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Source : Bulletin SHAP, tome XXVII (1900), pp. 242-245.

EXTRAITS DES OLIM.

Les Olim sont un recueil de procédures civiles portées devant le Parlement ou Cour du roi. La rédaction des registres qui contiennent ces actes remonte seulement à 1254, avec plus ou moins de précision et de clarté; les sentences ne prononcent généralement d'autres peines que des amendes. Ils commencent en 1254 et se terminent en 1318, sous Philippe V.

Un des grands défauts de ces actes, ainsi que le fait remarquer le comte Beugnot, est de ne pas porter de date certaine. Ils ne portent que celle du Parlement où ils ont été évoqués. Le Parlement se réunissait plusieurs fois par an à des dates fixes : la Pentecôte, la Toussaint, la St-Martin d'hiver, la Chandeleur, et se prolongeaient plus ou moins, selon le nombre des affaires.

Louis IX et ses successeurs tinrent la main à ce que ces parlements se réunissent exactement, et pour les faits de la nature de ceux que nous relatons, ils étaient toujours d'une grande sévérité.

INCENDIE DU MOUSTIER D'AUGIGNAC. (1)

Enquête faite par ordre du Roi par Nicolas de Verneuil, clerc, et Guillaume d'Antonne, chevalier, sur les maux et violences que Me Géraud de Nobiliaco (Nouaillac), recteur de l'église d'Augignac, disait lui avoir été fait à lui et à ses hommes par Boson de Bourdeille, chevalier, et ses complices, par le bris de son église et d'autres choses qu'il demandait, de par le Roi, contraindre ledit Boson à lui rendre. Il fut prouvé par l'enquête que ledit Boson et ses complices avaient envahi ladite église d'Augignac et la maison dudit recteur et qu'ils les avaient incendiées, qu'ils avaient emporté les ornements de l'église, cinq chevaux et autres objets appartenant au recteur, et fait prisonniers son frère et deux petits neveux, qu'ils avaient rançonné son frère, qu'ils tuèrent d'un carreau un homme qui était dans la tour du moustier, qu'ils pillèrent et détruisirent plusieurs maisons d'Augignac, et que ledit Me Géraud agissait seulement pour recouvrer ce qu'on lui avait enlevé et qu'il avait estimé devant les enquêteurs à la somme de trois cents livres limousines, et de nouveau il prête serment que cette somme est exacte. Ledit Boson est condamné par la Cour à trois cents livres limousines envers Me Géraud, qui réclamait seulement pour les dommages qui lui avaient été faits, et ledit Boson doit les payer avant l'Ascension prochaine du Seigneur.

Traduction.

 

DEMELES ENTRE GEOFFROY DE PONS ET L'EVEQUE DE PERIGUEUX (2).

Une plainte nous ayant été portée de la part de l'évêque de Périgueux, des habitants du bourg d'Alamans et de Nicaise Ursin, notre sergent, au procureur du sénéchal du Périgord, sur ce qu'il a été démontré que Geoffroy de Pons, seigneur de Ribérac, damoiseau, a commis plusieurs violences, injures, excès, dommages et destructions contre ledit évêque, un de ses prêtres et autres personnes, qu'il a troublé l'évêque dans la possession de la haute et basse justice du bourg d'Alamans qui est à lui et dont les prédécesseurs ont joui de tout temps, et qu'il n'est pas souvenir du contraire, nous avons ordonné une enquête sur ces excès el désobéissances : cette enquête ayant été faite et portée à notre Cour, il a été trouvé et suffisamment prouvé que Geoffroy, seigneur de Ribérac, s'empara de Géraud de Bonnefon, prêtre, et le mit en une étroite prison, et que malgré les appels à nous faits par l'évêque et les habitants d'Alamans, ledit Geoffroy ayant été averti par Nicaise, notre sergent, qui lui avait notifié de ne plus porter empêchement à l'action de la haute et basse justice qui appartenait à l'évêque, qu'il ne ferait plus violence aux hommes du bourg, que l'évêque et ses biens étaient sous la sauvegarde du Roi, que ledit Nicaise avait de par notre autorité défendu au dit Geoffroy tout ce qui pourrait être contre nous, et qu'il n'attentât en rien à ce qui pouvait être au préjudice de l'évêque ou de ses gens ; le dit sergent avait cité Geoffroy aux assises de notre sénéchal du Périgord et de nouveau défendu qu'il portât atteinte aux droits de l'évêque et des gens d'Alamans. Mais, méprisant tout, ledit Geoffroy prit et jeta en prison plusieurs hommes et habitants d'Alamans ; de plus, non content de cela, Geoffroy vint à Alamans, y entra par violence en brisant les portes du bourg, à la tête d'une multitude d'hommes armés, malgré la présence de notre sergent, qui, autant qu'il le put, en vertu de notre autorité, s'opposa à ces faits ; de plus, ledit Geoffroy accumulant les maux aux maux, l'évêque étant présent, revêtu de ses ornements pontificaux, avec la mitre, la crosse et l'enseigne de la sainte croix, défendant au dit Geoffroy, de la part de Dieu et de la nôtre, de faire aucune injure ou insulte à l'église ou aux gens d'Alamans ; le dit Geoffroy accabla l'évêque d'insultes et lui dit les paroles les plus extravagantes, et dans son emportement Geoffroy passa si rapidement entre l'évêque et un prêtre qui le soutenait, que tous deux furent jetés à terre et eussent été tués si les assistants ne les eussent relevés et aidés ; les gens de Geoffroy lancèrent plusieurs flèches et carreaux contre les habitants du bourg, et Geoffroy tenta d'y tenir ses assises. De plus, ledit Geoffroy frappa violemment Guillaume de Pilhac que ledit Nicaise, notre sergent, avait pris à Ribérac sur le mandat de notre sénéchal, comme notre débiteur en fuite ; il porta violemment la main sur les yeux de notre sergent et les pressa avec force. Sur ce, lorsque ledit Geoffroy fut arrêté par la main et par la bouche (manu et ore), par notre sénéchal du Périgord, et qu'il lui fut ordonné d'aller tenir prison à Lauserte, ledit Geoffroy ne daigna pas le faire, mais se relira en refusant d'obéir, et continua de causer toutes sortes de désagréments à l'évêque, à ses gens et à nos sergents, refusant d'obéir et méprisant notre juridiction.

Toutes ces choses vues attentivement, ledit Geoffroy a été condamné par notre Cour envers les personnes suivantes : 1° audit évêque, pour les injures et dommages à lui faits, mille cinquante livres petits tournois ; 2° audit Géraud, prêtre, cent livres tournois ; 3° audit Nicaise, notre sergent, en cent cinquante livres tournois; 4° aux hommes et bourgeois d'Alamans pris et incarcérés par ledit Geoffroy, à cinquante livres tournois pour être distribuées entre eux par ledit évêque ; 5° pour nous, deux mille livres tournois pour notre amende ; de plus la Cour a ordonné que toute la terre de Geoffroy soit placée sous notre main et y soit tenue jusqu'à ce que tout soit réglé; ledit Geoffroy restera en prison à notre volonté dans le lieu qui lui sera assigné, et quand ledit Geoffroy sortira de prison, il ira aussitôt, tout droit, vers l'évêque de Périgueux, pour lui faire amende verbale sur les dits faits, et notre Cour, par le même jugement, a réservé le droit des parties sur la justice du bourg d'Alamans, tant pour la propriété que pour la jouissance.

Traduction

A. de Roumejoux.

 

(1)     Olim, t. I, p. 278, — Parlement de la Pentecôte. — Louis IX, 1268.

(2)      Olim, p. 587, tome iii. — Philippe iv le Bel, 1310. L'évêque de Périgueux était Audoin de Neuville, 1295-1314.

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