioit sa saincleté de ne le dispenser sur son incapacité. Humilité! qui seule sembla meriter sa confirmation. Le

 

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Pape commandant au Cardinal de Saincte Croix de le sacrer pour Evesque. Ainsi en despit de tous ses efforts il faut obeyr; il vient à sa ville, faict son entrée solemnelle le 3 Aoust de l’an 1447. Trouva que le vice s’estoit authorisé dans tout son dioceze (en marge: Status dioecesis Petr.), les Eglises desolées, bruslées, renversées, sans service divin, le Clergé sans ordre ny discipline, l’impunité des vices alloit eshontéement la teste levée.

Grande moisson pour un si bon ouvrier, qui avec l’aide de son Dieu s’appliqua au travail, à la visite, exhortation, confirmation, re­conciliation des Eglises, & à tous les autres exercices de sa charge, qui pour l’ordinaire reculoient son repas à deux heures après midy, avec un plus grand fruict qu’il n’eut ozé esperer de ce grand desordre. Specialement faut noter le puissant remède dont il se servit heureusement pour extirper le blaspheme qui regnoit pour lors en la bouche de tous (en marge: Jureurs punis); c’est que dés le commencement de sa promotion il fit une ordonnance (en marge: Decretum cont. de jeran...), que tous ceux qui auroient juré fussent citez par le Curé du lieu à comparoistre devant luy, & que deslors les denoncez subissent les peines des excommuniez, jusques à ce qu’il parut par lettres testimoniales de leur absolu­tion, menassant par censures les Curez pusillanimes à la denonciation, encourageant les zélés à l’exécution. La peine qu’il imposoit (en marge: Poena) pour le blaspheme estoit que durant la Messe le criminel se tiendroit à la porte de l’Eglise un cierge

 

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en main, nud pieds, sans chapeau ny ceinture, quelquefois en chemise, & qu’a la fin il se presentast au pied de l’Autel pour recevoir publi­quement l’absolution; ainsi, faisant subir inexorablement ceste peine à toute sorte de personnes, il n y eut dans un an aucun si huppé, & pour noble qu’il fut, qui osast ouvrir la bouche contre le ciel (en marge: Effectus). O Dieu! que ne revelliez-vous en nostre siecle le feu de ce nouvel Elie, puis que nous en avons besoing plus que jamais?

Ces heureux commencemens faisoient enrager de despit tout l’Enfer avec ses partisans; il suscita le bastard de Gramont Anglois, qui commandoit dans le chasteau d’Auberoche, lequel espiant l’occasion de se saisir de nostre Evesque lors qu’il alloit innocemment pour reconcilier l’Eglise de S. Anthoine (en marge: Capitur ab Anglis), qui avoit esté polluë par les meurtres faicts par cét Anglois dénaturé, n’ayant d’autre escorte que l’Abbé de Brantosme, & quelques autres Eclesiastiques: ainsi facilement il le print pour prisonnier de guerre, luy accordant à peine un sien Prestre pour le servir (en marge: Espreuve). Durant sa prison il fut plus mal traicté par louyë, suivant son dire, qu’au­trement: parce qu’il estoit contraint d’entendre ordinairement ses ennemis qui blasphemoient en damnez. De là il est conduit au chasteau de la Roche Chalais, & sur la crainte que les preneurs avoient que son frère le Seneschal de la province ne vint assieger & forcer la place, deliberent de le conduire à Lybourne, pour de

 

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là l’envoyer en Medoc, ou en Angleterre. L’Archevesque de Bourdeaux Pierre Berland, vray homme de Dieu (en marge: Eripitur per Archiep. Burdig.), & reputé pour sainct, apprint le danger où se trouvoit nostre Evesque, & secondant la noblesse qui estoit desja aux champs pour l’enlever, il conduit si adextrement l’entreprise qu’ils le retirent de leurs mains à Lybourne (en marge: Delivrance), le jettent dans un bateau, & conduisent heureusement à Bour­deaux. L’Archevesque accompagné de son Clergé & du corps de la ville le vint accueillir au port, le mene à l’Archevesché, le festina par plusieurs jours, avec les principaux de la ville.

Par ce narré nous passerons au temporel (en marge: Montreslet), comme desja la ville de Bourdeaux estoit en l’obeyssance (en marge: 1450) du Roy de France, lequel dés l’année 1450 (en marge: Annal. Aquit.) ayant heureusement reconquis la Nor­mandie, il porta sa pensée à déguerpir des mains estrangeres nostre pauvre Guyenne (en marge: Alain Chartier), & pour cét effet il commença ses reprises par la ville de Bragerac (en marge: Dup. t. 2), qui tousjours a esté reputée une des clefs de la Guyenne (en marge: Bragerac rendu): il y envoya le Comte de Pontieure & de Perigord avec puissante armée, qui aux premieres aproches contraint les assiegez à demander capitulation: le Comte reçoit la ville au nom du Roy, permettant à l’Anglois de sortir bagues sauves, & les habitans sont maintenus en leurs privileges (en marge: Regestre de la gener. de Bourd. fol. 186): ce qui fut confirmé par lettres Royaux de Charles l’an 1451 le 24 Novembre (en marge: 1451), avec abolition du passé, & promesse que leur ville ne seroit jamais se-

 

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parée dé la couronne de France.

L’année suivante (en marge: 1452) nous ramenera en Guyenne le Comte Dunois avec puissante armée, qui dans moins de deux mois conquit toutes les villes & places les plus opiniastres, hormis Bayonne, de fléchir soubs les armes Françoises, specialement la ville de Bourdeaux (en marge: Chronic. Burdigal.), despourveuë de secours Anglois, le receut avec toute son armée le 21 Juin.

Ainsi trois cens ans après que nous avions esté démembrez de la couronne de France par l’infortuné mariage d’Eleonor, nous revenons heureusement à la domination de nostre premier maistre, par la faveur du ciel, & la vaillance de la noblesse (en marge: Loüange): surquoy je ne puis taire ce qui a esté remarqué en ce lieu par Gilles, Dubouchet, Dupleix & autres (en marge: Annal. Aquit.); c’est que parmy le grand nombre de ceux qui servirent le Roy de France, pour reconquerir l’Aquitaine, seulement deux Seigneurs acquirent le nom de Chevaliers sans reproche (en marge: Gill. nic. Chronic. de Franc.). Le Seigneur de Barbazan (en marge: Dup. t. 2), & François de Bouchard Viscomte d’Aubeterre, Cham­bellan du Roy, Seneschal d’Angoumois, fils de Jochin, fils de Savary, fils de Pierre, qui aussi porterent le tiltre de Comte, possedans de plus les Seigneuries de Castillon, Mucidan, Puinorman, Cadillac, Rochefort, Roussilles, Sainct Jean d’Angles, Rochemeaux, Sainct Martin de la Coudrée. Ce qui soit dict en faveur de nos Evesques sortis de ceste noble famille.

 Mais (en marge: 1452) la grande & longue maladie de l’Aqui-

 

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taine ne peut se guerir tout soudain sans quelque recheute qui fut l’année suivante 1452 la ville de Bourdeaux (en marge: Polid. Virg.), & en suitte les villes du voisinage se rendent derechef à la rébellion (en marge: Rebellion); ce qui a soudain apella à Bourdeaux le plus signalé des Capitaines Anglois Thalabot (en marge: 1452); mais ce fut pour finir bien tost ses jours dans le Perigord; car accourant pour secourir les quinze cens Anglois assiegez dans Castillon par les nostres, il fut porté par terre d’un coup de coulevrine, & au sepulchre dans la Chapelle nommée S. Jean de Colles, bastie au desa du ruisseau qui separe ceste province du Bourdelois. Mort qui fut suivie de celle de son fils, & de l’estonnement des rebelles qui aux aproches du Roy Charles (en marge: Alain & Jean Chartier), rendirent à sa discretion la ville de Bourdeaux, la Guyenne rebelle trouva la misericorde dans ce coeur vrayement Royal pour les Ecclesiastiques & Nobles (en marge: Misericorde Royale). Neantmoins pour punition exemplaire il se reserva sur eux le chastiement de vingt personnes, & le payement de cent mil escus, tant pour leur Chef que pour leurs prisonniers.

Accompagnons le retour de nostre Evesque (en marge: Eliae ep. reditus in urbem) qui par la faveur de la paix revint à sa ville, qui le receut comme jadis Alexandrie & Constantinople les Chrysostomes & Athanases apres leur exil: aussi virent-ils sa ferveur redoublée (en marge: Fervor), & plustost un Evesque Religieux, qu’un Religieux devenu Evesque (en marge: Actions saintes): n’ayant retranché rien de trois Caresmes de sa regle (en marge: Jejunia); & au surplus y adjoustant les jours du Mecredy & Samedy: la veille des

 

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grandes solemnitez estoit au pain & à l’eau, lavant les pieds à certain nombre de pauvres, suivant la solemnité du jour, lesquels il servoit à la table teste nuë, & auparavant prendre son repas, qui tousjours pour quelle compagnie qu’il y eust, fut assaisonné de la lecture des saincts livres: un banc estoit sa couche ordinaire, un livre pour cuissin, son habit un rude gris brun (en marge: Vestis), de vingt & cinq sols l’aune, son manteau presque de si vil prix; & quand il fut Archevesque l’aulne de son drap coutoit quelque quarante sols, aussi le disoit-il estre trop precieux. Enfin le vray esprit & la vertu d’Elie estoit avec luy, par laquelle il estoit plus-que fervent à repren­dre les vices (en marge: Conciones), comme il parut dans une quarantaine preschant à son peuple deux heures tous les jours sur les sept pechez capitaux. Son assiduité aux confessions estoit toute pastorale: ne permettant qu’aucun se retirast sans consolation (en marge: Benignitas), tant il estoit bening envers les pecheurs repentans: mais severe & plus que lyon envers les superbes opiniastres. Certains Chanoines, Prieurs, voire Abbés de son dioceze pour eviter sa correction, ne vouloient recognoistre sa jurisdiction; mais il les ramena puissamment à leur devoir (en marge: Magnanimitas); voire il intenta procez contre les universitez qui bailloient si facilement les degrez à ceux qui par leurs chicanes rongeoient le pauvre peuple. Dc plus sa charité estoit no­toire envers les pauvres necessiteux, desquels il estoit le nourrissier dans sa maison, le Mede-

 

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cin dans l’Hospital (en marge: Charitas), leur Curé pour les Sacremens & sepulture. C’estoit du sanctuaire sacré de l’oraison & contemplation (en marge: Oratio) qu’il empruntoit ce brasier de charité toute fervente, passant le peu de la nuict qu’il desroboit à ses occupations pour vaquer à sa méditation, qu’il destrempoit pour l’ordinaire d’un ruisseau de larmes respanduës pour ses diocezains. C’estoit pour eux qu’il consacroit tout ce qu’il possedoit, donnant sa santé, sa vie, ses pensées, & son revenu pour les Eglises (en marge: Aedificia sacra), bastimens, pauvres & necessiteux; sa liberalité fut grande aydant à rebastir l’Eglise collégiale de S. Astier, ruinée par les guerres passées; il rebastit aussi la moitié de l’Eglise S. George qui est dans les faux-bourgs de la ville; comme aussi fit dresser le grand Autel de son Eglise Cathédrale que le vieux manuscript dict par exaggeration, avoir estè le plus beau & magnifi­que de ce Royaume.

Mais il semble que Dieu avoit reservé ce S. Evesque Religieux de S. François, pour executer apres plus de deux cens ans les dessains d’un autre Evesque Religieux de S. Dominique (en marge: Vid. sup. anno 1261), qui l’an 1261 avoit determiné de lever le sainct corps de l’Apostre du Perigord (en marge: Corps sainct honnoré), & n’agueres nous avons veu le congé que le Pape Eugene (en marge: Vid. Bull. Eugen. 1441) en a donné au Chapitre. Ainsi le vingt-cinquiesme ou vingt-septiesme May de l’an 1463 Elies de Bourdeille (en marge: 1463), assisté de l’Evesque de Sarlac, & de son oncle l’Evesque de Rieux (en marge: Ma. Sc. dom. comm.), & jadis de Sarlac, tous deux de la maison de Rouffignac

 

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en Lymosin, celebrerent l’élevation du corps du bien-heureux S. Front, colloquans à part son chef dans un grand tabernacle qu’il avoit faict eslever & richement elabourer au milieu du Choeur, basty de lames de cuivre, esmaillées & dorées, renfermé de grilles de fer; ouvrage d’un merveilleux artifice, qui à nostre siecle a demeuré en proye aux harpies huguenotes.

Ce fut en suitte un coup de la prudence de nostre Prelat d’accoiser (en marge: Accord) les differens intervenus entre les deux Chapitres Cathedral & Collegial (en marge: Ma. Sc. dom. comm.), chacun pretendant devoir posseder le chef de ce corps sainct, l’accord faict par le sainct Evesque fut portant processionnelement à l’E­glise Sainct Estienne un bras de S. Front le jour de Saincte Quitere.

Sur ce sujet il ne faut obmettre comme ceste mesme année (en marge: 1463) redonna à ceste province le sainct Suaire que les Tholozains avoient possedé depuis l’an 1392. Certains escholiers de l’or­dre de Cisteaux envieux de ce qu’il avoit esté ravy à leur Ordre par droict de represaille l’enleverent habilement de l’Eglise du Taur (en marge: Sainct Suaire), le rapportant à Cadouin, & peu de temps apres le portent a l’Abbaye d’Aubasine, où il fut retenu durant sept ans, non sans plaintes des Tholozains, & de l’Abbé de Cadouin, jusques à l’an 1463 (en marge: Ma. Sc. Abb. Cadunii); pour lors le Roy Charles commanda par ses patentes à M. Pierre de Combort Evefque d’Evreux, & Abbé d’Aubasine, de rendre à l’Abbé de Cadouin P. de Gain, le sainct Suaire,

 

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comme il appert par l’inscription de son sepulchre (en marge: Epitaphium Abbatis Cad.).

HIC IACET CORPVS F. PETRI DE GAIN,

qui senior Abbas hujus monasteris, per cujus opem recuperatum fuit Sanctissimum Sudarium, videlicet die decimo mensis Junii anno Domini 1463 de manibus reverendi in Christo patris Petri de Combornio Eboracensis Episcopi, administratoris Aubasinae.

 

Je suis estonné sur la merveille des miracles approuvez & verifiez par l’Archevesque de Toloze l’an 1413 lesquels continuerent dans ceste province, suivant le tesmoignage que l’Archevesque de Bourdeaux Arturus de Montauban, baillé l’an 1470. Ce qui obligea les Papes Inno­cent huictiesme, Urbain cinquiesme, Boniface septiesme, & Alexandre quatriesme, Grégoire onziesme, Jules second, Clement septiesme, & plusieurs autres plus anciens de bailler beau­coup de privileges à ceste Abbaye, confirmez par le Pape Paul l’an 1535.

Revenons à l’année 1463 qui donna assez pour d’incommodité à ceste province (en marge: Commiss. pour les francs-fiefs), par la commission baillée au Seneschal du Perigord sur le faict des francs-fiefs (en marge: anno 1463), & nouveaux acquests faicts specialement par les communautez Ecclesiastiques & Religieuses, qui apres tant de ruines se trouvoient bonnement sans tiltres pour prouver ce que les Commissaires demandoient.

De la passons à nostre Evesque Elie, lequel Dieu relevoit tout autant qu’il se deprisoit par les actions de son humilité ordinaire (en marge: Archevesque de Tours). Le Roy Louys onziesme successeur de Charles eut co-

 

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gnoissance de ses merites, le choisit pour son confesseur, & l’Archevesché de Tours vacant, il le ravit à ceste province pour le colloquer (en marge: 1468) en plus haut grade, l’an 1468.

Pour le Comté du Perigord, il avoit esté en­tre les mains de Jean de Bretagne Sieur de l’Aigle (en marge: Corl. Comit. Engol.), Vicomte de Lymoges (en marge: Juvenal des Ursins); il eut un fils nommé Guillaume de l’Aigle (en marge: Guillaume de l’Aigle, comte du Perig.) son successeur l’an 1443 qui decedant sans hoirs, fit sa soeur Françoise de Bretagne son heritiere, qui l’an 1460 fut mariée à Alain Sire d’Albret (en marge: Alain d’Albret, Com. du Perig.) d’où nasquit Jean d’Albret. (zz)

 

 

Radelphinus, Evesque.

Louys XI, Roy de France & Duc d’Aquitaine.

 

Par la promotion d’Elie à l’Archevesché de Tours (en marge: L’an de Jesus Christ 1468), nostre Siège Episcopal escheut à Radelphinus ou Ranulphius, pourueü par le Pape Paul second (en marge: Bulla Paul 2 anno 1468), suivant la Bulle expediée l’an 1468.

Quant au Duché d’Aquitaine l’année suivan­te (en marge: 1469) Louys onziesme donne pour apanage (en marge: Duché) à son frere Charles (en marge: Charles Duc de Guyenne), non toute l’Aquitaine; ains seulement le Bourdelois, 1e Bazadois, les Lannes, la Xaintonge & la Rochelle; mais trois ans

 

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après la mort luy ravissant la vie (en marge: Nicol. Gilles), causa la reunion totale de la Guyenne à la couronne de France (en marge: 1472) par reversion d’apanage: ainsi tousjours jusques aujourd’huy elle a demeuré en propre au Roy de France.

Les occupations de l’Archevesque de Tours ne luy avoient faict oublier son pays (en marge: 1476): si que l’an 1476 il obtint par sa sollicitation du Pape Sixte quatriesme une Bulle des grands pardons en forme de Jubilé (en marge: Indulgences) pour dix ans en faveur des fidèles qui visiteroent les Eglises de Sainct Estienne & S. Front és jours de leurs festes (en marge: Bullae Sixti 4 anno 1476), ou quatre jours suivans, & y seroient leurs liberalitez pour reedifier leur ruine imminente, à la charge que le tiers des oblations viendroit à la Chambre Apostolique. En suite l’Archevesque Elie par une autre Bulle est commis pour General Pénitencier & Surin­tendant à ce Jubilé, avec puissance d’absoudre & dispenser sur les voeux & irrégularité. Dans la première Bulle nous aprenons les Reliques qui reposoient pour lors dans l’Eglise de Sainct Estienne, in qua certae reliquiae ejusdem Sancti, & corpora Sancti Leonis Papae qui magnus Leo dictus, & beati Patrocli, & Sancta Sabina martyris requiescunt. Il dict en suitte plusieurs tiltres d’honneur de l’Eglise S. Front, qu’il apelle un des septante deux Disciples de Jesus-Christ, &c.

Le mesme Pape Sixte quatriesme l’an 1481 ordonna (en marge: Chron. Burd. anno 1481) à la requisition du Roy Louys onziesme (en marge: 1481) qu’on fit inquisition de la saincte vie & miracles faicts par Pierre Berland cy-devant Ar-

 

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chevesque de Bourdeaux, & pour cét effet commet Raoul Evesque de Perigueux, & Raymond Evesque de Bazas Inquisiteurs (en marge: Gabr. Lurb. de Viris, Illustr. Aquit.), qui après plusieurs & fidèles recherches, rapporterent leur procez verbal en l’assemblée de tous les Ordres de la ville de Bourdeaux le dix-huictiesme De­cembre audit an, pour envoyer des deputez en Cour de Rome poursuivre la canonization de ce grand Prelat: ce qui pourtant fut sans effet.

Je ne veux encor quitter la memoire de l’Archevesque de Tours Elie de Bourdeille; car il n’abandonnera jamais son pays par esprit & affection. Ce nouveau grade ne luy avoit enflé le coeur; moins encore quand le Pape Sixte quatriesme l’an 1483 le fit Cardinal du tiltre de Saincte Luce in Silice (en marge: Cardinal); il demeura tousjours sur son cube inébranlable en sa simplicité contre ces faveurs humaines: c’est le tesmoignage que Rodolphius Tosciniacensis (en marge: Rodolphius Toscin. lib. 2 hist.) luy donne dans son histoire Seraphique, sic in rebus secundis quae caeterorum etiam sapientum animos fatigant, ne qui­dem latum unguem à recto statu vel cursu huc atque illuc deflexit, sed sapienter vento nimis secundo vel contrahere cum coelestibus praeceptis, tum exemplis edoctus, prosperitatem humanam judicavit vento similem aut vitro quod maxime frangitur cum maxime splendet; quippe qua falsis imaginibus ludit, quam adversitas qua instar lapidis Lydii filios Dei non extus auratos sed intus aureos indicio demonstrat, & tactu probat, &c. Il ne s’agrandit qu’en noble coura­ge pour la deffense des immunitez Ecclesiasti-

 

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ques, s’opposant aux usurpations des Officiers du Roy; mesme au péril de sa vie. Desja le Chancelier de France & le grand Conseil l’avoient faict adjourner à comparoistre personnelement (en marge: Défenseur du S. Siege); mesme tout le temporel de son Archevesché estoient mis entre les mains des Comrnissaires; mais contre tous ces tonnerres il s’arme de sa plume; escrit plusieurs traictez de la puissance du Pape, & la defense des concordats faicts contre la Pragmatique sanction (en marge: tractatus de potest Pap. per Eliam de Bourdeille, Arch. Tur.), l’un desquels commençoit à summo coelo (en marge: Deffensorium concord. cont.). Q’estoit mettre de l’huile au feu, qui embrasoit les cervelles politiques, & quoy que desja il eut par sa parole adoucy le coeur du Roy; neantmoins certains courtisans le mettent en totale disgrace, l’un d’iceux est substitué à son office de Confesseur du Roy; mais dans peu de jours finissant sa vie, laissa de l’estonnement aux autres (en marge: Chenu. in ep. Pet. & Archie. Turon.), & bailla de l’admiration à toute la France sur la constance de nostre Prelat.

Le temps de sa mort s’approchoit, il le cogneut estant malade dans le chasteau d’Artene prés de Tours (en marge: Gall. Christ.): il s’arma des Sacremens, defend toute pompe funèbre, & ne veut d’autre lict pour mourir que la cendre, d’autre sepulture que le cemetiere des pauvres (en marge: Mort); aussi mourut-il vrayement pauvre ne s’estant rien laisse: mais ayant tout mis en depost dans les mains des pauvres aux Hospitaux, ou Eglises & Monasteres ruinez. Il mourut faictement l’an 1484 laissant la ville de Tours plus desolée qu’elle n’avoit esté depuis

 

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le decez du grand Sainct Martin. Les Tourengeaus par plusieurs jours honorerent ce Sainct, & Dieu du ciel voulut le recommander par plusieurs miracles (en marge: Miracles), comme il avoit faict durant sa vie (en marge: Miracula ex Inquis. vitae & sanct.). Raportons-en quelques-uns: estant à Tours celebrant la saincte Messe, un Capitaine de l’armée du Roy Charles aliéné de son esprit se jetta à ses pieds, & soudain fut remis en son bon sens. A Amboise estant dans son Convent en la mesme action au jour de la Feste de S. Fran­çois, le Maistre d’hostel de la Royne de France Charlote l’advertit à l’oreille du danger de mort où elle estoit dans le travail d’enfant, il s’arresta un peu, offrit à Dieu sa prière pour elle, & sou­dain elle fit heureusement ses accouches. De plus deux demoniacles, l’un à Tours, l’autre à Périgueux, furent delivrez par son exorcisme, Guil­laume Chalupy Advocat, & jadis son domestique, rend tesmoignage qu’ayant appris à Tours, la maladie de son frère qui tiroit aux abois, de­manda congé à son maistre pour venir en ceste ville servir le malade: mais cét homme de Dieu respondit n’estre necessaire qu’il seroit bien tost en santé, ce qui fut vray par la vertu de sa prière. Guillelmus de Valle habitant de ceste ville tesmoigne comme ayant sa cuisse rompuë depuis quinze mois, & despendu son bien à se taire traitter sans apparence de guerison, oyant le rapport des merveilles du bien-heureux Cardi­nal, demanda affectueusement à Dieu sa gueri­son par les prières de ce bon Prelat qu’il croyoit

 

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estre bien-heureux au ciel, & dans peu se voit miraculeusement guery: cecy suffira pour declarer une partie des merites de celuy qui durant vingt ans a esté noftre Evesque. (1)

 

 

Godefridus de Pompadorio, Evesque.

Louys XI, Roy de France.

 

Gabriel Dumas, Evesque.

Charles VIII, Roy de France.

 

Godefridus de Pompadorio, Evesque.

Louys XII, Roy de France.

 

Nous trouvons (en marge: L’an de Jesus Christ 1481) que Geoffroy de Pompadour surnommé de Chasteaubouchet (en marge: Ma. Sc. D. pub.), tint le baston Pastoral de ce dioceze l’an 1481 (en marge: Chenu in Tab. ep. p.). Peu d’années après on commença l’establissement (en marge: Fondation) du Convent des Peres Augustins hors la ville (en marge: Gall. Christ.) par son consentement & de la com­munauté de la ville l’an 1483 à la promotion

 

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de FF. Jean, & Prongentius de Villezaio Religieux de cet Ordre: plusieurs bien-facteurs contribuerent à cét oeuvre pie (en marge: Fund. August. anno 1483): Jean Dupuy Sieur de Trigounan donna le fonds où l’Eglise fut bastie; ce lieu fut beni par nostre Evesque Geof­froy, assisté de F. Pierre d’Abzac de la maison de la Douze (en marge: Ma. Sc. do. comm.), Religieux de l’Ordre de S. Augustin, Evesque de Rieux, & du depuis de Laitoure; il demeura Prieur jusques à l’an 1494 auquel il fut faict Archevesque de Narbonne.

Revenons à l’année 1483 funeste par la mort de Louys onziesme (en marge: 1483) qui obligea la Royne de convoquer les Estats generaux l’année suivante (en marge: 1484), ils furent premierement assignez à Orléans (en marge: Nic. Gill. Chronic.), de là à Tours, où se trouverent les deputez des trois Estats de ce Royaume, l’Evesque Geoffroy de Pompadour y assista pour le Clergé de ceste province (en marge: Ma. Sc. dom. comm.) avec les autres deputez (en marge: Estats generaux); lesquels obtindrent du Roy la confirmation des immunitez & franchises bailléez par les Roys de France à ceste province; plusieurs bons reglemens y furent conclus, specialement on donna au Roy Charles huictiesme fils unique du defunct la somme de douze cens mille livres, & cent mille escus pour son couronnement (en marge: 1485). De là nostre Prelat augmentant de grade, est faict grand aumosnier du Roy, president en la Chambre des Comtes à Paris. Mais sa fortune receut une notable secousse par l’accident qui luy survint en ce temps: car la minorité du Roy Char­les, fit naistre à deux Princes ambitieux l’occa-

 

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sion de poursuivre la regence du Royaume (en marge: Nic. Gill.) avec telle violence qu’ils sembloient plustost vouloir conduire cet Estat au sepulchre, que le gouverner & recourir de l’orage; c’estoit le Duc de Bourbon contre Louys Duc d’Orléans, qui estoit poussé & possedé par François Comte du Dunois (en marge: Revoltés), homme de prompt & violent esprit (en marge: P. Des Rey); qui voyant le Competiteur eslevé à l’office de Conestable de France, fit resoudre le Duc d’Orléans en tiltre de premier Prince du sang & le plus proche de la couronne, de se liguer avec les principaux Seigneurs pour venger ses interests & mescontentemens pretendus: desja le mal esclatoit en guerres civiles; mais les plus zélés François travaillerent à reconcilier le Duc d’Orléans avec sa Majesté, ce qui fut heureusement conclu à Bougency (en marge: Appaisées), à la charge que le Comte de Dunois promoteur de la revolte vuideroit le Royaume (en marge: Argentré lib. 12 c. 27).

Toutesfois l’impatience de cét esprit tout bouffi de rage ne peut se tenir coy plus long temps en la ville d’Ast en Piedmond (en marge: Rengregées); il revint en France sans rappel, à son arrivée fortifie Partenay pour son asseurance, de là en avant il remuë ciel & terre, tasche de renouer la ligue des Princes mécontens, sollicite puissamment le Duc d’Orléans à poursuivre ses premieres pointes; mais Anne de France tante du Roy, qui par les Estats de Tours avoit eu le gouvernement de sa Majesté, ne dort pas, elle descouvre les principaux conjurez, nostre Evesque de

 

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Pompadour, l’Evesque de Montauban de la maison de Caumon, avec le Seigneur de Bussi son frere (en marge: Jaligni), & Philippe de Commines, sont convaincus par leurs propres lettres d’estre adherans à celle ligue, à raison dequoy ils furent arrestez prisonniers (en marge: Ligueurs faictz prisonniers); les Evesques estoient traictez honorablement; tandis cependant qu’on leur faisoit leur procez par les Commissaires de la Cour de Parlement de Paris (en marge: Convaincus). Duquel procé­dé le Pape Innocent huictiesme estant adverty envoya en France des Commissaires de sa part pour l’instruction de ceste cause (en marge: Dupleix, to. 3), lesquels ayant ouy les Prelats, & recogneu leur conspiration par trop criminelle se rendirent de Juges, advocats pour obtenir du Roy leur pardon (en marge: Pardonnez), qui se tesmoignant vrayement Roy & clement, se contenta de consiner les Evesques à quelque canton de leur dioceze.

Ceste mesme année nous trouvons nostre Evesque dans la chaire du Puy en Vellay (en marge: P. odo de Giff. lib. 3 c. 38); mais quittant nostre Siege Episcopal (en marge: Chenut. Epis. Podiens.), il ne voulut pourtant se descharger de plusieurs benefices importans qu’il possedoit dans le dioceze (en marge: Benefices) & ailleurs, suppliant le Pape Alexandre sixiesme qu’il luy fut permis de retenir avec l’Evesché du Vellay les Abbayes de S. Anian de Boisse en Angoumois (en marge: Ex schedis dom. comm. Engol.), de nostre Dame de Chancelade en Perigord, les Priorez de S. Cyprien en Sarladois, de S. Jean de Colle en Perigord, les Prevostez de S. Pardoux & d’Arnac, un Canononicat & Prebande en l’Eglise de Lyon. Ce

 

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qui luy fut accordé par le Pape Alexandre, le 17 Juillet, l’an neufiesme de son Pontificat.

Gabriel Dumas l’année mesme du départ de Geoffroy (en marge: Chenut.), fut aussi prins de l’Evesché de Mirepois, & pourveu de ce siege de Perigueux l’an 1485 par Innocent huictiesme (en marge: 1485), l’an second de son Pontificat (en marge: Bull. Inno. 8 anno 1485), comme il est marqué par sa Bulle, & l’an 1490 fut faict accord entre luy & la maison de ville pour les limites de leurs jurisdictions (en marge: 1490). L’année precedente & le vingt-huictesme Avril, le Seigneur Pierre d’Anton faict don au Chapi­tre de S. Front de Perigueux (en marge: Ma. Sc. Eccles. S. Front) de la precieuse Relique de la saincte Coiffe ou Voile de la Vierge (en marge: S. Voile) qu’il avoit apporté de son voyage d’outre mer, & ce à certaines charges & conditions portées par la transaction. Un habitant de la ville Olivier de Brehault par testament donna tout son bien pour fonder une Vicairie (en marge: 1500) pour servir & honorer la mere de nostre Dieu, laquelle par son usage & attouchement de son corps tout virginal avoit sanctifié ce linge sacré.

Nous trouvons (en marge: 1500) Geoffroy de Pompadour pour nostre Evesque pourveu par Alexandre 6 l’an 1500, le 18 de son Pontificat (en marge: Bull. Alex. anno 1500), il estoit nepveu de Geoffroy, qui n’agueres nous avoit quitté, passant à l’Evesché du Puy en Vellay. Il fit son entrée Episcopale le 12 de Novembre de ladite année sans continuer dans ceste charge au delà de l’an 1503 quoy qu’il vescut davantage (en marge: 1503), jusqu’à l’an 1514 Joannes Auriens luy succeda (en marge: 1504) à son Evesché l’an 1504.

 

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Quant au Comté du Perigord (en marge: Comté), Jean sire d’Albret (en marge: Jean d’Albret Com. du Per.), fils d’Alain Albret, fut heritier de son pere, & marié à Catherine de Foix Royne de Navarre, d’où provint Henry d’Albret (en marge: Henry Dalbret), qui du costé de son pere fut Comte du Perigord, & (en marge: 1517) du costé maternel Roy de Navarre l’an 1517.

Je ne veux passer soubs silence comme Anthoine de Sainct Symphorian (en marge: Juve. des Ursins) Abbé régulier de Brantosme, estant mort à S. Valeric l’an 1501 (en marge: Du Till. invent. des Roys de France) les Religieux de ceste Abbaye en nombre de quatorze vocaux s’assemblerent pour l’eslection d’un successeur, & procedans par voye de Scrutin (en marge: Ma. Sc. Abb. Brant. anno 1501), ils furent mi-partis, sept ayans nommé frere Hugues d’Abzac de la Douze, qui desja estoit Abbé de Allodiis de l’Ordre Sainct Benoist, les autres sept esleurent frere Pierre de Sandalesses Prevost de Puychambaud, qui estoit de leur famille: (en marge: Abbé de Brantosme) à raison dequoy il intervint des grandes contrastes. Enfin Sandalesses, ne se voyant assez puissant pour resister à Dabzac, resigna son droict de l’Abbaye au Car­dinal d’Albret Amanée. Malheur qui apporta le premier Abbé commandataire dans ce lieu, où pourtant il fit plusieurs & magnifiques bastimens, qui encore aujourd’huy presentent ses armoiries. Il mourut à Casteljaloux l’an 1520 chargé des Eveschez de Bazas, de Pamies, de Pampelone, avec les Abbayes de Brantosme, du Mas-dazil, de Lozac, & de S. Amand. (2)

 

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Joannes Auriens, Evesque.

Guido de Castro-Novo de Bretenous, Evesque.

Jacobus Murisso de Castro-Novo, Evesque.

François I, Roy de France.

 

Nous rencontrons (en marge: L’an de Jesus Christ 1504) un nouveau Prélat dans une saincte action, pour honnorer un sainct qui par excellence porte le titre de Grand sans reserve (en marge: Ma. Sc. Capit. Cathed.). Ce fut l’an 1504 que Joannes Auriens Evesque de Perigueux au jour de S. Thomas l’Apostre, esleva & transporta dans un nouveau Reliquaire d’argent les ossemens sacrez du grand S. Leon Pape (en marge: Corps sainct), qui des plusieurs années avoient esté portez à l’Eglise Cathédrale de S. Estienne. Peu de temps apres & l’an 1509 Anthoine de Luzec Evesque & Comte de Cahors (en marge: 1509) estant mort apres ses obseques, le Chapitre assemblé, suivant l’ancien

 

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droict des communautez, proceda à l’eslection & nomination d’un successeur qui fut l’Abbé de Bonneval, de l’ancienne & illustre maison de Castelnau de Bretenoux. Le Pape Jule 2 con­firma l’eslection ceste mesme année le 13 de Juin; mais desja nos Roys vouloient acrocher ceste amorce qui restoit pour les bonnes lettres dans la Pragmatique sanction, s’approprians les droicts des nominations qui par icelle restoient aux communautez. Ainsi le Roy Louys onziesme estant à Vienne le quatorziesme Aoust de ceste année 1505 envoya deffenses au Clergé de Cahors de recevoir autre pour Evesque que Germain de Ganay frere du grand Chancelier de France (en marge: Evesché), auquel il avoit donné son placet, comme nous apprenons des documens de la maison de ville de Cahors, rapportés par la Croix (en marge: De Cruce in actis epis. Cadurc.; ex quo Chenut. & Gall. Christ.). Surquoy intervindrent grands procez, & pour les appaiser fut trouvé bon que l’Abbé de Bonneval relaschant son droict a l’authorité Royale, fut pourveu à l’Evesché de Perigueux (en marge: 1511), l’autre demeurant à Germain de Ganay. Ainsi l’an 1511 Guy de Chasteau-neuf, le dernier jour de Fevrier, fit son entrée Episcopale à Perigueux; ses armes estoient trois tours d’argent en champ d’azur, lesquelles nous rencontrons en plusieurs edifices sacrez qui ont eschappé les derniers saccagemens, specialement au pilier-boutaut de la Chapelle S. Estienne, où aujourd’huy le Chapitre faict le divin service, on lit ceste inscription (en marge :1521), L’AN MIL V. C. XXI. ET

 

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LE XIII. D’AVRIL FVT COMMENCEE LA PRESENTE CHAPELLE. GVIDO DE CASTRO NOVO (en marge: Inscript. lapid.). Il fut suivy en l’Evesché par Jaques Murisse de Castelnau, qui le 5 d’Octobre 1523 fit son entrée Episcopale (en marge: 1523): mais ce ne fut pour vivre long temps apres, decedant à Cahors l’année suivante, le 10 jour d’Aoust jour de S. Laurens (en marge: 1524). Ceste année fut remarquable par la donation que fit Pierre Ruffis ou Roux, Curé de Montagut, pour la fondation de la Chapelle adjoincte à l’Eglise de S. Front (en marge: Fundatio Capell. Sanctae Annae anno 1524), soubs le tiltre de S. Jean Baptiste. La première pierre de ce magnifique & bien entendu bastiment (en marge: Fondation) fut mise en ceste année 1524 le contract passé avec [avec répeté] les maistres qui receurent pour commencer six mille cinq cens livres; le fondateur ne peut voir son entreprise conduite à chef, estant prevenu de la mort: mais pour la continuation de la fabrique il donna tout son bien à la communauté de Perigueux (en marge: Ma. Sc. dom. comm. anno 1524), qui l’an 1549 fut en procez (en marge: Et anno 1549) contre les Architectes pour n’avoir bien assis leurs premieres voutes, & contractans avec d’autres font con­tinuer ceste fabrique jusques aux années infor­tunées par la prinse de la ville, & sur la reprise ceste Chapelle changea de nom, estant consacrée à Saincte Anne en recognoissance du bien­fait receu au jour de sa Feste, comme nous dirons. (3)

 

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Joannes de Plagnies, Evesque.

François I, Roy de France.

 

Incontinent (en marge: L’an de Jesus Christ 1524) apres le decez de Jaques, dans la mesme année 1524 le dixiesme Novembre Jean de Plaignie (en marge: Chenu.), ou Planis, fut destiné pour son successeur (en marge: Gall. Christ.). Il estoit de ceste ancienne & illustre famille de Desplas en Lymosin (en marge: Ma. Sc.), qui jusques à nostre temps a produit de tres-grands & tres-dignes Prelats és sieges de Bazas & de Leitoure (en marge: Origine), dans lequel nous honorons encor la venerable & pieuse vieillesse de l’oncle, & le zele du nepveu. Nostre Evesque estoit fils aisné du sieur Anthoine Desplas, & de Marie de Miramont, portant pour armes trois barres de geule my-parties en champ d’argent. Le 23 d’Avril 1525 il fit son entrée Episcopale (en marge: Ex schedis capit. Cathedralis), de laquelle ayant parlé si souvent je veux maintenant d’escrire la solennité. Les quatre Barons du Perigord estoient convoquez, à sçavoir Bour­deille, Mareul, Biron & Beinac (en marge: Reception de l’Evesque), lesquels par devoir portaient sur leurs espaules l’Evesque nouveau assis sur une chaire, depuis l’Eglise de S. Pierre Laneys, jusques dans son siege Epis-

 

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copal, à l’entrée de son Eglise Cathédrale il estoit acueilly du Clergé, auquel il juroit sur les saincts Evangiles les articles suivants. Premierement, qu’il garderoit en general les coustumes & statuts qui sont observez dans l’Eglise Catholique. Secondement, qu’il conserveroit au possible les droicts Episcopaux, recouvreroit les biens alienez, & en particulier conserveroit les privileges de ceste Eglise. Tiercement, qu’il vouloit selon son pouvoir guarantir de leurs ennemis & de toutes hostilitez ceux de son dioceze. Haec omnia, disoit-il, praedicta promitto & juro ad sancta Dei Evangelia me facturum & servaturum pro posse (en marge: Jurement de l’Evesque). En suitte il frappoit de son baston Pastoral la porte de son Eglise, disant le verset, Attollite portas principes, &c. Le Choeur respondoit, Quis est iste Rex gloriae, &c. A l’ouverture l’on chantoit, Sint lumbi vesti praecincti, jusqu’au Maistre-autel, où l’Evesque di­soit l’Oraison de S. Estienne; de là chantant le Cantique, Te Deum laudamus, il estoit porté par les Barons dans son siege Episcopal. Ce font les devoirs du Clergé envers leur nouveau Prelat, qui en suitte leur devoit faire plusieurs liberalitez.

Deplaigne estant acueily avec ceste magnificence, s’occupa à plusieurs sainctes actions (en marge: Sainct Espine trouvée). La mort du Capitaine des Anglois Talabot (en marge: Vid. sup. anno 1453), tué prés de Castillon, avoit donné parmy les despoüiles prises sur luy à noble Michel Peyrounin, une Croix d’or, garnie de diamans, trouvée au

 

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col du deffunct, laquelle apres quelques années tomba entre les mains de noble Pierre de Pombrian sieur de Monreal, lequel faisant ouvrir ce sacre Reliquaire, trouva au dedans une espine enchassée, & n’ayant asseurance s’il la falloit honorer, comme ayant servy à la Passion de Jesus-Christ. Il consulta sur ce doubte nostre Evesque de Plaignie, qui commit l’examen de cét affaire à son Théologal Maimont Gardien du Convent de S. François, lequel dans sa consulte baillée par escript, respond qu’il falloit de­mander à Dieu des signes extraordinaires par jeusnes & prières publiques, afin qu’il luy pleut de declarer en quel estat il vouloit qu’on tint ceste espine. Il est vray-semblable que dans l’essay faict, divers miracles parurent (en marge: 1526): car l’an 1526 nostre Evesque expedia un Bref (en marge: Rescriptum Joannis de Plagn. anno 1526) en faveur de la transaction faicte par le Sieur de Pombrian avec Sudiraut Curé de la Parroisse d’Aysac, declarant apres plusieurs consultes qu’on peut & doit honorer la saincte Espine, commandant de la porter processionnelement; j’ay veu l’ori­ginal de ce rescript dans le thresor du chasteau de Montreal.

Dés la mesme année nostre Evesque expedia une commission autentique à Jean Ganeoti No­taire Apostolique, à ce qu’il procedast à l’inquisition de la vie & moeurs du deffunct Elie de Bourdeille jadis Evesque de Perigueux, puis Archevesque de Tours, & Cardinal, decedé depuis quarante & deux ans. Ne tanti viri me

 

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moria, dict l’Evesque (en marge: Inquisition), in clero & populo praedictae dioecesis sepulta remaneat, ut ejus exemplo caeteri ad vitae sanctitatem & laudem facilius trahantur, generosaque nobilitas tantis virtutitus excrescentibus, etiam proclivior ad similia peragenda invitetur (Commiss. Episc. de Pla. pro inquis. anno 1526). Ceste inquisition fut faicte à la promotion de son nepveu, noble Jean de Bourdeille Proto­notaire Apostolique, qui avoit entrepris la ve­rification de dix-huict articles proposez sur les merites du deffunct; & à cét effet il fit ouyr quatorze ou quinze tesmoings, & jaçoit que sa canonization ne soit esté du depuis poursuivie en Cour de Rome, neantmoins il a esté tousjours tenu en odeur de saincteté, comme nous avons dict. L’evesque Jean de Plaignie fit bastir le chasteau qui porte son nom sur les frontières du Perigord & Lymosin, comme l’on void aujour­d’huy par ses armoiries qui y paroissent.

L’an 1530 le Chapitre de S. Front pour agrandir l’authorité de la maison de ville (en marge: Hommage pour la Vigerie, ex Ma. Sc. do. com.), contracta avec ses officiels, pour la Justice de la Vigerie, qu’ils donnerent aux Maire & Consuls, a la charge qu’ils leur rendroient hommage-lige lorsque la Feste du Martyr S. Sillain tomberoit au jour de Dimanche (en marge :Hommage), & ce en la qualité suivan­te. Le Maire ayant les deux genoux, le chapeau & ceinture en terre, teste nuë, le chaperon posé sur le bureau, les mains jointes dans les mains de l’Abbé ou du President du Chapitre, donnant trois florins d’or pour l’achapt, & leur promet­tant vassalité fidele, reservé l’hommage & service

 

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deu au Roy. Semblable hommage-lige doivent ils rendre pour la Justice du Cellarier (en marge: Hommage pour le Cellarier), lors que la Feste de S. Front tombe au Dimanche, posant le chaperon & ceinture sur le bureau du lieu capitulaire, se mettant teste nuë & mains jointes dans les mains du President au Chapitre (en marge: Hommage), puis les posant sur les saincts Evangiles, pro­mettant vassalité au Sieur Abbé, Chanoines & Chapitre, puis se levant bailler le baiser à la joüe du President (en marge: Ma. Sc. cap. S. Front), luy donnant pour leur achapt un paire de gands tissus de laine blanche. L’achapt de ceste Juftice avoit esté faict l’an 1484 pour huict cens livres: desja le Sieur Abbé & le Chapitre en avoit vendu au Roy le plus liquide l’an 1336. (4)

 

 

Fulco de Bonneval, Evesque.

Claudius Givry, Evesque, Cardinal. S. R. E.

François I, Roy de France.

 

(en marge: L’an de Jesus Christ 1531) L’evesché de Bazas estoit possedé par Foucaud de Bonneval (en marge: Chenu. in tab. ep. Vasatens.); il fit permutation de son Siege & du Prioré de Leyrac avec nostre Evesque Jean de Plaigne, qui fut succedé en celuy de Bazas par

 

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son dernier frere Annet de Plaigne: ainsi le pre­mier jour de Janvier 1531 Foucaud fit son en­trée dans Perigueux, estant porté par les depu­tez des quatre Barons, ayant esté inhibé ausdits Seigneurs de s’y trouver en personne, à raison du desordre qui fut survenu sur la preseance, disputée entr’eux (en marge: Ma. Sc. do. com.). Ce Prelat fut amateur du bien public (en marge: Fondation), faisant conduire la fontaine de Jameau jusques au milieu de la ville, à quoy la communauté contribua (en marge: 1535): car l’oeuvre estoit de haute entreprise, puis qu’il falloit traverser la riviere de l’Isle par des aqueducs qui bien-tost furent renverfez par l’effort du coulant des eaux.

La mort du Cardinal d’Albret arrivée l’an 1520 avoit desja aporté de grandes desolations dans l’Abbaye de Brantosme (en marge: Abbaie), dont il estoit le premier Abbé commendataire (en marge: Ma. Sc. Abb. Brant.), plusieurs fascheux & presque implacables procez intervindrent durant plus de dix-huict ans, entre FF. Claude Rafin, & Pierre Saunier Religieux de cét Ordre, pour succeder à ceste Abbaye, qui comme la Sabine tirassée par les Romains expiroit; & destituée de Religieux, rendoit les abois entre les mains trop avides. Enfin (en marge: 1538) Saunier resigna ses droicts à M. Pierre de Mareul Pro­tonotaire Apostolique, qui l’an 1538 obtint du grand Conseil arrest d’adjudication; & comme tousjours nostre Dieu tout admirable, qui est en ses oeuvres, tire d’un grand desordre un bon reglement, le grand Conseil ordonna à la requi-

 

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sition du Procureur general du Roy que ceste Abbaye de Brantosme seroit reformée (en marge: Reformatio Abb. Brantosm.) selon les statuts & definitions de l’Ordre S. Benoist, & que Commissaires seroient deputez pour cét effet: ainsi (en marge: 1539) l’année suivante 1539 les Com­missaires arrivent pour executer l’arrest, accom­pagnez de R. P. F. Placide Leger, Prieur de l’Abbaye dc Sainct Germain des prés, & Frere Quentin de Condé, à ce commis de par le Roy François premier, ceux-cy avec l’Abbé de Brantosme dresserent les articles de la reforma­tion de ce lieu, tant pour le spirituel que pour le temporel.

Foucaud de Bonneval (en marge: 1540) fit vaquer l’Evesché (en marge: Ma. Sc. cap. S. Steph. & do. com.) par son decez l’an 1540. Il fut ensevely dans son Eglise Cathédrale, audevant le grand Autel, accompagné des pompes funebres, or­dinaires à sa dignité Episcopale, laquelle de surcroy tomba dans les mains du Cardinal Claude de Givry du tiltre de Saincte Agnes in agone (en marge: Cardinal), appellé Evesque de Langres, Pair de France, administrateur perpetuel de l’Eglise, & Evesché de Perigueux durant dix ans. (5)

 

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Joannes de Lustrac, Evesque.

Godefridus de Pompadour de Chasteau Bouchet, Evesque.

Guido Bouchard d’Aubeterre, Evesque.

Augustinus de Trivulcis, Card. S. R. E., Evesque.

Henry II, Roy de France.

 

Tandis (en marge: L’an de Jesus Christ 1551) que nos Pasteurs estoient endormis dans le calme apporté à la France par les armes victorieuses de nos Roys, l’Enfer qui ne dort jamais estoit aux aguets pour surprendre le troupeau du Seigneur si mal gardé par les Prelats nonchalans (en marge: Abus), lesquels s’ils veilloient c’estoit pour se joüer du bien du Crucifix, comme d’une pelotte, se le renvoyant l’un à l’autre par un tripotage tout sacrilege (en marge: Flori. de Raymond Ness. de l’her. lib. I). Dieu du ciel ne peut davantage suporter les excez des prophanateurs

 

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de son sanctuaire, il lasche les alonges dont Satan estoit attaché, & selon le stile ordinaire qu’il pratique en sa fureur, pour chastier son peu­ple permet que les loups carnassiers, soubs la toison des simples brebis entrent dans sa ber­gerie, pour renouveller toutes les cruautez & boucheries sanguinaires, que les siecles passez de l’Eglise eussent senty.

Desja Martin Luther sur la fin de l’an 1517 (en marge: Heresie) avoit sonné le baffroy dans Vitemberg en Saxe (en marge: Thuanus Sleyden.), pour reveiller les esprits panchans à la rebellion contre l’Eglise par le desir des nouveautez (en marge: Annal. Nicol. Gilles); desja les placards mal attachez & plaquez contre l’ancienne Religion, voloient dans toute la Chrestienté (en marge: Lutherienne), mesme dans l’année 1534 nostre pauvre France commença de sentir la puanteur de ces libelles diffamatoires portez jufque dans la chambre & cabinet du Roy François premier, qui pour lors estoit à Blois, attentat qui oultra de douleur son cœur tout Chrestien! mais l’im­pudence passant jusques à la ville de Paris avoit aussi mis en la main de ce bon Roy le fer & le feu contre ceste hydre venimeuse (en marge: Jean le Febvre): mais quoy! c’estoit de vray coupper les testes qui renaissoient à centaines (en marge: Calvienne), à la faveur d’un nouveau faux Prophete (en marge: Institution de Calvin anno 1535), qui ceste année 1535 bastit son institution pour former la Samarie au milieu de la France, diviser l’union de l’Eglise, & par un attentat sacrilege renversa l’estat & la foy des François pour remettre sur pied des ruines de ceste Monarchie, les idoles de ses fantaisies,

 

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fonduës du billon des heresies descreditées dés long-temps

Henry second l’an 1547 successeur du zele (en marge: 1547) & de la couronne de France, oppose à ce venin les plus opportuns remedes que le temps & la pieté de ses ancestres luy fournit: mais la rebellion de l’Aquitaine (en marge: Paradin hist. lib. c. 5 & 7) contre ses edicts & de son pere arrivant l’an 1547 fut le sujet de la gabelle (en marge: Gabelle), arma la cholere de Dieu contre les villes du Xaintonge, Angoumois, Poitou, Lymosin, Perigord (en marge: Annal. Aquit.; 1548), & autres qui sentirent & les effects de la justice du Roy offensé (en marge: Chro. Engol.), & de la part de Dieu, elles furent abandonnées aux plus funestes accidens qu’il permet arriver contre les peu­ples les plus rebelles à ses loix divines, specia­lement la ville capitale du Perigord, dans laquelle le Sieur de Brandon Conseiller au Parle­ment (en marge: Parad. c. 7) avoit esté inhumainement traicté pour ce sujet verra dans peu la divine punition.

Jean de Lastrac l’an 1550 comme Evesque de Périgueux faict son entrée le 14 Juin (en marge: 1550): mais ce ne fut pour y faire long sejour: car l’année suivante 1551 Geoffroy de Pompadour du Chasteau Bouchet (en marge: Ma. Sc. Eccles. Cat.) fut receu (en marge: Evesque) dans la ville pour Evesque avec les pompes ordinaires le 13 Decembre (en marge: 1551); j’ay apprins son extraction dans Chasteau Bouchet, maison noble du Lymosin, qui est sur la frontière du Perigord, où l’on voit inscript dans une galerie les vieux pourtraicts (en marge: Inscript. in pariete) des cinq enfans du sieur Geoffroy de Pompadour, dont le troisiesme est nostre Evesque, suivant l’in­-

 

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scription, qui l’apelle aussi Abbé de S. Maurin.

Mais nous tardons trop d’entamer nos mal­heurs, qui commencerent en ce pays au vingt-quatriesme jour de Janvier de ceste année 1551 par le plus estrange sacrilege que jamais les Rouptiers eussent commis dans leurs persecutions (en marge: Sacrilege). C’est que desja la rage Lutherienne eslançoit ceux qu’elle possedoit, specialement contre les marques de nostre redemption; desja ils se ruent au débris des Croix, Images & representations de Jefus-Christ. Ainsi à la faveur de la nuict ils rompirent, abatirent & briserent toutes les Croix qui estoient arborées depuis Perigueux, jusqu’au bourg de Marsac (en marge: 1551), & sur les autres advenuës de la ville; deschargeant & leur rage & leur ventre sur le piedestal qu’ils ne pouvoient arracher. Sacrilège qui donna au coeur de tous les bons Catholiques! specialement aux Officiers de la Justice qui se portent sur les lieux, font procez verbal de ces excez (en marge: Ex processu verbali Stephani Bertin Majoris urbis & Consulum anno 1551), & sur les violens soubçons que cét excez avoit esté commis en partie par certains Ecclesiastiques & Chanoines infectez du Calvinisme (en marge: Recherché), ils font exacte perquisition dans la cité pour ren­contrer les indices des auteurs de ce crime, sans trouver aucune preuve, sauf contre un Prestre nommé Chaulet, qui fut retenu prisonnier. Et pour appaiser le juste courroux de nostre Dieu lezé, l’on dressa une procession generale, demandant à Dieu misericorde: mais ce n’estoient que les premières esgratigneures du foüet de Dieu,

 

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qui coup fut coup nous escorchera plus visvement: car dés le lendemain vingt-huictiesme de ce mois, l’infortune fut plus grande. Ces har­pies d’Enfer sur la minuict enfoncent la grille de la Chapelle apellée Nostre Dame de Pitié, en l’Eglise Cathedrale, où le thresor du Chapi­tre estoit gardé (en marge: Pillage), pillent tous les vaisseaux sacrez d’or & d’argent, qui valloient quarante mille livres, asçauoir les précieux Reliquaires du chef de Sainct Léon Pape, du chef de Sainct Barthe­lemy Apostre, du bras de Sainct Front (en marge: Ibidem). De plus dix-huict grands Calices d’or ou d’argent, avec leurs patenes, buretes, encensoirs, chandeliers, croix, & autres orfebvreries.

Au lendemain sur ce funeste spectacle, les pleurs & les cris des Catholiques monterent jusques au ciel, ne sçachans bonnement qui accuser, regretans plus la profanation des saincts ossemens, lesquels au dernier jour de ce mois, on trouva dans un jardin despoüilles de leurs chasses, & jettez par terre: les Ecclesiastiques en advertirent la Justice pour venir faire atestation & verification d’iceux; après quoy ils font une procession, rapportant ces ossemens soubs le grand Autel de l’Eglise Cathedrale (en marge: Procession), accom­pagnez du peuple qui fondoit en larmes, & d’une voix lamentable crioit par les rues, demandant à Dieu misericorde sur son peuple, & justice contre les sacrileges (en marge: Ma. Sc. do. com.); mais encore Dieu nous prepare des machines pour nous battre mieux en ruine. L’Evesque Geoffroy meurt

 

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l’année suivante 1552 aagé de cinquante-six ans (en marge: Juvenal des Ursins); d’autre-part Henry Sire d’Albret Roy de Navarre, Comte du Perigord du costé de son pere (en marge: Comté), eut sa fille Jeanne de Navarre mariée à Anthoine de Bourbon (en marge: Anthoine de Bourbon, Comte du Perig.), desquels l’an suivant 1553 nasquit Henry quatriesme, auquel le Comté du Périgord sera terminé & incorporé à la couronne de France, lors que l’an 1589 il sera recogneu pour Roy de France. Henry second (en marge: Henry de Bourbon, Annal. Dupleix, tom. 3 pag. 488) crea & establit a Périgueux la Cour des Aydes ceste année 1553 (en marge: Cour des Aydes) laquelle profita d’un costé: mais par accident facilita l’Apostasie de la ville de Bragerac, dans laquelle le sejour de Poynet Lieutenant general tenoit la main à l’execution des edicts, & la bride courte à l’huguenot; mais s’estant faict pourvoir d’un Office de Conseiller en ceste nouvelle Cour des Aydes, il resigna son office à son frere germain qui estoit en secret plus que passionné Lutherien, lequel dans moins de six mois facilita l’Apostasie generale de ceste ville (en marge: Apostasie de Bragerac), y donnant entrée publique au presche de la doctrine nouvelle (en marge: Ma. Sc.), qui desja les avoit bien avant empestez par la communication du voisinage de Saincte Foy: mais en secret & à cachette. Et comme ceste furie grossissoit par nouvelles rages, il authorisa la demolition des bastimens Ecclesiastiques, la tyrannie du massacre des Prestres & Religieux; le Curé de S. Jeammes Jean Galaïou, & un autre bon Prestre Anthoine Benteyac receurent dans leur Eglise tant de coups par les inhumains (en marge: Cruautez), qu’ils demeurerent

 

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sourds toute leur vie, qui leur fut esté ravie dans ceste ville excommuniée sans qu’on le renferma dans des tonneaux, & les Catholiques les conduirent sur une charrette hors la ville en lieu d’asseurance.

Guy Bouchard d’Aubeterre print possession (en marge: 1554) de l’Evesché le neufiesme Juin l’an 1554 (en marge: Chenu; Gall. Christ.) auquel fut donné arrest en Parlement de Bourdeaux à raison de la Cure de S. Avit de Manzac, par le­quel elle enjoinct à nostre Evesque, à la requisition du Procureur general du Roy, de faire transcrire en parchemin (en marge: Pancarte de l’Evesché), & mettre en deuë forme la pancarte de l’Evesché, qui avoit esté produitte, & de la faire conserver dans ses thresors & archives par personnes à ce deputées (en marge: Arrest du Parlem. de Bourd. anno 1554), afin d’y avoir recours aux differens qui surviendroient pour raison des collations, presentations, & autres provisions des benefices: ce qui fut exécuté l’an 1556 dans le Synode tenu au mois d’Avril (en marge: 1556), auquel l’Evesque Guido presidoit; lequel fut aussi l’an 1554 dans l’employ pour moyenner les transactions qui furent passées entre le Chapitre de l’Eglise collégiale S. Theodore de la Roche Beaucourt, & le Sieur du lieu qui estoit leur fondateur (en marge: accord), & ce pour l’establissement & fondation du Bas-choeur (en marge: Transact. pour le Chapitre de la Roche Beaucour), laquelle transaction fut encore modifiée par une seconde l’an 1557 dirigée & conseillée (en marge: 1557) par le mesme Evesque au contentement de tous, y mettant la paix apres plusieurs debats trop im­portuns.

 

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Mettons icy le doigt sur les lèvres pour ne dire une funeste catastrophe d’un grand, & con­tentons-nous de dire que bien tost après, voire dés l’an 1554 je trouve le Cardinal Augustinus de Triulcis (en marge: Lib. hommag. episcop.), du tiltre de S. Adrian, qui se declare administrateur perpetuel de l’Eglise & Evesché de Perigueux (en marge: Cardinal administrateur), lequel entr’autres par­ticularitez se montra zélé en l’exécution des reglemens, qui avoient esté faicts l’année prece­dente pour la reformation de l’Abbaye dc B rantosme, 1e Roy pressant l’affaire à la requisition de l’Evesque de Lavaur, Abbé commendataire de ce lieu; mais il falloit trouver des Religieux vrayement Religieux pour les observer, & repeupler ceste Abbaye; pour cét effet l’abbé s’adressa aux Religieux de la Congrégation de Chezal-benoit de l’Ordre reformé de Sainct Benoist (en marge: Reformation), les priant d’annexer son Abbaye à leur reformation; Il transigea avec eux l’an 1543. Le concordat est emologué dix ans apres. Il ne peut pourtant avoir ceste satisfaction de voir l’execution de ses desirs prevenu de la mort l’an 1556 suivy en l’Abbaye par Pierre de Bourdeille (en marge: Ma. Sc. Abbatiae Brantol.). Mais le Cardinal Triulce nostre Evesque, poussant la roüe à la reformation par son autho­rité, Charles d’Acromonte Archevesque de Bourdeaux, donnant son contentement & faveur; enfin l’an 1559 les Reformez furent mis dans ceste Abbaye (en marge: 1559), & les anciens Moynes se retirerent dans les Priorez emportans les plus importans tiltres de ceste maison. La mesme

 

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année de la reformation de ceste Abbaye fut faicte la secularisation de l’Abbaye de Sarlac, & érigée en douze dignitez seculieres pour l’Egli­se Cathedrale avec d’autres Officiers. (6)

 

 

Petrus Fournier, Evesque.

Charles IX, Roy de France.

 

Nonobstant (en marge: L’an de Jesus Christ 1550) tous les efforts humains, le feu de l’heresie s’augmente (en marge: Flori. de Raymond, ness. de l’heres.), l’on ne peut arrester son incende par l’abbatis des maisons les plus relevées; c’est un juste fleau de Dieu qu’il envoye en sa fureur, specialement contre l’Aquitaine (en marge: Fleaux de Dieu), tout autant que celuy dont il punit jadis les Babiloniens (en marge: 4 R. 17 v. 25) & autres regions Idolatres de Cutha, de Anath, de Emath, de Sephamain, & autres peuples incirconcis, mepriseurs du culte du Dieu d’Israel, contre lesquels il envoya des lyons & autres bestes fauves qui les dechiroient impitoyablement.

Desja le bercail de ceste province est en proye aux loups carnaciers; d’autre-part les mercenai­res, n’ont d’autre soing que d’escorcher, & de le gorger du residu; deux mauz qui dans dix

 

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ans meneront l’Eglise de ceste province à sa desolation totale (en marge: Desolation), jusqu’à ce que l’on recognoisse que nostre Dieu est fort & jaloux, visitant l’iniquité des Pères (en marge: Exod. 20) sur leurs enfans en la troisiesme & quatriesme generation.

Pierre Fournier natif d’Auvergne, noble de son extraction, mais non beaucoup moyenné, (en marge: 1561) est mis en la place de l’Evesque de Perigueux l’an 1561. D’autre-part la mesme année (ô secret de Dieu) le premier faux Pasteur Calviniste, venu de Geneve (en marge: Premier Ministre), commença de se glisser dans les chasteaux de ceste province, pour empester la noblesse par sa doctrine diabolique: nous apprendrons du Martyrologe & Histoire de l’Eglise pretenduë (en marge: Histoire des Martyrs de l’Eglise Chrestienne à Geneve, l’an 1565), le progrés & la fin de cét Apostre d’un nouveau Evangile. Lors que l’apostasie commença à Geneve d’apeller les libertins à l’esclave franchise du Calvinisme, Maistre Simon Brossier, jeune homme de vingt ans, s’y laissa traisner , où il huma par plusieurs ans l’esprit seditieux de la pretenduë reformation pour la porter à divers voyages dans la France, faisant profession de mener à ceste ville excommuniée, tous ceux qu’il pouvoit charlater, soubs esperance d’apprendre le vray service de Dieu. Apres plusieurs vovages il s’arresta en France, & sur le mois d’Aoust de l’an 1561 il vint dans la Roche Beaucourt (en marge: du Perigord), & semant sa fausse doctrine s’approche prés la ville de Perigueux. D’autre costé plusieurs Ministreaux rodent par ceste province, disans qu’ils estoient envoyez du Pape pour prescher la refor-

 

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mation de l’Eglise, & suivant la remarque du Theologal Peyronnet (en marge: Peyronnet Theolog. de Perig. en sa preface sur les Sermons des Saincts), la simplicité du siecle, & l’ignorance estoit pour lors si grande qu’on ne cognoissoit point les loups soubs la toison des brebis; mais les Curez, deffrayoient leurs voyages (en marge: Vint à Perigueux), les peuples les escoutoient comme Anges du Paradis. Sur le bruict des nouvelles approches du Ministre Brossier ceux de ceste ville qui desja estoient enyvrez du vin de la Babilone (en marge: Martyrolog. Ibid.), le suppliçnt de visiter les fideles infide­les; il print ceste asseurance tout malade qu’il eqtoit, & commença à prescher de nuict à l’hostellerie du Chapeau Verd proche la porte du Pont, la basse-court luy servant d’auditoire, apres que la cave de l’hostellerie fut trouvée trop estroitte pour le concours du peuple (en marge: Ma. Sc. dom. comm.).

Desja les officiers de la Justice avoient senty la fumée de ce feu caché: car dés le 25 Avril de ceste année ils avoient découuert que ce Ministre s’estoit retiré dans le chasteau du Sieur de Meymie (en marge: Heresie descouverte), où l’on conjecturoit plus que probablement le thresor de l’Eglise Cathedrale avoir esté apporté par les Chanoynes de ceste maison, qui desja avoit apostaté de la foy; de plus l’on avoit plus que preuve suffisante que ce Mi­nistre boutefeu avoit porté plusieurs mutins à la rebellion; desja l’on voyoit les seditieux Calvinistes venir en trouppe avec armes dans la ville. Enfin au quatriesme de May le Sieur An­thoine de Chiliaud, pour lors Maire de la ville (en marge: En exercice), s’estant porté dans la maison d’un cordonnier

 

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Lymosin, qui depuis peu s’estoit domicilié dans la ville, interrogé qui avoit baptizé son fils, luy avoit respondu qu’un valet de Meymi l’avoit apporté à la Feuliade où son fils avoit esté baptizé à la reformée parle Ministre Brossier, & apellé Abraham; mesme quelques jours apres cét enfant estant mort, ce nouveau reformé le porta en cachettes à la sepulture, sans y apeller le convoy ordinaire des Ecclesiastiques. Tous ces funestes symptomes donnoient cognoissance de la grandeur du mal qui s’agrandissoit de plus en plus. Le bon heur dans ce malheur porta les officiers de la Justice d’espier si adextrement l’heure de ce Predicant caché (en marge: Martyrolog. Ibid.), qu’enfin il tomba entre les mains du Lieutenant particulier, qui le fit traisner en prison dans la maison de ville (en marge: Ministre faict prisonnier). Icy les actes de ce faux martyr, disent qu’un Advocat de la ville des plus passionncz l’ayant battu, le poussa d’une roideur dans le cachot le plus puant de la Conciergerie, d’où le lendemain il fut retiré à la priere des principaux de la Religion, & mis dans la sale des prisonniers, où quelques Chanoynes accompagnez de quelques Gentils­hommes, & principaux de la ville, se rendirent pour convaincre la fausseté de ce nouveau Predicant; mais pour toute response il leur disoit, qu’ils estoient venus pour se mocquer de luy, & non pour apprendre.

Mais pour relever le coeur à demy abbatu à ces religionnaires, arriva l’edit de Janvier (en marge: L’edit de Janvier de l’an 1561), qui en revocant celuy du mois de Juillet de l’année (en marge: 1561).

 

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precedente, defendoit que ceux de la nouvelle Religion ne fussent emprisonnez., & ne subissent les peines ordonnées pour avoir faict leurs presches, s’estre assemblez à leurs prières & exerci­ces de leur secte hors les villes: ainsi le prison­nier apres un mois de reclusion est relasché (en marge: Relasché), & l’heresie non jà plus en cachettes rmais la teste levée, abusant de la minorité de nos Roys, piaffe, chante ses victoires & triomphes. Desja presque toute ceste province tendoit à l’apostasie, les principales villes traisnées par la violen­ce de ce torrent suivoient la nouveauté du schisme. Ce Ministre exerçant librement sa charge (en marge: Apostasies) ramassa de nos débris & dressa (en marge: Martyr. Ibid.), à ce qu’ils disent dans Perigueux, une Eglise bien polissée. La ville de Bragerac enyvrée du vin de la Babilone avoit traisné presque tous les Religieux de trois ou quatre Convents à ceste desesperée liberté, mesme dans le Mercadil l’on avoit faict un Tem­ple, apres avoir deserté l’ancienne & celebre maison du Prieur, & demoly son Eglise. Florimond de Raymond (en marge: Florimond de Raymond, ness. de l’hersesie, lib. 8, c. 17) remarque qu’estant encores jeunet, il les fut voir dans ceste Synagogue, regie par un Moyne apostat, qui au lieu des prieres Ecclesiastiques, leur avoit composé & mis en main un Cantique François, qui commençoit (en marge: Cantique huguenot),

O pauvre creature,

Tu tends à pourriture,

N’ayans encore l’usage de la rime Bezeane quoy que desja rimassée des l’an 1553 un pedant

 

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Escossois, aveugle, & pour ce nommé le Caecus, gasta grandement la jeunesse de ce lieu (en marge: Invention), leur expliquant au lieu de leur Virgile les pseaumes de Bucanan, & dans l’exposition leur instillant le ve­nin de l’heresie, finesse bien subtile, que luy-mesme avoit desja pratiqué dans Montauban.

Mais nostre Dieu laissera-il ce mal sans anti­dote? deslors que le serpent au renouveau sort de la taniere où il avoit demeuré blotty durant l’Hyver, à mesme temps la nature faict bourgeonner le fresne qui est son contre-poison (en marge: Opposition). Plusieurs escrivains, specialement ceux qui s’estoient trouvez au colloque de Poissi, mirent la main à la plume, refutant pertinemment les erreurs du Calvinisme. M. Jean Talpain Docteur Theologal à Perigueux l’an 1562 (en marge: J. Talpin deffence du sacrifice de la Messe, anno 1562) fut le premier qui deffendit par son livre François le tres-auguste sacrifice de la Messe contre les ca­lomnies de ce temps (en marge: 1562); il fut homme tres- entendu és escritures, és langues Grecques & Hebraiques, quoy que plus heureux en sa plume qu’en sa langue; nous voyons encor ses livres si par­faitement elabourez qu’ils ne nous laissent rien à dire de nouveau, tant en ceste matière qu’és autres poincts de controverse.

Desja l’insolence huguenote n’avoit que trop picqué le coeur à plusieurs villes du voisinage qui se resolurent de faire main-basse, & se dégager de ses hostes insupportables (en marge: Thuanus); toutesfois l’apostheme n’estoit encore en sa maturité, la blessure au lieu de mettre hors le puz, y alluma l’e-

 

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stiomene: les Princes du sang levent les armes, battent aux champs avec leurs trouppes reformées (en marge: Armées des Princes), surprennent plusieurs places (en marge: Lapopeliniere); bref toute la France est en armes. Duras n’ayant peu conduire à chef son entreprise sur Bourdeaux (en marge: Daubigné, lib. I, hist. cap. 11), se retirant honteusement de Sarlac, s’acheminoit avec ses trouppes huguenotes de vingt & trois enseignes d’infanterie, & treize cornettes de cavallerie pour aller joindre l’armée du Prince au pays de France. Montluc non jamais assez loüé pour les Catholiques (en marge: Ma. Sc. do. com.), voyant les maux & ravages que ces rebelles exerçoient sur nos Eglises de la campagne, luy vint au devant dans les pleines de Veir, à trois lieuës de Perigueux, & le chargea si heureusement (en marge: deffaite), qu’il en mit à mort plus de quatre ou cinq mille, leur enleva les deux canons qu’ils traisnoient, emporta dix-neuf drapeaux, & cinq cornettes qu’il presenta au Duc de Monpansier depuis peu venu dans Bragerac. Ceux de la desroute se sauverent à la fuitte.

Sur les commencemens de ces desordres, les faux fidèles de la ville craignans ce qui arriva (en marge: Martyrologe de Geneve), persuadoient au Ministre Brossier la retraitte pour l’asseurance de sa personne: mais trop d’opiniastreté le mit derechef entre les mains de la Justice (en marge: Ministre prisonnier). Il fut retenu dans les prisons Royaux durant trois mois, & sur le poinct de faire confirmer à Bourdeaux sa sentence de mort, il prevint l’exécution, décédant dans la Conciergerie (en marge: meurt), laissant opinion d’avoir esté empoi-

 

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sonné par les liens; ce qui obligea les officiers de le faire ouvrir, & ne trouvans rien dc venin: car il l’avoit tout vomy par sa bouche durant plusieurs ans; tout distillé par sa plume en ses escrits, on fit ensevelir ceste charongne au ce­metiere des pendus, où du depuis par perpe­tuel anatheme les passans jettent une pierre sur son sepulchre.

Ceste notable desroute de Duras (en marge: 1562) avoit abatu le sourcil de l’huguenot dans la Guyenne, mesmement dans ceste province: mais en suitte de la guerre,1a cherté des vivres & la contagion mirent dans ce pays à mesme temps les trois fleaux de l’ire de Dieu (en marge: Fleaus de Dieu). Jettons-nous derechef dans la meslée des armes, pour voir dans ceste province la plus sanglante persecution de l’E­glise qui soit esté par le passé. C’est estrange combien le seul nom de Catholique estoit odieux aux nouveaux venus! en voicy un exem­ple bien funeste. Dieu avoit encore conservé dans Bragerac plusieurs qui n’avoient fleschy le genoüil devant Baal; ces enragez Calvinistes espierent entr’autres Peyrare de Dangounet, ri­che marchand, tres-bon Catholique; & lors qu’il se retiroit au soir dans sa maison (en marge: Assazinat) ils l’assazinerent à coups d’espées. Estant laiffé pour mort, neantmoins il y avoit encore esperance de guerison; surquoy ces denaturez assazins le vindrent daguer dans son lict, mettent sa maison & boutique au pillage (en marge: Daubig. lib. 3 c. 17, Sectes). Ainsi falloit-il refor­mer l’Evangile? (en marge: Thuanus) De plus un jeune Capitaine

 

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Armand de Caumond Sieur des pilles, espia la garnison de ceste ville-là (en marge: 1563), mal soigneuse de gar­der les prisonniers huguenots, tant hommes que femmes, destinez au dernier supplice, il s’enhardit luy trentiesme à cheval de les enlever; ce qu’il fit apres plusieurs meurtres, & quelques jours apres pratiqua le mesme dans Sain­cte Foy (en marge: Entreprises hardies). Avantures qui luy grossirent le coeur, & poursuivant ces commencemens entreprint sur Mussidan, escale de nuict la ville & le cha­steau (en marge: Dupleix, to. 3 hist.), & comme l’appetit vient en mangeant, conspire derechef sur Bragerac par quelques fausses clefs: ce qui n’ayant succedé, il pratiqua l’entrée par l’ouverture des murailles que fit un bourgeois dans sa maison, par laquelle il se glissa en petit nombre, baillant grand terreur avec plusieurs trompettes & tambours (en marge: Bragerac prins): neant­moins il est acueilly de la garnison qu’il força & mit en desroute; le Peuch qui commandoit dans la ville r’allia huictante soldats dans le chasteau, le Curé de S. Jammes frere germain du Sieur Peyrarede, en r’allie d’autres dans une tour proche de la maison de ville, tout ce qui demeu­ra par les rues passa au fil de l’espée. Pilles at­taque premièrement ceste tour, la sappe, l’em­porte, faict massacrer ceux que la ruine n’avoit escrazez (en marge: Aubigné, Ibidem). Le Curé grandement loüé des historiens huguenots, à raison de son courage, sauvé comme miraculeusement dans une arcade de la tour, se jette à travers les fossez dans la campa­gne: mais il fut couru d’une si grande multitu-

 

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de d’habitans, qui par trahison secondoient les attaques, qu’enfin il tomba entre les mains de Pilles, qui le fit pendre audevant du chasteau (en marge: Cruauté), dans lequel on fit plus de resistence: mais la basse-court emportée de vive force par l’hugue­not, le Peuch voulant parlementer est refusé d’avoir composition, luy reprochant le massacre de quelques faux freres en Christ. Enfin & luy & les siens se rendirent à discretion, qui ne fut autre que la mort cruelle. Ainsi le boüillon d’un Mars furieux eslançoit ses Religionnaires à des attentats violens; les pauvres Catholiques sont chassez de la ville (en marge: Ma. Sc. dom. comm.); les Eglises & Monasteres à six lieuës à la ronde sont renversés des apostats sont les plus fougueux, specialement un Prestre renegat Curé de Marsaneis, se ren­dit pour jamais infame par aes cruautez.

Desja Monluc preparoit à Bourdeaux le canon pour aller forcer Mussidan rebelle (en marge: Comm. de Monluc): mais le traicté de paix faict à Amboise le dix-neufiesme de Mars l’an 1563 (en marge: Edict de paix) arresta sa course (en marge: 1563), & non la furie de l’huguenot, duquel les conspirations continuent & grossissent les années suivantes.

L’an 1566 Monluc allant contre l’armée des Princes (en marge: 1566), passoit à Perigueux le deuxiesme de Novembre, voyant les trahisons des Religionaires sur ceste ville les en fit chasser (en marge: And. le Chesne); & le Roy Charles neufiesme (en marge: 1567) pour mettre quelque ordre dans le cahos des sanglans desordres l’année suivante 1567 establit à Perigueux (en marge: Grands Jours) les grands jours du Parlement de Bourdeaux (en marge: Ma. Sc.), qui servirent

 

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un peu pour brider les huguenots; de plus il osta à Bragerac le siege Presidial qui y avoit esté estably, fit demanteler ses murailles, y envoya loger le regiment de Sarlabourcg.

Il faut encore un coup voir dans ceste province (en marge: Daubigné lib. 5 cap. 5) humilier notablement l’huguenot par la perte d’une bataille qui le reduit au petit pied, comme nous apprendrons de la Popeliniere (en marge: La Popeliniere lib. 10 hist.) & d’Aubigné historiens Religionnaires. Nos reformateurs de l’Evangile, impatiens de la seconde paix, laquelle par derision ils appelloient, boiteuse & mal-assise, comme ayant esté procurée par Biron qui estoit boiteux, & le Sieur de Malassise, se revoltent derechef par une conjuration generale (en marge: Revoltes insolentes), brassée soubs les auspices du Prince. Nos voisins les Xaintongeois furent les premiers à prendre les armes, les Provençaux & Languedociens ne pouvans demeurer dans leur peau reformée, quittent femme & enfans, s’enrollent soubs Assier & Mouvans (en marge: 1568), font un gros de seize mille hommes de pied, quatre cens cinquante checaux, & trois cens cinquante arquebusiers à cheval. Desja ils passent la Dordongne à Soulliac (en marge: Jean le Frere anno 1568) pour aller en Poictou joindre l’armée du Prince. Viennent au Bugo, arrivent à S. Astier, trois lieuës de Perigueux, où le Duc de Mompensier estoit, tant pour l’asseurance de la ville, que pour conduire du secours en Angoulesme. Il trouva bon de charger ces voleurs deguisez en gendarmes, qui estoient separez de deux en deux regimens pour atten­-

 

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dre ceux qui ne pouvoient fournir à leurs longues traictes (en marge: Desroute); Le Duc divifa son armée en deux (en marge: Thuanus), par un bout se rend à S. Astier, où il attaqua d’Assier; avec sept ou huict cens chevaux, & prés de quatre mille hommes de pied, seule­ment pour l’empescher de secourir Mouvans & Pierre Gourde, qui estoient à Mensigniac, contre lesquels il envoya fondre le gros de son armée, conduitte par le Comte de Brissac, le­quel après une rude escarmouche, qui dura de­puis le matin jusques au midy; faignant sa retraitte il invita les ennemis de sortir de leur fort pour s’aller joindre avec les leurs, qui estoient à Riberac; mais pour lors tout d’un coup ils furent si à poinct & si rudement chargez, que les deux Colonnels demeurerent morts sur la place (en marge: Victoire), & de leurs regimens jusques à trois mille hommes taillez en pièces; ceux de Riberac à la faveur de la nuict se sauvent dans Aubeterre qui tenoit pour les conjurez (en marge: Ma. Sc. dom. comm.); les plus tardifs y demeurerent poursuivis par les nostres, qui tous victorieux font leur retraicte à Perigueux, emportans les drapeaux ennemis, n’ayans perdu que cent hommes & quelques blessez les feux dc joye sont allumez, le Te Deum laudamus retentit de toutes parts.

Mais le retour de l’armée des Princes conduite par l’Admiral (en marge: Lapopeliniere), qui passoit dans l’Angoumois & Perigord, pour se retirer de la desroute (en marge: Thuanus) de Jarnac (en marge: 1569), donna bien de l’effroy l’année sui­vante à la ville de Périgueux, qui demanda se-

 

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cours à Monluc (en marge: Daubig.), lequel y envoya son fils le Chevalier avec douze enseignes d’infanterie(en marge: Monluc comment.): toutesfois le dessaing de ce relief de la desroute n’estoit autre que de mettre la riviere de Dordongne entre l’armée victorieuse de Monsieur & leur infortune (en marge: Huguenots humilies). Nos reformez de Bragerac voyans leur party affoibly par tant de pertes, eurent recours au Sieur de la Baume leur voisin & bon Catholique, le prient d’accepter leur gouvernement, pour en ceste façon le mettre a couvert de la cholere du Roy; mais peu après le Capitaine Pilles estant retiré dans sa maison, apres avoir soustenu le siege de S. Jean contre le Roy qui y estoit en personne, entreprend encore un coup de se rendre maistre dans Bragerac, suivant les offres que luy font les habitans tousjours rebelles, il y entre le plus fort, secondé par eux à la faveur de la bresche qui estoit aux murailles du costé de la riviere, ruant & massacrant les habitans Catholiques qui restoient (en marge: Ordo Seraphicus Gonzaguae), specialement ceux de la garnison, parmy lesquels le F. Pierre Thoelatus Cordelier fut cruellement meurtry après un long martyre; le gouverneur se sauva du haut des murailles à la faveur d’une corde.

Maintenant les Ministres levent les cornes plus que jamais, & comme aucune conjuration n’estoit execcutée que par les inventions & in­telligences que donnoient ces nouveaux predicans (en marge: Bragerac prins), le Ministre Bergamont entreprend avec Pilles de surprendre la ville de Perigueux (en marge: Ma. Sc. do. com.); la

 

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trahison estoit facilitée par les principaux travestus en païsans (en marge: Conjurations), qui conduisoient des char­rettes de foin: mais leur dessaing est esventé, à raison dequoy la maison de ville deputa deux bourgeois vers le Sieur Evesque, qui s’estoit remis dans le chasteau l’Evesque, duquel Mouvans l’année auparavant s’estoit rendu maistre, y faisant des insolences, specialement dans l’Eglise qui sont inexplicables; ils prient donc leur Prelat de se retirer en la ville, l’asseurans qu’il y seroit receu avec honneur, & qu’on craignoit que derechef il ne tombast entre les mains huguenotes qui l’avoient rançonné quel­ques années auparavant. Sur ces justes & honestes demandes il respondit si cruëment qu’il augmenta le soupçon de son peu de fidélité envers eux; veu mesme que son chasteau avoit esté surpris par Mouvans, parce qu’il le luy avoit abandonné & laissé sans garde.

La paix qui fut de part & d’autre accordée (en marge: 1572) pour la troisiesme fois (en marge: Thuanus) sembloit devoir servir d’emplastre aux blesseures de l’estat (en marge: De ferres); mais les frenetiques ne peuvent supporter les ligatures & bandages de leurs playes (en marge: Lapopel.), ce qui obligea presque toutes les villes de la France (en marge: Lefebvre), de celebrer la Sainct Barthelemy avec la livrée rouge (Dupleix, to. 3), à l’imitation de la ville capitale du Royaume (en marge: Massacres). Funeste & sanglant remede! contre c’est’ hydre renaissante, massacre qui fut presagé au ciel par ceste nouvelle estoille qui parut dans le signe de la Cassiopée en figure de lozange baillant

 

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sujet pour long temps a nos Astralogues de discourir. Le cemetiere des Innocens donna le lendemain de la despesche des huguenots son aubespin sec de long temps, tout couvert de fleurs contre l’ordinaire du mois d’Aoust, le Perigord contribua son suffrage par un prodige rapporté en suitte du precedent (en marge: Prodiges) par Belle-Forest dans ses Annales de France (en marge: Belleforest soubs Charl. 9). Ce fut, dict-il, dans une ferme apellée Pronsault, appartenante à un Advocat de Perigueux apellé Anthoine de Chilliaud, où fut trouvé un genest ayant plusieurs formes de Mitres & Croces, les unes des­quelles representoient celles d’un Evesque, les autres d’un Abbé, quelques-unes d’un Archevesque & Patriarche, mais ce qui est encore digne de merveille, c’est que les Mitres estoient garnies de plusieurs petites figures faictes en façon de houppes, avec des fleurs de couleur azurée-celeste, & icelles mouchetées; & par-dessus le naturel des chevelures du genest, l’on voyoit des pennaches faicts du mesme branchage: ce qui parut en un seul rameau duquel Chilliaud fit present au President la Lane (en marge: Ibidem), qui tenoit les grands jours à Perigueux, lequel en suitte le donna, comme chose remarquable à Monsieur le Marquis de Villars, pour lors Ad­miral de France. Je ne m’arreste, poursuit-il, sur l’interprétation de ces choses, me suffisant de rappor­ter briesvement les choses ainsi qu’elles se sont passées, & n’ignore point que Dieu ayant faict un si grand bien à la France par la ruine du plus dangereux

 

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homme qui jamais en soit sorty, n’aye aussi voulu donner au peuple plusieurs signes de joye pour le glo­rifier & louer en ses oeuvres admirables & non imi­tables. Ces violens remedes opererent en plusieurs l’abjuration de l’heresie dans ceste ville; il n’y demeura bonnement aucun qui n’y renonçast publiquement dans le mesme mois d’Aoust; mais peu apres la prise de la ville ces faux neophites retournerent au vomissement devenus plus dangereux qu’auparavant, nonobstant tout le serement de fidélité faict par le comman­dement du Roy entre les mains des Sieurs qui y tenoient les grands jours: pour monstrer, combien peu profite la violence extreme, pour remedier aux maux de la conscience.

Ceux de Bragerac, comme les elephans, devenus plus fougueux à la veuë du sang de leurs freres, qui ruisselloit presque dans toutes les villes de France, reparent les bresches de leurs murailles par les matériaux de trois Convents, à sçavoir des Freres Mineurs prés la Dordogne à la porte de Cleyrac, des Carmes hors la porte Barraud, & des Jacobins hors la porte de Logadoir, retenans pour Gouverneur le Baron de Langoiran venu de soustenir le siege de la Rochelle, où il avoit eu de la part des Princes le gouvernement du Bourdelois, Agenois, Perigord & Bazadois. Ils vont pour sa conduite luy faire escorte jusques à S. Jean Dangely; accueillent à bras ouverts celuy qui portoit les feux & flammes de la rebellion. Ce

 

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fut pour lors que les Eglises à sept & huict lieuës la ronde receurent le dernier poinct de leur desolation, les Catholiques les extremes oppressions, toute la province la generale espouvante, ces pilleurs faisans la guerre (en marge: Daubigné lib. I c. 8 t. I) non en hommes; mais, comme dict un d’iceux, en diables encharnez, conduits par Langoiran & Vivans, animez par les Ministres la Caussade & Bordas (en marge: Ministres factionnaires); cestuy-cy dans la premiere année de son nouveau Episcopat fut infamé par son adultere, convaincu par la grossesse de sa servante; homme tres-factieux! qui entr’autres entreprit de pren­dre le chasteau tres-fort de Montreal, avec quelque jeunesse de Bragerac, qu’il suborna au deçeu du Gouverneur, soubs esperance du pilla­ge. Il avoit pratiqué deux soldats du chasteau où commandoit le Capitaine Bonnet: ainsi nos reformateurs de l’Eglise successeurs du feu d’Helie, & non de sa doctrine, s’estans rendus de nuict au lieu avec eschelles & petards, sont descouverts par la noblesse du pays, qui conservoit ceste place d’importance (en marge: Sans succes); quarante ou cinquante de ces entrepreneurs demeurent sur la place, les autres blessez abandonnent leurs eschelles & petards dans les fossez du chasteau, se sauvent à la fuite, favorifez par l’obscurité de la nuict (en marge: Ma. Sc.). Le Ministre Bordas est recogneu autheur & conducteur de ceste infortunée entreprise; Langoiran, quoy qu’il authorisast tou­tes violences, estoit sur le poinct de payer le Ministre par la corde & le gibet, pour adoucir

 

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la douleur des bourgeois; mais la cause avoit trop besoing de tels ouvriers Evangeliques. On se contenta de l’interdire pour quelque temps de l’exercice du Ministere. Ce Gouverneur ne fut en rien tant recommandable qu’en l’aversion & hayne qu’il tesmoigna contre qua­torze ou quinze femmes publiques de la ville, qui à la reformée produisoient sans cesse des fruicts de malice & de rebellion; & pour le salaire de leur travail il les fit attacher & precipiter du haut du pont dans la riviere de Dordongne, n’ayant d’autre remede pour arrester le desbord causé par la saincte reformation. Dés longue-main la ville capitale du Perigord estoit desirée par les protestans; ceux du voisinage ne manquoient de pratiquer ordinairement sa surprise, specia­lement Langoiran disoit souvent, au rapport des siens (en marge: Conjuration), que Bragerac luy estoit une bonne hostesse, si elle avoit pour ayde S. Front (en marge: Aubig. t. 2 lib. 2 cap. 13); mais Dieu ne voulut, suivant le stile de sa Justice, frapper son peu­ple sans le menasser; (en marge: 1575) car ceste mesme année l’an 1575 la famine avoit esté notable dans le pays (en marge: Ma. Sc. do. com.), mesmes, ô misere! deux femmes du bourg de Lardimerie furent convaincues d’avoir mangé un enfant, & pource furent punies par le gibet. D’autre-part les domestiques Auvergnias de l’Evesque Fournier ayans jetté l’oeil de concupiscence (en marge: Chenu. in ep. Petroch.), à ce qu’on dict, sur des sommes notables d’argent que leur maistre avoit n’agueres receu pour quelque benefice,conspirent sa mort, & estant au chasteau l’Evesque (en marge: Evesque estranglé), la nuict du qua-

 

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rorziesme Juillet l’estranglerent dans la descente d’un degré, le remirent mort dans son lict, & emportans ses escus se sauvent à la fuitte. Mort tres-funeste! sur laquelle le P. Esparvier Observantin, grand Predicateur, fit l’oraison funebre, prenant pour son theme la prophétie de nostre malheur (en marge: Prophetie), percutiam Pastorem, & dispergentur oves gregis (en marge: Joannis C. 11). Je frapperay le Pasteur, & les brebis du troupeau seront dispersées. Apprenons dans trois sepmaines apres l’explication de ce passa­ge, nous servant des historiens huguenots, qui ne seront suspects au récit de ceste divine puni­tion, de laquelle eux-mesmes estoient les exe­cuteurs.

Tout prés du pont qui traverse la riviere de l’Isle pour donner entrée dans la ville de Peri­gueux, estoit le grand logis des Lamberts (en marge: Ex Daubig. t. 2 l. 2 c. 13), qui suivoient les armes rebelles, appellé l’hostellerie du Chapeau Verd, où le premier Presche avoit esté faict les années passées, ce lieu sembla favorable pour esclorre la trahison brassée dés long temps par Langoiran contre la ville (en marge: 1575); l’hoste du logis, nommé petit Pierre, Normand de nation, facilita grandement l’execution conclue pour le sixiesme d’Aoust, l’an 1575 soubs l’asseurance de mille livres de recompense (en marge: Executés); il introduit dans sa maison par le bout du jardin, à la faveur de la nuict quatre à cinq cens arquebuziers choisis , & quelques quarante Gentils-hommes bien equippez en armes; tout ce monde bien cathequizé garda un merveilleux silence à

 

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entrer dans le logis; mais encore plus à demeu­rer là jusques à sept heures du matin, sans estre aperceus ny sentis à la fumée des meches allu­mées par les deux bouts. Pour lors seize ou dix-sept se desguisent en paysans pour se mettre en deux trouppes (en marge: Invention), & compasser tellement le partement des derniers, qu'ils ne fissent qu'arriver dans le corps de garde du bout du pont, quand les premiers metroient le pied dans celuy de la ville. A cela y avoit grande difficulté: car la premiere garde se faisoit dans un petit ravelin, & posoit une sentinelle au bout du pont-levis; puis de là à la porte de la ville, il y avoit presque cent pas. Les sept premiers conduits par Lambertie, passent favorablement le cors de garde du pont-levis abbatu contre l'ordinaire des jours de Feste & contre l'advertissement que le Sieur de Bour­deille avoit envoyé à la ville la nuict passée (en marge: Ma. Sc. do. com.), luy estant occupé à battre l'Abbaye de S. Chamans, à sept lieuës de là, tenue par les hérétiques. Ces desguisez estans à la dernière porte de la ville, un vieux Sergent de bande jetta ses yeux sur les mains de Lambertie blanches & plus fraisches que celles d'un paysan, & sans plus d’enqueste, le vieillard saute au col du payfsan travestu (en marge: Executee); mais il fut aussi tost tué d'une grande dague que Dutranchart, qui estoit Lieu­tenant de Langoiran en Perigord tira de dessoubs son ouvriere. Bien prit à ceux-là, que la seconde trouppe conduite par le Capitaine Jauré, & la Palanque deffit le premier corps de garde

 

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sans peine, ayant saisy la table où les armes à feu estoient rangées, laquelle ils eslancent dans la riviere viennent au secours des premiers qui avoient mis à l’entr'ouverture de la porte un tronçon de pique qui empeschoit le voisinage accouru au bruict (en marge: Prinse de ville), de fermer tout à faict la porte; ainsi par les massacres des resistans, s'estans saisis des deux portes le reste des caches dans l'hostellerie conduit par Langoiran, couvert d'une grande roudelle, le coutelas au poing, fut habile à s'advancer dans la ville.

D'autre-part Vivans avec deux compagnies de cavallerie (en marge: Daubig. ibidem), embusqué dans une maisterie, de laquelle il avoit renfermé toutes les personnes, qui estoit assez prés pour ouyr les arquebuzades, joinct aussi deux vedettes qui alloient & venoient jusques à la veuë du pont; ceux-là à la première fumée accoururent & entrerent dans la ville à cheval; ce qui bailla aux habitans de l'espouvante, & n'y eut rien d'opiniastré qu'à la porte de Taillefer, dans laquelle apres avoir disputé la ruë quelques septante Catholiques se renferment (en marge: Resistance): mais estans intimidez par les leurs propres, qui estoit au dehors, ils se ren­dent à discretion. Le Baron de Langoiran attri­bua la facilité dc ceste prise à l'efficace d'un voeu qu'il avoit faict sur l'ouverture de la porte de la ville, ayant veu par la fenestre d'un petit cabinet sortir les premiers deux Religieux Augustins, qu'innocemment alloient dire la Messe à la Parroisse S. George, il fit voeu à Dieu, à ce qu'il

 

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disoit, de s'abstenir ce jour là de respandre le sang humain (en marge: Ma. Sc. do. com.). O homme religieux! ce que pour­tant il ne garda (en marge: Parjure), ayant veu un venerable Prestre de 60 ans dans l’effroy de la larme (en marge: Raymond Dupuy Curé de la Monzie & Vicaire de Sainct Silain), encore revestu des habits Sacerdotaux, auquel il accourut de furie, le massacra cruellement, faisant une victime qui fut incorporée à celle qu'il offroit en l'Autel non sanglant. Le pillage de la ville fut très-grand (en marge: Pillage), au rapport des historiens & de ceux qui participerent au butin, speciale­ment sur les Ecclesiastiques, Eglises & Convents (en marge: La Popelin. lib. 36, Hist. des troubles), tandis que les maisons des faux & traistres citoyens religionnaires estoient conservées. Le pillage dura trois jours, accompagné dc phalarismes inouys, & n'eut point trouvé de fin que la manque de prendre, sans l'arrivée du Viscomte de Tourenne, & de la Noüe, qui par l'espoir d'un second pillage fit cesser celuy-là (en marge: Ex Daubig. Ibid.).

Le plus précieux thresor qui fut perdu dans ce general desordre, fut la chasse du corps, & la medaille du chef sacré de l'Apostre du Perigord S. Front, que le Capitaine Jauré & la Palanque eurent pour leur part du butin (en marge: Sacrilege). Ce la Palanque estoit du commencement guabarrier à Bragerac, & par les brigandages insignes faicts sur les Ca­tholiques s'estoit rendu formidable dans les ar­mes protestantes. Pour Jauré, il estoit du voisinage de Bragerac, & pour conduire au cha­steau de Tiregan la chasse, il fut contraint d'en charger son cheval avec ce blaspheme, qu'il

 

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aymoit bien S. Front, puis qu’il le mettoit à cheval, & luy alloit de pied. Ils fondirent les lames d'or & d'argent de la chasse, & jetterent les ossemens du Sainct dans la Dordongne (en marge: Ingratitude). O denaturez! quelle rage transporte nostre courage contre le Pere, qui vous a apporté la lumière de l’Evangile? Vous deshonorez celuy que vos ancestres ont tant honoré? vous martyrisez apres plu­sieurs siecles le corps de celuy que Jesus-Christ n'avoit voulu qu'il souffrit d'autre tourment, que de l'avoir veu mourir dans le supplice de la Croix! vous abandonnez aux flots celuy qui avoit precipité il y avoit tantost seize cens ans dans les mesmes flots, le dragon cruel qui infestoit vos campagnes? (en marge: Vid. comment in capit. 4 & 5 vit. Sancti Fronton) les armoiries de vostre ville, qui portent ce dragon, n'accusent-ils pas vostre barbare impieté? ouy: mais c’est mainte­nant l’heure & la puissance des tenebres. La grande Eglise de S. Front fut l'object principal de la furie huguenote, pillant, debiffant, razant, ruinant tout ce qu'ils ne pouvoient enlever (en marge: Chenu. in praefat. episc. Petroch.); les cloches sont fondues, les reliques desterrées; voire, ô inhumanité inouye! Eruta e sepulchris cadavera, in quibus adhuc aliqua species carnis inherat pugione confossa, au rapport de deux autheurs dignes de foy (en marge: Cruautez inouies), ils ponignarderent (sic) des corps morts desensevelis. De plus les effigies des SS. des Cardinaux, des Evesques, des Roys, des Comtes sont renversées & poudroyées (en marge: Etto. 2 hist. du progres de l’heres. lib. 8 pag. 66). Sur tout le magnifique tabernacle où reposoit le chef du Sainct Apostre fut ruiné. Desastres

 

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bien funestes qui pour lors tirerent ces souspirs de quelque Jeremie de ce temps (en marge: Souspirs), lequel apres la remise (en marge: Vid. supra anno 1453) escrivit de ses propres larmes ces vers lugubres rapportez dans le grand livre du thre­sor de la maison de ville (en marge: Ex majori libro do. com.).

 

Vidimus hic quondam gemmis radiare fepulchrum

Frontoni sacrum, nec minus arte potens :

Nam lapidum strues variarum incisa ferarum

Monstra dabat, necnon tot simulachra virum.

Hoc tamen excisum est, scelus hoc templi ruina

Direptis opibus poene sequta fuit.

Urbs etiam vastata virum crudelibus ausis

Quos agitat vetitae religionis amor.

At veluti gens sacra Deo Babylone relicta

Templa per Assyrios diruta restituit :

Sic nos reliquias templi veneramur ut ante,

Tristius at solitas fundimus ore preces:

Quas pater exaudi, & populi miserere precantis

Placatusque tuam protege Christe domum.

 

Mais ces malheurs ne s'arresterent icy. Aubigné (en marge: Aubig. t. 2 lib. 2 cap. 13) les poursuit en tiltre des conquestes de Langoiran, lequel ayant joinct ses forces ensemble, alla au siege de Tyviers, où il fut receu rude­ment, & par gens qui tiroient sans cesse, mesmes aux tambours & trompettes, comme inca­pables de toute capitulation. Le Viscomte de Turenne entrant en cholere à son rang, fit don­ner une escalade generale (en marge: Tyviers prins). La Noüe & Choupes porterent la premiere eschelle: la Noüe monta le premier, & se tenans bonne compagnie se jetterent de la muraille dans une maison, où

 

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ils se trouverent seuls, attaquez de six hommes, contre lesquels ils se deffendent, attendans le secours, qui leur vint presque trop tard du co­sté où le Viscomte avoit monté. Enfin la place demeure à la mercy de leur cruauté toute sacrilege & inhumaine. (7)

 

 

Franciscus de Bourdeille, Evesque.

Henry III, Roy de France.

 

Bientost apres (en marge: L’an de Jesus Christ 1574) le decez tragique de Pierre Fournier, François de Bourdeille fut prins de l'Abbaye de S. Denys en France (en marge: Chenu. Gall. Christ.), & apellé du Cloistre de S. Benoist, pour estre vray & legitime Pasteur du troupeau desolé. Ainsi l’an 1575 il print possession (en marge: 1575) de l'Evesché de Perigueux per aspectum pinnaculi, du sommet de la monta­gne du Toulon (en marge: Ma. Sc. do. com.); parce que la ville n'estoit en estat de recognoistre autre domination pour le spirituel & temporel, que la fougade & l'insolence d'une effrenée liberté. Laquelle se rendit encore plus insolente l'année suivante (en marge: 1576) à la faveur de l'edict de paix baillé l'an 1576 par Henry troisiesme Roy de France & de Pologne,

 

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excedant en advantages pour les pretendus Reformez les concessions precedentes (en marge: Edict de paix), accordant l'exercice libre de leur Irreligion, avec toutes ses dependances: escholes, consistoires & synodes (en marge: Edict de paix l’an 1576); mais ce qui particulièrement portoit le coup mortel à la Foy Catholique de ceste province (en marge: Aubig. l. 2 c. 25), fut l'article cinquante & neuf, qui donnoit aux huguenots la ville de Perigueux parmy les villes d'asseurance. Voicy l'article (en marge: Article 59 de l’Edict de paix). Pour certaines & bonnes considerations, avons baillé aux Catholiques unis, & à ceux de la Religion les huict villes qui sensuivent, Aiguemortes & Bauchaire en Languedoc, Périgueux & le Mas de Verdun en Guyenne. Nions & Serres ville & chasteau en Dauphiné. Yssoire en Auvergne, Saine la grand tour, & le circuit d’icelle en Provence, & promettront nostre-dict frere Roy de Navarre, Prince de Condé, Mareschal d'Amville, & ceux qui seront commis à la garde d’icelles sur leur foy & honneur de les nous bien & fidelement garder (en marge: Villes d’assurance). Ce qui de plus en plus leva l'estendart à l'apostasie de tous ceux qui l'an 1571 au mois d'Aoust avoient publiquement abjuré l'heresie (en marge: Vid. sup. anno 1572), & maintenant devenus plus inhumains contre leurs concitoyens, bailloient les inventions pour tyrannizer plus à plaisir les Catholiques qui restoient encore dans la ville, soubs l’esperance de jouyr du benefice de la paix, ou plustost retenus là par les ennemis, pour y attirer le siege Presidial qui s'estoit retiré à S. Astier (en marge: Ma. Sc. do. com.). Ainsi (en marge: 1577) l'huguenot demeurant paisible possesseur, employe l’année suivante 1577

 

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pour demolir totalement les Convents de S. François, S. Dominique, S. Augustin (en marge: Eglises razées): l'Eglise Cathedrale que les bourgeois avoient un peu gastée les années auparavant, maintenant est mise en un monceau de pierres comme aussi le chasteau Episcopal qui estoit tout proche & d'une fabrique admirable, maintenant voit ses tours renversées; autant preparoit-il de faire à l'Egli­se S. Front: mais ils craignent que les ruines de ceste enorme masse de pierre n'accablat le tiers de la ville ainsi rendue inhabitable.

Le Roy de Navarre sorty de la Rochelle vou­lant visiter son gouvernement vint à Perigueux: ceux de la ville qui restoient dans ce lamentable desordre (en marge: Piteux estat), luy presenterent pour toute entrée un arc tres-haut sans fueilleure, painct de noir, & au milieu un escriteau blanc qui disoit, URBIS DEFORME CADAVER (en marge: Inscrip.). Un Escuyer qui marchoit devant le Roy, l'asseura que c'estoit la plus belle entrée où il l'eust jamais accompagné, à cause de ces trois mots, lesquels luy estant commandé d'expliquer, il s'en excusa sur ce qu'il n'y avoit de mots François pour les exprimer (en marge: Daubig. l. 3 c. 2). Langoiran fut accusé de beaucoup dc cruautez & phalarismes, d'avoir ravy l’ame & la vie à ceste piteuse esquelette, bonnement descharnée, n'ayant policé l’insolence de ses soldats denaturez con­tre ce pauvre peuple affligé (en marge: Tyran accusé): d'ailleurs le Viscomte de Turenne ayant esté traversé par luy en beaucoup de dessaings, se servant de l'authorité que son apostasie de la foy luy avoit donné

 

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de fraische datte, dans le party infidele, attisoit le feu de la cholere du Roy contre cét impie Gouverneur, & faisoit conclurre plusieurs à luy oster ceste place: ainsi Sathan estoit opposé à Sathan: mais apres tout, puis que l'execution de la prinse de ceste ville avoit esté faicte par luy, on se contenta pour ceste fois d'y mettre des compagnies nouvelles sans changer le Gouverneur.

Nos Catholiques privez de leurs maisons à raison du zele de leur saincte Foy, pressez de l'huguenot, mais non abbatus de courage (en marge: Entreprises sans effect), entreprennent specialement par deux fois, de se remettre dans leur ville: mais quoy? la justice de Dieu n'estoit encore appaisée. De faict la première fois au jour des Innocens (en marge: Ma. Sc. do. com.), les nostres s'estoient desja saisis du Fort basty à la porte de ville, qui en porte encore aujourd'huy le nom: mais n'estans secondez à temps par ceux de de­hors, furent partie massacrez, partie au gibet, partie retenus dans les prisons. La seconde en­treprise descouverte par l'huguenot fut encore plus sanglante, ayans apellé par une contre-trahison la noblesse qui estoit au dehors en ar­mes, mais soudain ils se virent couverts de feu & d’ennemis, qui les ayans enfermez, entre les deux portes leur donnent la mort (en marge: 1581), les prisonniers sont poignardez de sang froid; bref il semble que l'esperance de liberté soit pour jamais ostée aux fideles, & de surcroy l'an 1581 la contagion s'échauffe dans la ville (en marge: Peste) avec grande mortalité.

 

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Mais comme dans les buissons espineux & embrasez Dieu veut estre recogneu pere de misericorde, il envoya aussi, comme un feu sainct Elme dans l'orage, le P. François Bord, qui apporta la consolation (en marge: Ma. Sc. Colleg. Socie. Jes.) aux Catholiques restez dans la ville (en marge: P. Bord contre l’heresie). Cét homme de Dieu ayant estudié soubs le docte Maldonat, fut Chanoyne de S. Front l’an 1575. Depuis estant à Verdun, il entra en la compagnie des Jesuistes, & à la priè­re des Catholiques vint prescher dans sa ville avec une asseurance plus qu'humaine, eu esgard au peu de franchise que la verité de nostre Re­ligion y pouvoit trouuer. Il refute puissamment la fausse doctrine des Ministres preschée dans la saline qui leur servoit de Temple. Et souvent les met à non plus dans quelques conferences; s'hazardant à souffrir patiemment plusieurs insolences, mesmes en chaire dans la Chapelle Sainte Anne, qui seule estoit permise aux Ca­tholiques, le restant des Eglises servant d'escueries, d'arcenal, de corps de garde, de tripots & autres prophanations. Enfin Dieu voulut se servir de ce personnage pour promettre aux Catholiques la remise de leur ville après six ans de bannissement & esclavage tyrannique (en marge: Ma. Sc. do. com.). Car desja les Sieurs de Montardy & des Fieux (en marge: Desseins) r’allient dans le chasteau l'Evesque & ailleurs les habitans dispersez par les campagnes, desseignent la reprise de leur ville le vingt-sixiesme Juillet l'an 1581 espians l'occasion de l’absence du Sieur de Vivans (en marge: 1581), & que suivant l'ordonnance du Roy

 

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de Navarre, le fort n'estoit gardé que par les habitans de la pretenduë Religion. Le jour au­paravant le P. Bord disant la saincte Messe, un pigeon blanc tournoya par plusieurs fois l'Autel de Saincte Anne où il celebroit; ce que fut pris pour quelque esperance de la paix avec Dieu apres les rigueurs du deluge; ainsi le jour assigné les Catholiques s'estans blottis dans les ruines d'une grange appartenante à l'hostelerie Saincte Catherine, près des murailles (en marge: Reprise de ville), se saisissent heureusement de la porte du fort, baillent l'espouvante & la chasse à l'huguenot, & forçans la resistance des ennemis demeurent maistres de la ville. Au mesme jour le P. Bord par gratulation de ce bonheur fit une exhortation aux Catholiques victorieux toute moüillée de larmes, que la joye tiroit de son coeur (en marge: Ma. Sc. do. com.); mais le Dimanche suivant les ayans assemblez dans la grande Eglise, il leur prescha plus au long sur la misericorde de Dieu, qui vient apres le temps de sa justice.

Dés lors le Sieur Evesque, tout le Clergé, & tous les Catholiques se mettent en devoir de restablir l'estat Ecclesiastique & temporel renversé par les infortunes passées (en marge: Eglises restablies). Les deux Chapitres, Cathedral & Collegial s'assemblent en un mesme Coeur, qu'on dressa de nouveau dans l'Eglise S. Front, reconciliée & mise en assez bon estat. Il est incroyable quels desordres l'heresie avoit apporté dans ceste province depuis quelques années. Nous apprenons d'un

 

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livre faict ceste année 1581 par les politiques (en marge: L’estat de tous les deniers levés depuis 30 ans finissant l’an 1580. Imprimé l’an 1581), passionnez l'estat de tous les deniers levez, de tous les meurtres arrivez dans la France de­puis trente & un an, finissant à l’an 1580, voicy imprimé le denombrement pour le dioceze du Perigord, qui ne sera importun au lecteur, eu esgard à la matière. Pour le domaine tant aliené que non aliené, sont esté levez quatre millions quatre cens cinquante mille livres. Pour les offices vacans par mort, deux cens trente mille livres. Pour subvention de subside de cinq livres pour procez, huid cens mille livres. Pour traittes de bled, tant par eau que par terre, entrée de vivres, vante des biens meubles de ceux de la Religion, trois cens cinquante mille livres (en marge: Vexations). Le Clergé a payé au Roy à cause des decimes douze cens mille livres. Somme sept millions trente mille livres. Je ne sçay s'ils augmantent la doze pour induire le peuple au souslevement: mais ce n'est pas tout; voicy l'estat d'autres de­niers qui ne sont tombez aux coffres du Roy (en marge: L’estat de tous les deniers levés depuis 30 ans finissant l’an 1580. Imprimé l’an 1581), baillez dans le mesme temps par ceste province. Pour les rançons des deux Religions, trois cens mille livres. Pour les voyages, sept cens mille livres. Tailles particulières, huict cens mille livres. Estappes huict cens mille livres. Super-impositions, douze mille livres Surcharge de sel, treize cens mille livres. Pour tollerance de mon­noye, douze cens mille livres. Pour la gendar­merie, douze mil livres. Pour l'infanterie, vingt & deux mille livres. Pour droict d'annates à

 

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Rome, treize cens mille livres. Somme six millions quatre cens quarante six mille livres. Et joignant ceste somme avec la precedente font treize millions, quatre cens septante-six mille livres. Pour les massacres (en marge: Massacres), il y eut septante & cinq Chanoines ou Curez meurtris, huict Moynes occis, 4 Jacobins, Carmes ou Augustins, 5 Cordeliers, des­quels Gonzague (en marge: Ordo Seraphicus Gonzag.) en nomme deux, l'un à Montignac, F. Esmarius Vivacrius, vir admirandae sanctitatis plumbeis spherulis trajectus, & diro mucrone confossus fuit. L'autre à Bragerac, F. Petrus Toetanus Sacerdos mactatus crudelissime. Pour la noblesse des Catholiques trois cens occis. De la Religion deux cens soixante (en marge: Wandingus to. 2 Annalium minorum). Des soldats Catholiques quatre mille. De la Religion quatre cens cinquante. Hommes, femmes, enfans occis à divers rencontres quatre mille deux cens qua­rante & huict. Somme-toute neuf mille trois cens cinquante habitans de ceste province fu­rent massacrez dans trente ans.

L'Archevesque de Bourdeaux Anthoine Prevost de Sausac avoit dés long temps (en marge: 1582) souhaitté d'assembler les Evesques ses suffragans (en marge: Concilium Burdig. anno 1582), specialement depuis la conclusion du Concile de Trente (en marge: Concile), pour remedier aux notables ruines de l'Estat Ecclesiastique: mais son dessein avoit esté interrompu par la felonnie des guerres intestines qui s'estoient eschauffées par toute la France (en marge: Praefat. Concilii), sed precipue (dict-il) in hac Aquitaniae provincia, maxima cum vexatione, & piorum quorumqumque hominum internecione, non minus atro-

 

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citer quam libere grassata est. Toutesfois soubs esperance de mieux il indiqua son Concile provincial au jour de la Toussaincts l'an 1582 au­quel se rendirent les Evesques suivants, Janus Fregouze, Evesque d'Agen, Charles Debouy, Evesque d'Angoulesme, Geoffroy de S. Belin, Evesque de Poictiers, Nicolas le Cornu Evesque de Xainctes, Louys de Salignac, Evesque de Sarlac, Arnaud de Pontac, Evesque de Bazas, apellé à raison du voisinage, quoy que non suffragant. Avec les Procureurs des autres Eveschez, Chapitres, Abbayes de la seconde Aqui­taine. Ils dresserent trente & cinq articles, ou tiltres sur les matieres les plus importantes pour ce siecle deplorable. Le Pape Gregoire treiziesme (en marge: Litterae approbat. Greg. 13) donna l'examen de ce Synode à la Congregation des Cardinaux deputez pour l'Exposition du Concile de Trente (en marge: Confirmé), apres laquelle revision (en marge: Ex Congreg. Cardinal.), le Pape exorte l’Archevesque de faire gar­der ces articles par tous ses Evesques suffragans, les lettres sont dattées de Rome le 3 & 19 Decembre l’an 1583.

Maintenant la rigueur de la cholere de Dieu cornmence un peu à s'appaiser; le P. Bord avoit long temps travaillé pour restablir en ceste province la Religion Catholique, & lors qu'il fut apellé à Bourdeaux pour Recteur du Collège (en marge: Ma. Sc. Coll. Societ. Jes.), les huguenots luy dressent en chemin une embuscade pour le mettre à mort. Leur dessaing descouvert, il est contraint de rebrousser che­min dans ceste ville.

 

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enfin le retour de ce bon Pere à Bourdeaux fut assez funeste, se voyant contraint quelque temps apres avec les siens de quitter son College & la ville à raison de la grand peste qui affligea les Bourdelois, & quelques années après pressé d'obeyr aux Edicts (en marge: Arrest de l’an 1589 Cont Jes. p. Jesuict), il en sortit (en marge: 1589) derechef avec une vingtaine de ses Religieux, le dernier de Juillet l'an 1589 les conduisit à Perigueux où ils feurent honorablement & charitablement accuillis, & logez au Collège de la ville (en marge: College fondé), qui avoit esté fondé dés l'an 1530 & comme l’on jugea necessaire d'establir tout à faict en ce lieu les Peres de ceste compagnie, l'an 1591 le 13 & 24 Decembre l’on trassa au long les articles d'une fondation du Collège soubs leur gouvernement (en marge: 1591), ayant eu au prealable l’advis & consentement du Sieur Evesque & des venerables Chapitres de la ville. Les articles sont envoyés à Rome au General Claude Aquaviva, qui les approuva & receut ce College, le 13. April l’an 1592 (en marge: Fundatio Collegii Petroch. Socie. Jes.). Ainsi le neufiesme Octobre de la mesme année, le contract de fondation & dotation fut conclu entre le Sieur de la Porte Juge Criminel Maire de la ville (en marge: Confirmé), avec ses Consuls, & les Pères Louys Richome Provincial, avec François Bord, pre­mier Recteur du Collège (en marge: 1592). Ces nouveaux ou­vriers Evangeliques continuerent à travailler fidelement pour l’instruction de la jeunesse, & pour le restablissement de la foy; mais l’an 1596 la mort ravissant le P. Bord, priva la ville (en marge: 1596), & la compagnie de cét homme tout Apostolique.

 

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Pour l'Evesque de Bourdeille, estant ja cassé d’ans & de vieillesse, il rendit les derniers abois, estant à son chasteau l'Evesque (en marge: Chenu, Gall. Christ.), & fut conduit dans l'Eglise S. Front, pour y estre ensevely la veille de la Feste de ce grand Sainct (en marge: 1600), 1e vingt-quatriesme Octobre l'an 1600. (8)

 

 

Joannes Martin, Evesque.

Henry IIII, Roy de France.

 

Par la demission du defunct Evesque (en marge: L’an de Jesus Christ 1601), la mesme année Jean Martin Lymosin receut le baston Pastoral (en marge: Chenu, Ibid.), & print possession reelle de cét Evesché le neufiesme Fevrier l'an 1601 où il vesquit quelque douzaine d'années; & comme les gran­des maladies sont suivies de foiblesses & residus bien importuns (en marge: Foiblesse), la santé n'estant jamais soudainement renduë que par miracle, il en estoit ainsi de l'estat spirituel de ceste province, qui enco­re traisnoit de l'aisle, ne pouvant bonnement reprendre son premier tein. L'heresie levoit la

 

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teste plus que jamais dans le plat pays: neant­moins plusieurs communautez Ecclesiastiques & maisons Religieuses, commencent à la faveur du règne très-heureux de Henry le Grand à se rallier dans les masures de leurs Abbayes & Mo­nasteres (en marge: Eglises remises); & apres avoir essuyé leurs larmes rebastissent quelques logemens pour les services divins, tout autant que la misere du temps leur permettoit. Desja Susanne de Saincte Aulaire, Abbesse de Ligueulx avoit assemblé dans son Monastere quelques bonnes Religieuses pour le repeupler (en marge: Abbatiae & monasteria reedificantur): dessaing qui luy a tres-heureusement succedé par l'éducation de M. sa niepce, qui l'an 1607 fut pourveuë de l'Abbaye (en marge: 1607), & conduit aujourd'huy avec zele & ferveur ceste famille honorable à l'estat de la perfection religieuse. Les dessaings des Abbesses du Bugo, de Fontaines, de S. Pardoux, & autres lieux furent aussi fervants pour conspirer & executer les restablissemens de leurs Abbayes.

Environ ce mesme temps les PP. Recollets firent leur establissement dans la ville de Tyviers (en marge: Establissemens), commençans par la liberalité de M. Raynier, & de la noblesse du voisinage leur bastiment pauvret & humble (en marge: Fundatio P. Recol. Tyberii), suivant l'estat de la tres-estroicte pauvreté qu'ils professent: ce Convent est le dixiesme en rang dans leur province d'Aquitaine. Quelque temps apres M. de la Martonie Evesque d'Amiens, par le congé du Sieur Evesque Martin sacra leur petite mais devote Eglise: il ne me seroit difficile de pu-

 

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blier les fruicts que Dieu a operé par leur zele en tous ces quartiers, où l’indevotion & la bar­barie regnoient auparavant leur sainct travail: mais les effects ne demeurent muets dans mon silence. Seulement diray-je que ce petit & devot Convent, par quelque bon rencontre a servy de pepinière pour peupler ce sainct Ordre dans les deux villes Episcopales du Perigord.

Au mois de Mars de l’an 1605 dans le College des Peres Jesuistes fut posée la premiere pierre du grand bastiment par les Maire & Consuls (en marge: Primus lapis domus coll. S. J. anno 1605), avec le Pere Recteur; du depuis ceste fabrique a continué heureusement. Ainsi tous les Or­dres par une saincte emulation, travaillent à leurs bastimens; le Sieur Evesque ne s'espargne en rien pour le travail des edifices qu'il fit dresser en divers lieux; & ainsi l’an 1612 il finit ses jours (en marge: 1612), & fut ensevely dans le porche de l'E­glise S. Front. (9)

 

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Franciscus de la Beraudiere, Evesque

Louys XIII, Roy de France.

 

(en marge: L’an de Jesus Christ 1614) Comme pour remettre les desordres aportez pour l’heresie Arrienne dans l'estat de ceste province, Dieu s'estoit servy l’an 500 de la main favorable de l'Evesque Chronopius (en marge: Vid. sup. anno 485); aussi apres des bresches plus notables, causées par le Calvinisme dans le mesme lieu, Dieu s'est voulu de nos jours servir d'un très-digne Prelat, successeur du zele & pieté de ses ancestres, qui a recueilly dans ses bras paternels le débris de la Religion, pour en reunir les pieces, & la relever plus advantageusement qu'on n'eut osé esperer (en marge: Remede opportun). Ce fut l’an 1614 que François de la Beraudiere, de la noble famille de Rouet en Poictou, fut pourveu de l'Evesché de Perigueux, ayant esté durant dix huict ans Conseiller au Parlement de Paris, en suitte grand Doyen de l'Eglise Ca­thedrale de Poictiers, Abbé de l'ancienne & honorable Abbaye de Noaillé, où il introduit

 

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des Religieux de la Congregation reformée de Sainct Maur de l'Ordre S. Benoist. Durant l'interregne, & auparavant son arrivée l’an 1612 les peres Recollets furent appellez (en marge: 1612) dans ceste ville par les voeux & suffrages communs de la maison de ville (en marge: Establissemens), & le desir des habitans, qui desja és années passées avoient tesmoigné beaucoup d'affection pour ce sainct Ordre (en marge: Fundatio Convent P. Recol. Petroch.). La Croix de leur establissement fut arborée avec grande solemnité au mois de May, dans le fonds du Sieur Meredieu Chanoine, commençans peu à peu à dresser un petit Oratoire, en attente d'un plus grand Convent, qui fut dessaigné, l'an 1615 du costé de la ville (en marge: 1615), où le pont traverse la riviere de l'Isle, & non sans quelque divin rencontre, le mesme lieu qui avoit esté prophané par le premier presche faict dans ce pays par le Ministre Brossier (en marge: Vid. sup. anno 1561), le mesme solage de l'hostellerie du Chapeau verd, où la trahison pour la surprise de la ville fut executée par l'huguenot (en marge: Et anno 1575), il y avoit tantost cinquante ans, fut consacré pour y faire le sejour de la saincteté & fidelité, fut choisy pour y loger ceux qui par special entreprennent de destruire par exemple & doctrine l'irreligion du Calvinisme.

Ainsi donc le troisiesme de May l'an 1615 la premiere pierre du Convent des Peres Recollets (en marge: Primus lapis anno 1615) fut posée en ce lieu par le Sieur Tricard, commc Vicaire general du Seigneur Evesque, tous les corps de la ville assemblez processionnelement; les Peres commencent leur edifice (en marge: Fondations) par les libe-

 

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ralitez de divers bien-facteurs, jusques à ce que le Sieur du Chesne Archidiacre & Conseiller du Roy en ce siege, se declara fondateur de ce Convent, pour lequel durant son vivant il con­tribua tout ce qui estoit necessaire à la fabrique, & ce avec une affection tres-paternelle & munifique, qui apres son decez & sepulchre a esté jusqu’à present transmise à ses héritiers.

Le 18 du mesme mois & an, le Sieur Tricard fonda dans l'enclos de la ville un nouveau Convent des Peres Augustins reformez (en marge: Fund. P. Augus. in urbe Pet.); & l'année que ces bons Religieux y convoquerent leur Chapitre provincial il fut declaré fondateur de ce lieu (en marge: 1615), où la pieté & religion se rend de plus en plus recommandable. Environ le mesme temps deux Convents des Peres Minimes furent fondez dans ceste province (en marge: Fund. Pa. minimorum Albae-terrae & planiaci), l'un à Aubeterre par les munifiques liberalitez des Seigneurs du lieu; l'autre à Plaignac par le Comte de Gurson dans un lieu devot & retiré du bruict & concours du peuple, à ce que ces bons Peres y dressassent un cours de Théologie pour leurs Religieux & estudians; le Sieur Evesque tesmoignant tou­sjours ses benevoles & affectueuses liberalitez envers les Ordres Religieux, annexa au Convent d'Aubeterre la Cure de S. Quentin, & au second la Cure de S. Martin en Lher.

De plus le restablissement de l'Abbaye de Chancelade (en marge: Abbatia Cancell.) a rendu recommandable les merites du Sieur Abbé (en marge: Reformation), qui voyant ses predecesseurs avoir tenu ce lieu en commande par plusieurs

 

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ans, volontairement se rendit regulier, encou­rageant ses religieux par sa bonne vie & doctri­ne à la saincte reformation. Ses bastimens font esperer le total rappel de l'ancienne ferveur, qui longtemps avoit regné dans ce lieu consacré à la Vierge.

Ainsi le culte de Dieu, ses Eglises, les habi­tations de ses serviteurs, qui militoient soubs divers Ordres; bref tout l'estat Ecclesiastique reflorit de nouveau dans ce dioceze. Cependant le dessain de restablir l'Eglise Cathedrale en sa premiere fabrique demeuroit un peu acroché (en marge: Bastiment); jusques à ce que au mois de Juillet de ceste mesme année 1615 nostre Evesque passa contract avec son Chapitre Cathedral (en marge: Contract pour reedifier l’Eglise Cathed.) à ce que ce pieux & hardy dessain vint à s’esclorre. De faict Venance Fortunat (en marge: Ven. Fortun. in epitaph. Cronop.) auroit aujourd'huy mesme subject de dire à ce Prelat ce que jadis il escrivoit d'un de ses predecesseurs en l'Evesché.

Templa exusta celer revocasti in culmine prisco;

Hinc tua, sed coelis, stat sine labe domus.

Mais la furie de l’heresie ne peut demeurer en sa peau. Sur la fin de ceste année 1615 l'on celebre à Bourdeaux l'heureux mariage de nostre Roy Louys treizieime avec l'infante d'Espagne (en marge: 1615); l'huguenot ne peut supporter ceste alliance (en marge: Revolte huguenote); commence à troubler la longue paix de ce Royaume par la levée de ses armes. Rohan conducteur de la rebellion (en marge: Mercure franc.) inonda specialement sur ceste province, à la faveur des villes hugue­notes qui estoient le long de la Dordongne.

 

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Faict des actes d’hostilité dans le plat pays, spe­cialement sur les lieux & personnes sacrées, pour ne degenerer à la félonnie Religionnaire: les quartiers de Mompon virent des grands sacrileges dans leurs Eglises, notamment la Chartreuze de Vauclaire, est abandonnée à leur furie, où les representations de Jesus Christ y restent encore transpercées de plusieurs coups d’espée; bref tout le pays Catholique fut au pillage, & de long temps n'oubliera la guerre de Rohan; ainsi par anatheme apellent-ils ceste persecution (en marge: Guerre de Rohan).

La paix estant rendue, ces boüillards d'eau essuyez, nostre Prelat voulut recognoistre les quartiers de son Dioceze les plus desesperez & saisis de la gangrene de l’heresie; veu que depuis cinquante ans aucun n'avoit soigné d'y advancer le salut des ames (en marge: 1619); venant donc en la ville de Bragerac, il voit les marques deplorables de la desolation de la foy Catholique, l'heresie sur son throsne, sans aucun contretenant pour la vérité. Deslors il dessaigna d'y establi[r] une mission de personnes doctes & zélées pour remedier à la malignité du mal avec l'ayde de ciel (en marge: Missio Bragerac P. Recol. lectorum). De faict l'an 1619 il porta sa pensée sur l'Ordre des Peres Recollets, traicte avec leur Pere Provincial, obtint de luy le nombre de Religieux qu'il desiroit pour sa mission, expedie (en marge: 1620) pour leur establissement ses lettres autentiques du vingtiesme Janvier l'an 1620 leur baillant toute la puissance spirituelle qu'il pouvoit pour

 

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prattiquer dignement leurs fonctions de la predication, atque insuper (dict-il) quo facilius & liberius ex labore suo quem Dominus concesserit fructum percipiant, ab omnibus casibus, vel censuris, à jure vel ab homine nobis reservatis, absolvendi licentiam, necnon super omnia qua Episcopis à Concilio Tridentino conceduntur, delegatam eidem U. P. Leoni, concedimus & ex nunc concessa de­claramus, cum potestate suis subditis eandem facultatem quoties opus fuerit impertiendi & subdelegandi.

Par d'autres lettres il leur donna les mazures d'une Eglise proche du chasteau du Roy dans la ville, pour y establir le service divin (en marge: Donatio D. Episc. P. Recol. capellae B. M. de Castro Brag.), lequel il dict avoir esté discontinuatum & poenitus abolitum, propter haereticorum in praedicto loco commerantium auctoritatem, & Praedecessorum nostrorum Episcoporum negligentiam & incuriam. Soubs ces saincts auspices ces missionnaires s'employent fidelement à l'oeuvre de Dieu, nonobstant toutes les contradictions de l'Enfer; car dans la mesme année les playes mortelles de la rebel­lion huguenotte se reouvrent funestement, & secoüens le joug de l'obeyssance deuë à la couronne, ragent plus que jamais contre les Ca­tholiques, allument une cruelle guerre par toute ceste province. Ce qui apella l'année suivante (en marge: 1621) les armes victorieuses de nostre Roy pour venir en suite de la prinse de S. Jean d'Angely (en marge: Le Merc. franc.), arrester la superbe revolte dc Bragerac, & autres villes du voisinage.

A l'arrivée de ce grand Roy, la foy Catholi-

 

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que commenta de respirer avec plus de liberté, estant dégagée de l'oppression par la faveur de ses armes très-justes. Il acueillit gracieusement les Peres Recollets; & scachant, comme il dict dans ses patentes, la grande consolation & utilité que reçoivent ses sujects des villes où ils sont establis, tant par leurs bonnes vies & pieté, que par leurs predications & exhortations; il jugea leur total establissement necessaire en ceste ville de Bragerac, pour l’instruction de ses subjects qui desireroient estre instruicts & fortifiez en la Religion Catholique. Et à cét effect il leur donna son chasteau qui estoit proche des murailles de la Chapelle N. Dame (en marge: Don du Roy Louys 13 aux P. Recol. de Brag.), qu'il leur fit reedifier par sa munificence Royalle. Le don de son chasteau fut expedié au camp de Mon-heur au mois de Decembre l'an 1621 ceellé de cire verte, avec le cordon de soye verte & rouge. Il laissa aussi en ceste ville un Pere Jesuiste pour travailler à ceste grande moisson.

Mais dans l'année suivante (en marge: 1622) la rebellion à demy esteinte fut rallumée dans la Guyenne (en marge: Le Merc. franc.) par la conjuration huguenotte sur les places qui l’année precedente avoient flechy le col; derechef en l’absence de sa Majesté se revoltent, attirant sur elles la cholere de Dieu, & du Prince, qui tient de luy son espée non sans sujet, pour la vengeance sur les meschans, comme dict l'Apostre (en marge: Roman. 13 v. 4).

Le Duc d'Albeuf vint en ceste province avec ses forces, se met en debvoir avec son armée de forcer le chasteau de la Force rebelle (en marge: Histoire decad. de l’heres. l. 8 fo. 470), où la bataille fut livrée, les ennemis venans fondre de

 

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nuict sur les assiegeans; de là passe contre la ville de Mont-rauer. Et apres un fascheux siege prend la place d'assaut, laissant dans ses ruines genera­les la marque de la justice de Dieu. Saincte Foy par ses insolences apella derechef la presence du Roy pour la venir subjuguer sur le temps de la Feste Dieu; ainsi le pays fut tout pacifié par ce­tte seconde visite Royale.

L'année suivante (en marge: 1623) l'Eglise des Peres Recollets de Bragerac fut consacreé par le Seigneur Evesque, suivant l'inscription en lettres d'or (en marge: Inscript. lapidea). DIE 20 MAII HANC ECCLESIAM CONSECRAVIT ILLVSTR. ET REVER. FRANCISCVS DE LA BERAVDIERE EPIS. PETROCHORICENSIS, SVB RELIQVIIS SANCTI STEPHANI MART.

Et comme le Cardinal de Sourdis Archevesque de Bourdeaux (en marge: 1624), avoit tousjours faict paroistre sa ferveur pour le bien general de l'Eglise; aussi specialement pour le bien particulier de l'Aquitaine (en marge: Concilium Burdigal. anno 1624), il convoqua à Bourdeaux ses Eves­ques suffragans, pour s'assembler à son Synode provincial l'an 1624 où le convoy des Prelats fut plus celebre qu'au Concile precedant, & plusieurs bons reglemens y furent conclus.

Nous avons veu aussi depuis peu dans la ville de Perigueux un nouveau Convent des Religieuses, soubs le tiltre de Nostre Dame (en marge: Fundatio Relig. B. M. Pet.), qui se consacrent specialement pour l'instruction des filles; leur bastiment & Eglise estant parachevée, il fut consacré l'an 1628 par nostre Eves­que avec grande magnificence. Dés l'an 1625

 

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le Sieur de la Bermondie Chevalier (en marge: Fundatio Relig. de fanlaco) avoit fondé dans le bourg de Fanlac des Religieuses de S. Benoist, soubs le tiltre de Nostre Dame des Vertus, & desja tout le pays en reçoit beaucoup d'édification. Ainsi l'oeuvre de Dieu prosperant à veuë d'oeil, demande au ciel les aspects & benedictions favorables, pour restablir le lustre ancien de la pieté de ce dioceze.

Enfin (en marge: 1628) nous avons veu en ce temps esclorre le sainct desir des Conciles provinciaux de la seconde Aquitaine tenus l'an 1582 & l'an 1614 specialement pour l'erection d'un seminaire en chaque Dioceze (en marge: Vid. supra concil. Burdig. anno 1582 & 1624). Mons. nostre Evesque ayant fondé mille livres de rente pour l'entretien du seminaire basty tout contre la maison Abba­tiale, où huict ou neuf escholiers son eslevez à la pieté & doctrine, pour servir quelque jour au Clergé de ceste province.

Pour conclusion de tout ce narré, le Pasteur qui aujourd'huy (en marge: 1629) est recogneu legitime successeur du premier Evesque du Perigord, apres avoir arboré presque en toutes les maisons de son Evesché les armoiries de ses travaux, & de son soing paternel pour les bastimens de l'Eglise, a voulu signaler sa ferveur par le desir & affection qu'il a eu pour les pierres vifves de son sanctuaire, qui ont basty son Eglise du Perigord durant seize cens ans, faisant par ses recommandations apprendre à la posterité le mémorial des Saincts de ceste province, des persecutions qui ont cizelé & martelé son Eglise, des

 

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Prelats qui l'ont relevée & conservée jusques aujourd'huy, des bien-faicteurs qui l'ont dotée & favorisée, attendant que la main artiste de Dieu, qui en est le principal architecte, y mette les derniers festons & couronnemens dans le ciel. (10)

 

 

ADVERTISSEMENT

AUX CATHOLIQUES DE

ceste province sur le profit qu'ils pourront

recueillir de la lecture de

cét opuscule.

 

Arrestez vous sur les chemins, & vous enquerez des Sentiers des anciens, informez vous quel est le meilleur? & y marchez (en marge: Advertissement necessaire). Tres-sage conseil du Prophète Jeremie (en marge: Hier. 6), grandement necessaire pour nostre siecle infortuné, auquel le schisme a tracé dans l'unité de l'Eglise la fatale lettre pytagorique pour ouvrir la voye large de perdition, au mespris du sentier estroit qui conduit à salut. Advertissement tres-necessaire dans ceste province; où le nom de Catholique & de Religionnaire nous marque deux Religions bien differentes, soubs le tiltre de vraye Eglise, lequel chaque party veut par advantage s'approprier. C'est à nous

 

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tous maintenant d'arrester coy nos esprits (en marge: Pour recognoistre), pour considerer d'un oeil non passionné premierement quel des deux partis! a outrepassé les bornes que nos Peres nous ont posé contre la deffense de Dieu (en marge: Prou. 22 v. 28). Qui gauchit au schisme ou à la super­stition? qui court à l'Eglise, ou qui suit la doctrine des premiers Pasteurs, lesquels, comme dict S. Augustin (en marge: August. cont. Jul. Pelag. l. 2), ont tenu dans l’Eglise ce qu'ils y ont trouvé, ont enseigné ce qu'ils y ont appris; & ce qu'ils ont receu de leurs peres ils l’ont traduit à leurs enfans; car je ne doubte point, comme dict ailleurs le mesme Docteur (en marge: Idem, epist. 42), que plusieurs pampres retranchez de la racine du Christianisme, qui s'est respandu par les Sièges Apostoliques, & les successions des Evesques, ne se glorifient du tiltre de Chrestien, quoy qu'ils ne soient que des cermens desseichez.

Or la vraye pierre Lydienne pour distinguer le faux billon (en marge: La vraye religion), qui reluit d'un escu emprunté, dans l'or naturel, c'est de tracer les degrez par lesquels la doctrine Apostolique est transmise à ceux qui se disent la professer; car, dict Sainct Irenée (en marge: Iren. lib. 3 c. 3), c’est l’unique moyen de manifester au jour, que la foy a esté conservée jusques à present depuis les les Apostres, pour confondre tous ceux qui gauchiroient en façon quelconque. Ainsi devant luy Tertullian (en marge: Tertull. de presc. ca. 10) somme les heretiques de luy exhiber l'origine de leurs Eglises. Ainsi apres luy S. Epiphane (en marge: Epiph. cont. heres. her. 5 & to. 2 lib. I c. 27) les renvoye aux fins de non recevoir au deffaut de ceste preuve; ainsi Sainct Augustin (en marge: August. t. 7 psal. cont. donat.) dans le Pseaume contre les Donatistes les somme d'exhiber la liste de leurs Evesques depuis S.

 

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Pierre. Pour moy au nom de tous les Catho­liques de ceste province subissant ceste fascheuse (quoy que juste espreuve) j'ay desja produit le flux de nos Prelats qui nous ont apprins la doctrine que nous croyons, faisant voir qu'ils l'ont tenuë depuis S. Front nostre premier Apostre (en marge: Succession), qui l’avoit receuë de la bouche de S. Pierre, dont quelques-uns l'ont seellée de leur sang. C’est maintenant aux Pasteurs de la pre­tenduë reformée de monstrer leurs predecesseurs devant l'arrivée du Ministre Brossier & Bordas, qui ayent enseigné leur Religion refor­mée. Au defaut d'eux j'ay droict de leur dire, aussi bien que S. Cyprian à Novatus (en marge: Cypri. li. I ep. 6), qu'ils ne sont dans l’Eglise, ny ne peuvent estre réputé Pasteurs, estans sortis d'eux-mesmes, sans succeder à aucun.

De plus tout ainsi qu'au Soleil il y a plusieurs rayons, mais une seule lumière (comme parle S. Cyprian) & plusieurs branches en un arbre (en marge: Cypri. de unit. eccle.): mais sa vertu est réduire en une seule racine (en marge: Unité); & comme lors que plusieurs ruisseaux se degor­gent d'une source, il semble que l'unité en soit multipliée, & toutesfois elle est conservée en son origine: ainsi l'Eglise du Perigord estant emanée, comme nous avons prouvé, de la matrice de l'Eglise Romaine, de laquelle, suivant le mesme Docteur (en marge: Id. epist. 55 ad corn.), l’unité Sacerdotale a prins son origine, & ayans demeuré unis avec icelle dans les temps les plus fascheux; nous pouvons asseurer que nous gar­dons l'unité si necessaire à l'Eglise, & apellons

 

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avec Optat le Milevitain (en marge: Optatus Millevit. lib. 2 co. Parmen.), pecheur & schismatique, celuy qui a estably un autre chaire, contre celle que le Chef des Apostres a estably, afin que par icelle l'unité de tous fut conservée.

Pour troisiesme advantage nous maintenons par la succession à S. Front, le droict de professer la doctrine Apostolique (en marge: Apostolique), & venuë des Apostres, lesquels apres qu'ils eurent rendu tesmoignage de la foy de Jesus-Christ, comme dict Tertullien (en marge: Tertul. de prescript.) premierement en Judée, & y ayans fondé des Eglises se sont du depuis espandus par l’univers, & ont publié aux peuples la doctrine d’une mesme foy, & pour ceste occasion ont fondé des Eglises en chacune de leurs villes, dont les autres Eglises ont emprunté & pren­nent encore tous les jours pour estre Eglises la source de leur foy, & la semence de leur doctrine; au moyen dequoy elles sont tenuës pour Apostoliques, comme filles des Eglises Apostoliques: car il est necessaire que toutes choses soient mesurées & estimées par leur origine. D'où resulte un singulier eloge pour nostre Eglise, qui ayant esté plan­tée & arrosée par plusieurs saincts Prelats, peut estre apellée saincte, sans que les deffauts de quelques siens Evesques l'ayent peu degrader de ce tiltre, non plus que la rue puante, n'infecte dans un mesme jardin les odeurs de la rose, & le charbon dans la boutique de l'orfevre, ne ternit l'esclat de l'orfevrerie.

En quatriesme lieu, puisque, suivant Sainct Augustin (en marge: August. Hypogn. lib. 3), pour lors la borne de la foy est par nous conservée, quand nous ne transportons, mais plustost

 

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observons religieusement les termes que les Saincts nous ont posé, fondans des Eglises, sacrans des Autels, assistans aux Conciles, où la veneration des Saincts par leurs images, par leurs festes, où la prière pour les deffuncts, &autres poincts de nostre croyance ont esté ordonnez (en marge: saincte doctrine). Je conjure maintenant les Religionnaires de prendre garde, combien justement, pour parler encor avec S. Augustin (en marge: Idem cont. Jul. pelag. lib. 2), le peuple Chrestien dans le Perigerd, prefere le sens commun de tous ses anciens Prelats à leurs prophanes nouveautez ?

Ce cinquiesme advantage ne sera à refuser que les enfans legitimes de ces nobles Peres du Christianisme sont ennoblis (en marge: Enfans ennoblis) par leur sainct & royal Sacerdoce. Les loüanges de leurs merites font l'honneur de leur famille: tout ainsi, dict Politian (en marge: Aug. Polit. lib. 7 ep. ad lo. Bapt; ny.), que nous pouvons aussi bien nous rassasier estans invitez du bien d'autruy, comme des nostres. Ce qui est specialement veritable en la parantele spirituelle,où les nobles actions de saincteté ressemblent aux myrtes, lauriers, & oliviers, qui par une perpetuelle succession de fueilles demeurent tousjours en leur verdeur.

Bref les enseignemens de nos predecesseurs nous attirent de vray à la pratique de la vertu (en marge: portés à imiter); mais leurs exemples nous contraindront d'imiter les prototypes de saincteté. Si comme un autre Palemon, dict S. Augustin (en marge: August. li. I cont. Julia.), tu estois entré tout yvre des debauches de la nuict, dans l’eschole de Xenocrates; tu ne devrois pas estre touché d'une si grande retenuë, que de te trouver parmy tant de

 

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saincts personnages de ceste province; la face de ces saincts doit estre d'autant plus reverée que leur maistre Jesus-Christ est plus grand que Platon maistre de Zenocrates. Il ne faut pas que les Catholiques du mesme pays que les saincts, ny les successeurs de ces Evesques, offusquent en eux-mesmes les rayons de l'honneur qui rejallit du renom de leurs ancestres. Ainsi je conclus par le conseil de Cassiodore (en marge: Cassiod. divi. lect. ca. 42), futurae Beatitudinis mores, vitas patrum, confessiones fidelium, passiones martyrum legite constanter, vitae sancta imitatio nos provocans ad caelestia regna perducat. Amen.

 

 

FINIS.

 

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SANCTI PROVINCIAE PETROCHORENSIS.

 

1

S. Fronto

Protoapostolus

2

S. Syllanus

Martyr.

3

S. Frontasius

Martyr.

4

S. Severinus

Martyr.

5

S. Severianus

Martyr.

6

S. Anianus

Episcopus.

7

S. Euparchius

Anachoretarum Abbas.

8

S. Avitus

Eremicola.

9

S. Asterius

Eremicola.

10

S. Sorus

Anachoreta.

11

S. Junianus

Eremicola.

12

S. Cyprianus

Abbas.

13

S. Antivius

Abb. Brant.

14

S. Eumachius

Presbyter.

15

S. Aquilinus

Confessor

16

S. Sacerdos

Episc. Lem. & Abb. Pet.

17

Sa. Mundana

Martyr.

18

Sa. Alvernera

Virgo & Martyr.

19

SSae. Memna & Galla

Virg. & Mart.

 

 

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DIPTYCA EPISCOPORUM PETROCHORENSIUM.

 

1. S. Fronto primus Antistes anno Domini 46

13. Guillelmus de Nauclard, 1130

2. S. Anianus, anno 76

14. Gaufridus de Causé, 1138

3. Chronopius, anno ....

15. Raymundus de Maiolo, an. 1147

SEDES VACAT.

16. Joannes d’Assydo, anno 1160

1. Pegasius, anno 415

17. Petrus Minetis, 1170

2. Chronopius, anno 500

18. Adzemarus, 1187

3. Carterius, anno 585

19. Radulphus de Turribus, 1210

4. Saffarius, anno 590

20. Raymundus de Pons, Cardinalis, S.R.E, 1223

SEDES VACAT

21. Petrus de Sancto Asterio, anno 1237

1. Bertrandus, anno 767

22. Helias Paletisis, anno 1269

2. Raymondus ....

23. Raymundus d’Auberoche, anno 1283

3. ....

24. Audoynus, anno 1294

4. Sebaldus, anno 900

25. Raymundus, anno 1306

5. Froterius, anno 976

26. Petrus, anno 1333

6. Martinus Bozo, 992

27. Raymundus, 1336

7. Rodolphus de Cohalia, anno 1003

28. Guillelmus, 1343

8. Arnald. Vitabrensis, anno 1014

29. Petrus, anno 1374

9. Geraldus de Gordonio, anno 1037

30. Gabriel, anno 1405

10. Guillelmus de Monteberulpho, anno 1059

 

11. Reginaldus de Tyberio Martyr, 1086

 

12. Guillel. de Albaroch. 1099

 

 

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31. Raymundus de Bretenous, 1408

44. Guido de Castro novo de Bretenoux, anno 1511

32. Joannes, anno 1408

45. Jacobus Murisse de Castronovo, 1523

33. Berengarius, anno 1431

46. Joannes de Plaigne, 1524

34. Helias Serven, 1437

47. Fulco de Bonneval, 1531

35. Petrus de Durfort, 1438

48. Claudius Givry Cardinalis, 1540

36. Raymundus Laubariensis, 1440

49. Joannes de Lustrac, 1550

37. Godefridus Berengarius Darpajou, 1441

50. Godefridus de Pompadorio de Chasteau-bouchet, 1551

38. Helias de Bourdeille, Cardinalis, 1447

51. Guido Bouchard d’Aubeterre, 1554

39. Radelphinus, 1468

52. Augustinus de Triulcis Cardinalis, 1554

40. Godefridus de Pompadorio, anno 1480

53. Petrus Fournier, 1561

41. Gabriel Dumas, anno 1485

54. Franciscus de Bourdeille, 1575

42. Godefridus de Pompadorio, 1500

55. Joannes Martin, anno 1601

43. Joannes Auriens, 1504

56. Franciscus de la Beraudiere, anno 1612

 

CAPITULA DIOECESIS PETROCHORENSIS

 

1. Cap. Eccles. Cathedralis S. Stephani

4. Cap. Eccles. Collegiatae Albaterrae

2. Cap. Eccles. Collegiatae S. Frontonis

5. Cap. Eccles. Collegiatae Rupis bovis Curti

3. Cap. Eccles. Collegiatae Sancti Asterii

6. Cap. Eccles. Colleg. Ribeyraci

 

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ARCHIDIACONATUS.

 

1. Magnus Archidiaconus Cathedralis

3. Archid. de Dupla

2. Archid. Brageracensis

4. Archid. de Sarlato

 

ABBATIAE

 

1. Abbatiae B. Mariae Cancellatae Ord. S. August.

6. Abb. de Bosco Bavo (sic; Cavo) Ord. S. Bernardi.

2. Abb. Brantosmis Ord. S. Benedicti

7. Abbatia Religiosarum De Ligurio Ord. S. Benedicti.

3. Abb. Tortoyraci Ordin. S. Augustini

8. Abb. Religiosarum Albugis Ord. S. Benidicti.

4. Abb. de Castris Ordin. S. Aug.

9. Abb. S. Clerae Petrachorae

5. Abb. Petrozae Or. S. Bernardi.

10. Abb. Religiosarum de Fanlac. Ord. S. Bened.

 

PRAEPOSITURAE

 

1. Praepositura de Themolaco

5. Praep. S. Martini de Grangas

2. Praep. de Nalliaco

6. Praep. Rup. Bovis Curti

3. Praep. de Gabilion

7. Praep. de Pommiers

4. Praep. de Paluau

8. Praep. de Ponnat

 

ARCHIPRESBITERATUS

 

1. Archip. de la Quinta

9. Archip. de Villamblardo

2. Archip. de Peyrato

10. Archip. de S. Marcelli

3. Archip. de Goust

11. Archip. de Tyberio

4. Archip. de Vanxentio

12. Archip. de Valeuil

5. Archip. de Pilliaco

13. Archip. S. Medardi

6. Archip. de Chanteyraco

14. Archip. de Campagniaco

7. Archip. de Veteri Marolio

15. Archip. de Albugio

8. Archip. de Velines

16. Archip. de Audrix

 

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PRIORATUS

 

1. Priorat. Conventualis Sancti Joannis de Colla

29. Prior. de Manzaco

2. Priorat. Convent. de Peyraco

30. Prior S. Medardi de Lymolio

3. Priorat. Convent. de Faya

31. Prior. de Sourzac

4. Priorat. Convent. Religiosarum S. Pardulphi

32. Prior. S. Mammetis

5. Priorat. Convent. Religiosa de Fontibus

33. Prior S. Martini de Brageraco

6. Priorat. Convent. Relig. B. Mariae Petrachorae

34. Prior. S. Martini des Combes

7. Priorat. de Merlandra

35. Prior. de Creisse

8. Prior. de Septem fontibus

36. Prior. de Guilletorse

9. Priorat. de Bourneto

37. Prior. de Chaslardo

10. Prior. de Boursaco

38. Prior. de Lagulhiaco

11. Prior. S. Privati

39. Prior. d’Annexia

12. Prior. de Parcoul

40. Prior. S. Juliani

13. Prior. S. Eulaliae

41. Prior. de Bella Aqua

14. Prior. de Ponteuraux

42. Prior. de Peyrefix

15. Prior. de Chaslard

43. Prior. de Bordellia

16. Prior. de Puymango

44. Prior. S. Mart. de Albareda

17. Prior. de Boansault

45. Prior. S. Eulaliae

18. Prior. de Jouniaco

46. Prior. S. Raphaelis

19. Prior. de Salles

47. Prior. de Bougens.

20. Prior de S. Severino

48. Prior. S. Michaelis

21. Prior. de Bonisseto

49. Prior. de Gaudonnias

22. Prior. S. Laurentis de Marolio

50. Prior. de Cubas

23. Prior. de Serles

51. Prior. de Condaco

24. Prior. S. Medardi de Labbatial

52. Prior. S. Angelli

25. Prior de Grangiis

53. Prior. de Capella Faucher

26. Prior de Flaix

54. Prior. S. Leonis

27. Prior. S. Paxentis

55. Prior. S. Romae

28. Prior. de Montcaret

56. Prior. de Bars

 

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CONVENTUS

 

1. Monasterium Vallis Clarae Ord. Carthusianorum

9. Conv. F. Carmelitarum Brageraci

2. Conventus F. Minorum S. Francisci Petrachorae

10. Collegium Societatis Jesu.

3. Convent. F. Praedicatorum S. Dominici Petroch.

11. Convent. F. Recollectorum Tyberis

4. Convent. F. Praedicatorum Brageraci

12. Convent. F. Recollectorum Petrochorae

5. Convent. F. Minor. Brageraci

13. Conventus F. August. intra moenia Petrochorae

6. Convent. F. Augustinianorum Petrochorae

14. Conv. F. Minimorum Albaterrae

7. Conv. F. Minor. Albaterrae

15. Conv. F. Minimorum de Planiaco

8. Conv. F. Minor. Exidolis

16. Conv. F. Recollect. Brageraci

 

 

LES ROYS D’AQUITAINE,

depuis l’an 419 jusques à 852

suivant les Annales d’Aquitaines,

& la Chronique Bourdeloise.

 

L’Aquitaine fut conquise aux Romains par Julles Caesar, & leur demeura jusques à l’an dixiesme de l’Empereur Honorius, qui l’an 410 la donna aux Gots jusques à Clovis l’an 509.

 

1. Athaulphe

410

5. Thurismond

450

2. Sigeric

 

6. Theodoric II

 

3. Uvallia

419

7. Erric

 

4. Theodoric I

 

8. Alaric

 

 

― Page 240 ―

 

1. Clovis

509

10. Dagobert

 

2. Clodomires

 

11. Clovis II

 

3. Clotaire

 

12. Clotaire III

663

4. Gontram

 

13. Charles Martel

 

5. Sigibert

 

14. Pepin le Bref

 

6. Childebert

 

15. Charlemagne

 

7. Theodebert & Theodoric

 

16. Louts le Debonnaire

 

8. Clotaire

 

17. Pepin second

 

9. Heribert

 

18. Charles le Chauve qui supprima la Royauté d’Aquitaine l’an 852

 

 

DUCS D’AQUITAINE

François depuis l’an 852

jusques à 1137

 

 

1. Ranulphe

6. Guillaume Teste d’Estoupe

2. Guillaume le Piteux

7. Guy

3. Ebles I

8. Guillaume Geoffroy

4. Ebles II

9. Sainct Guillaume

5. Guillaume Hugues

10. Louys le Jeune qui repudia la fille de S. Guillaume Heleonor Duchesse d’Aquitaine

 

 

DUCS D’AQUITAINE

Anglois jusques à l’an 1200

 

Heleonor se remaria à Henry qui fut Roy d’Angleterre l’an 1153.

 

1. Henry Roy d’Angleterre & Duc d’Aquitaine

2. Richard Roy & Duc

3. Jean Roy & Duc

 

Le Duché fut confisqué sur l’Anglois, & revient au François l’an 1200 jusques à l’an 1255.

 

1. Louys 8 Roy de France & Duc d’Aquitaine

2. S. Louys 9 Roy de France & Duc d’Aquitaine

 

S. Louys redonna une partie de l’Aquitaine à l’Anglois, & la nomma Guyenne l’an 1255.

 

1. Henry 4 Roy d’Angleterre & Duc de Guyenne

5. Edouard IV

2. Edouard I

6. Richard

3. Edouard II

7. Henri V

4. Edouard III

8. Charles 7

 

― Page 241 ―

 

Charles 7 Roy de France l’an 1453 recouvra de l’Anglois toute l’Aquitaine usurpée & l’annexa à la couronne de France.

 

1. Charles 7

7. François 2

2. Louys onziesme

8. Charles 9

3. Charles 8

9. Henry 3

4. Louys 12

10. Henry 4

5. François 1

11. Louys treiziesme

6. Henry 2

 

 

 

LES COMTES DU PERIGORD,

recueillis des livres de Piton, Choppin,

Corlieu, Belloy, Meynard, Catel, &

tiltres de la Generalité de Bourdeaux,

de la maison de ville de Perigueux,

de Nerac, & des plus anciennes noblesses.

 

 

1. Foelicissime institué par Clovis anno 507

2. Foelix Aureol pere de S. Euparche

 

1. Willebaud mis par Charlemagne, anno 778

 

1. Vulgrin Taillefer, mis par Charles le Chauve, anno 850

2. Guillaume I anno 900

3. Bernard

4. Bozon Vetulus, anno 970

5. Guillaume 2 Taleyrand, 980

6. Gerard, anno 1025

7. Helie I, anno 1037

 

― Page 242 ―

 

8. Audebert Cadoyrac, anno 1039

9. Bernard

10. Bozon 2, anno 1040

11. Helie 2, anno 1128

12. Helie Rudel 3, anno 1136

13. Helie Taleyrand 4, anno 1194

14. Augenius

15. Helias Taleyrand 5, anno 1232

16. Archambaud 2, anno 1258

17. Helies Taleyrand 6, anno 1320

18. Archambaud 3, anno 1320

19. Roger I, anno 1323

20. Archambaud 4, anno 1328

21. Roger 2 Bernard, anno 1331

22. Jean d’Armagnac, anno 1364

23. Archambaud 5 Taleyrand, 1369

24. Archambaud 6, anno 1391

 

1. Louys de Valois, 1399

2. Jean de Valois, 1407

3. Jean de Bretagne, Sieur de l’Aigle, anno 1417

4. Guillaume de Bretagne, 1443

5. Alain d’Albret, anno 1460

6. Jean d’Albret, 1483

7. Henry d’Albret, 1517

8. Anthoine de Bourbon, 1552

9. Henry de Bourbon, Roy de France, & la Comté fut par luy incorporée à la couronne de France.

 

 

 

 

 

 

I

 

Notes critiques et historiques

sur

l'ouvrage du P. Dupuy

par M. l'abbé Audierne,

Membre de la Société française pour la conservation des monuments de la Dordogne,

inspecteur des monuments historiques, membre de plusieurs sociétés savantes, etc., etc.

 

 

(aa) Arnaud de Villebois, et non pas de Vitabre, était de la même maison que les seigneurs de La Rochebeaucourt et de La Valette, département de la Charente. Ce fut cet évêque qui le premier ordonna que la commémoration des morts fut célébrée, à l'avenir, le lendemain de la Toussaint. Il était présent, dans l'église de Saint-Hilaire de Bordeaux, à la consécration de Gérard, évêque de Limoges: ce fut même lui qui l'accompagna dans son diocèse, le présenta aux religieux de Saint-Martial, l'installa et chanta le Te Deum en action de grâces. En l'an 1020, il se trouvait encore au sacre de Jourdain, successeur de Gérard, et le conduisit de Saint-Jean-d'Angely, où avait eu lieu la cérémonie, à Limoges, pour l'installer sur le siège épiscopal. Le P. Dupuy le fait assister aussi à la consécration de l'église du monastère d'Uzerche; mais un inconvénient s'oppose à ce que l'on admette cette assertion. La consécration fut faite en 1097 (voy. Gaufrid. Vosiens et Gal. Chris.), et Arnaud de Villebois était mort en 1037. On conçoit qu'il était assez difficile qu'il se trouvât à cette cérémonie 70 ans après sa mort. Le P. Dupuy l'aura confondu avec Rainaud de Thiviers, que le cartulaire de Saint-Jean-d'Angely met au nombre de ceux qui étaient présents à cette consécration; et ce qu'il appelle un convoi religieux, pour

 

II

 

rendre la cérémonie d'Uzerche plus magnifique, était le voyage expiatoire que Jourdain, évêque de Limoges, fit à Bourges, avec une centaine de clercs et de moines, nus pieds, pour se faire relever de l'excommunication que Gosselin, archevêque, avait prononcée en assemblée synodale et en présence du roi Robert, contre lui et tout le Limousin, parce qu'il s'était fait ordonner par un évêque qui n'était pas son métropolitain.

Guy ou Guillaume VII vivait en 1127. Il est probable qu'il n'était pas le fils de ce Guillaume VI que Dupuy fait mourir en 1025. Le duc d'Aquitaine, dont veut parler cet auteur, est Guillaume III, surnommé le Grand, qui, suivant Besli, hérita de son père des comtés de Poitou, de Limousin, de Saintonge, du pays d'Aunis et de l'Aquitaine. Ce duc eut plusieurs guerres à soutenir contre Boson, comte de la Marche. Il fit bâtir, en 1010, l'abbaye de Maillezais, où il embrassa la vie monastique en 1029, et y mourut le 31 janvier 1030. Du Cange prétend que le véritable chef de Saint-Jean-Baptiste était dans l'église d'Amiens, où il avait été apporté de Constantinople, et que celui qu'on honorait à Angely était le chef de Saint-Jean-Dédesse. Ce savant pourrait bien se tromper dans l'une et l'autre de ses assertions; mais heureusement cette question de pieuse crédulité ne tient pas essentiellement à l'orthodoxie de la foi.

Parmi les comtes de Périgord, il n'en est aucun du nom de Gérard. Celui que Dupuy nomme ainsi était Boson II, troisième fils de Boson, dit le Vieux, et dont le fils aîné était Elie II. Ce ne fut point, comme l'assure le P. Dupuy, Elie II qui fit crever les yeux à Benoît, chorévêque de Limoges, pour l'empêcher de monter sur le siège épiscopal de cette église lorsqu'il serait vacant, mais Elie Ier, dont le caractère était extrêment violent. Ce comte, poursuivi par Géraud, vicomte de Limoges, qui s'était chargé de venger le chorévêque Benoît, fut enfermé dans le château de Montignac, d'où il s'échappa au moment où on allait lui crever les yeux pour lui faire subir la peine du talion. Il mourut en se rendant à Rome.

Ce fut Elie II qui frappa, à Périgueux, une monnaie portant son nom et qu'on nomma plus tard Eliène. Dupuy écrit Eliène par H. C'est une erreur reproduite par les auteurs modernes, qui n'ont fait que copier leur devancier, n'ayant pas sous les yeux la monnaie d'Elie: ainsi, M. Le Bas, dans le dictionnaire encyclopédique de France, affirme que la monnaie Eliène n'a pas été retrouvée encore de nos jours; mais nous pouvons aujourd'hui lui dire le contraire. Il existe à Périgueux, chez M. de Mourcin, une Eliène que

 

III

 

nous avons donnée nous-même à ce savant archéologue; cette pièce est religieusement conservée dans son cabinet; elle a pour légendes: d'un côté, PETRACORIS; de l'autre, ELIAS COMES; son module est celui des deniers du moyen âge. Cette pièce est d'argent.

Gui, vicomte de Limoges, et Emma, sa femme, ne furent point, comme l'assure Dupuy, les fondateurs de l'abbaye de Tourtoirac; ils n'en furent que les restaurateurs. Cette abbaye a été détruite pendant les guerres de religion et elle n'a point été relevée de ses ruines. L'église, cependant, existe encore en partie, et les restes du couvent offrent un rang d'arcades en plein cintre, appartenant évidemment au Xe siècle.

Le concile de Bourges, tenu en 1031 et non pas en 1034, fut convoqué par Aimon, archevêque de cette ville, pour règler quelques points de discipline ecclésiastique et pour établir l'apostolat de Saint-Martial. Rien ne prouve qu'Arnaud de Villebois se trouvait à ce concile; mais il assistait à celui qui fut tenu quinze jours après à Limoges, et où fut contesté à Saint-Front le titre d'apôtre du Périgord, et à celui de Poitiers en 1032.

 

(bb) Gérard de Salignac, que Dupuy surnomme de Gourdon, était, sans doute, de la famille de Gourdon de Floirac, sortie des comtes de Toulouse, ou, peut-être, de celle des Salignac, très ancienne dans l'Aquitaine, et confondue avec celle des Fénélon. Il fut un des premiers évêques d'Aquitaine qui établit la trêve de Dieu.

Elie Ier, qui maltraita le chorévêque de Limoges, n'est pas celui qui fit frapper les Eliènes. Ayant un frère qui se nommait Aldebert, la similitude de noms a porté le P. Dupuy a confondre les personnes. Elie II eut un fils nommé aussi Aldebert, et c'est avec ce comte que Gérard de Gourdon eut de grands démêlés, ou, pour mieux dire, une guerre ouverte, au sujet de la monnaie que lui et son père, Elie, avaient fait fabriquer, contrairement aux anciens droits de l'abbé de Saint-Front.

Le Blanc, en effet, mentionne dans son traité plusieurs monnaies frappées au Puy Saint-Front et de Saint-Silain, avec cette autre légende: Vesonno vico, et sur d'autres peut-être moins anciennes, Petrocorius. Ces dernières doivent être du VIIe siècle, puisque ce n'est qu'à cette époque que la Cité de Vésone quitta son nom pour prendre celui des habitans de sa province. Sydoine Appollinaire est le dernier auteur qui se serve du mot Vesunnici pour dési-

 

IV

 

gner les habitans de Périgueux, et Grégoire de Tours n'emploie que les mots Petrocorium et Petrocorii pour désigner Périgueux et les Périgourdins. La monnaie dont parle Dupuy, avec les cinq annulets, symbole du nombre de coupoles de la cathédrale de Saint-Front, est plutôt celle des comtes de Périgord. Je croirais volontiers que les comtes de Périgord, pour faire la paix avec les évêques de Périgueux, renoncèrent aux Eliènes, pour faire frapper les monnaies sur lesquelles on lit d'un côté: Lodoicus, et de l'autre Ecolisme, avec les cinq coupoles pour type. Les comtes d'Angoulême retinrent sur leur monnaie quatre annulets seulement, parce que la cathédrale d'Angoulême n'offrait que quatre coupoles. Cet arrangement était facile, puisque les deux comtés n'en faisaient qu'un primitivement.

Les forteresses que Frotaire de Gourdon fit bâtir pour repousser les Normans étaient au nombre de cinq: Agonac, Auberoche, Grogniac, Saint-Christophe et Bassillac.

La destination de la table pascale dont parle Dupuy n'est point douteuse aujourd'hui. Elle servait à indiquer la Pâque aux curés du diocèse et à règler l'époque des fêtes: mais quel cycle pascal représentait-elle? Voilà la difficulté. Nous observons seulement que cette table ne contient que quatre-vingt-dix-neuf années, et que le cycle de Théophile se composait de quatre-vingt-quinze.

Ce ne fut ni Bernard, ni Boson qui succédèrent à Aldebert, comme le prétend Dupuy; ce fut Elie IIIe, en 1074.

 

(cc) Geofroi, duc de Gascogne, est le même que Guillaume VI, comte de Poitiers et duc d'Aquitaine. Il était le second fils de la duchesse Agnès et de Guillaume le Grand. Il mourut au château de Chizé, le 24 septembre 1086 ou 1087. Il avait épousé la fille d'Aldebert II, comte de Périgord, qu'il répudia pour cause de parenté.

En 1060, l'archevêque de Bordeaux était Gosselin de Partenay, qui succédait à Andron, et non pas Bertrand, comme le dit Dupuy. La chronique bordelaise ne fait même pas mention de cet évêque, que la Gallia christiana ne nomme pas.

Les noms des chapitres et des chanoines n'ont commencé à être en usage que vers le temps de Charlemagne, comme le prouve Marcellus Ancyranus, dans le traité qu'il a fait sur une décrétale d'Honoré III. Avant le VIIe siècle,

 

V

 

et dès les temps mêmes des apôtres, on trouve un clergé établi dans l'église avec l'évêque, formant un sénat pour la gouverner. C'est cette assemblée qu'on nommait presbyterium. Mais le clergé s'étant disséminé dans les campagnes, les évêques gardèrent autour d'eux un collège de clercs ou de prêtres, qui étaient nourris avec les revenus de l'évêché, vivaient en commun, demeuraient sous le même toit, pour être le conseil et le sénat de l'évêque. Ils furent même héritiers de ses meubles jusqu'en 816. Ce fut sous Clotaire Ier que Baudin, archevêque de Tours, institua, le premier en France, un collège ou chapitre dans son église. Il arriva, dans le Xe siècle, que, dans les villes un peu importantes, où il n'y avait pas d'évêques, on établit de pareilles communautés ou congrégations, qu'on appela collégiales, parce qu'on se servait indifféremment du mot congrégation ou collège; celui de chapitre, qu'on leur a donné depuis, est plus nouveau. Les membres de ces communautés furent appelés chanoines, non seulement à cause de la pension qui leur était assignée, et qu'on nommait canon, ou en vieux français provende, mais encore à cause de la règle qu'ils observaient.

La vie commune était aussi établie dans les collègiales; elle l'était également dans la collègiale du Puy Saint-Front; l'emploi de cellérier donné à Itier, qui en était l'un des chanoines, le démontre clairement. Les frais que fit ce chanoine pour faire sculpter le tombeau de saint Front ne prouvent point que la collégiales eut été sécularisée; elle ne le fut jamais. Ses membres n'étaient point des moines; ils eurent toujours pour abbé l'évêque de Périgueux leur chef. D'ailleurs, les dépenses faites pour l'ornement de ce tombeau furent supportées par la communauté. Le chapitre de Saint-Etienne menait encore la vie commune sur la fin du XIe siècle; comment les religieux de la collègiale de Saint-Front en auraient-ils été dispensés?

L'abbaye de Castris, aujourd'hui Châtre, était située en Périgord, près de Terrasson, dans la commune qui porte ce nom. Elle était florissante dans le XVe siècle. Dix prieurés, dont six dans le diocèse de Périgueux, un dans celui de Sarlat et trois dans celui de Saintes, étaient à la nomination de l'abbé. Il ne reste de ce couvent que des ruines, et son souvenir s'est presque entièrement éteint dans la mémoire des habitans de la commune de Châtre, qui lui doit cependant son existence.

 

(dd) Guillaume VII, duc d'Aquitaine, né le 22 octobre 1071, succéda à Guillaume VI, son père, en 1086, dans le comté de Poitiers et les

 

VI

 

duchés d'Aquitaine et de Gascogne. Il avait épousé, en secondes noces, Mathilde, fille unique de Guillaume IV, comte de Toulouse, et veuve du roi d'Aragon. Il en eut trois fils: Guillaume, qui fut le père d'Eléonore d'Aquitaine; Raymond, qui devint prince d'Antioche, et Henri, moine de Cluni. Il en eut aussi plusieurs filles, dont on ne connaît que Mahaut, mariée au viconte de Thouars. Il mourut le 10 février 1127. Ainsi, Dupuy se trompe en disant que ce duc fut le père d'Eléonore; il en était l'aïeul. L'auteur de la Chronique bordelaise est tombé dans la même erreur.

Rainaud de Thiviers avait sans doute des propriétés à Saint-Jean-de-Côle, où il fonda un prieuré. L'église offre encore des restes de constructions de l'époque de sa fondation, quoique restaurée dans un autre style. Les bâtimens du prieuré étaient vastes, si l'on en juge par ceux qui les ont remplacés, et que la révolution de 1793 n'a pas détruits.

Adémar, évêque d'Angoulême, et les chanoines de son église, étaient en discussion au sujet du droit de nomination du gardien des choses saintes que l'évêque s'attribuait; ils prirent pour arbitres, dans leur procès, les chanoines de Saint-Etienne de Périgueux et de Saintes. Cet évènement, sur lequel le P. Dupuy se tait arriva vers l'an 1089.

Sylvestre II fut le premier qui proclama la nécessité d'une guerre sainte, mais il ne fut pas entendu. Grégoire VII convoqua de nouveau tous les chrétiens pour la défense de l'évangile déjà banni de l'Afrique, traqué en Asie et menacé en Europe par le Coran, qui s'y introduisait par les Pyrénées, la Sicile et le Bosphore. Mais la guerre sainte n'était pas encore devenue la passion de la foule. Ce ne fut que sous Victor III et Urbain II, après les prédications de Pierre L'Ermite, que les Latins se déterminèrent à aller délivrer la Palestine. Rainaud de Thiviers ne fit point partie de la première armée commandée par Pierre L'Ermite. Se trouvant à la consécration de l'église d'Uzerche, en 1097 ou 1099, et au concile de Bordeaux en 1098; il est certain qu'il n'était point non plus dans aucune des trois armées qui se réunirent, la première au nord, la deuxième au centre et la troisème au midi de la France, pour se rendre dans la Terre-Sainte vers la fin de l'année 1096; il ne partit qu'en 1101, avec une nouvelle levée devenue nécessaire, et ce fut Guillaume IX, comte de Poitiers et duc d'Aquitaine, qui conduisit cette troupe de croisés.

 

(ee) Guillaume d'Auberoche, archidiacre de Périgueux, avant son élec-

 

VII

 

tion, ne fut pas, à ce qu'il paraît, le successeur immédiat de Rainaud de Thiviers. Claude Estiennot prétend que ce fut un nommé Raimond, mentionné dans plusieurs chartes; mais suivant une charte de l'abbaye de Charroux, c'eut été Guillaume Gradin. Nous ne chercherons point à résoudre cette difficulté, il nous suffit de l'avoir signalée.

Guillaume d'Auberoche contribua à la fondation de l'abbaye de Cadouin. On peut lire l'histoire de cette abbaye dans l'ouvrage que nous avons publié en 1840, à Périgueux. Il est probable que cet évêque ne se trouvait pas au concile de Poitiers en 1100; aucun document d'ailleurs ne le cite. Guillaume IX ne s'opposa point à la tenue de ce concile, où les évêques furent maltraités et battus par les laïques; il y assista lui-même, au contraire, et n'en sortit que pour protester contre une mesure qui compromettait les intérêts du roi; on lui reproche cependant d'être l'auteur du tumulte qui troubla ce concile.

Guillaume d'Auberoche étendit ses libéralités aux abbayes de Cluni, de la Sauve-Majeure, d'Uzerche et de Saint-Cybard d'Angoulême. Ce vertueux prélat mourut, non pas l'an 1123, comme il est marqué, par erreur, dans le Fragment de la Chronique des évêques de Périgueux, imprimé dans la bibliothèque de Labbe, mais bien en 1130 ou environ, comme le dit Dupuy, car il est certain qu'il vivait encore le 29 juin 1189 (sic; il faudrait lire 1129), suivant le cartulaire de Chancelade.

 

(ff) Guillaume IX mourut en 1127, âgé de 56 ans. M. Capefigue, dans son Histoire de Philippe-Auguste, semble croire qu'il fut le dernier duc d'Aquitaine: ce serait une erreur. Le dernier duc est Guillaume X, qui mourut dans l'église de Saint-Jacques de Compostelle, le vendredi saint, 9 avril 1137, âgé de 38 ans seulement. Je ne sais d'après quels documens le P. Dupuy donne à Guillaume IX le titre de Saint: serait-ce à cause de son voyage en Palestine? Mais il en revint tel, qu'il y était allé. Il avait emmené un sérail et avait voulu fonder, à Niort, une abbaye de prostituées, en invitant ses vassaux à donner de l'argent et des fonds de terre à ce couvent de nouvelle espèce, comme on en donnait aux monastères du voisinage. Au reste, son fils Guillaume X n'était pas meilleur que lui; ses cruautés et ses pillages, dans la guerre de Normandie, l'ont rendu célèbre dans l'histoire.

Il est évident que Dupuy a confondu les actions de ces deux personnages, pour les attribuer à un seul homme. C'est, en effet, Guillaume X qui fit un

 

VIII

 

pélerinage à Saint-Jacques de Compostelle et qui arrangea le mariage de sa fille Eléonore avec le fils de Louis VI; mais le mystère de son voyage à Rome et sa retraite dans un désert sont dénués de fondement.

Ce mariage, une fortune pour la royauté, si Louis VII eût été plus sage, devint une source de malheurs pour la France. ― Le duché d'Aquitaine comprenait le Poitou, le Limousin, le Bordelais, l'Agenais, l'ancien duché de Gascogne et l'autorité suzeraine sur l'Auvergne, le Périgord, la Marche, la Saintonge et l'Angoumois.

Guillaume de Nanclars était archidiacre de l'église de Périgueux avant d'en être évêque. En 1131, il maintint les religieuses de Notre-Dame de Saintes dans la possession de l'église de Saint-Silvain de La Monzie, sur la Dordogne, dont elles avaient été injustement dépouillées. Ce fut ce prélat qui le premier établit que les laboureurs paieraient le droit de commun, pour le maintien de la paix.

 

(gg) Géoffroy de Cauze, issu d'une noble famille du Périgord, mourut, non pas en 1142, comme il est marqué dans les catalogues ordinaires, mais en 1143 ou 1144, et c'est à tort que la Gallia christiana place après lui un Pierre qui n'a pas existé. La cause de cette erreur vient de ce qu'on a mal lu la charte de Saint-Amand-de-Boisse, et que l'on a pris un R, lettre initiale du nom, pour un P. Le P. Dupuy n'est pas tombé dans cette méprise.

 

(hh) Raimond de Mareuil était frère utérin, à ce que l'on croit, de Boson de Grignols, comte de Périgord; il fut nommé archevêque de Bordeaux en 1158; il fit un voyage en Périgord l'année suivante, et mourut à Bordeaux le 23 décembre de la même année.

 

(ii) Le mausolée de Jean d'Asside existe encore dans l'église de la Cité; il est placé contre le mur du nord dans une arcade feinte et surmonté d'un fronton sans base. Deux colonnes supportaient son cintre un peu original. Les fûts ont disparu; il ne reste plus que les chapitaux, sur lesquels on voit des dragons avec des ailes et des loups ou des léopards. L'archivolte est chargée d'ornemens gothiques, représentant des tiges de chardons entrelacés et s'unissant à leur extrémité par leur feuilles. Sur l'un des pieds droits, on lit cette inscription, que Dupuy ne mentionne pas: Constantinus de Jarnac fecit hoc ops. Et cette autre encore: Qui presentes litteras legis et considers: in defuncti nomine die: absolve Domine: vel Dominus, aut saltem fidelium.

 

IX

 

Le P. Dupuy a mal écrit le millésime; il est ainsi: M.C.LX.

On a placé devant ce magnifique monument une énorme croix de pierre, dont la première marche du piedestal touche les deux pieds droits. Là n'est pas la place de cette croix de mission; elle serait infiniment mieux dans le cimetière, où devrait la faire transporter l'autorité municipale.

 

(jj) Pierre de Mimet fut inhumé dans l'église de la Cité; son tombeau est pratiqué dans l'épaisseur du mur du nord, il est indiqué à l'extérieur par cette épitaphe:

Petrus presul erat: jacet hic in pulvere pulvis: sit celum requies: sit sibi vita Deus: obiit decima die aprilis.

Sous son episcopat, Henri II, roi d'Angleterre, vint assiéger le Puy Saint-Front. La Cité s'était rendue; le siège dura long-temps, mais il fallut capituler. C'est pendant cette lutte et les divisions entre Plantagenet et ses trois fils, que Bertrand de Born, du château d'Hautefort, joua un grand rôle dans le Périgord. Il fut comme la trompette de ces funestes et malheureux débats.

La douceur du caractère de Pierre Mimet le rendit étranger à ces sanglantes luttes et le mit à l'abri des persécutions; il ne s'occupait que de bonnes oeuvres.

L'église de Sainte-Alvère, dont il fit la consécration, tombait en ruines. Elle fut reconstruite en 1770 par les soins et aux frais du marquis de Sainte-Alvère, de la haute, puissante et illustre famille de Lostanges.

 

(kk) Adémar de la Tour, qu'on présume fils du seigneur de La Tour-Blanche, était d'abord chanoine de Saint-André de Bordeaux. Devenu archidiacre de Périgueux en 1170, il fut fait évêque de la même ville, et obtint du pape Urbain III, le 22 septembre 1187, une bulle confirmative des biens et privilèges de son église. On croit qu'il se démit de son siège en 1197, en retenant le titre d'évêque; mais il est plus probable qu'il mourut la même année. Il paraît, par une bulle du pape Innocent III, concernant l'abbaye de Cadouin, datée du 8 mai 1198, qu'Adémar de la Tour était déjà mort; cependant il est dit dans la Gallia christiana qu'il fut nommé en 1201, avec Hélie, archevêque de Bordeaux, arbitre d'un différend entre les abbés de Cadouin et de Pontigny. Il est à présumer qu'il s'est glissé une erreur dans les chiffres ou dans la lettre initiale du nom de l'évêque; ce qui prouverait qu'il y a confusion, c'est que le P. Dupuy, dans cette circonstance, a interverti

 

X

 

l'ordre chronologique des évêques et en a même omis un que nous rétablirons dans la place qu'il doit occuper.

L'église consacrée par Adémar de la Tour, le 3 des calendes de février de l'année 1194, existe encore. Elle est située dans la plaine, à l'est de Limeuil; sa forme est une croix latine très régulière: elle peut servir de type pour caractériser l'architecture de cette époque.

C'est dans cette église qu'était placée l'inscription rapportée par le P. Dupuy. Elle n'y est plus aujourd'hui; on l'a transportée dans l'église de Sainte-Catherine, plus moderne, et située dans le bourg même de Limeuil. L'inscription donnée par Dupuy offre une erreur et une omission qu'il importe de relever. Petrachoricensi n'est pas écrit par ch, mais par un g, et le nom du pape régnant ainsi indiqué: CELESTINO PAPA SANTE ROMANE ECLESIE PRESIDENTE, n'y figure pas.

 

(ll) Ramnulfe, ou Raoul de Lastours, issu d'une noble et ancienne famille du Limousin, dont une branche avait possédé le château d'Hautefort, en Périgord, et s'était éteinte depuis quelque temps dans la famille de Born, fut d'abord chanoine de Saint-Irier, et ensuite de Saint-Etienne de Limoges en 1210. Il monta sur le siège de Périgueux vers l'an 1210, malgré les parens et les partisans de Raimond de Castelnau, évêque de Périgueux, son prédecesseur, dont ne parle pas le P. Dupuy.

Le traité fait par Ramnulfe de Lastours, pour rétablir la paix entre les habitans du Puy Saint-Front et ceux de la Cité, existe encore dans les archives de la mairie de Périgueux. Le voici:

 

« Ramnulfus, Dei gratia, petragoricensis episcopus. Universis tam presentibus quam futuris has litteras inspecturis, salutem in Domino. Noveritis quod cum controversia inter Civitatem et Podium-Sancti-Frontonis Petragoricensis super multis articulis verteretur in nos compromiserunt. Dutis nobis consiliaris, ex parte Civitatis, H. canonico et R. de arena milite; ex parte vero Podii, W. Alberti et B. Blanquet burgensis; jure jurando firmantes quod quidquid de consilio istorum statueremus inviolabiter observarent. Nos vero de consilio istorum et cum prudentibus viris habita deliberatione statuimis quod omnes querele quas habebant vel habere poterant ad invicem, sive in generali sive in speciali. Retroactis temporibus penitus remiterentur, salvis dominiis et hereditatibus dominorum, et juramentis a burgensibus Podii-Sancti-Frontonis domino regi Franciae

 

XI

 

factis, et juramentis a civibus Petragoricensibus dominis terrarum factis, precipimus etiam ut nullus pignoretur, nisi proprius debitor vel fideijussor. Item si aliquis interfecerit vel vulneraverit aliquem, vel aliquid furatus vel depredatus fuerit in altera villarum non recipiatur in alia, salvata immunitate ecclesie. Ita tamen quod si confugerit ad ecclesiam, nullus contra detrimentum ville in qua deliquit, presumat parare assensum vel consesnsum delinquinti. Item cum aliquis de altera villarum venerit ad aliam, sit ibi securus tanquam esset de villa. Quod si necesse fuerit prestetur sibi conductus securus in eundo et redeundo, donec fuerit reversus in villam suam. Et si forte aliquis captus fuerit inter duas villas, eundo et redeundo ab utraque villa pro posse, bona fide requiratur. De victualibus et aliis necessariis utraque ville deserentibus idem statuimus quod sint in eundo et redeundo securi, nisi sint fidejussores vel debitores; et si ab aliquo depredentur ab utroque villa bona fide requiratur. Item cum aliqua dubietas, sive ex debito, sive ex alia re propter negacionem alicujus orta fuerit, pro querela illa aliquis non pignoretur, sed ad arbitrium quatuor negans respondeat conquirenti, et XXti dies negacionis quo sopiatur, et si negans convictus fuerit sive conquerrens contestationem injuste movisse, ad arbitrium IIIIon pena pecunaria puniatur. Intelligimus etiam quod jus debiti vel pignoris, salvum sit cuique ville utriusque, salva tamen ecclesiastica auctoritate. Quatuor arbitri hoc modo debent eligi. Quod utraque villarum duos dabit et illis jurabunt quod secundum equitatem et sine acceptatione personarum, villarum negocia tractent; et si contingit quod unus vel duo sint absentes, alii a villis loco illorum substituantur, secundum formam premissam et singulis annis mutabuntur, quando necesse fuerit dicti arbitri conveniant, villarum negocia pertractantes. Hanc compositionem de consensu et voluntate utriusque ville fecimus, quam in perpetuo juraverunt fideliter observare. Quod in testimonium hujus rei, nos et ecclesie sanctorum Stephani et Frontonis et commune de Podio-Sancti-Frontonis, presentem cartam sigillis nostris fecimus sigillari. Actum est hoc anno ab incarnatione Domini, M° CC° XVII°; Honorio, papa, et Philippo, rege Franciae, regnantibus; pontificaus nostri, anno octavo; VI° idus aprilis. »

 

Il fit ensuite le voyage de la Terre Sainte, et à son retour, en 1219, il confirma la fondation du prieuré de La Faye. Quatre ans après, il adressa, conjointement avec les chapitres, abbayes et monastères du Périgord,

 

XII

 

au roi Louis VIII, à son avènement au trône, une supplique pour prier ce prince de remplir la promesse faite à Châteauroux par le roi son père, de prendre en pitié le diocèse de Périgueux, désolé par les guerres.

Enfin, ce vertueux et vénérable prélat, accablé d'infirmités se voyant dans l'impossibilité de gouverner son diocèse, donna sa démission entre les mains de Grégoire IX, qui, par ses lettres du 12 octobre 1232, chargea l'archevêque de Bordeaux et l'évêque de Tournai de l'accepter. Il ne vécut qu'un mois après sa démission. ― Ce fut sous épiscopat que le nombre des chanoines de Saint-Front fut fixé à trente; il fut réduit plus tard à vingt-quatre par le pape Grégoire IX. (Arch. du Vatican).

Il ne reste aujourd'hui que des ruines des châteaux de Domme, de Montfort et de Castelnau. Le château de Beynac, ancienne baronie, est encore debout, mais abandonné depuis environ un demi-siècle, il est à craindre qu'il ne soit bientôt, comme les autres, qu'un amas de poussière.

 

(mm) Raimond de Pons, évêque et cardinal, doit être placé immédiatement après Pierre de Mimet et avant Adémar de la Tour; tous les catalogues fixent sa nomination à l'évêché vers l'an 1223 et sa promotion au cardinalat en 1227. Mais cette opinion est insoutenable, puisque le siège de Périgueux a été occupé sans interruption, durant toute la première moitié du XIIIe siècle, par Raoul de Lastours, Raimond de Castelnau et Pierre de Saint-Astier; il ne reste donc d'autre place qui lui convienne que l'intervalle qui s'est écoulé depuis 1182 jusqu'en 1187. Ce fut probablement lui qui se rendit à Châteauroux, auprès du roi Philippe-Auguste, avec les députés des chapitres et des monastères du Périgord. (Trésor des Char. sac. Périg. Cot. I).

La petite chapelle dont parle Dupuy existe encore, ainsi que l'inscription gravée au dessus de la porte. La croix a été renversée; on en a conservé cependant les débris sculptés; ils sont déposés dans l'intérieur de la chapelle.

Raimond de Castelnau était frère de Raoul de Castelnau, seigneur de Razac; sa place, dans l'ordre des évêques, est entre Adémar de la Tour et Raoul de Lastours. Il assistait, en 1197, à la consécration de l'abbaye de la Couronne, près d'Angoulême. Le pape Innocent III lui écrivit le 10 mai 1198, au sujet de la réformation du monastère de Cadouin; il lui adressa successivement plusieurs autres lettres relativement à l'administration de son diocèse. Ce fut lui qui fit don, en 1206, au monastère de Notre-Dame-de-la-Daurade, située près du pont de la Cité de

 

XIII

 

Périgueux. Enfin, il fut dépossédé par ordre du même pape Innocent III, qui lui faisait, entre autres reproches, celui d'une extrême négligence dans ses fonctions. Il vécut encore plusieurs années; car, d'après le cartulaire de Chancelade, il fit don à cette abbaye, en 1220, de quelques droits qu'il avait dans la châtellenie de Montancès et dans la paroisse de Razac, en présence et du consentement de Fortanier de Castelnau, son neveu.

 

(nn) L'épiscopat de Pierre de Saint-Astier fut très agité. Cependant ce prélat, aimé de tous les partis, n'eut point à souffrir ni dans sa personne, ni dans ses biens; mais la division qui existait entre les deux villes (le Puy Saint-Front et la Cité), la guerre civile qui éclata souvent entre leurs habitans et les luttes constantes entre le roi d'Angleterre et le roi de France, l'affligeaient profondément. Il était si pieux, si doux, si juste, qu'il domina tous les esprits, gagna tous les coeurs, et sa prudence fut si grande qu'il fut choisi plusieurs fois pour arbitre dans les différends les plus acharnés, qu'il sut toujours appaiser; aussi sa mémoire s'est perpétuée d'âge en âge, et l'histoire n'a omis aucune particularité de sa vie. Tous les actes qui parlent de lui ne le désignent qu'avec les expressions de la plus profonde vénération, et son nom est toujours précédé d'un épithète de respect qualifiant ses vertus. Sa famille a hérité de ses rares qualités, et aux nobles sentimens qui la distinguent, aux nombreux siècles qui ont perpétué sa gloire, elle joint cette bonté, cette franchise, cette loyauté, cette grandeur d'âme bien rares de nos jours et cependant l'apanage des coeurs vraiment français.

Voyez nos brochures sur Saint-Astier et sur Saint-Front, imprimées chez MM. Dupont en 1844. Il y est question de cet évêque et de sa famille.

 

(oo) Hélie de Pelet, chanoine de Beauvais, fut nommé par le pape Clément IV, le 19 avril 1268. L'an 1276, il unit à chacune des 24 prébendes ou canonicats dont était composé le chapitre de Saint-Front, certains bénéfices-cures dépendant du patronage du même chapitre. Enfin, le 10 mai 1279, il fut transféré au patriarchat de Jérusalem et mourut en 1288.

Saint-Louis, à son passage à Périgueux et dans son pélerinage à l'abbaye de Cadouin, était accompagné de ses trois enfans Philippe, le comte d'Alençon et le comte de Clermont en Beauvoisis, du comte de Toulouse et du

 

XIV

 

comte d'Artois. Louis IX fut solennellement mis au rang des saints par Boniface VIII en 1297. Les Périgourdins refusèrent d'abord de reconnaître sa sainteté, ne lui pardonnant pas d'avoir abandonné le Périgord aux anglais; mais ses vertus triomphèrent, et la vérité éteignit le ressentiment.

 

(pp) Raimond d'Auberoche était archidiacre de Boulogne, dans l'église de Térouane, quand Nicolas IV le nomma évêque de Périgueux. De nouveaux troubles éclatèrent au commencement de son épiscopat entre la Cité et le Puy Saint-Front, au sujet de la nomination des consuls. C'est alors que les deux villes voulurent avoir leur maire particulier et leurs consuls; mais en 1283, Lambert Laporte ayant été nommé maire et étant agréable aux deux partis, la paix se rétablit.

On croit que le Puy Saint-Front était fortifié: Philippe n'aurait fait qu'élever les murailles qui étaient trop basses et en mauvais état. Les premières fortifications furent faites sous Henri Ier, pour se défendre contre les routiers qui désolaient le pays; il est probable, cependant, que l'enceinte de murailles n'était ni continue, ni détachée du corps des maisons, comme elle le fut dans le XVIe siècle.

 

(qq) Audoin de Neuville était issu d'une ancienne famille du Périgord. Il mourut le 18 décembre 1313, suivant le calendrier de l'église de Limoges. Le pape qui passa à Périgueux, sous son épiscopat, était Bertrand de Got, connu sous le nom de Clément V, et archevêque de Bordeaux avant son élection, qui fut l'oeuvre de Colonna, par l'entremise de Philippe le Bel. Ce pape ne mit point le pied dans la capitale du monde chrétien; il abjura le séjour du Rome pour rester en France et, à la grande surprise de tous les chrétiens, il se fit couronner à Lyon. Après avoir parcouru l'Aquitaine, la Bourgogne et plusieurs autres provinces, au milieu du cortège le plus pompeux, étonnant la chrétienté par le luxe de sa marche triomphale, il se retira à Avignon, ville du domaine des rois de Naples, où ses successeurs, au nombre de sept, tous Français, tous nés dans le midi de la France, résidèrent pendant soixante ans.

 

(rr) Raimond Durfort, de l'illustre maison de ce nom, était archidiacre de l'église de Périgueux, chanoine et archidiacre d'Aurillac, prieur de Lafaye, lorsqu'il fut nommé à l'évêché de Périgueux par Clément V, le 28 jan-

 

XV

 

vier 1314. Il fit son entrée solennelle à Périgueux le lundi avant la Purification de la même année. Ce fut de son temps que Pierre Brunet, chanoine de Saint-Front, fonda un hôpital à Périgueux pour treize pauvres. Ce fut aussi sous son épiscopat que Jean XXII érigea l'abbaye de Sarlat en évêché: ce pontife forma ce diocèse de la partie la plus méridionale du Périgord. Ce nouveau diocèse fut séparé au nord, de l'évêché de Périgueux, par la Vézère, jusqu'à son embouchure dans la Dordogne, et ensuite par cette dernière rivière.

Le P. Dupuy semble désapprouver le démembrement de l'évêché de Périgueux pour l'érection du diocèse de Sarlat. Je doute que les évêques bien pénétrés de la sainteté de leurs devoirs consentent à partager ses sentimens. Plus un diocèse est vaste, plus la responsabilité est grande. La surveillance devient plus difficile et les moyens d'erreur plus nombreux. Un évêque qui ne peut pas voir tout par lui-même, est obligé de s'en rapporter au témoignage des autres. Qui peut lui garantir l'impartialité, la vérité et la justice! Les passions ont mille voix, la raison n'en a qu'une; il faut être bien habile pour ne pas se laisser tromper!

 

(ss) Dupuy affirme que Charles le Bel, mourut sans enfans, appela à la couronne Philippe de Valois, comme son plus proche parent. C'est une erreur qu'il est essentiel de relever. Voici les paroles de Froissard: « Quand Charles aperçut que mourir lui convenait, il devisa que s'il advenait que la reine accoucha d'un fils, il voulait que messire Philippe de Valois, son cousin germain, en fut le maimbourg (tuteur) et régent du royaume jusques à donc que son fils serait en âge d'être roi, et s'il advenait que ce fut une fille, que les douze pairs et les hauts barons de France eussent conseils et avis entr'eux d'en ordonner et donnassent le royaume à celui qui avoir devrait. » La reine accoucha d'une fille. Aussitôt deux prétendans se présentèrent, Philippe et Edouard III, roi d'Angleterre. Alors les barons se réunirent avec les notables de Paris et des bonnes villes et avec les douze pairs. Ils donnèrent le royaume de commun accord à Philippe, comte de Valois.

Ce Raimond dont parle Dupuy est le même que Raimond Durfort, mentionné plus haut.

 

(tt) Guillaume Audebert naquit à Chartres. D'abord religieux franciscain,

 

XVI

 

ensuite professeur en droit civil et en droit canonique, il était chapelain du pape et prévot de Saint-Pierre d'Arie, au diocèse de Térouane, lorsqu'il fut nommé à l'évêché d'Apt. Ce fut le pape Benoît XII qui le transféra le 1er octobre 1341 à Périgueux. Son prédecesseur à Apt était Guillaume Astier, de l'ordre des frères mineurs, qu'on a mal à propos mis dans quelques catalogues au nombre des évêques de Périgueux.

L'abside actuelle de l'église de Saint-Front fut bâtie par Elie de Talleyrand; aujourd'hui elle est occupée par le choeur des chanoines de la cathédrale de Périgueux. Il est facile à reconnaître que son style architectonique est bien différent de celui de la cathédrale. Ces deux édifices, quoique liés aujourd'hui, annoncent évidemment des époques différentes.

 

(uu) Le successeur de Guillaume Audebert fut Adémar de Neuville, chanoine de Périgueux, nommé par Clément VI le 8 juin 1347; il mourut à Rochemaure, près d'Avignon, où il était allé prendre l'air pour sa santé. Il est nommé dans le titre de la fondation de douze chapelains, faite dans l'église de Saint-Front par le cardinal de Talleyrand.

Dupuy et la Gallia christiana ont omis deux autres évêques qui succédèrent à Adémar de Neuville: Arnaud de Villemur, qui fut nommé à l'évêché de Périgueux le 15 octobre 1347, transféré à Pamiers le 13 février 1348, créé cardinal du titre de saint Sixte, évêque de Palestine en 1351, et mort à Avignon; et Guillaume de Lagarde, chancelier de l'église de Beauvais, nommé le 13 février 1348, transféré à Brague, en Portugal, le 27 juillet 1349, ensuite à Arles, en Provence, en 1360, où il mourut vers l'an 1378.

Pierre Tizon, que la Gallia christiana confond mal à propos avec Pierre Pin, archevêque de Bénévent, était issu d'une noble famille d'Angoumois. Nommé d'abord à Viterbe, ensuite à Vérone, il fut enfin transféré à Périgueux le 27 juillet 1349. Il tint un concile provincial dans sa ville épiscopale en 1365. Le manuscrit in-4° des actes de ce concile se trouvait dans la bibliothèque d'Etienne Baluze; il est probablement aujourd'hui à la bibliothèque royale.

Dupuy, en disant que l'idole avait été colloqué dans la chaire de Pierre, fait allusion à l'élection de Clément VII. Le conclave, composé de seize cardinaux, dont onze étaient Français, avait nommé l'évêque de Bari pape, sous le nom d'Urbain VI. Toute la chrétienté le reconnut sans contestation, malgré le tumulte qui avait décidé son élection; mais, six mois après, les mêmes

 

XVII

 

cardinaux conjurèrent de le renverser du trône pontifical; ils déclarèrent au monde chrétien que le saint siège était vacant, parce que la nomination de l'évêque de Bari était nulle et illégale, ayant été forcée, et ils élurent le cardinal Robert, de Genève, qui prit le nom de Clément VII. Ce schisme, ardemment soutenu, dura quarante années. La France, l'Ecosse, la Castille et Naples reconnurent Clément VII comme seul et légitime pontife. La Germanie, l'Italie septentrionale, l'Angleterre, les Pays-Bas, la Navarre et presque tous les états du nord, reconnurent Urbain VI. L'Europe se trouva ainsi partagée en deux factions, l'une pour la papauté italienne et l'autre pour la papauté française.

 

(vv) Les anciens monumens de l'église de Périgueux font mention d'un évêque Gabriel, en l'an 1405; il est probable que ce prélat fut nommé par le chapitre et confirmé par Benoït XIII, à l'époque où le duc d'Orléans, comte du Périgord, venait d'arracher à la faiblesse de Charles VI, en 1403, une ordonnance qui rendait l'obédience à ce pontife et le délivrait de sa prison.

Raimond de Bretenoux, d'une noble famille du Périgord, des environs de Campagne, entre Sarlat et le Bugue, et qu'on a mal à propos confondue avec la maison Castelnau de Bretenoux, était docteur ès-lois et chanoine de Saint-Front lorsqu'il fut nommé à l'évêché de Sarlat, par Benoît XIII, le 1er octobre 1397. Le même pape le transféra à Périgueux le 24 janvier 1404, et non pas le 26 février. Il reçut les hommages des vassaux de l'évêché en 1407; il assista au concile de Pise en 1409, et fut transféré à l'évêché de Lombès, par le pape Jean XXIII, le 28 juin 1413. Il mourut, suivant le nécrologe de l'église de Sarlat, le 9 février, sans date d'année; mail il est certain qu'il ne vivait plus en 1417.

Cet évêque Jean, dont parle Dupuy, est nommé, en effet, dans quelques titres de la Cité de Périgueux; mais il est probable qu'il n'était maintenu que par les Anglais. La Gallia le cite aussi.

Raimond de Pérusse d'Escars fut nommé par Jean XXIII, le 28 juin 1413. Il s'obligea, par procureur, le 24 juillet suivant, à payer à la chambre apostolique les droits accoutumés; il paraît qu'il ne fut pas généralement reconnu en Périgord, ou qu'il ne garda pas long-temps son siège, car, suivant divers actes, le siège était vacant dès la fin de mai 1414. On trouve une lettre du maréchal Boucicaut, datée de son hôtel de Turenne, le 27 mai 1415, portant qu'à la requête du noble Bertrand d'Abzac, écuyer, il de-

 

XVIII

 

mande au pape de conférer l'évêché de Périgueux à Gantonnet d'Abzac, frère de Bertrand, et reconnaît, au nom du roi, devoir une somme d'argent au même Bertrand, pour lui avoir livré le château de Castelnau de Berbigières.

Etienne, de l'ordre des frères prêcheurs, professeur et maître en théologie, fut nommé à l'évêché de Périgueux par Benoît XXIII (FB. Il faut lire Benoît VIII; Jean XXIII a été déposé au mois de mai 1415), le 6 décembre 1415. Il reçut une lettre du même pape, relative à son sacre, le 7 février 1416.

Le catalogue des évêques de Périgueux est plein de confusion vers la fin du XIVe siècle et le commencement du XVe. L'évêché a été occupé quelquefois par deux évêques à la fois, nommés par les deux papes, et soutenus par les Anglais et par les Français. Il fut même un moment où l'on avait déclaré en France la soustraction à l'obéissance des deux papes, et l'univeristé de Paris tendit à établir une église nationale indépendante des deux rivaux. Tout ce désordre provenait d'un schisme que tous les esprits éclairés déploraient. Avec le centre d'unité à Rome, on n'a pas à craindre le retour d'un pareil scandale. En 1409, le concile de Pise excommunia les deux papes et en nomma un autre, sous le nom d'Alexandre V; il y eut alors trois papes; ce fut une désolation pour l'Europe catholique.

 

(xx) Bérenger d'Arpajon, issu de l'ancienne maison des seigneurs de ce nom, dans le Rouergue, était prévôt de l'église de Beaumont, diocèse de Vabres, quand il fut nommé à l'évêché de Périgueux, le 14 mars 1414, par le pape Jean XXIII. Il fut chargé par les pères du concile de Bâle d'appeler trois fois à haute et intelligible voix le pape Eugèen IV, pour qu'il eût à comparaître devant eux. Ce pape excommunia le concile. Les pères de ce concile le déposèrent et nommèrent à sa place Amédée VIII, duc de Savoie, qui accepta la tiare et prit le nom de Félix V. Il paraît cependant que Bérenger, qui était resté attaché au concile de Bâle, se reconcilia avec Eugène et devint son partisan. Cet évêque ne faisait pas sa résidence à Périgueux, à cause des guerres anglaises qui désolaient le Périgord; il demeurait habituellement dans la prévoté de Beaumont, comme étant plus éloignée du théâtre des hostilités; il y mourut le 7 décembre 1347.

Je m'étonne que le P. Dupuy n'ait pas dit un seul mot de l'infâme condamnation de Jeanne d'Arc. Le procès de cette héroine et l'iniquité de ses juges ne sauraient jamais être trop flétrie. Les menées sourdes et ignobles des hommes pervers, se couvrant du manteau du zèle et de la piété pour op-

 

XIX

 

primer l'innocence, doivent être sans cesse dévoilées aux générations qui se succèdent. C'est la honte réservée aux méchans. La conduite de l'évêque Cauchon, de Beauvais, vivra aussi long-temps que son nom écrit dans annales de l'église, tandis que celle de sa victime conservera dans l'histoire la renommée la plus touchante et la plus pure. Aussi Jeanne d'Arc disait-elle à cet évêque: « Avisez bien de ce que dites être mon juge, car vous prenez une grande charge. » Mais le mensonge, l'hypocrisie, la perfidie, la haine et l'envie ne reculent jamais devant une accusation quelque absurde qu'elle puisse être, et Jeanne d'Arc fut brûlée. Sa mémoire fut réhabilitée en 1456, par une commission d'évêques nommée par le pape Calixte III. Cette justice ne lui rendit pas la vie.

 

(yy) Elie Servient et Pierre Durfort doivent être placés immédiatement après Pierre Tizon. Raimond Geoffroi et Bérenger sont une répétition de noms qui ne peuvent s'attacher à trois nouveaux évêques.

Elie Servient fut nommé évêque de Périgueux par le chapitre de cette cathédrale, dont il était archidiacre. Sa nomination fut confirmée par Clément VII le 24 octobre 1384. Il fit son entrée solennelle dans la ville épiscopale le 1er novembre 1385. Il mourut deux ans après, dans le château de Plazac, dépendant du temporel de son évêché. Il avait un frère, Raimond Servient, qui était prieur de l'église séculaire de Saint-Avit-Sénieur, dans le diocèse de Sarlat.

Pierre Durfort mourut en 1403, dans un voyage qu'il fit à Avignon pour solliciter auprès du pape Benoît XIII des indulgences pour quelques solennités de Saint-Front.

Ce n'est pas cet évêque qui est inhumé dans le mur du nord de l'égise de la Cité, ancienne cathédrale: c'est Pierre de Mimet. La forme des lettres de l'épitaphe ne laisse d'ailleurs aucun doute à ce sujet.

 

(zz) Elie de Bourdeilles avait vingt-sept ans quand le chapitre de Périgueux le nomma évêque de cette ville. Il obtint donc une dispense de trois ans, et non pas de six ans, comme l'affirme le P. Dupuy. Il est probable, en effet, que les deux chanoines, députés vers le pape, se seraient rendus coupables d'un mensonge qu'il était impossible de ne pas relever, et qu'Elie de Bourdeilles ne les aurait accompagnés que pour leur donner un démenti formel devant le pontife! Elie de Bourdeilles n'avait pas besoin de cette

 

XX

 

particularité pour paraître plus grand; à nos yeux, elle l'élèverait moins, car il pouvait refuser l'honneur qui lui était offert, ou du moins se dispenser d'accompagner les chanoines.

La dénonciation n'est plus dans nos moeurs, ni dans nos lois; elle flétrirait ses auteurs. La délation favorise quelquefois les intrigans, mais elle n'a jamais contribué à les rendre honorables, et si les délateurs sont écoutés de temps en temps, ils ne le sont le plus souvent que parce qu'ils cachent leurs mauvaises passions sous les dehors mensongers de la piété et du zèle.

La pierre tumulaire de l'abbé de Gain existe encore dans l'église de Cadouin. Quelques lettres de l'inscription commencent à s'effacer. Rappelant un fait historique, cette pierre, d'ailleurs respectable par sa destination, mérite d'être précieusement conservée. Elle sert aujourd'hui de marche-pied à un confessionnal.

 

(1) Radulfe, ou Raoul de Fou, était frère de Jean et d'Yves de Fou, conseillers et chambellans de Louis XI; il fut successivement abbé de Saint-Thierry de Reims, de Saint-Junien de Noaillé, de Saint-Taurin d'Evreux. Le pape Paul II le nomma à l'évêché de Périgueux le 8 juin 1468, il fut transféré à Angoulême le 6 juillet 1470 et à Evreux le 12 novembre 1479. Il mourut le 2 février 1510.

 

(2) Geofroi de Pompadour Ier, d'une ancienne maison du Limousin, était fils de Golfier, seigneur de Pompadour, et d'Isabeau de Comborn. Livré à l'étude des belles lettres dès ses plus tendres années, il fit, sous d'excellens maîtres, des progrès rapides. Il fut d'abord chantre et vicaire-général d'Evreux et archidiacre de Viviers, ensuite chanoine et comte de Lyon. Le 24 juillet 1465, il fut élu évêque d'Angoulême par les suffrages du chapitre et avec l'applaudissement universel de tous les habitans. Le 6 juillet 1470, il fut transféré à Périgueux, et le 15 mars 1486, au Puy en Velay; il fut conseiller d'état sous Louis XI et Charles VIII. Il fut accusé de trahison avec Georges d'Amboise, évêque de Montauban, et Philippe de Comines, pour avoir favorisé le duc d'Orléans, depuis Louis XII. Ce prélat resta deux ans en prison et fut ensuite mis en liberté sur la recommandation du pape. Il mourut le 8 mai 1514, à Paris, selon quelque-uns, et selon d'autres au château de Laurière, en Limousin. On dit qu'il fut le premier qui prit le titre de grand aumônier de France.

 

XXI

 

Gabriel Dumas était trésorier de la sainte chapelle de Bourges et abbé de Notre-Dame-des-Pierres, en Berry, quand il fut nommé à l'évêché de Périgueux, le 15 mars 1486. Il transigea avec la ville sur sa juridction. Il mourut dans le Berry, sa patrie, au commencement de juillet de l'année 1500.

Geofroi de Pompadour II, fils de Geofroi de Pompadour, seigneur de Château-Bourlet, et de Marguerite Lasteyrie, était archidiacre de Sarlat, notaire apostolique, conseiller du roi Louis XII et grand aumônier, quand sa nomination à l'évêché de Périgueux fut confirmée par le pape Alexandre VII, le 20 juillet 1500.

L'abandon de la pragmatique sanction par Louis XI, m'avait fait penser que Geofroi avait été nommé par le roi, et je l'avais écrit dans une notice historique des évêques de Périgueux; plusieurs lettres trouvées dans les archives de la mairie de cette ville prouvent le contraire. C'est un devoir de relever mon erreur. Voici les lettres écrites aux consuls par Louis XII; elles démontrent évidemment que la nomination des évêques de Périgueux appartenait au chapitre, et que Geofri lui dut la sienne:

 

« De par le Roy,

Chers et bien amez. Si toust que avons esté advertiz du trespas de feu vostre dernier évesque de Périgueux, et désirans de toute nostre affection que nostre amé et féal conseiller et grant aumosnier maistre Geoffroy de Pompadour soit pourveu dudit évesché, avons escript ja par deux foiz à ceulx du chappitre de ladite église et encores escripvons presentement par nostre amé et féal conseiller ordinaire en nostre grant conseil maistre Richard nepveu leur prions si très acertes que povons que nostredit grant aumosnier vueillent eslire en leur futur évesque. Et pour que avons ceste matière très à cuer, vous en avons bien aussi voulu escripre, à ce que de vostre part vous y vueillez employer et tenir la main envers lesdits de chappitre; Ainsi que vous dira de par nous ledit maistre Richard nepveu. Si le vueillez ainsi faire et qu'il n'y ayt faulte sur tant que désirez nous faire service. -- Donné à Lyon, ce XVIIIe jour de juillet. »

                                                                                                     Signé « Loys. »

                                                                                                     Et plus bas. « Cotereaux. »

 

Suscription: « A nos chers et bien amez les maire, consulz, bourgoys, manans et habitans de nostre ville de Périgueux. »

 

XXII

 

La lettre suivante a été publiée dans le journal patriotique de la Dordogne, 27 mars 1791.

 

Copie d'une lettre trouvée dans les archives de la municipalité de Périgueux.

 

« De par le Roy.

Chers et bien amés, comme dernièrement nous avons écrit par notre cher amé premier huissier de chambre Alabre de Saulpes, nous avons été bien averti que vous êtes employés en la matière d'élection de l'évêché de Périgueux en faveur de notre amé et féal conseiller et grand aumônier Geofroi de Pompadour, dont vous savons très bon gré, et vous en remercions, et pour ce qu'avons cette matière à coeur, nous croyons notre amé et féal conseiller et chambellan le sieur Pombrian, capitaine de Loche, lequel croirez et à lui ajouterez foi. Donné à Melun, le 1er jour de septembre. »

                                                                                                     Signé « Loys. »

                                                                                                     Et plus bas: « Catercal. »

 

Au dos est écrit: « A nos chers et loyaux les maires, bourgoys, manans et habitans de notre ville de Périgueux. »

Au bas est écrit: « Reçue le 9 septembre, l'an 1500. »

Cette lettre n'existe plus dans les archives de la mairie.

 

« De par le Roy.

Chers et bien amez, nous avons esté par plusieurs foiz advertiz comment, pour amour de nous, vous vous estes grandement employez en faveur de notre amé et féal conseiller et grant aumosnier l'évesque de Périgueux, mesmement derrenièrement, parce que ceulx que avyons envoyez de vers vous pour ceste cause quant sont venuz nous ont dit de bouche, dont vous savons bon gré et vous en remercyons. Vous advertissans que ne mectrons en obly le plaisir et service que en ce nous avez faiz et en aurons vous et les affaires de votre en bonne souvenance, vous priant tousiours avoir les affaires de notredit conseiller, votre évesque, en singulière recommandation

 

XXIII

 

de tout votre pouvoir, car les plaisirs que lui ferez les repputerons à nous faiz. Donné à Bloys, le XIIe jour d'octobre. »

                                                                                                     Signé « Loys. »

                                                                                                     Et plus bas: « Bourdin. »

 

Au dos est écrit: « A nos chers et bien amez les maire, bourgoys, manans et habitans de notre ville de Périgueux. »

 

Nous en citerons une autre qui prouve aussi combien Louis XII était affectionné à Geofroi de Pompadour:

 

« De par le Roy.

Nos amez et féaulx, nous avons ésté adverty que dès l'année passée aucuns lacais et autres gens se assemblèrent en Périgort à port d'armes et ravirent et enportèrent grant quantité de blez appartenant à notre amé et féal conseiller et grant aumosnier l'évesque de Périgueux; et pour ce que notre dit conseiller doute à cause que présentement nous en allons delà les mons que les dessusdits ou autres en vueillent autant faire ceste présente année, nous voulons et vous mandons bien expressement que si aucune assemblée se fait à l'encontre de notre dit grant ausmosnier, que vous y allez et les prenez ou faictes prendre et faictes si bonne justice de ceulx que trouverez y avoir esté en port d'armes, que ce soit exemple à tous autres. Et gardez que n'ayt faulte. Donné à Grenoble, le XXVIIe jour de juing. »

                                                                                                     Signé « Loys. »

                                                                                                     Et plus bas: « Le Charron. »

 

Au dos est écrit: « A nos amez et feaulx et bien amez les maire, consulz, manans et habitans de notre ville de Périgueux. »

 

Ce prélat mourut dans le mois de novembre, l'an 1511 ou 1514.

 

(3) Geofroi de Pompadour II mourut en l'an 1511 ou 1514; comment Jean d'Auriens pouvait-il lui succéder en 1504? La Gallia christiana est cependant de l'opinion du P. Dupuy; son erreur vient de ce qu'elle a con-

 

XXIV

 

fondu Geofroi II avec Geofroi Ier, qui, en effet, fut mis en prison. Au reste, si Jean d'Auriens fut évêque de Périgueux, ce qui n'est pas probable, il faudrait dire que Geofroi II donna sa démission, et nul document n'autorise cette supposition.

Voici ce qui aura donné lieu à la méprise du P. Dupuy et de la Gallia christiana: En 1540, et non pas en 1504, Jean Faure, évêque d'Auriens ou d'Aurens, sous l'archevêché d'Ephèse, en Asie, suffragant du cardinal de Gaddis, évêque de Sarlat, mit dans un nouveau reliquaire les ossemens de Saint-Léon ou Léonce, évêque de Périgueux. De cette particularité on en aura conclu qu'il était évêque de cette ville.

Guy de Castelnau, fils de Jean, baron de Castelnau, seigneur de Bretenoux, et de Marie, fille du maréchal de Culant, était licensié ès-droits, chanoine de Rodez et notaire apostolique, avant sa nomination à l'évêché de Périgueux. C'était un prélat distingué par sa piété et son savoir.

Jacques-Maurice de Castelnau, son parent, lui succéda. Il fut nommé par Adrien VI, à la demande de François Ier, le 22 décembre 1522. Il mourut le 10 avil de l'année suivante. Il était bachelier ès-décrets et avait été chanoine de Cahors.

 

(4) Jean de Plas était conseiller au grand conseil et avait prêté serment pour cette charge entre les mains du chancelier, le 11 mai 1508. Il permuta son évêché pour celui de Bazas et le prieuré de Leyrac, le 4 août 1531. Il se démit de ce dernier évêché, le 26 octobre 1534, en faveur d'Annet de Plas, son frère; il mourut au château de Plas et fut inhumé à Curemonte, dans le tombeau de ses ancêtres.

 

(5) Foulques de Bonneval, dont la mère était Marguerite de Foix, fut nommé par le roi à l'évêché de Limoges, vers l'an 1510. La possession lui en ayant été disputée par Barthon de Montbas, il passa successivement à Soissons, le 18 août 1514; à Bazas, le 1er juillet 1520, et enfin à Périgueux. Il fit son testament au Château-l'Evêque, le 7 juillet 1540, et mourut bientôt après.

Claude de Longwy, cardinal de Givry, était fils de Philippe, seigneur de Givry, et de Jeanne de Baufremont. Il fut aussi évêque de Poitiers et de Mâcon. Il administrait encore l'église de Périgueux le 8 juin 1541; mais il se démit bientôt après. Augustin de Trivulce lui succéda dans l'administra-

 

XXV

 

tion de l'évêché de Périgueux, par nomination du 27 août 1541. Dans tous ses actes, il prit toujours le titre d'évêque de ce siège, qu'il conserva jusqu'à sa mort, arrivée à Rome le 8 mars 1548. Il était fils de Jean, sénateur de Milan, et d'Angèle Martinengue. Il fut d'abord protonotaire apostolique, archiprêtre de Saint-Pierre de Rome, archevêque de Reggio, en Calabre, et revêtu de la pourpre romaine le 1er juillet 1517. Il est étonnant que la Gallia christiana l'ai passé sous silence.

 

(6) Ce fut le 2 avril 1549, et non pas le 24 juin 1550, que Jean de Lustrac fit son entrée solennelle dans Périgueux. L'acte de son entrée et de sa prestation de serment entre les mains de Bertrand Lambert, alors maire, est cité par l'auteur d'un manuscrit, comme l'ayant vu lui-même dans les archives de la maison de ville.

Les seigneurs de La Feuillade de Meymy furent les premiers qui introduisirent le protestantisme dans la ville de Périgueux. Deux chanoines de cette famille ayant embrassé le calvinisme, obligèrent Bertrand d'Ayes, leur frère aîné, de s'unir à eux. Ils entrainèrent ensuite le seigneur de Lardimalie et quelques autres de leurs parens et amis. Ils firent venir un ministre protestant. Ayant favorisé l'hérésie, ils donnèrent naissance à tous les désordres qui dans la suite affligèrent la ville.

Guy Bouchard d'Aubeterre, nommé à l'évêché de Périgueux par Henri II, reçut son institution canonique de Jules III, par une bulle datée du 7 décembre 1553. Avant sa prise de possession, il prêta le serment accoutumé entre les mains de François Tricard, maire de la ville. Le P. Dupuy, parlant d'une funeste catastrophe qu'il tait en mettant le doigt sur les lèvres, fait allusion à l'apostasie de cet évêque. Voici ce que nous lisons dans une note autographe écrite en 1720, sur la marge d'un exemplaire de l'Etat de l'église du Périgord, à la page 180: « Guy Bouchard, évêque, apostasia et en amena l'abbesse de Sainte-Claire de Périgueux à Genève, où ils se marièrent et menèrent une vie malheureuse. Le sieur Desplassons tire sont origine de ce Guy d'Aubeterre. »

Augustin de Trivulce ne succéda point à Guy de Bouchard. Ce cardinal administra le diocèse de Périgueux après Claude de Longwy. L'évêque qui fut désigné pour prendre soin de l'évêché après Guy d'Aubeterre, fut Antoine d'Apchon. Il resta peu de temps à Périgueux. Il n'est même pas cer-

 

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tain qu'il ait pris possession. Il se démit, en 1561, en faveur de Pierre Fournier.

 

(7) Le curé de Marsaneix, nommé Bertrand, et son frère durent roués et brûlés sur la place de la Clautre de Périgueux.

Le corps judiciaire de messieurs des grands jours qui vint s'établir momentanément à Périgueux, était composé de quinze conseillers du parlement de Bordeaux, dont voici les noms, deux exceptés que nous n'avons pu découvrir. Christophe de Muscadet, président; Jean Dalesme, Joseph de La Chassaigne, Guyonnet, Duduc, Sevin, Mérignac, Bernard Donacour, François Fayard, Pierre Merle, Jean Faure, Léon Faure, François Fabri, l'un des gens du roi. Quand les membres de cette cour se retirèrent, ils demandèrent une escorte pour s'en retourner en sûreté.

Mouvans et Gourde, attaqués par le comte de Brissac et le jeune duc de Guise, qui marchait déjà glorieusement sur les traces de ses aïeux, s'étaient retranchés dans Mensignac. Ils résistèrent vigoureusement et se maintinrent dans leurs retranchemens. Alors le duc de Guise et le comte de Brissac, pour attirer les calvinistes en rase campagne, feignirent de se retirer; Gourde et Mouvans ayant cru à leur départ simulé, abandonnèrent leur poste pour aller rejoindre le prince de Condé, qui se trouvait à Aubeterre. Mais à peine leur troupe fut-elle en vue du bois de Chantegeline, entre Mensignac et Saint-Apre, que les catholiques, qui s'étaient mis en embuscade derrière une colline, fondirent sur eux. Mouvans soutint courageusement les violentes attaques de Brissac; mais sa cavalerie se trouvant très fatiguée et affaiblie, Pierre Gourde, qui conduisait l'arrière-garde, crut devoir lui envoyer la sienne, pour qu'il put résister avec avantage.

De Guise et de Brissac s'étant aperçus de ce mouvement, firent charger aussitôt l'arrière-garde de l'ennemi, qui fut toute taillée en pièces, quoique Pierre Gourde se fût jeté dans le bois dit de Fayole, pour s'y sauver avec quelques débris. Son corps fut trouvé, dit un manuscrit, superbement vêtu après le combat, comme s'il eût été dans les mêmes sentimens que César, qui disait: « qu'il fallait se parer pour aller aux coups aussi bien que pour aller aux nopces. »

L'orage fondit ensuite sur Mouvans, qui vendit chèrement sa vie. Il fit des efforts prodigieux de valeur. Le ravin par lequel les catholiques l'attaquèrent fut jonché de cadavres. Il tua le jeune Lachâtre et le seigneur Dés, qui

 

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passaient pour les deux plus braves de leur armée: mais le jeune duc de Guise ayant porté le désordre dans le dernier bataillon des calvinistes, les poussa dans un bois, où le duc de Brissac acheva de les défaire. On ne retrouva point le corps de Mouvans.

Aussitôt que d'Acier eut appris cette défaite, il abandonna les environs de Saint-Astier, pour se rendre à Aubeterre, où l'attendait le prince de Condé.

Pierre Fournier avait quitté Château-l'Evêque, le 2 juin 1569, pour venir à Périgueux, où il était en plus grande sûreté. Les troubles ne s'appaisant point, il fit dans sa ville épiscopale un séjour de cinq ans. Croyant alors que le calme était rétabli, il retourna à Château-l'Evêque, malgré les observations de ceux qui lui étaient dévoués et qui prévoyaient ce qui lui arriva. Il paraît que cet évêque mourut victime d'un complot dont ses domestiques ne furent que les exécuteurs mercenaires. En effet, les meurtriers trouvèrent de puissans protecteurs et aucun d'eux ne fut puni; cependant la justice informa contre eux; ils furent mis à la conciergerie et allaient être condamnés, quand ils furent délivrés par les calvinistes, qui ne s'emparèrent de la ville que dans le but de les sauver, craignant qu'ils ne fissent quelques révélations qui auraient compromis quelques chefs de leur parti. La relation de la prise de Périgueux serait très curieuse à connaître, mais elle doit figurer ailleurs que dans des notes; nous la donnerons séparément plus tard.

 

(8) François de Bourdeilles, après sa prise de possession, à vue de clocher, se retira à Château-l'Evêque, que le seigneur de Pronsault avait défendu contre les attaques des protestans et lui avait conservé.

Langoiran s'étant déterminé à garder la ville sous sa dépendance, en devint le gouverneur. Alors il établit un conseil, pour l'aider à supporter le poids des affaires, et lui donna pour chefs, Saint-Vallier, ancien conseiller du parlement de Bordeaux, qui n'avait quitté sa charge que pour faire la guerre pour les protestans; Reymond Boucher, conseiller aussi audit parlement, dont le père était de Périgueux, et Bertrand Lambert, qui avait contribué puissament à la prise de la ville. Ces trois hommes firent divers règlemens qui achevèrent d'anéantir la religion catholique dans Périgueux et de ruiner ce que la fureur des trois journées avait épargné ou laissé échapper.

Les officiers royaux qui, après la prise de la ville, s'étaient éloignés, rentrèrent à Périgueux, l'année suivante, dans le mois de juin, à la faveur d'un

 

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édit de pacification avec les protestans. Plusieurs habitans les imitèrent, mais ils furent tellement maltraités, qu'après trois mois de persécution et de souffrance, ils furent forcés de s'échapper comme ils purent et de regagner la campagne, où les plus prudens étaient demeurés, pour ne pas s'exposer aux injures de leurs implacables ennemis.

Le roi de Navarre, avant son départ de Périgueux, ôta le gouvernement de la ville à Langoiran, pour le donner au vicomte de Turenne, alors âgé seulement de 20 ans, qui fut depuis duc de Bouillon. Il lui laissa quatre compagnies d'infanterie, lui donnant l'ordre de faire construire une citadelle, dont il fit jeter les fondemens dans la même année et à laquelle il fit travailler sans relache jusqu'à son entier achèvement. Cette forteresse s'étendait depuis la porte Mouchy jusqu'au dessous de la tour Mataguerre, se liait aux murs de la ville et allait aboutir à cette arcade, qui s'appelait alors la porte des Farges, dont la rue qui y aboutit retient encore le nom.

Cette citadelle achevée, le vicomte de Turenne, que la guerre appelait ailleurs, se retira; mais ce ne fut qu'après avoir achevé d'abattre l'église cathédrale et fait raser le palais épiscopal, que Langoiran avait épargné.

Avant de partir, il laissa pour gouverneur de Périgueux de Choupes Poitevin, homme assez doux, dont les catholiques n'eurent pas trop à se plaindre.

Peu de temps après cependant, la persécution recommença, et le présidial se retira à Saint-Astier avec le consentement de la cour et du parlement de Bordeaux. Ce fut à cette époque que Bertrand de Laporte, seigneur de Puyferrat, fut nommé gouverneur de cette ville pour protéger les officiers royaux et fournir aux justiciables les moyens d'arriver facilement jusqu'à eux. Trois conseillers cependant du présidial, Pierre Laulière, Pierre André et Gabriel de Gondin, natif de Sarlat, et les deux avocats du roi, Baptiste Vigouroux et François Pasquet, restèrent à Périgueux.

De Choupes abandonna le gouvernement de la ville; Geoffroi de Vivans le remplaça. Alors la persécution recommença au-dedans et au-dehors. Avant l'arrivée du nouveau gouverneur, les catholiques essayèrent de surprendre la ville pour s'en emparer. De Coutures, preux gentilhomme, de la maison de Saint-Aulaire, du côté paternel, et de celle de Bourdeilles, du côté maternel, fut le chef de cette entreprise, qui devint funeste pour la plupart de ceux qui y participèrent. Le frère de Coutures fut pris montant à l'assaut du fort. Plusieurs de ses complices ayant été pris aussi, furent passés au fil de

 

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l'épée, et, le lendemain, le maire, par sentence des juges qui étaient restés dans la ville, fit décapiter leurs cadavres pour exposer leurs têtes sur les remparts, à la vue de tout le monde.

Cette défaite n'abattit point le courage des catholiques; ils firent une nouvelle tentative, à la tête de laquelle se trouvaient de Coutures, de Trigonant, de Rognac, de Leymarie des Bories et d'Hautefort. Mais la trahison fit échouer leurs projets. Les deux Leymarie furent tués dans l'attaque, après une lutte courageuse, et les autres gentilshommes furent forcés de se retirer. Vivans, ne pouvant se venger autrement que sur des prisonniers, fit périr le frère de Coutures et le neveu du procureur du roi de Bordes, qu'il avait retenus dans les prisons depuis la première entreprise, en 1577. Ce massacre fut suivi, peu de temps après, de celui de cinq catholiques dont les protestans s'emparèrent. Ces cinq victimes furent François Alexandre, bourgeois et marchand; François Vigier, secrétaire de l'évêque; Elie de La Gaillote, archer du vice sénéchal; Jean Laurent et Elie Prugnol, armurier.

Les catholiques ne pouvant plus supporter les outrages dont ils étaient sans cesse l'objet, résolurent à tout prix de rentrer dans la ville et s'en rendre les maîtres. De Chillaud fut l'âme du complot avec Bourdeilles. Les premiers gentilshommes qui se joignirent à eux furent: de Chabans, de Labrangelie, Delort, de Trigonant, de Lamothe Saint-Privat, de Laforets et de la Roderie. Vinrent ensuite du Chastenet, des Farges Chabans, de Siorac, Lefraisse de Saint-Jean, et plusieurs bourgeois dont le courage fut digne des plus grands éloges. Presque toute la noblesse des environs participa aussi à cette entreprise, et surtout les MM. de Montardy. La ville ayant été prise, le premier soin des vainqueurs fut de remercier Dieu et consacrer à jamais le jour de leur victoire par une fête que les maire et consuls firent célébrer religieusement tous les ans, le jour de Sainte Anne, jusqu'en 1793, époque où cette fête cessa d'être obligatoire.

 

(9) L'épiscopat de Jean Martin n'offre par lui-même rien de très remarquable; à la vérité, ce prélat convoqua un synode, qu'il tint dans l'église de Saint-Front le 18 avril 1602; quelques communautés relevèrent aussi leur couvent, et la discipline ecclésiastique reprit une nouvelle vie; mais de son temps fut interrompue l'unité religieuse, à laquelle la France se trouvait soumise depuis plusieurs siècles, et pour la première fois, depuis Clovis, on proclama cette tolérance que Louis XIV voulut détruire et qu'une sanglante

 

XXX

 

révolution a ramené pour long-temps. La ligue, pour repousser Henri IV, avait répandu partout les doctrines de la souveraineté populaire. Les chaires parlaient sans cesse du droit imprescriptible du peuple d'éloigner du trône un ennemi de sa religion et de ses lois. « Les assemblées des états, disait Jean Boucher dans l'un de ses sermons, possèdent le pouvoir public et la majesté suprême, la puissance de lier et de délier, la souveraineté inaliénable: le prince procède du peuple, non par nécessité et par violence, mais par élection libre. »

Les protestans, au contraire, étaient pour le droit divin. « Dieu seul impose les rois à la race humaine, disaient-ils; il faut recevoir le souverain que Dieu envoie, fût-il hérétique et tyran; jamais un peuple ne peut dépouiller un prince de ses droits. » La france religieuse se trouvait divisée en deux camps opposés; la force était imposante de part et d'autre; par induction des principes même de la ligue, un prince ne pouvait prescrire une croyance à son peuple; Henri IV se vît donc forcé d'accorder aux huguenots la liberté de conscience, avec l'exercice public du culte réformé.

Ce fut un grand évènement; c'est de cette époque que date la liberté des cultes, qui naquit de la guerre civile et qu'on ne pourrait détruire aujourd'hui sans s'exposer à de nouveaux malheurs.

 

(10) F.B. L’abbé Audierne n’a pas écrit de note concernant François de la Béraudière.

 

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