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Source : Bulletin SHAP, tome XXXV (1908) pp. 63-68.

DEUX DOCUMENTS INÉDITS.

Nous avons signalé le premier de ces documents à la séance d'avril 1908. Il est tiré des archives du château du Roch à M. le comte de La Tour du Roch ; le second provient des archives du château de la Valouze, appartenant à l'un de nous. Les deux pièces sont originales. L'une, d'une belle et ferme écriture, est signée « Alain » ; l'autre n'est pas signée, parce que c'est un acte sous-seings privés ; mais il y a les trous des huit sceaux des parties contractantes. Nous avons montré cette dernière pièce à la séance du 27 mai de la même année.

i. — Ajournement pour l'hommage de Laussel. 1512.

Le Jean de Commarque, qui obtient le sursis, possédait outre Laussel la coseigneurie de Beyssac Lors de son mariage, en 1484, avec Jeanne de Machat de la Méchaussée, on relève parmi les personnages présents au contrat Antoine de Jaubert, bachelier, juge de la vicomte de Turenne. Il est vraisemblable que c'est le père de Pantaléon Jaubert, juge de la même vicomté, puis conseiller et président du Parlement de Toulouse, nommé dans le document. Pantaléon n'était que le gendre de Jean de Commarque, ayant épousé la fille aînée de celui-ci, Jeanne, décédée vers 1521-1522, laissant le nom de Commarque à ses enfants. Elle avait deux sœurs : Hélix, femme de François du Pouget de Nadaillac, et Françoise, épouse de François, de Montardit. Quelle parenté existait entre Antoine Jaubert et les Jaubert de Nanthiat et de la Roche-Jaubert, de famille chevaleresque ? Nous n'avons pu la trouver. Mais de 1450 à 1550 nous avons fréquemment rencontré des cadets de familles anciennes remplissant des fonctions judiciaires, même de second ordre. En outre, le prénom de Pantaléon étant très rarement usité, on peut se demander si le président Pantaléon ne fut pas parrain, comme parent proche, de Pantaléon Jaubert, qui fut abbé de Royaumont, puis de Charroux.

Le sire Dalbret, conte de Perigort et viconte de Limoges.

Juges, procureurs, trésoriers, receveurs et aultres noz officiers de nos ditz conté et vicomté. Noble homme Jehan de Comarque, seigneur de Leoussel, a envoyé devers nous nostre amé et féal conseiller maistre Panthaléon Joubert, nostre juge général de nostre dit viconté pour nous remontrer (un mot effacé) il est en quelque indisposition de sa personne. Au moyen de quoy n'est peu venir à nous pour nous faire et prester les foy, hommages et sermens de fidélité et tous aultres droitz, en quoy nous est tenu pour raison des biens qu'il a et tient en nos dits conté et viconté ; Nous suppliant luy vouloir donner terme et respit de ce faire, pour tel temps que adviserons. Ce que luy avons accordé pour les causes susdites et mesmement en faveur de nostre dit conseiller et juge son filz ; et ce pour ung an à compter du jour et date de noz présentes. Si vous mandons que durant ledit terme ne laissez souffrez estre (apporté) ancun empeschement en sesd. biens. car tel est nostre plaisir. Donné en nostre chasteau de Montignac ce IIIème jour d'octobre l'an mil cinq cens et douze.

(signé) Alain.

(et plus bas) Martinet.

Jean de Commarque ne rendit pas l'hommage en 1512, car, le 8 juin 1519, il demandait un nouveau sursis, nous apprend l’Inventaire des Titres d'Albret, publié par l'abbé Dubois.

 

II. Fondation d'une chapelle à Saint-Geniès. 1327.

La fondation de cette intéressante chapelle, que décorent des peintures fort anciennes (M. Drouyn les avait signalées, si nous ne nous trompons, à notre érudit président, qui nous donnera une étude sur elles), n'est pas du tout due à Gaubert Lachaminade, modeste prêtre du lieu de Saint-Geniès. A la page 216 du tome I de notre Bulletin, on cite, d'après le Périgord illustré et Lespine, cette fondation, faite par ce Gaubert « laicum Sarlatensis diocesis. » Le même fait est répété au tome XII, p. 189. Au tome IX, p. 98, M. René de Gérard nous proposa l'estampage de la porte de la chapelle du Chalard.

Non ! cette fondation n'est pas due à un simple prêtre du Sarladais, mais à de nombreux et assez puissants seigneurs, qui lui donnèrent les moyens de bâtir la chapelle et de la desservir. Le hasard a permis à l'un de nous d'en acquérir la charte originale,

Nous sommes en 1327, voyons quels sont les nobles familles qui figurent dans ce document.

Les de Val. D'après un acte, qui se trouve dans les pièces justificatives de la généalogie de Ferrières-Sauvebeuf, Pierre de Val, damoiseau, aurait pour mère une dame Nafays. A l'époque que nous considérons, cette famille de Val (de Valle) parait avoir son centre d'action à Saint-Geniès. Dans un vieux terrier de Salignac on trouve, en 1298, un Hélie de Val, seigneur de Saint-Geniès, et dans une autre pièce, non ;datée, Raymond de Val, aussi seigneur de ce lieu. Plus tard, en 1330 et 1349, est cité Raymond de Val, donzel de Saint-Geniès, puis, en 1361, Raymond de Val, seigneur de Pelvezy, repaire noble dans cette paroisse. Le mas de Val, confrontant avec celui de la Reynie, est cité dans ce même terrier. Il était situé dans la paroisse de Borrèze, qui touche celle de 3aint-Geniès. Cassini le porte. Ce lieu serait-il l'origine du nom de la famille qui nous occupe ? (B. N. Mss. Clérambault, 1181.)

Ahelitz de Lestanh. Alix d'Estaing (de Stagno dans certains actes) était fille de messire Guillaume d'Estaing et sœur de puissant seigneur Raymond, qui lui donna en dot 50.000 sols petits tournois. Veuve de Gaillard de Balaguier, elle épousa en juin 1316 Manfred ou Matfroy de Salignac, chevalier, seigneur de Salignac. Celui-ci, fils d'Hélie, était veuf d'Alamande de Gourdon, épousée en février 1301.

Quant à Marguerite de Peyrals et aux Saint-Geniès, ils ne nous sont pas connus.

On a supposé, mais sans preuves, que ces derniers pourraient bien être des cadets des Salignac. Ce n'est pas notre avis. Nous croyons qu'ils forment une famille à part. On trouve dans les sceaux de Clairambault, registre 52, trois quittances datées d'Agen, 1er juillet 1354, 15 juillet et 1er octobre 1355, d'Arnaud de Saint-Geniès, écuyer, sergent d'armes du Roi et châtelain de Montcuq. Le sceau donne on écartelé : 1 et 4 un lion ; 2 et 3, trois bandes. Le lion ainsi placé serait bien les armes propres des Saint-Geniès, les bandes des 2 et 3 pourraient représenter une alliance soit ancienne soit récente avec les Salignac. On sait qu'à ces époques surtout le 1er quartier et le 4e (quand ils élaient semblables) représentaient les armoiries du titulaire du sceau (1).

Sommes-nous bien en présence, dans ce sceau, de notre Saint-Geniès et de notre importante châtellenie bergeracoise de Montcuq ? L'auteur anonyme des Sceaux gascons du Moyen-Age (publiés par la Société historique de Gascogne en 1888) ne semble pas de cet avis. Il dit « qu'Arnauld Saint-Genez (sic), sergent d'armes du Roy en son chastel de Montcuq, a donné en 1352 plusieurs quittances de ses gages, où est le sceau ci-dessus (lions écartelés d'un plain, tête de femme en cimier entre deux cols de chimères). Le lieu de Saint-Geniez est dans la commune de Montcuq, département du Lot. »

En 1359, à Toulouse, un Guillaume de Saint-Geniès scelle une quittance avec un écu semblable au premier décrit. (Pièces Originales, 2751).

Universis et singulis presentes litteras inspecturis et audituris, Nos Raymundus et Poncius de Vallibus, milites ; et Petrus fillius domini Aymerici de Vallibus, militis ; et Ahelitz de Lestanh ut tutrix et tutorio nomine Johannis de Salanhaco, ffilii nostri et domini nostri domini Marfredi de Salanhaco, deffuncti militis ; Petrus de Valle, ffilius quondam domini Helie, militis deffuncti ; Margarita de Peyrals, relicta Eblonis de Sancto Genesio, ut tutrix et tutorio nomine Petri de Sancto Genesio, ffilii nostri et dicti Eblonis deffuncti ; Johannes de Quem et Raymundus de Valle, domicelli ; condomini de Sancto Genesio, salutem et fidem presentibus adhibere. Noveritis quod nos insimul et unanimiter volumus et specialem licentiam ad perpetuum, prout quemlibet nostrum tangit seu tangere potest, damus et concedimus pro nobis et heredibus et successoribus nostris universis, videntes et diligenter insimul accedentes, conciderantes utilitatem et comodum dicti loci de Sancto Genesio, et qua propter contenta in hiis nostris presentibus litteris nostra condicio non sit deterior ymo melior et quod cultus Dei et salus animarum nostrarum et totius popularis dicti loci et quam plurimum aliorum propter que in futurum anementari et mulliplicari, videlicet predilecto et karissimo nostro Guasberto Lacaunnada (2), clerico dicti nostri loci de Sancto Genesio, ibidem coram nobis presenti et recipienti, construendi seu de faciendo construi ad perpetuum quamdam capellam, cum suis pertinenciis universis, apud dictum locum de Sancto Genesio, juxta cimiterium dicti loci, deversus solis ortum, situm in loco vocato vulgarito in Caslario ; qui locus confrontatur ex una parte cum itinere per quod itur de Sancto Genesio versus molendinum vocatum de Diana et ex alia parte cum itinere publico regio per quod itur et revenitur de Sancto Genesio versus castrum de Salanhaco, cum aliis suis confrontationibus, si que sint prout talius et clarius continetur in quibusdam patentibus litteris super confeccione et constructione hujusmodi capelle concessis et confectis et sigillo Sarlatensis curie inpendenti sigillatis, ut earum prima facie apparebat, quasquidem litteras, actus, capitula et omnia alia et singula, in eisdem scripta et contenta, laudamus, ratifficamus, approbamus et in quantum confirmamus, possumus rata et grata insimul, et unanimiter et prout quemlibet nostrum tangit, habemus et sumus perpetuo habituri. Et omne jus, deverium, servicium, dominium et quodcumque aliud genus servitutis ad nos et nostrum quemlibet conjunctim vel divisim competentia seu competitura in loco constructionis capelle predicte et pertinenciis ejusdem solvimus, desamparamus pro nobis et nostris heredibus et successoribus universis penitus perpetuo, et quitemus, prout quemlibet nostrum tangit, dicto Guasberto et heredibus et successoribus suis ac etiam tenenciariis capelle memorate sub omnibus renunciationibus juris et facti, usus et consuetudinis pariter et cautelis, quibus conjunctim vel divisim jure aliquo, consuetudine seu aliqua alia ratione in judicio vel extra possemus venire aut nos juvare veniendi contra promisse vel aliquod premissorum talem legem nobis et nostrum cuilibet et heredibus et successoribus nostris perpetuo insimul imponentes, quod si contigebat quod absit nos, seu nostrum alterum, venire in futurum, contra contenta in hiis nostris presentibus litteris, aut aliquid de contentis in eisdem quod omnis audientia nobis et nostris heredibus et successoribus coram quovis judice perpetuo denegetur et omnis judicialis adhitus penitus precludatur.

In cujus rei testimonium et ad majorem roboris firmitatem, nos, condomini predicti, eidem Guasberto has presentes litteras concedimus, nostrorum sigillorum munimine roboratas. Datum apud Sanctum Genesium die mercurii in festo beate Catherine virginis, anno Domini millesimo trecentesimo vicesimo septimo.

(Pas de signatures ; trous des huit sceaux.)

A. de SAINT SAUD.                            P. HUET.

 

(1) Dans la collection Clérambault il y a 48 quittances de cet Arnaud de Saint-Geniès, sergent d'armes, châtelain et capitaine, de Montcuq. Environ 38 sont pourvues de leurs sceaux, portant tous l'écartelé ci-dessus. Dans le nombre 5 ou 6 ont 3 barres au lieu de bandes ; erreur de graveur, il y en a eu en tous temps.

(2) La traduction Lachaminade parait un peu forcée ; Lacaunade parait meilleure.

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