Source : Bulletin SHAP, tome XXVI (1899), pp.
285-358 & 424-488 (extraits).
RECHERCHES SUR LE
COUVENT ET LE BOURG DE SAINT-PARDOUX-LA-RIVIÈRE [1].
I.
LE
COUVENT.
Au point où la Dronne
abandonne les rochers granitiques du Limousin qui barrent sa route à chaque pas
et forment de si pittoresques, mais sauvages paysages, pour se transfigurer en
une paisible rivière coulant à pleins bords, et où les coteaux, qui, jusque-là,
l'enserrent étroitement, s'écartent de ses rives pour donner naissance à l'une
des plus belles et riantes vallées du Périgord, s'étale, presque correctement
aligné, le bourg de Saint-Pardoux-la-Rivière[2] d'où la vue s'étendait autrefois
sur la campagne environnante; aujourd'hui placé au fond d'un entonnoir, barrée
qu'est cette vallée par-un immense et obsédant remblai, jeté là de par la
volonté utilitaire, mais peu esthétique, des ingénieurs du chemin de fer ;
remblai interrompu, il est vrai, par un élégant viaduc dont les quatre arches
enjambent hardiment la rivière, la roule et la voie du tramway.
Ce bourg porte
le nom d'un personnage dont le culte était très répandu en Limousin dès le xiiie
siècle : saint Pardoux né vers 657 à Sardent, village du diocèse de Limoges,
fut promu en 687 à la direction du monastère de Garactum (Guéret), où il mourut le 6 octobre 787. Il fut inhumé dans
l'église de Saint-Aubin de cette ville qui jusqu'à la Révolution conserva ses
reliques dans une curieuse châsse d'ivoire dont un fragment figure au musée de
Guéret.
Plusieurs vies
anciennes de saint Pardoux existent à la Bibliothèque nationale et mentionnent
les miracles qui lui furent attribués : guérison d'aveugles et de paralytiques,
délivrance de possédées, défaite des Sarrazins[3], etc. ; mais ni les unes, ni les autres ne donnent la moindre
indication sur les causes qui firent adopter à notre bourg le patronage de ce
saint. Il existe bien aux environs une fontaine dite de Saint-Pardoux,
mentionnée dès 1318, mais les traditions qui s'y rattachaient sont perdues.
Il est
vraisemblable d'admettre que le groupement d'habitants qui s'était constitué en
ce point, — l'origine de la vallée fertile de la Dronne, — se mit sous la
protection du saint limousin[4] et lui éleva une église dont le
vocable fut pris pour le nom du village ; plus tard, pour le distinguer des
nombreux bourgs du même nom, on ajouta les mots la Rivière, et on disait en latin, Sanctus Pardulphus de Ripariâ[5].
À la fin du XIIIe
siècle, la fondation d'un couvent de l'ordre des Dominicaines vint accroître
l'importance de cette petite paroisse rurale : pendant six siècles, ce monastère fut pour le
bourg une source de profits de toute sorte ; aussi les religieuses
étaient-elles fort aimées et considérées[6]. Rien ne
saurait mieux en donner une idée que l'expression de nos dames dont les villageois se servaient
pour lés désigner dans la conversation. En maintes circonstances, ils
n'hésitèrent pas à prendre parti pour elles dans des conflits soulevés avec
l'autorité civile ou ecclésiastique, quitte dépendant à leur intenter dés
procès au sujet de la perception des dîmes ou de l’exercice du droit de four
banal.
Cet ordre de
Dominicaines avait pour fondateur saint Dominique de Guzman, moine espagnol, né
à Carlange, dans la vieille Castille, l’an 1170. Ayant reçu du pape Innocent
III l'autorisation
de prêcher les Albigeois, il vint en France où il se conduisit avec tant de
zèle et de prudence qu'il fut nommé inquisiteur en Languedoc.
.Ce l'ut alors
qu'en 1206 il institua à Frouille, entre Carcassonne et Toulouse, un couvent de
filles auxquelles il donna la règle de Saint-Augustin avec quelques
modifications. De là ces religieuses se répandirent en France, Italie, Espagne
et Portugal, si bien qu'au siècle dernier, elles possédaient 45 maisons en
France et un grand nombre à l'étranger[7].
A l'origine, cet
ordre n'admettait que des filles nobles issues d'un mariage légitime, tout au
moins pour les religieuses de chœur. Leur habit consistait en une robe blanche
avec chape tannée et voile noir; en hiver, elles pouvaient porter trois
tuniques avec une pelisse, ou quatre, sans pelisse.
Elles ne
pouvaient manger de viande qu'en état de maladie, devaient porter des chemises
de serge, dormir sur des paillasses et consacrer leur temps à la prière et à la
méditation, en filant la laine et le lin.
D'après.les constitutions de l'ordre, leurs couvents
devaient être construits sans faste — mediocres
domos et humiles ; — par suite
les peintures et les sculptures qui « déforment la pauvreté », en étaient
proscrites. Il leur était interdit aussi d'avoir plus d'une cloche; de même
qu'il ne leur était pas permis d'accompagner leurs chants avec des instruments
de musique : l'usage des orgues ne fut toléré qu'en 1515.
L'église était
divisée en deux parties: l'une ouverte aux parents des sœurs ; l'autre,
consacrée à celles-ci, était entièrement entourée d'un grillage percé d'une
ouverture de la largeur d'une palme par où la communion leur était donnée. . En
1601, le pape Clément VIII réglementant les réceptions au parloir, ordonnait
que celui-ci serait garni de deux grilles distantes de deux mains, et composées
de barreaux de fer entrelacés et ne laissant entre eux qu'un espace de deux
doigts ; deux religieuses voilées devaient assister aux visites.
Les punitions
étaient dans l'ordre progressif : privation de la voix haute (vox activa), de la voix basse (vox
passiva), des
divers offices, des sacrements, enfin l'excommunication. La sœur qui ne
chantait pas dans le ton suivi par ses compagnes était punie de huit jours de
voix basse[8].
En raison de
l'origine des religieuses, cette règle sévère ne fut pas partout observée et,
au XVIe siècle, presque tous les couvents de cet ordre étaient tombés
dans un relâchement extrême : à Aix, monastère fondé par Charles II, roi de
Sicile, elles accommodaient l'habit religieux aux modes du temps ; une gravure
ancienne nous les représente portant un vêtement blanc avec un scapulaire de la
grandeur d'un tablier; derrière leur coiffure, savamment édifiée, est jeté en
guise de voile un petit morceau de crêpe; la robe drapée d'une façon fort
gracieuse, largement décolletée, relevée derrière en pouf, est garnie dans le
bas d'un haut volant : costume d'un goût parfait que les élégantes du temps
n'auraient pas désavoué. Une gravure de la même époque nous montre une
religieuse de Montfleury, en habit d'hiver : robe blanche recouverte d'un
manteau noir descendant jusqu'à mi-jambe, ouvert par devant et bordé de deux larges
bandes d'hermine ; une pointe noire, comme les veuves en portaient jadis, tombe
sur le front[9].
Nous verrons
plus loin que le monastère de Saint-Pardoux ne fut point à l'abri de ces
écarts.
A la fin du XIIIe
siècle, la règle imposée par saint Dominique était encore suivie dans toute sa
rigueur, et les religieuses jouissaient d'un légitime renom d'austérité et de
vertu ; elles étaient particulièrement estimées en Limousin et en Périgord où
l'ordre des Dominicains, fondé par le même religieux, possédait déjà plusieurs
couvents.
Le Limousin,
dont faisait alors partie Saint-Pardoux, était depuis 1263 sous le gouvernement
de Marguerite de Bourgogne : fille du duc Hugues IV et de Yolande de Dreux,
celle-ci avait épousé Gui VI, vicomte de Limoges, décédé à Brantôme en 1263, en
revenant d’assiéger le château de Bourdeille.
Gui ne laissant
qu'une fille âgée de trois ans, Marguerite dut prendre le gouvernement du
comté; c'était, écrit Marvaud, une femme hautaine et ambitieuse, aussi
implacable dans ses ressentiments que hardie dans l’exécution de ses desseins.
Bientôt sa dureté souleva contre elle tous les habitants de la vicomté, en
particulier les bourgeois de Limoges qu'elle accablait d'exactions. En 1270,
ceux-ci, ayant obtenu des secours du roi de France, secouèrent le joug et
chassèrent l'impérieuse vicomtesse qui dut se retirer avec ses troupes à Aixe
et Chalusset ; « alors cette femme que la haine ne laissait plus dormir,
courant çà et là dans le Limousin, chercher armes et gens de guerre, toujours à
cheval comme un homme de bataille, criant, vociférant contre les bourgeois,
fortifia les garnisons de ses châteaux d'Aixe et de Châlus et ordonna aux siens
de piller partout les propriétés des bourgeois[10]. »
La vicomtesse
avait auprès d'elle, comme instrument de ses vengeances, un seigneur du nom de
Gérard de Maumont, homme cruel et astucieux, qui, par ses bassesses et ses
flatteries, avait su capter sa confiance et s'était fait nommer gouverneur de
Limoges. Pour être agréable à sa maîtresse, il profita d'une absence de
celle-ci, pour, de concert avec son frère, Elie de Maumont, doyen de
Saint-Yrieix, annuler de sa propre autorité toutes les franchises précédemment
accordées par Marguerite aux bourgeois qui avaient fait leur soumission. La
vicomtesse le récompensa de ce coup d'audace, en le nommant gouverneur du
Limousin et en le comblant de présents.
Enfin Marguerite
mourut[11]. La nouvelle de sa mort lut
accueillie avec joie par tous Les habitants du pays qu'elle avait opprimés
pendant de longues années ; maintes légendes ont porté jusqu'à nous le triste
renom de Marguerite l’enragée, que ses compatriotes surnommèrent
la vicomtesse-reine.
Marguerite fut,
jusqu'au delà de la mort, l'incarnation la plus parfaite de ces temps féodaux
où le seigneur, après avoir pillé indistinctement amis et ennemis, sans même
respecter les biens de l'Eglise, se recueillait au seuil de l'autre vie, et,
pour des fondations pieuses, instituait cette même Eglise légataire d'une
grande partie de ses biens que fréquemment ses successibles, malgré les
formules d'anathème insérées dans les actes contre les usurpateurs, ne se
faisaient aucun scrupule de conserver.
Four racheter
ces cruautés, la vicomtesse, par son testament qui ne nous est point parvenu,
témoigna le désir de faire établir une communauté de Dominicaines au bourg de
Saint-Pardoux qui lui appartenait : Gérard de Maumont, son exécuteur
testamentaire, fut chargé de réaliser son désir.
Gérard, raconte le chroniqueur
limousin, Bernard Gui[12], historien de l'ordre de
Saint-Dominique et contemporain de ces faits, s'employa de tout son pouvoir et
exécuter les dernières volontés de sa bienfaitrice et, suivant ses intentions,
fit construire[13] un monastère qu'il dota de rentes
et de la haute justice de Saint-Pardoux.
Vers la fête de Sainte-Agnès
(21 janvier), étant à Paris, il offrit ce nouvel établissement à l'ordre de
Saint-Dominique représenté par frère Guillaume Aurelie et Bernard de Bertrand,
en présence du roi Philippe, qui, sur la prière de Gérard, accorda des lettres
de sauvegarde à ce monastère le plaçant sous l'autorité royale, à charge de
prières pour lui et ses successeurs. Ces lettres furent octroyées à Melun au
mois de février suivant, 1292 (n. st.)
Cette donation
fut acceptée au chapitre provincial tenu à Brive le jour de l'Assomption 1292
par Raymond Extranei[14], vicaire de la province, la charge
de provincial étant alors vacante, et par quatre définiteurs : Raymond d'Hunald[15], prieur de Toulouse; Odon de
Gausencio, prieur de Montpellier, Guiran, prieur de Marseille, et frère Jean
Vigoreux. Pour rendre cette donation irrévocable, Gérard la renouvela
solennellement au maître de l'ordre, Etienne Bisuntinum[16], le dimanche des Rameaux, dans le
couvent des Dominicains de Paris, en présence de nombreux frères, parmi
lesquels se trouvaient cinq maîtres en théologie, neuf bacheliers, Guillaume
Aurelie, et Gérard de Bremont, du couvent de Périgueux, spécialement délégués
pour terminer les négociations. Sur le champ, le maitre de l'ordre, du
consentement des religieux présents et sur les nouvelles instances de Gérard de
Maumont, manda aux religieuses de Prouille, d'avoir à envoyer quelques-unes des
leurs pour occuper le nouveau monastère de Saint-Pardoux, et un accord fut
conclu entre Gérard et Etienne Bisuntinum le samedi avant la Toussaint 1292.
Gérard, que les
chroniques nous représentent comme « un grand et puissant tyran qui prenoit à
dextre et à senestre »[17] profita de ce qu'il tenait en sa
main les biens destinés par Marguerite pour la dotation du couvent, et de sa
toute puissance comme clerc du roi de France, pour s'en approprier une partie,
et il sut amener le maître de l'ordre à donner son assentiment à ses
usurpations.
Par l'accord
dont nous venons de parler, Gérard déclare bien délivrer à l'ordre de
Saint-Dominique le couvent qu'il a fait construire, le bourg et la paroisse de
Saint-Pardoux, tels que les tenait le vicomte et lui-même après le décès de la
vicomtesse, sous réserve d'une rente de 12 livres données par celle ci aux
Cordeliers de Nontron, et lui assigne comme dotation les terres acquises par la
vicomtesse, de Raymond de Saint-Martin[18], la manse de la Bleynie, paroisse
de St-Front la-Rivière, et la manse de la Roussie, paroisse de
St-Martin-le-Peint ; mais reprenant d'une main ce qu'il abandonne de l'autre,
il exige du maître de l'ordre d'immenses concessions : celui-ci consent à le
laisser en possession du fort de Saint-Pardoux au-dessous duquel est construite
l'église paroissiale, entouré de murs et de fossés avec toutes les terres sises
à l'entour qui n'étaient ni la propriété de l'église, ni celle des particuliers
; il lui reconnaît la haute etl basse justice sur ce fort et ses dépendances,
l'appel de la justice du bourg et de la paroisse ; le droit de conserver les
vignes qu'il avait fait planter sur ce même territoire, du côté de Châlus, avec
la faculté d'en établir de nouvelles ; d'acheter des terres; d'y construire des
maisons et d'exercer sur ces biens les droits de haute justice.
Le maître de l'ordre
s'engageait en outre, au nom de ses religieuses, à faire célébrer une messe
chaque jour de l'an par un frère dominicain pour le repos de l'âme de la
vicomtesse, de son mari, de ses parents et bienfaiteurs ; plus quatre
anniversaires solennels pour la fondatrice : le premier le lendemain de la
conversion de Saint-Paul (27 janvier) ; le deuxième, le lendemain de la fête de
Saint-Marc, évangéliste, le troisième, la veille de la Sainte-Marguerite (19
juillet) et le quatrième la veille de la Saint-Luc (18 octobre).
Pour lui, Gérard
obtint une messe quotidienne jusqu'à sa mort et après celle-ci, une messe des
défunts dite chaque jour pour le repos de son âme, de ses parents et
bienfaiteurs. De plus les religieuses étaient tenues de prier chaque jour en
chapitre pour la vicomtesse, son mari, Gérard et les leurs. Enfin le maître de
l'ordre consentit à admettre, à chaque mutation du seigneur de Châlus, une
religieuse présentée par le nouveau possesseur. Pour plus grande confirmation
de tous ces accords, Gérard apposa son sceau au pied de l'acte ; l'empreinte en
cire verte présentait un écu fascé[19].
Tout étant ainsi réglé, six
religieuses furent envoyées du monastère de Prouille ; elles arrivèrent à
Saint-Pardoux le 9 des kalendes de juin (29 mai) 1293, jour de la Trinité, qui,
cette année-là, coïncidait avec la fête de la Translation de Saint-Dominique :
une foule immense composée du peuple, des prêtres et des nobles du pays tout
entier, au milieu desquels se distinguait Gérard, versant d'abondantes larmes
d'allégresse, se porta au devant d'elles et les accompagna en grande pompe au
monastère en chantant des cantiques et des actions de grâce, avec maintes
démonstrations de joie. Ces religieuses se nommaient : Fine d'Aragon, Elisabeth
de Saves, Agnès de Bechevena, Beatrix de Bethesi et Claire Davine ; celle-ci
dans la suite retourna à Prouille[20].
Fine d'Aragon
leur fut donnée comme première prieure ; à côté d'elle on plaça un prieur
syndic chargé de s'occuper des intérêts matériels de la communauté et élu par
celle-ci : le premier prieur fut Guillaume Aurélie qui avait été délégué par
l'ordre pour accepter la fondation de Marguerite de Bourgogne. La durée de
cette charge, d'abord fixée à un an, fut ensuite portée à trois ans ; le prieur
était indéfiniment rééligible.
Guillaume
Aurélie, à l'expiration de ses fonctions, fut nommé prieur du couvent des
Frères Prêcheurs de Périgueux et remplacé par Armand de Monte Agrario ; son
successeur, Raymond de Curamonte, reçut l'investiture de Fr. Pierre de Godin,
prieur provincial, l'an 1303[21].
La fondation et
les origines de ce couvent ainsi retracées nous donnerons sous le nom de chaque
prieure, pour utiliser d'une façon plus complète le résultat de nos recherches,
les divers faits que nous avons recueillis sur cet établissement.
FINE D'ARAGON, la première prieure,
appartenait sans doute à la famille royale de ce nom qui possédait alors en
France le comté de Roussillon et la seigneurie de Montpellier dont Prouille,
berceau de notre ordre, était fort proche[22].
L'année de la
fondation, le vigier, qui gouvernait le château pour Gérard, fit recevoir sa
fille, Pétronille Seguin, comme religieuse.
Peu de temps
après, la communauté fut augmentée par l'arrivée de six autres religieuses :
quatre venaient encore de Prouille, Marguerite Dardine, Elisabeth Vesine, Agnès
de Bethesi et Bertrande d'Escayrac; les deux autres, qui avaient reçu leur
éducation religieuse au même monastère, venaient de Pontvert[23] : Sereine d'Escayrac, sœur de
Bertrande, et Azema Froment de Martel.
En 1295 l'église du couvent reçut
la sépulture d'Elie de Maumont, doyen de St-Yrieix, frère du fondateur, qui,
décédé à Paris vers la fête des Rameaux 1294 (v. st.), avait d'abord été inhumé
dans le couvent des Dominicains de cette ville[24].
Gérard lui-même
étant mort au château de Châlus dont il était seigneur, la veille de la
Nativité de la Vierge (7 septembre) 1299, son corps fut apporté à Saint-Pardoux
et enterré, selon son désir, dans l'église des religieuses, en grand appareil,
le troisième jour après son décès[25].
Sur le testament
d'Adhémar Seguin, qui, le 27 avril 1303, faisait une donation au couvent,
figure le sceau d'Armand de la Brandie, prieur du couvent de Saint-Pardoux:
l'empreinte en cire brune de forme ovale (35mm sur 24mm) porte, sous une arcade ogivale, la
Vierge couronnée à mi corps, l'Enfant à sa gauche ; plus bas sous un arc de
même forme, un moine tourné à droite, à genoux, les mains jointes. Autour se
lit la légende :
....IORIS DE SCO
PAR.. LPHO -ORA P. MICH.
Sigillum prioris de Sancto
Pardulpho ; ora pro michi [26].
SEREINE
D'ESCAYRAC, prieure en 1307, l'une des religieuses venue de Prouille, succéda à
Fine d'Aragon. Elle pouvait être la fille de Bertrand d'Escayrac, vivant en
1267, et de sa seconde femme, Sereine de Saint-Privat,
Son obiit figurait
à la date du 23 février dans un nécrologe qui existait encore au siècle dernier
aux archives du couvent, où il fut consulté par l'abbé Nadaud. Des notes que
celui-ci a laissées[27], il résulte que ce nécrologe était
une sorte de calendrier contenant une vie des saints pour chaque jour de
l'année : quand un décès ou un événement notable se produisait, les religieuses
l'inscrivaient en marge de ce calendrier, en face du jour correspondant ; mais
dans la plupart des cas le millésime de l'année était omis.
C'est,
croyons-nous, un fragment de ce calendrier que nous avons retrouvé à Saint
Pardoux : il consiste en une double feuille de parchemin contenant, d'une
écriture du xive siècle, les vies des saints pour
les 8e, 7e, 6e, 5e et 4e
jours des ides de mai (8 au 12 mai); les lettrines sont dorées sur fond rouge
et bleu ; les rubriques tracées à l'encre rouge. En marge se trouvent
mentionnés des obiit et des anniversaires, les uns d'une écriture du XVe
siècle, les autres écrits au XVIIIe; ces derniers sont presqu'entièrement
effacés[28].
BEATRIX
DE BELHES figurait dans le nécrologe comme prieure ; il y a sans doute identité
entre elle et la prieure qui est désignée sous le nom de BESTRICT dans une
copie faite au XVe siècle d'un important accord conclu en 1318 entre
l'ordre des Dominicaines et le vicomte de Limoges, qui, devenu possesseur de la
seigneurie de Saint-Pardoux, s'était emparé, à la faveur des guerres, de la
haute justice et de divers droits en dépendant.
Cet accord fut
passé en janvier 1318 entre Jean de Bretagne, vicomte de Limoges, et Isabelle
de Castille, sa femme, d’une part ; frère Hugues, provincial des Dominicains
pour la province de Toulouse, Helie de Planis, prieur de Saint-Pardoux et la
prieure Bestrict, d'autre part. Le vicomte fit reconnaître son usurpation et ne
laissa au couvent que la justice moyenne et basse sur le bourg et un territoire
délimité du côté de Milhac et de Chaumeil, par la Dronne ; du côté du
monastère, par la croix de la Môle et du côté du mainement de l'Age par la
croix de la fontaine de Saint-Pardoux .
Dans l'étendue
de ce territoire bien restreint, à l'intérieur des clôtures du couvent
et dans les manses en dépendant sis dans la paroisse, le couvent pouvait
connaître des causes dont l'amende ne dépassait pas 60 sous et un denier, et en
cas de condamnation cette amende lui appartenait.
Il avait droit
de tenir prison dans le bourg et dans sa manse de Nieul, et pouvait nommer
prévôts, juges, greffiers et gardes avec faculté de tenir audience. Il
conservait le droit de donner mesure à blé, à huile, à sel et à vin et les
profits qui pouvaient en découler, mais cependant, jusqu'à concurrence de 60
sous et un denier.
Il fut aussi
convenu que les appels de ses jugements ressortiraient au château de Nontron
qui était la propriété du vicomte. Celui-ci lui reconnaît les droits de four
banal, d'estang de vin[29] et celui de lever annuellement 13
livres de taille et 100 sous de commestion sur les habitants du bourg.
Le vicomte et la
vicomtesse restent en possession de la haute justice du bourg et de la paroisse
avec tous les droits, prééminences et émoluments qui y sont attachés. Ils
consentent en outre à ne pas empêcher leurs vassaux de faire moudre leur blé
aux moulins du monastère, tant qu'ils n'auront pas fait édifier de moulins
banaux dans les paroisses de Saint-Pardoux et Saint-Front-la-Rivière. Enfin ils
confirment les possessions du couvent dans la vicomté de Limoges, lui donnant
la faculté d'acquérir dans tous leurs fiefs, réservé le droit de leurs vassaux,
sans payer de droits féodaux, mais sans que toutefois la valeur des biens
acquis puisse dépasser 30 livres. Les religieuses reconnaissent le duc et la
duchesse pour leurs seigneurs temporels.
Puis les
parties, tant pour elles que pour leurs successeurs, leurs hommes et officiers,
se remettent réciproquement leurs injures, insultes, forfaits, excès et
dommages qu'ils ont pu se faire; en témoin de quoi le vicomte et la vicomtesse,
le provincial, le prieur et la prieure apposèrent leurs sceaux au pied de
l'acte ainsi que celui du couvent[30].
Ce même prieur,
Hélie de Planis, passait une transaction le mardi avant la fête de Saint
Georges 1320, avec Gui Flamenc, seigneur en partie de Bruzac, qui devait au
couvent une rente de 100 sols pour Almoize et ses autres sœurs défuntes, reçues
autrefois comme religieuses au couvent : Flamenc ne reconnut devoir que 90 sous
qu'il assigna sur le mainement de la Faye, paroisse de Champagnac, sur celui de
Bionnac, paroisse de Saint Front et sur celui de la Rosselie. Le prieur fit en
même temps reconnaître la promesse faite par Gui, dès le lundi avant la
Saint-Martin d'hiver 1317, en présence d'Hélie Malet, Imbert de Nanteuilh,
clerc, et Hélie de Buyn, de donner une rente de 20 sous pour fonder son
anniversaire.
A défaut de
renseignements nous placerons ici trois prieures dont nous ne connaissons que
les noms[31]: AGNÈS DE BETHESI, une des
religieuses venues de Prouille, décédée le 1er décembre ; RICHEFINE ou RICHELINE
dont l'anniversaire était célébré le 6 mars, et AGNÈS dont l'obiit était
inscrit à la date du 30 avril.
C'est
probablement sous l'une d'elles que fut rendu par le juge de la vicomté de
Limoges, le jugement suivant sur des difficultés qui s'étaient élevées entre le
prieur et les paroissiens de Saint-Front et de Saint-Pardoux, que celui-ci
voulait contraindre à moudre leur blé aux moulins du monastère comme l'accord
de 1318 l'avait décidé provisoirement :
Nos judei vicecomitatus Lemovicensis, notum
facimus universis quod, cum Guillelmus Johannis, serviens de nostro territorio,
citasset ad presentes asisias de nostro territorio, quod plures homines
parrochianos burgorum Sanctorum Frontonis et Perdulphi de Riperia super factis
quod moluerant blada sua ad alia molendina quod ad molendinum quod dominus
vicecomes habet prope Sanctum Frontonem de Ripperia, cum diceret dictos
parrochianos teneri blada sua molere ad dictum molendinum de statuto regni
Francie, venerabili religiosoque viro priore Sancti Perdulphi de Ripperia
opponente, se ad praemissa pro se et priorissa et conventu dicti loci et
dicente se habere privilegium a domino duce Britannie vice-comiteque
Lemovicensi quod nullus inpediretur per gentes suas quod posset molere bladum
suum ad molendina dicti religiosi que sunt apud Sanctum Perdulphium et Ponbao
ut circa et facta nobis fide de dicto privilegio per litteras magno sigillo
dicti domini sigillatas confectas super compositione facto olim inter ipsum
dominum, ex una parte, et dictum priorem et priorissam dicti loci, ex altera.
Nos nolentes in aliquo decurtare privilegio dicto yminus (?) ipsum prout
expedit pocius observare, inhibemus tenore presentium preposito et serviente de
nostro territorio et cuilibet in sedis ne de cetero dictos parrochianos seu
quovis alios inpediant seu perturbent quominus possint molere blada sua ad
molendina prioris et priorisse predictorum, prout asueverunt facere temporibus
retroactis, exceptis dumtaxat hominibus talhabilibus domini supradicti. Datum
in assisias de nostro territorio die lune post diem dominicam qua cantatur Judica me, anno domini M.CCC° XX°. quinto.
MARGUERITE
VIGIER DE HAUTECORNE (de
Alto Cornu) fut,
d'après l'obituaire, la sixième prieure : elle était sans doute proche parente
de Catherine Vigier entrée au couvent en 1324, à qui son père Jehan Vigier,
chevalier, seigneur de Hautecorne, avait constitué en dot une rente de 30 sols.
Suivant une
pièce très mutilée du 7 des ides de novembre 13..7, le prieur Hélie de Julien
et la prieure ...igeria accensaient à Pétronille de
Planande une maison et des dépendances dans la paroisse d'Antonne, moyennant
une émine de froment et 12 deniers.
Le 5 juin 1344, la prieure RICARDE DE LA BRANDE accordait
l'investiture au prieur Pierre Darchier pour des rentes sises dans la paroisse
da Quinsac. Le même jour, elle abandonnait au monastère les dîmes qui lui
appartenaient sur le fief donné au couvent par Raymond Eyraud, à charge d'un
anniversaire.
Parmi les
donations les plus importantes faites aux religieuses vers ce temps, nous
mentionnerons celle consentie par Seguin de Neuil le mercredi après le dimanche
où l'on chante Oculi mei 1324 par laquelle il abandonne tous
ses biens, le repaire de Neuil, rentes, revenus, moulins, acaptes, tailles,
vassaux en dépendant, sa maison de Saint-Pardoux, son colombier et sa forêt ;
la fondation par Guillaume Mallet, le jeudi après l'octave de Pâques 1347, de
quatre obiits et de quatre grand'messes pour la célébration desquels il concéda
12 setiers de froment ; le testament d'Hélie de la Roche, vicaire perpétuel de
Saint-Pardoux, daté du lundi après la Nativité 1822 par lequel il donne une émine
de froment de rente pour la fondation d'un obiit.
En l'an 1342,
les religieuses augmentèrent les droits que leur payaient les habitants et les
fixèrent à 5 sols par feu.
FINE BRUNE DE
CHAMPNIERS succéda à la précédente prieure; le lundi jour de l'Exaltation de la
Ste-Croix (14 sep.) 1351, elle recevait, avec le prieur Hélie
Darchier, la ratification par divers paroissiens de Quinsac de plusieurs
contrats qu'ils avaient consentis au profit du monastère ; elle était encore
prieure l'année suivante.
Le lundi fête de
Saint Laurent 1360, Jean de Laurière, faisait donation au couvent de tous ses
biens sous réserve de la moitié de ses revenus pendant sa vie et de l'autre
moitié pendant celle d'Adhémar Jaucelin, prieur ; il donnait en même temps une
rente de blé aux Dominicains de Périgueux pour la fondation d'un anniversaire
le jour de Saint-Michel. En retour, il se réservait la faculté d'habiter le
couvent de Saint-Pardoux, en habit régulier ou séculier, à son choix, et d'y
finir ses jours. Par acte du 29 novembre 1362, sa soeur, Esclarmonde, veuve
d'Hélie de la Borie, fit don à ce môme couvent de sa personne et de tous ses
biens, sous la réserve de sa nourriture et de son entretien, à charge pour le
couvent de la faire ensevelir honorablement[32].
Pendant les
guerres anglaises, le monastère eut fort à souffrir des incursions ennemies qui
ravagèrent tant les environs de Nontron que les contrées voisines. Pour aider
les religieuses à relever le couvent de ses ruines, le pape Clément VI, unit au
prieuré, à leur sollicitation, la vicairie perpétuelle ou cure de
Saint-Pardoux, d'un revenu annuel de 50 livres, à condition de payer au vicaire une portion congrue
de 50 livres. La bulle qui constate cette
union est du jour des calendes de juillet (1er juillet) 1348.
En 1371, une contestation s'étant élevée entre l'évêque et le
couvent au sujet de la présentation à la vicairie, les religieuses représentèrent
au pape Grégoire XI « qu'il estoit malaisé de traicter avec led. sr. évesque à
cause qu'il demeuroit dans les terres subjectes aux Anglois"[33] et que led. lien de Saint-Pardoux étoit tenu par les
François ». Elles lui demandèrent de nommer un arbitre devant qui le différend
serait porté. Par lettres du 4 septembre 1371, Grégoire désigna Pierre[34], cardinal diacre de Saint-Eustache qui, à son tour, délégua
l'abbé de Chancelade et le doyen de Saint-Yrieix pour procéder séparément à une
enquête : après avoir ouï leur rapport, le cardinal décida que la présentation
appartenait à la prieure et la collation à l'évêque[35].
BONNE DE
LESPINATH qui est indiquée dans le nécrologe comme ayant été la huitième
prieure, vivait en 1384 et en 1403. Ce fut à sa supplication
que le pape Boniface accorda au couvent, en 1390, une bulle le dispensant à
cause des souffrances endurées et des pertes subies pendant les guerres, de
dîmes, tailles et autres subsides jusqu'en l'année 1404.
Aux prieures
dont les noms suivent, d'après le catalogue, nous n'avons pu accoler la moindre
date : AGNETTE DE LA BARDE, morte le 14 novembre, et GAILLARDE DE LA RIGAUDIE.
GUILLEMETTE DE
SOLIO affranchit, en 1428, les habitants « de la subgection d'aller cuire au
four banal », à charge de payer annuellement une rente de 5 sols par feu ; elle
mourut le 9 février 1480.
PÉTRONILLE DE
MAUMONT, alias DE MARMOYT, donnait à bail, avec Marie Béchade, sous-prieure,
Gratienne de la Grelière et Marie Autier, religieuses, le 22 novembre 1445, des
domaines sis à Saint-Martin-le-Peint ; elle décéda le 6 juin 1451.
Ce fut à cette
prieure que Jean de Bretagne, vicomte de Limoges et comte de Pierregort,
accorda, le 17 décembre 1445, des lettres confirmant les privilèges concédés
par ses prédécesseurs, «aux prieur, prieures, soeurs et couvent», « attendu,
dit-il, que nous désirons à ung chascun garder ses droiz et privilèges et
mesmement à l'Esglise et non point diminuer ».
Vers ce temps,
le pape Nicolas V (1447-1455) concéda des indulgences à tous ceux qui visiteraient
le couvent le jour de la Sainte-Anne, ainsi qu'il est constaté dans des lettres
d'Hélie, évêque de Périgueux du jour des calendes de juin 1451 ; deux ans
après, ce même évêque instituait une confrérie en l'honneur de sainte Anne.
La prieure
suivante, CATHERINE DE LA GRELIÈRE, passait le 29 juin 1452 avec Hélie Raoul,
de Nontron, une transaction concernant un ténement à Saint-Martin-le-Peint.
Elle est conclue in capitulo dominarum
sororum, ante ferratum[36] monasterii : tous jurèrent de tenir les conventions arrêtées, la
prieure, le prieur et deux religieuses en mettant la main sur la poitrine, et
Raoul en touchant le livre des Evangiles.
Le 21 avril
145S, elle obtenait du roi Charles VII des lettres mandant au sénéchal de
Périgord de contraindre les habitants de Saint-Pardoux au paiement de 13 livres
de taille et 100 sols de commestion dus au monastère en vertu de l'acte de 1318
; elle avait eu l’adresse de faire insérer dans ces lettres que la juridiction
de Saint-Sulpice lui appartenait en entier.
En affermant
diverses maisons sises à l'intérieur du fort, le 14 décembre 1453, elle se
réservait le droit, comme le pays n'était pas entièrement pacifié, de se
retirer dans ces bâtiments dans le cas où, à cause des gens d'armes, elle
serait obligée d'abandonner le couvent.
Sa mort
était inscrite dans l'obituaire à la date de 1457.
PERRETTE
DE LA. MARCHE, décédée le 16 avril, fonda en 1447 un obiit à charge de 10 sols
de rente sur le repaire de Neuil ; à cette date, elle n'était pas encore
prieure.
SOUVERAINE
DE POMPADOUR : dans l'obituaire on lisait : Anno 1473 et die 14, mensis
augusti, obiit honorabilis domina Sobeyrana de Pompadoria, que fuit priorissa
hujus monasterii.
MARIE
AUTHIER, religieuse au couvent pendant 55 ans, était prieure en 1477 ; elle
décéda le 19 août 1498 ; le 3 mai 1482, les habitants lui rendaient une
déclaration constatant qu'ils étaient ses justiciables et qu'ils étaient soumis
à sa banalité ; pour s'affranchir de celle-ci, ils s'engagèrent, comme en 1428,
à lui payer 5 sols par feu.
Sa parenté avec
noble Antoine Authier, qui, le 4 mai 1447, léguait au couvent, pour fonder un anniversaire,
une rente sur son moulin de la Bastide,
paroisse de Coussac-Bonneval, parait probable.
JEANNE DE
GUYENNE. La plus remarquable par la naissance des prieures qui gouvernèrent le
couvent de Saint-Pardoux, est assurément Jeanne, bâtarde de Guyenne,
petite-fille du roi Charles VII et par suite nièce de Louis XI.
Charles VII
avait eu de son mariage avec Marie d'Anjou, fille du roi de Sicile, huit filles
et quatre fils ; de ces derniers deux seulement survécurent : Louis, qui lui
succéda sous le nom de Louis XI, et Charles, d'abord duc de Berri, puis duc de
Normandie et de Guyenne, né au château du Montil-lès Tours le 28 décembre 1446.
« Cestuy monseigneur Charles, dit Commines, estoit homme qui peu ou rien
faisoit de luy, mais en toutes choses fut manié et conduict par autruy[37] ». Cette appréciation de Commines
est exacte et toute sa vie Charles fut le jouet de ses courtisans qui,
plusieurs fois l'excitèrent à lever contre son frère l'étendard de la révolte :
en 1461, il fut placé par eux à la tête de la Ligue du Bien Public dont le roi
ne vint à bout que par des prodiges de diplomatie.
En 1471, de
puissants seigneurs, exploitant sa faiblesse et son ambition, le firent entrer
dans une nouvelle ligue formidable : le roi d'Angleterre devait descendre en
Normandie, le duc de Bourgogne le rejoindre par la Picardie, tandis que le duc
de Lorraine attaquerait par la Champagne et le duc de Bretagne par la Touraine
; à Charles était dévolue la conduite des bandes gasconnes qu'il devait amener
au cœur même du royaume. Un hasard ayant mis le roi sur la trace de cette
conjuration, il envoya, pour gagner du temps, aux ducs de Bourgogne et de
Guyenne, des députés qui, par des promesses, essayèrent de les détacher du
complot ; en même temps, il massa des troupes sur les frontières.
La situation du
roi était toujours très critique, quand subitement Charles, l'âme de la
conjuration, tomba malade : se trouvant, en octobre 1471, à Saint-Sever, il
partagea avec sa maîtresse, Colette de Chambes, dame de Montsoreau, une pêche
qui avait été pelée par son aumônier, Jourdain Faure, dit Versois, abbé de
Saint-Jean-d'Angely ; ce fruit était empoisonné : quelques instants après, tous
deux furent pris de douleurs aiguës. Colette décéda le jour même, Charles
languit plusieurs mois et mourut à Bordeaux le 12 mai 1472. On ne manqua pas de
voir, avec quelque vraisemblance, l'intervention de la main du roi, dans cette
mort survenue si fort à propos, bien que Louis ait donné pendant la maladie de
son frère les marques de la plus vive douleur[38].
Faure et Henri
de la Roche, écuyer de bouche, son complice, furent arrêtés et incarcérés à
Nantes ; leur procès était déjà commencé, quand un jour on annonça que la
foudre en tombant sur la prison, avait tué les accusés[39].
Colette de
Chambes, fille de Jean, baron de Montsoreau, gouverneur de La Rochelle, et de
Jeanne Chabot, avait épousé, le 24 janvier 1466, Louis d'Amboise, vicomte de
Thouars, prince de Talmont, qui fut pour elle un véritable bourreau, la
maltraitant et la tenant renfermée dans une prison du château de Thouars[40]; restée veuve en 1469, encore
toute jeune, elle fut persécutée.par Louis XI qui lui refusait son douaire et
se réfugia près du duc de Guyenne qu'elle séduisit « plus pour ses grâces et
vertus que pour sa beauté, car elle sçavoit éloquemment parler et élégamment
escrire en prose et rithme, voire jouer de tous instruments musicaux »[41].
Charles eut
d'elle deux filles : Jeanne, notre prieure, pour qui, en raison de son illustre
origine, on fit fléchir les règles de l'ordre de Saint-Dominique qui
proscrivait les bâtardes ; et Anne, qui épousa, en 1490, François de Volvire,
seigneur de Ruffec, conseiller et chambellan du roi; décédée sans
postérité.
Jeanne fut d'abord sous-prieure de
Blaye, puis vint en la même qualité au couvent de Saint-Pardoux dont elle fut
nommée prieure en 1498. La proche parenté de la prieure avec le roi de France
ne pouvait être pour le monastère qu'une source de profits ; et en effet son
gouvernement, qui dura 43 ans, fut une période de prospérité pour les
religieuses qui, par elle, reçurent de nombreux dons.
En octobre 1490,
le roi Charles VIII accordait sur sa demande, aux habitants de Saint-Pardoux le
droit de tenir marché le jeudi de chaque semaine et deux foires par an : l'une
le lendemain de la Sainte-Catherine (26 novembre), l'autre le lendemain de
Sainte-Anne (27 juillet).
Les habitants, à
l'instigation de la sous-prieure, avaient présenté au roi une requête faisant
ressortir que St-Pardoux étant assis sur les grands chemins de Périgueux et
Limousin tirant à Bordeaux, nombre de marchands traversent ce bourg dans lequel
et aux environs « croissent plusieurs biens », que la création de marchés et de
foires ne manquerait pas de les retenir et qu'ainsi la richesse du pays se
trouverait augmentée.
Le roi accéda à
cette demande par lettres données au château du Montil-les-Tours, en octobre
1490, voulant, y est-il dit, « que toutes denrées, marchandises licites,
honnestes et permises soient vendues et distribuées aud. bourg durant lesd.
foires et marchés, à charge pour les habitants d'establir, au lieu où seront
ordonnées lesd. foires et marchés estre tenues, places, estaux, loges et autres
choses nécessaires pour l'exercice d'icelles, en tenant en bonne seureté lesd.
marchands, ensemble leurs denrées et marchandises durant icelles foires »[42].
Cette
autorisation avait été concédée par le roi, « pourveu qu'il n'y ait aucunes
foires ou marchés aux jours dessus déclarez à quatre lieues à la ronde » ;
condition qui ne se trouva pas remplie, car d'autres lettres données à
Saint-Martin-de-Candes en avril 1491 reportèrent le marché au mercredi, la
première foire à la Saint-Nicolas (6 décembre), et la seconde à la Sainte-Anne
(26 juillet), jour où avait lieu au couvent le pèlerinage institué par le pape
Nicolas V[43].
La faveur royale
n'abandonna pas Jeanne de Guyenne au cours de sa longue carrière[44] et par lettres du 27 mai 1538
données à Moulins, François Ier lui continua une pension annuelle de
100 livres sur la recette des tailles du Périgord que Charles VIII avait
accordée à sa cousine[45].
Vers 1518, le
couvent fut pillé et perdit tous ses meubles, argenterie, ornements d'église et
titres : le 10 mars 1518, l'official de Périgueux fulminait un monitoire contre
les auteurs de ce vol qui fut sans doute commis par une bande d'aventuriers
semblable à celle qui, cinq ans plus tard, sous la conduite de Maclou et de
Commarque, devait ravager le Poitou et l'Anjou[46].
Jeanne de Guyenne décéda le 31
janvier 1541 (v. st.) laissant une grande partie de ses biens aux religieuses
qui, reconnaissantes, mentionnèrent ainsi son décès dans leur nécrologe : Anno Domini 1541, et ultima januarii, obiit generosa
domina Joanna de Guiene, priorissa hujus monasterii, que mansit in officio
priorati 43 annis et quamplurima bona dedit, procuravit monasterio.
LOUISE DES
BROUSSES, prieure, figure avec Anne de Foix, sous-prieure, dans une
reconnaissance de rente du 22 janvier 1542 (v. st.)
LOUISE DE CANTUEL, alias CHANTUEL, CHANLUET,
(...)
pp. 457-458
La paroisse de
Saint-Pardoux dépendait de l'archiprêtre de Champagnac, diocèse de Périgueux[47]. La présentation et la collation
de la cure ou vicairie perpétuelle appartenaient primitivement à l'évêque, mais
nous avons déjà dit que le pape Clément V avait uni cette cure au couvent par
bulle du 1er juillet 1347, à charge de payer au curé une portion congrue de 50
1ivres. Voici cette pièce d'après une copie insérée dans la collection Lespine[48] :
Ad
perpetuam rei memoriam.
Prudentes virgines,
que mundanis abdicatis illecebris, virginitatem suam Filio Virginis devoventes,
separant, accensis lampadibus obvio irresponso, tanto propensioni consuevit
sedes apostolica studio prosequi cantat. Quanto ipse in earum necessitatibus
majori propter fragilitatem sexus indigere suffragio dinoscitur. Ex tenore si
quidem petitionis pro parte dilectarum in Chxisto filiarum, priorisse et
conventus rnonialium monasterii Sancti Pardulphi de Riparia, per priorissam
soliti gubernari, ordinis Sancti Augustini, Petragor. dioces., secundum
instituta et sub cura Fratrum ordinis Predicatorum viventium quibus etiam licet
habere proprium in locum ex indulto sedis apostolice speciali, nobis nuper
oblate percepimus quod ipse facilitates non obtinent que ipsis pro earum
sustentatione sufficiant et ad incumbentia eis onera supportando, et maxime
quia propter guerras que noviter tam circa castrum de Nontronio, Lemovic.
dioces. quod predicto monasterio est vicinum, quam etiam in aliis locis
circumvicinis illarum partium, peccatis exigentibus, viguerunt, ipse, notorie
de paupertate existant, nec possunt opportunum sibi implorare subsidium tum
propter perpetuo sunt incluse, quare dicte priorisse et conventus nobis
humiliter supplicarunt ut p. hujus modi earum relevandis et facilius p.
ferendis oneribus, parrochialem ecclesiam ejusdem loci Sancti Pardulphi de
Riparia, ad collationem episcopi Petragoricensis, qui est pro tempore,
pertinente, et jus fructus, redditus et proventus quinquaginta libr. Turon.
parvorum serv. taxatione decime valorem annuum non excedunt, cum omnibus
juribus et pertinences suis, prefato monasterio ex nunc unire, anectere,
incorporare et applicare perpetuo de benignitate apostolica dignaremur. Nos
igitur, eisdem priorisse, conventui et monasterio, paterno in hac parte
compatientes affectu ac hujus modi eorum necessitatibus de subventionis
alicujus auxilio opportune providere votentes earumdem priorisse et conventus
supplicationibus inclinati, predictam parrochialem ecclesiam, etiam si forsitan
sit eadem ecclesiam quomodolibet reservata, cum omnibus juribus et pertinenciis
suis, prefatis priorisse et conventui et monasterio ex nunc auctoritate
apostolica unimus, incorporamus et anectimus in perpetuum, ac etiam applicamus
ac in suos proprios usus ipsorum priorisse et conventus et monasterii
concedimus et etiam deputamus eisdem priorisse et conventui que nunc sunt et
pro tempore fuerint, auctoritate predicta, nichilominus Concedentes quod
cedente, vel decedente dilecto filio ….. (sic), rectore
dicte ecclesie, qui nunc est, vel ecclesiam ipsam quolibet dimittente liceat
eisdem priorisse et conventui per se vel procuratorem suum ejusdem ecclesie,
juriumque et pertinentiarum ipsius corporalem possessionem auctoritate propria
libere ingredi apprebendere recupere ac etiam retinere prefati episcopi et
cujuscumque alterius assenssu, licentia vel auctoritate minime requisitis,
reservata tamen primitus et assignata realiter de fructibus, redditibus et
proventibus antedictis, ipsius ecclesie, pro perpetuo vicario canonice instituendo
prout dicte priorissa et conventus id a nobis cum instantia postularunt
quinquaginta libr. parvorum turonen. ad dicti episcopi arbitrium annua et
perpetua portione, ex quibus dictus vicarius procurationem episcopalem solvere,
hospitalem servare et alia sibi et dicte ecclesie incumbentia teneatur onera
supportare nonobstantibus si aliqui super provisionibus sibi faciendis de hujus
modi ecclesiis vel aliis beneficiis, etc., etc. (sic.).
Datum Avinion.
Kal. Junii, anno sexto.
[1]
Qu'il me
soit permis dès les premières lignes de ce travail d'adresser
publiquement l'expression de ma vive reconnaissance à toutes les personnes
qui ont bien voulu me donner leur précieux concours pour mener à bonne fin
cette longue monographie, toute à la gloire du petit bourg où les hasards de la
vie administrative m'ont fait passer, grâce à l'amabilité de ses habitants,
quatre des meilleures années de mon
existence. Ce sera m'acquitter envers eux que de fixer les faits et gestes
dateurs ancêtres.
Je dirai tout d'abord Madame Petit de Plas, qui
on me communiquant les anciennes archives du couvent sauvées par une de ses parentes, m'a donné l'idée première d'entreprendre ces intéressantes recherches. C'est aussi à son obligeance que je dois la
plupart des vieilles coutumes que j'énumère plus loin. Elle me permettra de
l'assurer de ma plus respectueuse gratitude.
M. Durand de Ramefort, notaire, à Saint-Pardoux, M. Jamain, notaire à Miallet, M.
Duroy, notaire, à Saint-Saud, ont mis à ma disposition avec un empressement que
je ne saurais trop reconnaître, leurs anciennes
minutes, mine des plus riches où j'ai puisé à pleines
mains.
M. le docteur
Sireyjol, maire de Saint-Pardoux, m'a laissé prendre connaissance des anciens registres d'état-civil où se trouvaient nombre de renseignements
précieux, et des registres municipaux de la période révolutionnaire.
Je n'oublierai pas mes bienveillants et érudits
confrères de la Société archéologique : M.
Dujarric-Descombes, qui, au cours de ses nombreuses
recherches, a relevé à mon intention tout ce qui concernait Saint-Pardoux ; M. le comte de Saint Saud qui a eu l'obligeance d'annoter mes listes de religieuses et
de me donner de nombreux renseignements sur les anciennes familles ; M.
Villepelet, archiviste du département, et M. Cailliac, bibliothécaire de la
ville, qui, avec une complaisance infinie, ont guidé
mes recherches dans les riches dépôts dont ils ont la garde; M.
le chanoine Brugière, qui, très libéralement, m'a communiqué ses précieux
cartons ; M. le marquis de la Garde, qui m'a ouvert ses archives du château de
la Pouyade ; mon excellent ami Paul Petit de Plas qui m'a fait d'intéressantes
trouvailles aux archives et à la bibliothèque de Bordeaux.
Enfin toutes les
personnes de Saint-Pardoux qui m'ont communiqué leurs papiers de famille :
Madame Larrel-Lagrange, MM. Chartroule, Dupeyral, Desmarthon, etc.
A tous
j'adresse mes plus vifs remercîments.
[2]
Une
notice sur le couvent de Saint-Pardoux a déjà été donnée par M. de Laugardière
dans le Bulletin de la
Société (1884.)
L'auteur
n'a eu communication pour rédiger son travail que du terrier du couvent ; il
n'a point eu connaissance de la fondation, des faits survenus en 1553, 1625 et
l685, ainsi que de tous les événements concernant l'histoire du bourg, lacunes
que le dépouillement de près de 30,000 minutes de notaires, des registres
d'état-civil, de nombreux papiers de famille, ainsi que des recherches aux
Archives départementales de la Dordogne et de la Gironde, aux Archives et à la
Bibliothèque nationales, et à Rome, nous ont permis de combler.
[3] Cf. la Vie de saint Pardoux, palrmi de Guéret, par M.
Coudert de la Villatte ; Guéret, 1835.
[4] Il nous paraît curieux de faire
remarquer que la dévotion à saint Pardoux n'a guère dépassé la région sise
autour du Limousin, si l'on en juge du moins par la distribution géographique
des localités qui portent le nom de ce saint. La Corrèze en possède 5 ; la
Creuse et la Dordogne, chacune 4 ; deux en Lot-et-Garonne ; une saute dans
l'Allier, la Charente Inférieure, les Deux-Sèvres, le Lot, le Puy-de-Dôme et la
Haute-Vienne. Ce nom s'écrit indifféremment Pardoux, Pardoult et Perdoux.
[5] Pendant la Révolution, le bourg
s'appela les Sables-de-Dronne.
[6] Au XVIIe siècle,
nous avons rencontré plusieurs procès où la prieure est choisie comme arbitre.
[7] P. Touron, Histoire de
saint Dominique, Paris, 1789.
[8] Cf. le P. Echard, Scriptores ordinis Predicatorum recensiti, notisque historicis et
criticis illustrati. Paris, 1719.
[9] Histoire des
ordres monastiques, religieux et militaires, avec
gravures, Paris, Gosselin, 1720 ; t. III. p. 240 et
suiv.
[10]
M.
Marvaud, Histoire des vicomtes et de la
vicomté de Limoges, p. 300 et suiv.
[11] Moréri place sa mort en 1290,
tandis que M. Marvaud, t. I, p. 341, la met en 1277 : la chronique de
Saint-Martial dit que
Marguerite mourut le vendredi après la Saint-Barthélemy, 1277.
[12] Ou Bernard Guidonis : voir
sur ce chroniqueur limousin une intéressante étude biographique et
bibliographique de M. l’abbé Arbellot, dans les bulletins de la Société
Archéologique du Limousin, t. XLV. Né en 1260, Bernard Guidonis prit l’habit de
Saint Dominique la 16 septembre 1279 dans le couvent de Limoges ; après avoir
rempli diverses dignités, il fut nommé prieur de ce couvent en 1305, puis en
1307 inquisiteur à Toulouse et enfin en
1324 évêque de Lodève ; il mourut le 3 décembre 1331 laissant de
nombreux ouvrages d’histoire et de théologie. C’est dans son histoire de la
fondation des couvents de l’ordre des Frères Prêcheurs publiée par Dom Martène,
dans l’Amplissima Collectio, t. VI,
que nous avons retrouvé la relation concernant les origines du couvent de
Saint-pardoux.
Il existe trois copies anciennes
de cette histoire, l’une conservée aux archives des Frères Prêcheurs à Rome, la
seconde à la bibliothèque de Bordeaux et la troisième à celle de Toulouse.
Le
R. P. Maur. M. Kaiser, bibliothécaire de l’ordre des Frères Prêcheurs à Home, a bien voulu nous envoyer une copie de la première qui est cotée
dans ses archives lib. KL. p. 308 et 314 ; elle reproduit avec quelques
variantes le texte publié par D. Marlène, et une note fait connaître qu'elle
fut envoyée en 1307 aux religieuses de Prouille.
M. le baron de Rivières, inspecteur de la Société française,
d'archéologie, a bien voulu confronter ce texte avec celui conservé à Toulouse.
[13] On nous a
assuré avoir vu autrefois dans les archives du couvent un papier où il était
indiqué que les ouvriers qui travaillaient à cette construction touchèrent un
denier et un oignon par jour.
[14] Originaire de
Montbrun en Limousin, il était prieur de Brive en 1291-1293.
[15] Raymundus
Hunaudi de Loantario, Tolosanus, dixième prieur provincial ; Amplissima collectio, t. II, col. 427.
[16]
« Etienne de Besançon, né de maison médiocre, releva
son extraction par la sincérité de ses vertus et fut aussi grand prédicateur
qu'il était admiré dans les escholles ». Docteur en théologie, il fut régent du couvent Saint-Jacques
de Paris, provincial de France en 1291, puis général de l'ordre en 1292. Il
mourut à Lucques en Toscane le jour de Sainte-Cécile 1296, laissant plusieurs
ouvrages.
V. Histoire des saints, papes, cardinaux et autres hommes illustres qui
furent supérieurs ou religieux du couvent Saint-Jacques de l'ordre des FF.
Prêcheurs de Paris, par le F. Antoine Mallet. Paris, 1634, p. 400.
[17] Ancien manuscrit cité par
Daguesseau, Œuvres, t. VI, p.
475. La légende que nous citons plus loin l'accuse d'avoir fait un pacte avec
le diable pour la construction du couvent.
[18] La vicomtesse avait acheté ces
terres par acte du mercredi après l'octave de Pâques, 1265 (Nadaud, t. III,
page 97.)
[19] Nadaud dit cependant, t. III, p.
209, que les armes de Gérard de Maumont sont deux
lions passants.
[20]
Après
l'histoire, la légende : Gérard de Maumont, raconte-t-elle, fit un pacte avec
le diable pour construire le couvent, et tous deux arrêtèrent de l'édifier sur
les hauteurs de Couderfery, point culminant de la région, à demi-lieue de
Saint-Pardoux. Alors le diable apporta sa pleine poitrine de pierres; mais
lorsqu'il lui fallut de l'eau pour faire le mortier, il s'aperçut qu'il aurait
beaucoup de peine pour la monter à celte hauteur, et il prit pour l'emporter un
panier percé ; de telle sorte que lorsqu'il arrivait, il n'en restait plus une
goutte.
De dépit, il abandonna son tas de pierres —
en cet endroit le coteau est couvert de rochers et une carrière qui y est
aménagée porte le nom de carrière du Diable ; non loin on trouve aussi toute
une suite de tombelles, — et il décida que le couvent se construirait où
tomberait son marteau : du haut de Couderfery, le diable « tira son
marteau » qui alla tomber au bord de la rivière. Il se mit alors à l'œuvre.
Gérard lui ayant
demandé quelle hauteur auraient les bâtiments, le diable lui répondit qu'ils
seraient limités par son marteau et il le lança en l'air: cet outil s'arrêta à
une certaine hauteur et resta ainsi suspendu jusqu'à ce que la maçonnerie fût
arrivée à son niveau.
(Conté
par la Bouniune, vieille mendiante âgée de 93 ans,
noyée vers Pâques 1898, derrière le couvent.)
[21] Arch. des FF.
Prêcheurs de Rome, lib. K. L. p. 314.
[22]
D.
Francisco de Bofarull, archiviste général de la Couronne d'Aragon, a bien voulu
faire, à notre demande, dans les célèbres archives de Barcelone, sur la
filiation de Fine d'Aragon, des recherches qui sont restées infructueuses. Elle
n'est pas nommée, nous a-l-il écrit, dans l'important ouvrage publié par son
aïeul, D. Prospero de Bofarull : Los Condes de
Barcelona ; pas plus, du reste, que dans toutes les généalogies
de la famille d'Aragon qu'il a pu consulter.
Il voudra bien
trouver ici l'expression de notre très respectueuse gratitude.
[23] Pontus
Viridis, Pontvert près Condom, prieuré fondé en 1280; parmi
les religieuses de ce couvent, Bernard Gui cite Serena de Scayrac, Cartusensis, et Azema Fromento de Martello, (Ampl. Collectio, col. 126.)
[24] Nadaud dit qu'il mourut entre le
lundi et le mardi de la semaine de la Passion 1294, t. III, p. 209.
[25] Anno M° CC° II xx XIX obiit magister G. de Malo Monte apud Chaslutz Chabrol et fuit
sepultus in monasterio monialium S. Pardulfi. (Chron.
de Saint-Martial de Limoges.)
[26] M. de Bosredon, Sigillographie du Périgord, n° 439, et Arch. des Basses-Pyrénées, n° 1045.
[27] Bibl. nat. Collection
Lespine, t. XXXV, f° 123: n Catalogue des prieures fourni par M. Nadaud, curé
de Teyjac et f° 13L :
« Extrait d'un martyrologe très ancien où ou a inscrit sans ordre les articles
suivants. »
[28]
En marge
du 8 e jour des
ides (8 mai) on lit ; Anniversarii
domini Helie de Machmat el Therii de Machmat pro faciendo convention hahuit...
x s. rend. ;
Du 6e (10 mai) : anniversarii Riche....
domicellus angliscus.
Du 5e (11 mai) : obiit soror Agnès Pantheus.
Du 4e (12 mai) : obiit soror Magdalena
( ?) Despani.
Toutes ces notes paraissent tracées au xve siècle. Celles écrites au dernier siècle sont presque entièrement
effacées. De l'une on lit encore : Hac die decima et... rex hoc monasterio pro...urus
ann...um singulis.
Celte pièce
nous a été très gracieusement offerte par Mme Larrel-Lagrange, de
Saint-Pardoux.
[29] En vertu de ce droit d'estang ou
d'estreing de vin, le couvent avait le privilège exclusif de vendre du vin
pendant un mois.
[30] D'après une copie provenant des
archives du couvent ; tous les faits cités sans indication de source, dans la
suite de ce travail, ont même origine.
[31] D'après la liste de la collection
Lespine, t. XXXV, f° 129.
[32] Nobiliaire de
Courcelles, t. IV, art. Laurière.
[33] Le P. Dupuy dit en effet que l'évêque
Pierre Tisou était un partisan des Anglais.
[34] Pierre Flandrin, originaire du
Vivarais, doyen de Bayeux, créé cardinal en 1371, mourut à Avignon le 23
janvier 1381. (Moréri).
[35] Le couvent de Saint-Pardoux était
compris, en 1382, pour une aumône de 10 sols tournois dans les charités du
mardi-gras de la ville de Périgueux. (Note de M. Dujarric-Descombes.)
[36] Tous les actes des XVe
et XVIe siècles
et du commencement du suivant sont passés devant le ferat ou au ferret du couvent. Ce mot que nous ne retrouvons pas dans
les glossaires désigne sans doute la grille de fer qui divisait le parloir, et par extension le parloir
lui-même.
[37] Commines, édition Buchon, p. 60.
[38] Mérimée dans ses annotations des
Oeuvres de Brantôme, édit. Elzevir, t. III, p. 48, dit que la complicité de
Louis XI dans la mort de son frère n'est guère douteuse.
[39] Bouchet, Annales d'Aquitaine, édit. de 1644, p. 277 et suiv.
[40] Berthre de Bourniseaux, Histoire de Thouars, 1824, p. 159.
[41] Bouchet, p. 277. De Bourniseaux
dit cependant que « sa conversation amusante était soutenue par la bonté de son
caractère et les charmes de sa figure ».
[42] Archives
nationales, Registres de la chancellerie : JJ. 221, f° 83, r° ; ces lettres sont signées par Louis de
Luxembourg, Comte de Ligny, et Louis Malet de Graville, amiral de France.
[43] Archives
nationales, JJ. 222 f° 31, r°.
[44] Voir le P Anselme, t. I, p. 118.
[45] Id. J. 960 f° 78v° ; PP. 136 p. 198 et Gallia christiana, t. II col. 1507.
[46] Cf. Bouchet, loc. cit , p. 375 et suiv. ; Bourdigné, Histoire agrégative des annalles et cronicques d’Anjou, t. II, p.
338 et suiv.
[47] Pouillé d'AIliot
(1648) qui lui donne 100 1. de revenu.