Source : Bulletin SHAP, tome XXXVI (1909)
EXTRAITS DU CARTULAIRE DE PHILIPPARIE
I. — TAUX DU DROIT DE COMMUN A BELVES.
Dans notre Histoire
de la châtellenie de Belvès (chap. II, sect. I... 3° ressources propres
au seigneur; et tirage à part p. 131
et suiv.), nous avons étudié, en détail, le fonctionnement du droit
de Commun ou Commun de la Paix. A ce moment nous n'en
connaissions pas le tarif.
Le manuscrit
Philipparie, récemment entré à la Bibliothèque nationale (Bibl. Nat. Nouvelles
acquisitions Latines, n° 1922 : anciennement Phillips manuscrits, n°86),
nous permet de combler cette lacune et de faire connaître le tarif du Commun
de la Paix à Belvès. — Fol. 28 (vers le 1/4 de la page.)
Erat etiam consuetum assensari commune dicte castellanie
per quo commune dictus dominus in suis hominibus commorariis consueverat
recipere in dicta castellania et aliis suis castellaniis.
Trad. C'était de
même l'usage d'affermer le commun de la dite châtellenie, lequel commun le dit
seigneur sur ses vassaux y demeurant avait l'habitude de percevoir dans la dite
châtellenie et dans ses autres châtellenies.
Pro quolibet
homine commorante................ duodecim denarios.
Pour chaque
vassal y demeurant............ douze
deniers.
Pro quolibet
pari bovum............................. duodecim denarios.
Pour chaque paire
de bœufs.................... douze deniers.
Jumento ferrato sarciniam portanti ......
xii denarios.
Pour une
jument ferrée portant bât.....
12 deniers.
Pro qualibet vacca, equa, azino et animali grosso, sex
denarios, dura tamen habuerant plus de uno anno[1], pro
quolibet porco et sue unum denarium, excepto tamen porco qui nutritur ad
nutricem, quia pro illo non tenentur.
Pour chaque vache, cheval, âne et animal gros six
deniers, pourvu qu'ils eussent plus de un an, pour chaque porc et truie un
denier, excepté cependant pour le porc ou truie nourris par la mère, pour
lesquels on n'est pas tenu de payer.
Pro qualibet capra et ove............ medium
denarium.
Pour chaque
chèvre et brebis
un demi denier ;
Sed illud jus commune
nunc [1496] a paucis solvetur quia rex non permittit et cœtera.
Mais ce droit de
commun maintenant n'est payé que par un petit nombre parce que le Roi n'en
permet pas la levée, etc.
Un peu plus bas
Philipparie estime la valeur totale à trente sous environ.
a) Le Commun à Bigarroque différait en quelques
points, du tarif de Belvès. Voici le passage relatif à Bigarroque :
Fol. 110, r°:
Item solebat idem
dominus et sui predecessores levare commune ab omnibus habitatoribus
dicte castellanie, praeter que a clericis nobilibus et burgensibus (sic
Belvès).
Valeat pro quolibet
homine commune causa...................... xii denarios.
Pro quolibet
pare bovum........................................................ xii denarios.
Pro quolibet
equo seu equa ferratis sarcinam portantibus
vi denarios.
Pro quolibet azino seu azina.................................................... iiii denarios,
Pro qualibet vacca
seu jurgo habita plus que de uno anno iii denarios.
Pro quolibet
porco, nisi lactet................................................. unum denarium.
Pro quatuor
ovibus seu capris............................................... unum denarium.
Hoc tenore commune solutum
et levatum fuit etiam post novam populationem usque ad annum Domini millesimum
quadringentesimum septuagesimum., etc., etc.
II. — LEUDE OU DROITS DE MARCHÉ, DE BOUCHERIE ET A
L'OCCASION DE CERTAINES INDUSTRIES
A la page 154 et 153
de notre Histoire de la Châtellenie de Belvès (tirage à part) nous avons
constaté que les droits de marché ou leudes se partageaient entre les consuls
et l'archevêque de Bordeaux, mais nous déclarions ne pas en connaître le tarif.
Or, le manuscrit
Philipparie nous permet de combler cette lacune pour le xve siècle.
Nous traduisons ce passage du cartulaire :
Fol. 29, v°, in medio :
De même on afferme la
leude de Belvès, par les officiers du dit seigneur et noble Gaston de Verdon de
Belvès, ordinairement pour chaque année 60 sous, quelquefois plus, quelquefois
moins, et cette leude est levée, par droit du seigneur, les jours de samedi et
de marché, sur les objets et choses portés sur les registres et terriers
anciens, dans lesquels il est écrit ce qui suit :
Ainsi le dit seigneur,
sur chaque homme du dit lieu, qui le jour de marché apporte pour vendre, au
marché, sur la place de Belvès, du sel, une paumée.
De même si un foreanus ou étranger porte pour vendre
du sel au marché sur la place (fol. 30, r°) au même lieu, le seigneur a de même
une paumée[2] de
sel et en plus la quantité de sel contenue dans les deux mains jointes.
De même sur les
merciers forains et marchands de chaussures, qui dressent et placent une tente
sur la place du dit lieu, le jour du samedi, au marché, un denier.
De même ledit seigneur
archevêque, le jour de samedi et de marché, a, à titre de leude, sur tout roussin
ou jument vendus et pour chacun six deniers.
De même pour l'âne ou l'ânesse, vendus,
il a pour chacun un denier.
De même sur un bœuf ou
vache, ou mulet, vendus au marche, il a sur chacun un denier.
De même pour le porc et
la truie et la brebis, vendus au marché, et pour chacun une obole.
De même il prélève sur chaque charge de fer
vendu là, un denier.
DROITS DE BOUCHERIE
De même le dit seigneur
archevêque a et reçoit pour chaque porc tué dans les bancs ou boucheries de
Belvès deux deniers.
De même pour chaque bœuf, tué là, il a 4 quatre deniers.
De même pour mouton,
brebis ou chèvre, et pour chaque animal tué là, un denier.
De même pour une conche
[3] de
blé, et pour toute autre mesure grande ou petite.
Blanc d'un quart de page.
Et
plus bas fol. 30 v° in fine
: de même le dit seigneur, de toute antiquité, chaque année, à la fêle de la
Nativité de Notre-Seigneur, à Pâques, à la Pentecôte et à la Bienheureuse Marie
d'Août, et à la fête de tous les Saints, perçoit de chaque fabricant d'huile
travaillant au dit lieu ou dans le castrum de Belves, douze deniers cadurciens[4] — [5].
Des meules en pierre et
pour moulin, il est d'usage, à leur sortie de la juridiction, et pour chaque
meule de prélever douze deniers, [fol. 36 v°, finis].
III. — Document
intEressant Bigarroque.
Sequuntur Jura et Deveria
debita pro pedatgio et leuda de Bigaruppe.
Ici sont énumérés les
droits et les redevances dues pour péage et leude à Bigarroque.
Ce catalogue du péage
de Bigarroque nous est connu par deux copies ; l'une est dans le cartulaire de Philipparie
(B. N. Nouvelles acquisit. lat., n° 1922), fol. 183 v°, 184, 185, 186 et
187 du dit cartulaire, et l'autre, dérivée de la précédente se trouve aux Archives
de la Gironde, G 190, et provient de l'archevêché, car elle porte les
indications, suivies dans le classement des archives de ce fonds (cab. 6, étag.
8, liasse 2, n° 2). Voici son intitulé :
Ancienne pancarte des
droits de péage de Bigarroque, prise dans un livre des archives de l'archevêché
de Bordeaux, lequel livre composé de 243 feuillets de parchemin et ecrit en
caractères anciens, contient plusieurs titres en latin en faveur du dit
archevêché depuis 1458 jusqu'en 1489. C'est pour lors et aux feuillets 183 v,
184, 185, 186 et 187 dudit livre que fut transcrite ladite pancarte, laquelle
est ici fidèlement copiée, sauf deux ou trois mots laissés en blanc, qui à
cause de l'ancienneté des lettres n'ont pu être lus.
Nous suivrons pour
notre texte le cartulaire Philipparie, très facile à lire, et bien que nous ne
soyons qu'un paléographe fort ordinaire, nous n'avons pas trouvé les
difficultés qui avaient arrêté l'auteur de la copie. G. 190.
Philipparie, dans le
terrier consacré aux châtellenies de l'archevêque de Bordeaux en Périgord,
décrit ainsi le castrum de Bigarroque (fol. 108). (La traduction qui
suit est littérale.)
Le castrum remarquable
de Bigarroque est tout près du fleuve de la Dordogne, situé dans une position
élevée ; le dit castrum avait été très important ; il y avait deux tours et un
grand nombre d'habitations, à savoir 160 feux ou environ, une porte avec
barbacane y conduisait; dans une autre barbacane du castrum se trouvait la
convenable chapelle du bienheureux Blaise, Bigarroque élevée au haut du rocher
avait entre autres dépendances l'abbaye de Cadouin, le monastère de St-Cyprien,
le lieu de Cioraco[6] et les castrum et localité
de Campagne qui relevaient de l'archevêque de Bordeaux, à cause de son castrum
de Bigarroque.
Sans avoir à suivre
les confrontations de la châtellenie de
Bigarroque avec les seigneuries voisines, parfaitement établies par le
cartulaire de Philipparie (fol. 111 v°, à 115 v°), remarquons que la châtellenie
comprenait, comme dépendances (fol. 111
v°) l'église et la chapelle du castrum de Bigarroque ; l'église et
l'abbaye de Cadouin ; l'église de la Salvetat de Cadouin ; l'église de Cabans
unie à celle de Bigarroque ; l'église du Coux ; l'église de Mouzens ; l'église
de St-Cyprien ; l'église de Castillo (Castel) ; l'église de Reignac ; l'église
de la Chapelle ; l'église de Lussac ; l'église de Campagne ; l'église de
Catherna, c'est-à-dire la cappella Sancti Georgii de Catherna, à
l'extrémité de la commune du Coux, à l'est des Constancies et qu'on connaissait
autrefois sous le nom de la Cadène St-Georges, aujourd'hui St-Georges tout
court.
Quoi qu'il en soit de
cette énumération, le cartulaire fixe très exactement les confrontations et
l'étendue de la châtellenie de
Bigarroque : celle-ci forme un long territoire de l'ouest à l'est ; à l'est le
territoire est au nord de la Dordogne ; ce fleuve forme limite au sud et sépare
la châtellenie de Bigarroque, de la châtellenie
de Berbiguières et de la paroisse de
Siorac-de-Belvès ; au nord du fleuve le territoire dépendant directement ou
indirectement de Bigarroque s'élève plus ou moins haut, suivant une démarcation
que Philipparie donne avec grand soin et qu'on retrouve facilement sur la carte
d'état-major.
En face de Castelréal,
à partir du bout de Siorac et du ruisseau qui eu découle[7], le
territoire de Bigarroque occupe sur une certaine étendue les deux rives de la
Dordogne, et, bientôt, il s'étend exclusivement au sud du fleuve, qui forme sa
frontière au nord.
Sans que nous ayons à
entrer dans plus de détails, on voit donc que ce territoire se prêtait à
l'établissement de lignes de douanes terrestres ou fluviales.
Le seigneur archevêque
de Bordeaux n'a pas manqué, soit de les établir, si elles n'existaient pas
avant lui, soit de les maintenir, si elles existaient, au moment où il devint
seigneur de Bigarroque ; nous croyons plutôt à cette hypothèse, tant les
douanes terrestres et fluviales remontent loin dans le moyen âge. Notre
document qui ne nous fournit, sur ce point, aucune indication, nous fait seulement
connaître le tarif de ces douanes intérieures ; nous en étudierons les
dispositions, en suivant l'ordre même des paragraphes.
I. — PEage pour
le sel.
1. Et primo de navata
salis que deducitur ultra Sanctum Cyprianurn percipiuntur quatuordecim palmate
et vii denarii monete currentis.
2. De navata vero que debet
remanere in Sancto Cypriano vel citra recipiuntur septem palmate salis tantum
et nichil precium (G. l90, ajoute : sumitur, adjonction inutile!).
3. Item de qualibet
salmata salis que deducitur per terram ubicumque ducatur, percipitur una
palmata salis.
4. Attamen habitatores
castri et castellanie de Bigarrupe, si apportant sal per terram vel per aquam
apud Bigarrupem et ibi vendant illud, nichil solvunt ; sed si extrahunt inde
solvent ut supra, et si vendiderint ibidem solvet qui emit et extrahet de loco
predicto, sed de sale necessario alicui pro usu domus suo, ubicumque portetur etiam extra castellaniam
de Bigarupe, non solvitur pedatgium ; in hoc tamen et actendenda conditio
illius qui emit, quia si emit ut revendat, vel inde salet seu saliet carnes
quas et post modum venditurus, solvet pedatgium ut supra.
Le sel venait d'une
façon générale du bas de la rivière et la remontait, s'il était transporté par
bateau ; bateau auquel, semble-t-il, on réservait le nom de naveta ou navata[8], bateau qui devait
avoir une contenance déterminée, puisque le droit était invariable ; et si le
bateau allait au-delà de St-Cyprien, c'est-à-dire sortait delà châtellenie, on
percevait 14 paumées de sel : la paumée était la quantité de sel que l’on peut
contenir dans une main[9] et en
plus sept deniers de monnaie courante. Qu'était cette monnaie courante? On
hésite à penser au denier tournois, car dans notre pancarte, toutes les fois
qu'on fixait le droit à percevoir en monnaie tournois, on l'exprime soit
formellement, soit en abréviation). Peut-être la monnaie courante était-elle
ici la monnaie bordelaise. Ce denier valait les 2/3 du denier tournois; c'est le denier visé dans la
pancarte annexée à l'ordonnance de 1456 sur les péages.
Tel est le sens du § 1.
Le § 2 suppose que la navata, chargée
de sel, remonte au plus haut à St-Cyprien ou s'arrête avant, ou ne perçoit pour
cette navata que sept paumées de sel, sans aucune redevance en monnaie.
Cette différence entre
les marchandises transportées dans la châtellenie ou au-delà, que l'on frappait
de droits différents, montre la préoccupation qu'on avait de constituer des
faveurs fiscales aux habitants de la châtellenie.
Nous retrouvons cette
pensée dans un grand nombre de nos articles.
Le §3 s'occupe de
l'entrée du sel par terre dans la châtellenie; le sel y entrait chargé sur des
animaux, probablement sur des ânes et par salmata, saumée, charge ainsi
dénommée du nom qu'on donne vulgairement à l'animal saumo (comp.
Ducange, v° salmata); on percevait sur le sel, en quelque lieu qu'on
voulût le conduire et par saumée, une paumée de sel.
Le § 4 organise des privilèges pour les
habitants de la châtellenie, faveurs fiscales que la traduction de ce paragraphe
nous fera exactement connaître.
Cependant les
habitants du castrum et châtellenie de Bigarroque, s'ils apportent du
sel par terre ou par eau à Bigarroque n'ont rien à payer, mais s'ils le font
sortir, ils paient comme dessus (§ 1, 2 et 3, suivant les cas.)
Et quand ils le
vendent ici même, aura à payer l'acquéreur qui le fait sortir du territoire;
mais pour le sel nécessaire à l'acheteur, pour l'usage de sa maison, où qu'il le
porte même hors la châtellenie, il ne paiera pas le pedatgium, le droit de
péage ; en ceci par suite il faudra examiner la situation de l'acquéreur, car
s'il achète pour revendre, ou pour saler des viandes qu'il destine à la vente,
il paiera le pedatgium comme il est dit ci-dessus.
Ces privilèges, dans
l'application pouvaient ainsi donner lieu à de nombreuses difficultés.
II. — BOIS DE DIVERSES NATURES .
Notre tarif ne prévoit
que le transport de deux variétés de bois ; les merrains, bois destinés à la
fabrication des tonneaux et la codre, destinée à faire les cercles de barrique.
5. Item
de uno miliari mayraminis quod oneratus ultra Sanctum Cyprianum et transit per
pedatgium de Bigarupe, percipiuntur duo solidi T(urnenses).
6. Et si
oneratur in Sancto Cipriano vel citra duodecim denarios T. Et si non sit ibi
miliare, vel forte sit plus percipitur
pro rata ad formum predictum.
7. Item de uno miliari
coldre apportate de supra Sanctum Cyprianum percipiuntur duodecim denarii T. de
Sancti Cipriano vel citra, vi, vel juxta formum predictum, si sit ibi plus vel
minus.
La traduction suffit à
expliquer la disposition, en se rappelant la préoccupation de faire un
privilège pour la châtellenie.
Pour un millier de
merrain charge au-delà de St-Cyprien et traversant le péage de Bigarroque, on
percevra deux sous tournois loi.
S'il a été chargé à
St-Cyprien ou en-deçà, douze deniers tournois, soit un sou tournois.
El s'il n'y en a pas
un millier, ou s'il y en a plus d'un millier, suivant le nombre, en suivant le
taux indiqué.
De même pour un millier de coldre apporté
d'au-delà St-Cyprien on perçoit (douze deniers tournois) et apporté de
St-Cyprien, ou en-deçà six deniers, et d'après ce taux s'il y on a plus ou
moins.
Retenons la faveur
faite par le tarif du péage, aux habitants de la châtellenie ; et que la valeur
des merrains était le double des coldres (bois de châtaignier exploité en
taillis.)
III. — Des bateaux transitant par Bigarroque.
8. Item de nave molendinaria vel corallo de novo
factis supra Sanctum Cyprianum, transeuntibus per aquam ante Bigarupem. Causa vendendi
vel inferius remanendi percipiuntur duo solidi.
De factis vero in Sancto
Cipriano vel citra percipiuntur xii denarii Turnenses.)
9. Item
de gabarra nova facta supra Sanctum Ciprianum transeunte ante Bigarupem ex
causa predicta percipiuntur duodecim denarii.
De gabarra vero facta
in Sancto Cipriano vel citra percipiuntur sex denarii turnenses (sic).
10. Sed
sciendum est quod si talis navis corallus vel gabarra nove transeant onerate cum
aliquibus mercaturis tunc adoptabit pedacgiarius, aut velit percipere de tali vase
novo pedatgium, vel de mercaturis que portantur in eo, et alterum vel vas aut
mercature remanebit liberum a solutione pedatgii.
8. Sur le bateau meunier ou coral, fait
nouvellement, au-dessus de St-Cyprien et passant par eau à Bigarroque, pour
vente ou pour un séjour plus long, jn percevra deux sous.
S'ils ont été faits à St-Cyprien ou en-deçà on ne
percevra que xii deniers tournois.
On voit ici la préoccupation de favoriser
la châtellenie.
9. Sur la gabarre nouvellement faite au-dessus de
St-Cyprien et passant à Bigarroque pour les causes dessus dites, on percevra douze
deniers; mais sur la gabarre faite à St-Cyprien ou en-deçà, on ne percevra que
six deniers tournois.
10. Mais il faut savoir que si un
semblable coral ou gabarre passent neufs chargés de quelques marchandises, dans
ce cas le douanier jugera s'il veut percevoir sur ce semblable transport nouveau,
ou bien sur les marchandises chargées sur lui, et, dans ce cas, l'autre objet,
soit le bateau, soit la marchandise, restera exempt du droit de péage.
IV. — Vin, blé.
11. Item de dolio vini
onerato et apportato de loco supra Sanctum Ciprianum percipiuntur quatuordecim
denarii T(urnenses|.
De onerato et apportato
de Sancto Cipriano vel citra percipiuntur septem denarii T(urnenses).
12. Item de salmata
vini portata per aquam de supra Sanctum Ciprianum et uno sextario bladi, et pro
quolibet salmata vini et pro quolibet sextario bladi percipiuntur duo denarii (Turnenses).
De Sancto Cipriano vel citra percipitur unus
denarius.
13. Item de qualibet
salmata vini et quolibet sextario bladi portato per terram percipitur unus
denarius T(urnensis).
Idem de salmata rase.
11. D'un
tonneau de vin, chargé et apporté d'une localité, d'au-dessus de St-Cyprien, on
percevra 14 deniers tournois.
S'il
est chargé et apporté de St-Cyprien ou en-deçà, on percevra sept deniers
tournois.
12. Pour
saumée de vin, apportée par eau d'en amont de St-Cyprien et pour un setier de
blé, pour chaque saumée de vin, et pour chaque setier de blé on percevra deux deniers
tournois.
Apporté de St-Cyprien
ou d'en-decà, on percevra un seul denier.
13. De
chaque saumée de vin, et de chaque setier de blé, apportés par terre, on
percevra un denier tournois, de même d'une saumée complète.
V. — Meule de
moulin.
14. Item
de mola molendini in medio porforata, si apportetur supra Sanctum Ciprianum,
percipiuntur duo solidi : de Sancto Cipriano vel citra xii denarii.
De mola non perforata
nihil percipitur.
14. De
la meule de moulin, percée en son milieu, si elle est apportée d'en amont de
St-Cyprien, on percevra deux sous. Apportée de St-Cyprien ou d'en-decà, douze
deniers.
La meule non percée ne
paie rien.
La
perforation de la meule lui donne la valeur, en la rendant propre au service ;
et c'est une opération délicate qui entraînait la rupture d'un grand nombre.
VI. — Huile.
15. Item
de salmata oleii apportata per aquam de supra Sanctum Ciprianum, percipiuntur
octo denarii ; de Sancto Cipriano vel citra percipiuntur quatuor denarii.
16. Item de salmala
oleii apportata per terram undecumque veniat, percipiuntur quatuor denarii.
15. D'une saumés d'huile, apportée par eau, d'en amont de
St-Cyprien, on perçoit huit deniers ; de St-Cyprien ou d'en deçà on perçoit
quatre deniers.
16. D'une saumée d'huile, apportée par terre, d'où
qu'elle provienne, on percevra quatre deniers.
VII. — Des
porcs.
17. Item de porco salso de supra Sanctum
Ciprianum apportato per aquam, percipiuntur duo denarii.
De Sancto Cipriano vel
citra percipitur unus denarius, et si apportetur per terrain, undecumque
veniat, percipitur unus denarius.
18. Item si unum animal portet plus quam quatuor porcos
non solvuntur pro tota carga, nisi quatuor denarios (sic).
Pour un porc salé,
apporté par eau d'en amont de Saint-Cyprien on perçoit deux deniers.
S'il est apporté de St-Cyprien ou en
deçà, un seul denier.
S'il est apporté par
terre, d'où qu'il vienne, on perçoit un denier.
Si une bête transporte
plus de quatre porcs, on ne perçoit pour toute la charge que quatre deniers.
VIII. —Marchandises
se vendant aU poids,
DRAPS, CUIRS, FER.
19. Item de qualibet salmata seu carga rerum que
venduntur ad pondus, item pannorum, corii cordoani percipiuntur quatuor denarii
; de carga ferri de ferro percipiuntur duo denarii ; de carga operis ferrei seu
ferri operati percipiuntur quatuor denarii.
De chaque saumée ou
charge de choses, qui sont vendues au poids, de même des draps, des cuirs pour
cordonniers, on perçoit quatre deniers. Sur la charge de fer brut, on perçoit
deux deniers ; d'une charge de fer forgé ou ouvré on perçoit quatre deniers.
IX. — Merciers
et colporteurs.
20.Item mercerii et colerii portantes ad collum res venales,
que solvunt et solvere consueverunt pedatgium, solvunt obolum ; mercerii cum
animali portantes merces solvunt unum denarium.
Sed si mercerii seu collerii
portantes ad collum sequantur mercata de
quiudecim in quindecim diebus, non plus solvent qnam unum obolum.
Portantes vero cum
animali merces non plus solum quam unum denarium infra quindecim dies, nisi
augmentaverint in oneribus mercaturarum suarum.
21. Item de pelia panni
integra, que non est in carga, percipitur unus denarius et de escaces sive
frustro pannii percipitur unus obolus.
De même les merciers
et les colletiers portant, suspendus au cou, les marchandises à vendre, qui
paient suivant la coutume les droits de péage, paieront une obole. Les merciers,
portant le:- marchandises avec un animal, paieront un denier.
Ces droits frappent le marchand lui-même,
sans préjudice des droits auxquels, les marchandises peuvent être soumises.
Cependant, si les
merciers et colporteurs, portant suspendus au cou les marchandises, suivent les
marchés de quinzaine en quinzaine, ils ne paieront qu'une obole.
D'où il suit, qu'à Bigarroque les marchés
avaient lieu tous les quinze jours probablement ; on dégrevait ainsi les
marchands, habitués de ces marchés, du droit des marchandises apportées qui ne
payaient le droit qu'une fois : c'était une mesure de nature à assurer la
prospérité de ces marchés ; et les marchands, dans cette même hypothèse, qui
portaient les marchandises avec un animal n'ont plus à payer qu'un denier dans
les quinze jours, à moins qu'ils n'aient augmenté l'importance de leurs
marchandises.
Pour une pièce de drap
entière, qui n'est pas comprise dans la charge, on perçoit un denier ; et des
fragments ou restant de pièce on paiera une obole.
X. — Chaudrons
et autres Grands vases de fer, d'etain OU D'AUTRE
MÉTAL ; VASES PLUS
PETITS.
22. Item de carga
calderiarum et aliorum grandium generum vasorum, ferreorum, stagnorum, seu metalli
percipiuntur quatuor denarii.
Et de qualibet pelia
dictorum vasorum, si porlntus ad collum vel supra animal, nisi qui facit ea
portari velit solvere ut supra
pro carga, percipitur unus denarius.
23. Item de qualibet
carga aliorum minutorum vasorum ferreorum vel alterius
metalli percipitur unus denarius.
De qualibet petia dictorum vasorum
minutorum.
Si portetur ad collum
et tale vas constiterit plus quam duodecim denarii, percipitur unus obolus; sed
si constiterit xii denarii tantum vel minus nihil solvitur pro illo.
24. Item de salmata
ollarum et crugarum percipitur unus pitalphus; de carga unius hominis portantis
ad collum, si carga valent ultra duodecim denarios, percipitur unus obolus,
alias nihil.
Dans ces articles on s'occupe des objets
grands ou petits, qui servent dans les maisons.
Par charge de
chaudrons et d'autres grandes espèces de vases de fer, d'étain, ou d'autre
métal, on perçoit quatre deniers.
Pour chaque pièce de
ces dits vases, portée à dos d'homme ou sur un animal, à moins que celui qui
les fait transporter ne veuille payer, comme il est porté ci-dessus pour une
charge, pour chacun de ces vases on paiera un denier.
Pour chaque charge des
autres vases petits, de fer ou d'autre métal, on perçoit un denier.
Et pour chaque unité de
ces vases petits, si on les porte à dos et que ce vase vaille plus de douze
deniers, on paiera une obole ; et s'il vaut douze deniers seulement ou moins,
on ne paiera rien pour lui.
Pour les saumées ou
charge des ouïes et des cruches, on perçoit un pitalphus[10],
c'est-à-dire un vase à mettre le vin.
Pour la charge d'un
homme portant ces objets sur le dos, si la charge vaut au-delà de douze
deniers, on percevra une obole, autrement rien.
XI. — Poissons
salés et poissons frais.
25. Item
de carga piscium salsorum vel recentium percipiuntur quatuor denarii, et si
portentur ad collum percipitur unus obolus ; et de quolibet salmone percipitur
unus denarius et de duodenaa colagorum percipiuntur quatuor denarii.
Par charge de poissons
frais ou salés on paiera quatre deniers; si on les porte sur le dos, on
percevra une obole, et pour chaque saumon (très abondant dans la Dordogne avant
la confection du barrage de Mauzac) on paiera un denier, et pour une douzaine
d'aloses on percevra quatre deniers.
XII. — Animaux vivants.
26. Item
de porco uno vel sue emptis vel causa vendendi ductis, percipitur unus obolus ;
De ove, irco, vel capra percipitur unus
obolus ;
De asino vel asina percipiuntur quatuor
denarii, et si asinus vel asina vendantur in castellania de Bigarupe percipiuntur
a vendente quatuor denarii el totidem ab emptore quotiens vendatur ;
De bove, vel vacca percipitur unus denarius
;
De equo, ronsino vel
equa, si fuerint ferrati percipiuntur sex denarii ;
Pulli tamen et pullae
aut animalia alia subgentia vel sequentes matrem, nihil solvunt.
Cet article tranche
avec les autres ; il n'est pas relatif au péage, à la douane de Bigarroque,
mais il organise un droit de marché, perçu sur les divers animaux, qui y seront
amenés. Ce tarif, bien qu'il ne soit pas identique aux règles posées dans les
chartes des bastides (art. 34 des
droits types des bastides : voir Bastides du Périgord, par M. Vigie),
préserve avec celles-ci bien des analogies ; c'était donc là des régies qui
remontaient à plus de deux siècles en arrière de l'époque où notre copie a été
dressée, et très probablement le document que nous analysons doit être fort
ancien.
Voici ces dispositions
assez curieuses par certaines particularités :
Sur chaque porc ou
truie, achetés, ou conduits pour être vendus, on percevra une obole ;
Pour une brebis, bouc ou chèvre on
percevra une obole ;
Pour un âne et une ânesse,
on percevra quatre deniers, et si l'âne ou l'ânesse sont vendus dans la châtellenie
de Bigarroque, on percevra du vendeur quatre deniers, et autant de l'acquéreur
toutes les fois qu'il vendra à son tour.
Pour le bœuf et la vache, on perçoit un
denier [11];
Pour un cheval,
roussin ou jument s'ils sont ferrés, on perçoit six deniers ;
Les poules et poulets
et autres animaux, suivant leur mère, on ne paie rien.
XIII. — Vitres.
27. Item de collerio
portante vitra ad eollum percipitur unum parvum vitrum ;
Sed de vitris porlalis
supra animal percipitur unum magnum vitrum.
Avec cet article nous revenons au tarif
de péage.
D'un colporteur
portant sur le dos des objets en verre, il est perçu une vitre petite.
Pour les objets en
verre portés au moyen d'un animal, on percevra un grand objet.
Dans les bastides le
régime était un peu différent. Sur la charge d'un homme portant de la verrerie,
on percevait soit un denier soit un objet en verre valant un denier (art. 34,
charte des Bastides).
XIV. — Peaux.
28. Item
de pelle royra percipiuntur- duodecim denarii, vel ipsa pellis, nisi portans
velit solvere duodecim denariou turon(enses).
Pour des peaux tannées
on perçoit au choix douze deniers ou une peau, à moins que le marchand ne
préfère payer douze deniers tournois.
XV. — CHATAIGNES ET NOIX.
29. Item
de salmata castanearum vel nucium apportata per aquam de supra Sanctum
Ciprianum apportata, percipiuntur duo denarii ;
De citra Sanctum Ciprianum apportata percipitur
unus denarius ;
Et si portetur per
terram, undecumque apportetur, percipitur pro qualibet salmata, unus denarius.
Pour une charge de
châtaignes ou de noix, apportée par eau d'en amont de St-Cyprien, on perçoit
deux deniers.
Si elle est apportée d'en deçà de St-Cyprien,
on perçoit un denier ;
Et si elle est entrée
par terre, d'où qu'elle vienne, on perçoit pour chaque charge un denier.
XVI.
30. Item
de salmata mullorum apportata per aquam de supra Sanctum Ciprianum percipiuntur
octo denarii ;
De citra Sanctum
Ciprianum apportata, percipiuntur quatuor denarii ;
Et de apportata per terram,
undecumque apportetunr, pro qualibet salmata percipiuntur quatuor denarii.
Bien que le mulet,
quadrupède, ne soit pas mentionné dans notre tarif, eu égard a la manière dont
s'exprime le rédacteur, nous pensons qu'il s'agit ici de certaines variétés de
poissons désignées sous le nom de mulet. (Voir Ducange, v° mullo, mullus, et
v° mulos, mullus.)
En conséquence, nous traduisons ainsi :
Pour chaque saumée ou
charge de mulets[12] apportée par eau, d'amont
de St-Cyprien, on percevra huit deniers , d'en aval de St-Cyprien, on percevra
quatre deniers ; et si on les apporte par terre, d'où qu'on les apporte, pour
chaque saumée, on percevra quatre deniers.
XVII. — REGLE DE PERCEPTION POUR LE PEAGE.
31. Item de animali
aut aliquo alio empto extra castellaniam de Bigarupe, pro quibus fuerit alibi
solutum pedatgium vol etiam de aliquo alio necessario ad usum habitatorum
castri et castellanie predictarum, non percipitur pedacgium a dictis habitatoribus,
nisi pro asino et pro asina, si emantur infra castellaniam, quia pro illis ut
supra solvitur, et non pro emptis in castellaniam si remaneant ibidem
praeterquam ab illis qui habitant ultra cumbam dictum de Auria valle versus
Sanctum Ciprianum.
Avec l'article
précédent cesse le tarif de péage de Bigarroque ; les articles suivants posent
des principes pour la perception du péage, et s'occupent du droit de marché et
de boucherie à Bigarroque.
De tout animal, lors
même qu'il ait été acheté hors la châtellenie de Bigarroque, et pour lesquels
on aurait payé la le droit de péage, soit qu'il soit destiné à l'usage des
habitants du castrum et de la châtellenie, on ne fera pas payer le péage
aux dits habitants, si ce n'est pour l'âne ou pour l'ânesse, si on les achète
dans la châtellenie, car pour ceux-ci on paiera comme il est dit ci dessus
(soit 4 deniers), et non pour ceux achetés dans la châtellenie, s'ils y
restent, à l'exception des personnes habitant au delà de la combe dite
d'Aurival vers Saint-Cyprien.
Cette combe d'Aurival
est mentionnée dans le Dictionnaire Topographique dans la commune de
Mouzens; c'était à partir de là un territoire vers Saint-Cyprien, qui faisait
bien partie de la châtellenie de Bigarroque, mais que l’on considérait, comme
terre étrangère, et on la privait de certains avantages réservés à la châtellenie
et à ses habitants.
32. Item
de aliqua re comestibili vel alia, empta vel vendita, per aliquem de castellania,
praeterquam per dictos habitatores ultra cumbam de Aurea valle, si emptor velit
ad usum suum et domus suo nichil solvitur pro pedatgio vel leyda ubicumque portetur
infra castellaniam, nisi de asino seu asina pro quibus omni die solvitur pedatgium
seu leyda.
Pour chose comestible
ou tout autre, achetée ou vendue, par quelqu'un de la châtellenie , à
l'exception desdits habitants au-delà de la combe d'Aurival, si l'acheteur la
déclare pour son usage ou celui de sa maison, il n'y aura rien à payer, pour
péage ou droit de marché, où qu'il la transporte dans l'intérieur de la châtellenie
, à moins qu'il ne s'agisse d'un âne ou d'une ânesse pour lesquels en tout
temps on paie le péage et la leude.
33. Item
quicumque emerit bladum vel vinum aut alias mercaturas ad revendendas, et extrahat
de castellania solvit pedacgium et leydam quacumque die emerit.
Quiconque achète blé
ou vin, ou autres marchandises pour la revente et les fasse sortir de la
châtellenie, il aura à payer le péage et la leude quelque jour qu'il ait
acheté.
XVIII. - Des
juifs.
34. Item
Judeus transitum faciens per pedatghariam castri et castellanie de Bigarupe
solvit duodecim denarios, et judea totidem ; et si judea sit pregnans solvit
duos solidos.
Cette règle manque de
libéralisme, elle est traditionnelle dans les péages, et on la rencontre dans
beaucoup de leurs tarifs[13].
Le juif qui traverse
les lignes de péage du castrum ou de la châtellenie de Bigarroque, paye
douze deniers (un sou) ; la juive en paie autant, et si la juive est en état de
grossesse elle paiera deux sous.
XIX. — Contentieux
dE pEage.
35. Item
si super aliis tantum et de pedatgio forte oriatur dubium recurritur ad pedatgarios
et sapientes de Limolio et levatur pedatgium, sicut ipsi consueverunt levare,
vel sicut ipsi consulunt, et simililer illi de Limolio recurrunt in dubio ut
pedatgiarios ut sapientes de Bigarrupe.
Notre disposition,
bien qu'elle ne constitue pas une garantie bien sérieuse pour les redevables,
présente un certain libéralisme, puisque le redevable, au lieu de voir la
difficulté portée devant les juges de l'archevêque de Bordeaux, la voyait
soumise à des personnes qui ne relevaient pas de lui.
Si, à l'occasion de
ces matières seulement et à l'occasion du péage, un doute venait à se produire,
on avait recours aux péagers et aux prud'hommes de Limeuil, et le péage était
perçu, suivant la coutume suivie par eux, ou bien suivant leur décision ; et de
même les employés du péage de Limeuil, en cas de doute sur la perception
avaient recours aux péagers et aux prud'hommes de Bigarroque.
XX.. — Droits
de boucherie.
Avec l'article 36 est tixé le droit de boucherie.
36. Item de bove,
vacca, porco vel sue ad macellum de Bigarupe et in castellania venditi,
percipitur pro leyda a vendente
unus denarius, pro quolibet animali et de quolibet alio animali in dicto macello
vendito praeterquam de agno edullo et porcello subgentibus[14],
percipitur unus obolus pro leyda.
Le tarif est très
simple pour tout bœuf, vache, porc ou truie, vendus à la boucherie de
Bigarroque et dans la châtellenie, ou percevait à titre de leude du vendeur un
denier ; pour tout autre animal, et quoiqu'il fût vendu à la boucherie, sauf
pour les agneaux, chevreaux et cochons de lait, suivant leur mère, on percevait
à titre de leude une obole.
Cet article permet
d'affirmer qu'il y avait à Bigarroque une boucherie ou mazel, que l'archevêque
louait ou concédait à fief à un boucher ; il est douteux que ce fût là un
monopole organisé : Tout habitant pouvait tuer et vendre en payant la leude (Comp. les Bastides du Périgord).
XXI. — Droits
de marché.
Les seigneurs
attachaient la plus grande importance à l'établissement d'un marché dans la
seigneurie ; ils en retiraient quelques redevances, mais de multiples avantages
en résultaient pour les habitants.
Notre paragraphe
s'occupe des droits pécuniaires du seigneur à l'occasion du marché et qu'on
appelait deverium ou leyda.
37. Item sciendum est quod de cunctis
animalibus, vivis, venditis in castro et castellanie de Bigarupe a die lune
hora prima usque ad horam vesperorum diei mercuri, debetur domino archiepiscopo
deverium seu leyda, prout supra dictum est, de animalibus, vivis, venditis seu
causa vendendi ductis : videlicet pro uno bove, vol pro una vacca, illis diebus
et horis, venditis vivis in castro et castellania predictis, debetur unus
denarius, pro porco vel sue aul alio minuto animali illis tribus diebus venditis,
vivis, debetur unus obolus, et de uno denario seu quatuor oneribus feni, aut de
uno solo onere feni seu herba prati venditis, illis tribus diebus inter horas
predictas percipitur unus denarius ab emente et unus denarius vendente (finis.
fol. 187.)
Il faut savoir que de
tous les animaux vivants, vendus dans le castrum et la châtellenie de Bigarroque,
de la première heure du lundi jusqu'à l'heure des vêpres du mercredi, on doit
au seigneur archevêque de Bordeaux (deverium ou leyda) un droit de leude, comme
il est dit plus haut, sur tous les animaux vivants, vendus, ou conduits en vue
de la vente : à savoir pour un bœuf ou une vache, pendant ces jours et heures,
vendus vivants dans le castrum et la châtellenie susdite, il est dû un
denier ; pour un porc, une truie, ou tout autre animal de petite taille, ces 3
jours, vendus, vivants, une obole ; et pour une moule de foin ou quatre
fardeaux de foin, ou d'un seul fardeau de foin ou herbe de pré, vendus, pendant
les 3 jours, entre les heures fixées, il est perçu un denier de l'acheteur et
un denier du vendeur.
Tel est ce tarif de
péage de Bigarroque ; par les ressemblances qu'il présente, sur certains
points, avec les tarifs suivis dans les bastides, on peut présumer qu'il est
beaucoup plus ancien que le cartulaire dans lequel il est inséré ; il ne
présente pas la sécheresse des tarifs de même genre, déjà publiés ; c'est un
véritable code du péage ; aussi avons-nous cru utile de le faire connaître, car
nous le croyons inédit.
On remarquer que les
droits ne sont ni très forts, ni arbitraires, caractères que l'on
a reprochés à d'autres tarifs de péage de la même époque[15]. En
outre, on a cherché à donner des garanties aux redevables.
La perception de ces
droits dura jusqu'à la Révolution, au profit du seigneur archevêque ; mais le
tarif en fut quelque peu remanié par un arrêt du Conseil du 21 avril 1671,
portant règlement pour les droits de péage, et application par décision de
monseigneur Daguesseau, du 21 mars 1672[16].
Le cartulaire Philipparie
nous fait connaître quelques autres faits : fol. 189 v° ;nous y apprenons que
le seigneur de Berbiguières, vassal de l'archevêque de Bordeaux, au xve
siècle, s'efforçait de s'emparer du péage sur le fleuve de Dordogne, le long de
sa terre de Berbiguières et d'usurper l'usage et toute utilité du fleuve, pour
la plus grande partie, tant pour la pêche, que pour les passages et même pour
les ports de Fourques[17] et
de Picamilh. — L'archevêque avait eu des droits dans le port et territoire de
Sori près d'Alles, juridiction de Limeuil ; ils furent usurpés par le seigneur
de Limeuil et l'évêque n'eut pas pour combattre cette usurpation des documents
en forme légale[18].
Il avait un péage de
Couze[19],
mais peu important; il n'était affermé avec la baylie que 60 sous tournois et
quelquefois moins (op. cit.).
Philipparie nous fait
connaître (fol. 118) que de son temps les droits perçus au port de Bigarroque,
avec le péage terrestre et fluvial de toute la juridiction, étaient affermés
pour 200 livres de monnaie courante, quelquefois plus, quelquefois moins.
Tels sont sur cette
matière les renseignements du cartulaire de Philipparie.
A. Vigie.
[1] Pour tous les droits de leude ou marché, dans les bastides c'était la règle suivie d'une façon générale : les animaux ne payaient que s'ils avaient dépassé un an. (Art. 34 des chartes des bastides.)
[2] Dans le texte y a bien salmatam (saumée, charge), mais par comparaison avec le paragraphe précédent, nous
B pensons qu'il faut suppléer un p et traduire par paumée.
[3] Mesure du blé qui à Bayonne, d'après Ducange, valait 54 livres.
[4] Le sou caorcens valait la moitié du sou tournois, d'après M. de Wailly 0 fr. 4493, le sou tournois valant 0 fr. 8986, et partant les deniers tournois et caorcens présentaient la même différence de valeur.
[5] Les points représentent une phrase de quelques lignes dont quelques mots sont difficiles à lire et dont l'interprétation me parait la suivante : le texte après avoir rappelé une espèce de droit de patente sur les fabricants d'huile, ajoute : « Et je crois qu'il dut être entendu de même pour toutes les choses qui par fraude seraient aliénées à jamais, hors la juridiction, au préjudice du seigneur, et les diminutions de sa juridiction ou de son domaine en proportion de la diminution subie », l'auteur de ces actes, à cause de pertes qu'il infligeait au seigneur, avait à subir une taxe proportionnelle à la diminution des droits subis par le seigneur.
[6] S'agit-il de Siorac-de-Belvès ? Il formait bien un fief relevant de l'archevêque de Bordeaux, mais il n'était pas de la chàtellenie de Bigarroque, comme cela est établi au folio 115 v°, puisqu'on y dit que la Dordogne sépare la paroisse de Siorac de la châtellenie de Bigarroque : il s'agit ici de Cieurac.
[7] La séparation suivait un chemin venant de Castelréal, et descendendo ab inde usque ad gorgam seu abissinum vocatum del boch de l'aracol facientem divisionem inter juridictionem de Bellovidere et castellaniam de Bigarrupe et descendendo, per dictum rivum de Paracol usque ad flumen Dordonie qui rivus etiam facit divisionem inter juridictionem de Bellovidere a parte ecclesie de Palayraco et juridictionem de Bigarupe a parte loci de Cieuraco (f. 13, comp. f. 189 v) (l'aracol gorga ou rivus ne se trouve pas dans le Dictionnaire topoyraphique de M. de Gourgues.)
[8] Comp. Ducange v° Naveta et exemple de 1288.
[9] Voir Ducange v° Palmata salis.
[10] Ducange. V° Pitalphus : vas
vinarium.
[11] La différence du tarif entre les ânes et les bœufs est certaine : la lecture du cartulaire est certaine, et on retrouve plus bas ce taux de un denier pour le boeuf ; on ne peut tenter aucune explication avec certitude ; il est remarquable que dans les chartes des bastides (art. 34) un trouve une différence analogue, mais moins forte : bœuf ou vache 1 denier ; âne et ànesse deux deniers.
[12] Probablement salé.
[13] Note Cl. R. : Nous n’apporterons ici aucun commentaire sur le propos de A. Vigié. Nous rappellerons simplement au lecteur quelques dates et événements :
1290 : expulsion de la communauté juive d’Angleterre par Edouard Ier.
1301 : Ordre de Philippe le Bel à son sénéchal de chasser les Juifs du Périgord (voir sur ce site : http://www.guyenne.fr/archivesperigord/BNF/Tome72/T72f214.htm ).
1306 : expulsion des Juifs de France par Philippe IV le Bel.
1320-1321 : massacres généralisés des communautés juives sur le passage de la croisade des Pastoureaux , avec des complicités locales comme à Saintes ou Bergerac (voir sur ce site l’adresse : http://www.guyenne.fr/archivesperigord/Arch_Nat/Pogroms/JJ65A_f172.htm (document in registre Arch. Nat., reg. JJ65A des registres du Trésor national des chartes, f° 172 et suiv.).
1322 : seconde expulsion des Juifs de France.
[14] Lecture certaine : G. 190, donne subjacentibus.
[15] Droits de péage et de passage dans la juridiction de Vayres et dans quelques autres seigneuries des bords de la Dordogne par Léo Drouyn (1869).
[16] G. 190. Archives de la Gironde.
[17] L'usurpation sur Fourques ne réussit pas et une transaction intervint entre le seigneur de Gaumont, alors seigneur de Berbiguièrs et l'archevêque de Bordeaux, représenté par Philipparie (acte reçu par Jean de Bossac, notaire de Belvès).
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[18] Fol. 191.
[19] Fol. 192, v°