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Source : Bulletin SHAP, tome XXXXII (1915)

 

pp. 235-240.

LES DEUX DERNIERS PRINCES DE CARENCY

Les glorieux combats récemment livrés autour de Carency[1] doivent rappeler aux Périgourdins un des événements les plus caractéristiques, survenu pendant nos guerres de religion ; nous intéresserons peut-être quelques membres de notre Société archéologique, en leur racontant cet épisode.

Carency fut pendant cent ans environ le principal apanage d'une branche de la famille de Bourbon. Le premier descendant de saint Louis, qui porta le titre de prince de Carency, fut Jean, mort en 1453, fils de Jean I et de Catherine de Vendôme ; Charles[2], petit-fils de Jean, épousa Catherine d'Aligre et n'eut qu'une fille, Isabeau, mariée en 1516 avec François de Pérusse des Cars, seigneur de Lavauguyon[3], en Limousin, qui devint par ce mariage prince de Carency.

François était frère de Jeanne, mariée avec Jean de Caumont de Castelnau, père de : 1° Geoffroy, abbé de Clairac, qui apostasia pour épouser Marguerite de Lustrac, veuve du maréchal d'Albon de Saint-André ; 2° François de Caumont La Force, qui périt au massacre de la Saint-Barthélemy. Tous les Caumont étaient alors calvinistes, tandis que les des Cars étaient catholiques.

Geoffroy de Caumont mourut en 1574 ; trois mois plus, tard, le 19 juin 1574, sa fille Anne vint au monde et fut baptisée suivant le rite protestant; on lui donna le titre de marquise de Fronsac. Sa mère conserva le nom de maréchale de Saint-André; quoique veuve d'un des trois triumvirs, elle n'avait pas craint d'abjurer en épousant l'abbé de Clairac. Jean de Pérusse des Cars, fils de François, devint le tuteur de sa cousine, Anne de Caumont.

La marquise de Fronsac possédait une des fortunes les plus considérables du royaume ; toute la noblesse le savait et, dès sa sixième année, les plus brillants gentilshommes de France la demandèrent en mariage, notamment le vicomte Henri de Turenne[4], qui devint plus tard duc de Bouillon, et Charles, baron de Biron[5], qui devait mourir sur l'échafaud, en 1602. Jean de Lavauguyon, prince de Carency, s'occupa très peu de sa pupille jusque vers 1580 ; mais dès qu'elle eût atteint sa septième année, il résolut de la marier avec son fils aîné, Claude, âgé de quatorze ans ; il avait un second fils, Henri, âgé de douze ans. La maréchale de Saint-André repoussa la demande du prince, qui partit aussitôt en guerre et mit le siège devant Castelnau[6], pendant que le gouverneur, Geoffroy de Vivant[7], seigneur de Mel[8], poursuivait les catholiques dans le Haut-Quercy. La maréchale de Saint-André et sa fille furent très facilement enlevées et conduites à Lavauguyon, où la maréchale fut bientôt remise en liberté; les ravisseurs ne désiraient garder auprès d'eux que la riche héritière: la princesse de Carency s'occupait d'ailleurs avec le plus grand soin de la jeune orpheline et ne faisait rien qui pût contrarier ses idées religieuses.

Peu de temps après, le prince de Carency, abusant de ses droits de tuteur, se fit livrer les châteaux et les domaines que la maréchale el sa fille possédaient dans l'Agenais et le Périgord : Caumont[9], Tonneins-dessus[10], Folhet, Castelmoron[11], Gondourville[12], Coutras[13] et Fronsac[14]. Seul, Geoffroy de Vivant, gouverneur de Castelnau et des Milandes[15], refusa de livrer les châteaux dont il avait la garde ; Geoffroy de Caumont, en mourant, l'avait chargé de veiller sur l'enfant qui devait naître dans trois mois, et la maréchale .mettait en lui toute sa confiance.

Henri de Béarn, qui sera plus tard Henri IV, était alors gouverneur de la Guyenne ; Vivant eut recours à lui, demandant que le prince de Carency fût contraint de rendre immédiatement à la maréchale sa fille et ses domaines. Le Béarnais obligea Lavauguyon à remettre sous l'autorité de Geoffroy de Vivant les châteaux dont il s'était emparé sans aucun droit, mais il lui laissait sa pupille avec les terres de Castelnau, Coutras et Fronsac.

Jean de Lavauguyon jugea nécessaire de prendre des dispositions définitives pour qu'on ne vînt plus contrarier ses projets ; aux premiers jours de janvier 1586, la marquise de Fronsac fut mariée avec Claude de Pérusse des Cars, qui fut aussitôt nommé Prince de Carency, tandis que le Roi donnait à son père le titre de comte de Lavauguyon. Le mariage fut conclu sous la réserve qu'il ne serait pas consommé avant que la jeune mariée eût atteint sa quatorzième année.

Claude, prince de Carency, âgé de dix-huit ans à peine, faisait déjà bonne figure à la cour ; il y voyait parfois Charles de Biron, qui ne lui pardonnait pas d'avoir épousé la riche héritière sur laquelle il avait mis ses prétentions; le baron de Biron était aussi téméraire qu'ambitieux, mais dépourvu de tout sens moral ; il provoqua le prince en duel et s'entendit avec le marquis de Montpezat[16] pour le tuer, dans une rencontre déloyale, le 6 mars 1586.

Le comte de Lavauguyon se plaignit amèrement au Roi, sans aucun succès ; ces combats meurtriers, comparables aux pires assassinats, étaient encore très fréquents à la fin du xvie siècle ; Biron ne fut pas inquiété, mais Lavauguyon s'empressa de marier la jeune veuve avec son second fils Henri, qui sera le dernier prince de Carency ; l'union fut célébrée au mois d'août 1586; la marquise de Fronsac avait douze ans et son deuxième mari entrait dans sa seizième année.

Les deux mariages avaient été contractés malgré la formelle opposition de la maréchale de Saint-André, qui faisait partager son ardente soif de vengeance par Geoffroy de Vivant, gouverneur de Castelnau. Dans ce triste siècle des guerres de religion, les pires violences semblaient permises à tout catholique contre les huguenots, à tout protestant contre les catholiques; et parfois une circonstance imprévue donnait aux uns comme aux autres le suprême bonheur d'exercer les plus terribles représailles. Geoffroy de Vivant fit naître cette heureuse occasion dans des conditions mémorables; il la saisit aussitôt.

Au mois de décembre 1585, le duc de Mayenne[17] avait été envoyé par Henri III dans la Guyenne, pour remettre sous l'obéissance du Roi les protestants du Bas-Limousin, du Périgord et du Haut-Quercy ; le brillant prince de Lorraine commandait une armée de vingt-mille hommes, avec laquelle il promettait de conduire bientôt à Paris le roi de Navarre et le vicomte de Turenne, prisonniers; il s'empara facilement de Montignac[18], traversa sans aucun obstacle la vicomté de Turenne et le Haut-Quercy, enleva malgré l'énergique et longue résistance des huguenots les villes de Ste-Bazeille[19], Montségur[20], Castillon sur Dordogne[21], Ste-Foy la Grande[22], et mit le siège devant Mussidan[23], tandis que la marquise de Fronsac épousait à Lavauguyon[24] le prince Henri de Carency. Geoffroy de Vivant défendait la puissante citadelle, attaquée par Mayenne.

Nous n'avons pas pu découvrir le secret des négociations menées sous les remparts de Mussidan par le vaillant chef de l'armée catholique et par le farouche huguenot ; les « Faits d'armes » de Vivant ne disent pas un seul mot sur cette expédition ; mais il est certain que les deux généraux ennemis confondirent leurs armées pour aller à Lavauguyon enlever la princesse de Carency à son tuteur.

Vivant ne pardonnait pas au comte de Lavauguyon l'audace avec laquelle il avait, en 1581, pris le château de Castelnau et la jeune orpheline, dont il avait la garde; pour se venger d'une aussi grave injure, il convint avec Mayenne que les deux armées, au lieu de se battre l'une contre l'autre, iraient ensemble réclamer au comte de Lavauguyon la marquise de Fronsac, qui deviendrait plus tard la femme du duc d'Aiguillon, âgé de huit ans, fils unique du duc de Mayenne; le roi de Navarre avait approuvé cette nouvelle combinaison, et comme preuve de sa formelle adhésion, il donnait ordre de livrer immédiatement au chef de l'armée royale la ville et le château de Caumont, en Agenais; la maréchale de St-André donnait aussi son consentement, par haine contre Lavauguyon.

On ne pouvait plus songer à marier Anne de Caumont avec le baron de Biron, meurtrier de Claude de Carency ; mais le duc de Mayenne avait récemment épousé, en secondes noces, Henriette de Savoie, mère du marquis de Montpezat, complice de Biron dans le duel du 6 mars 1586 ! — Tout est donc bien étrange dans le traité de Mussidan.

Cependant la convention des deux chefs ennemis fut loyalement exécutée ; les alliés partirent de Mussidan, traversèrent Nontron et St-Mathieu[25], dressèrent leur camp en vue des tours de Lavauguyon et envoyèrent leurs sommations au comte. Jean des Cars opposa quelque résistance pour sauver son amour-propre ; puis il livra la jeune princesse de Carency, qui subissait avec une mélancolique douceur les cruelles vicissitudes de sa vie déjà si tourmentée.

Le duc de Mayenne revint à Paris ; il n'était pas suivi des deux nobles chefs des armées protestantes, le roi de Navarre et le vicomte de Turenne ; mais il menait, avec tous les égards possibles, la jeune marquise de Fronsac.

Peu de temps après, le dernier prince de Carency mourut et, le 2 février 1595, après un troisième enlèvement, plus dramatique encore que les deux premiers, Anne de Caumont, veuve des deux derniers princes de Carency, épousa François d'Orléans-Longueville, comte de St-Paul[26]. Geoffroy de Vivant était mort le 21 août 1592, sans avoir eu l'occasion de tirer l'épée contre le chef des Ligueurs. Rien ne troubla la singulière union de ces deux braves adversaires, .et le duc de Mayenne resta le fidèle et généreux protecteur du seigneur de Mel et de son fils, le seigneur de Doyssac ; les archives de La Verrie de Vivant contiennent deux lettres qui leur sont adressées, toutes deux empreintes des meilleurs sentiments de dévouement et d'amitié. Il était utile d'insister sur cet épisode, où l'on voit très clairement que, pendant nos longues et cruelles luttes civiles du XVIe siècle, l'idée religieuse eut peu d'influence sur les nombreuses batailles livrées en Périgord et Limousin.

R. de Boysson.

pp. 241-245.

QUATRE LETTRES INEDITES DE MARGUERITE DE VALOIS

a Jean de Champagnac

Nous avons heureusement retrouvé aux Archives départementales de la Dordogne, dans le fonds de Saunier, les quelques lettres de Marguerite de Valois que notre regretté confrère Georges Bussière cherchait partout pour les joindre à son dernier mémoire sur Brantôme et ses monuments. Il aurait été déçu. Ces lettres offrent, en effet, peu d'intérêt, et quel que fut son habile talent de metteur en œuvre, il n'aurait pu en tirer grand avantage.

Elles ont été données, il y a plusieurs années, aux Archives de la Dordogne, comme le constate un de nos anciens procès-verbaux, par le regretté Fernand de Bellussière, qui préparait alors une généalogie de la famille de Saunier. Ce sont de véritables lettres d'affaires, adressées par la reine Marguerite à un périgourdin, Jean de Champagnac[27], son conseil et ami, conseiller du Roi, lieutenant assesseur au siège présidial de Périgueux, maître des requêtes ordinaire en la maison de Navarre et ancien domaine de la reine Marguerite, sur lequel l'on avait jusqu'à présent aucune précision biographique. Mais un rapport sur les archives du château de Fontgrenon, que nous apporta récemment notre érudit vice-président M. Dujarric-Descombes, nous apprend que ledit Champagnac, du lieu de Bourdeille, reçut des lettres d'anoblissement au mois de janvier 1596.

On sait qu'il est l'auteur de plusieurs ouvrages philosophiques dont le dernier, en date de 1607, contient une épître dédicatoire à la Reine. L'hypothèse de l'abbé Audierne, qui le fait naître à Champagnac-de-Bel-Air, devient ainsi inexacte et cependant le lieu où ces lettres ont été découvertes, au château des de Saunier, près de Champagnac, aurait pu la confirmer.

La lettre de Marguerite au roi Henri IV, son mari, que l'abbé Audierne a insérée en 1801, dans son Périgord illustré (p. 115), n'était pas inédite. Elle avait été publiée bien avant, en 1842, par Guessard, dans son édition des Mémoires et lettres de Marguerite de Valois [28].

Des quatre lettres que nous apportons, trois sont autographes ; la quatrième, en meilleur état de conservation, est de la main d'un secrétaire. Les trois autres ont beaucoup souffert de l'encre qui les a brûlées, y a fait des trous dans le papier et les a rendues presque indéchiffrables. Nous avons eu recours à l'obligeance éclairée d'un paléographe distingué qui s'est spécialement consacré au xvie siècle, M. Patry, archiviste aux Archives nationales, actuellement mobilisé à Bordeaux, et grâce à lui, nous sommes en mesure de les reproduire. Qu'il nous permette de l'en remercier sincèrement !

Non datés[29], sauf un de 1607, ces grimoires sont, comme on le verra, écrits par la reine Marguerite, peut-être de sa retraite du château d'Usson, en Auvergne, où notre Brantôme fort épris était allé la voir. Ils concernent la pension que voulait bien lui accorder son mari le roi Henri IV, après son divorce. Elle en parle longuement à son ami Jean de Champagnac, qui lui avait été vraisemblablement recommandé par son adorateur Brantôme, voisin de campagne de Champagnac, comme un conseil prudent et expérimenté, capable de faire grossir le chiffre de la pension, s'il était possible.

 « Elle dotait et fondait des couvents, écrit Sainte-Beuve, tout en payant des gens de savoir pour l'entretenir de philosophie et des musiciens pour l'amuser pendant les offices divins ou dans les heures plus profanes. Elle faisait force aumônes et libéralités et ne payait pas ses dettes. Ce n'était point précisément le bon sens qui présidait à sa vie »[30].

On comprend que dans ces conjonctures elle avait un fréquent besoin d'argent et qu'elle essaye de tous les moyens à sa portée pour s'en procurer. Elle insiste auprès de son bon ami et mandataire Champagnac pour qu'il hâte la solution des affaires qu'elle lui signale. Mais plusieurs de ses recommandations sont pour nous obscures et nous échappent aussi bien que les termes de procédure qu'elle emploie. .  Laissons d'ailleurs la parole à la belle Reine.

F. V.

 

I

Suscription : Monsieur de Champagnac et Lalemant et à Mr Colin de Linest [31].

Monsieur de Champagnac et Laleman,

Cete si servira pour toux deux. M. de Rieux[32] ma tant fait de protatations (sic) dafectionner mon bien que je me suis résolue an faire preuve an cete aucasion. Revenes donc toux deux et maportes les expéditions nesesaires pour le parti des commisères des montres. Dites ausi à M. Robin[33] s'il l'est (sic) là que reviene ; car je désire parler à llui     ains (avis) ?? qui seroit beaucoup meilleur.... celui de latribution aus receveurs particuliers. Venes donc toux trois avec lesdites expéditions prontemant, je vous prie. Et croies que si lon me fait la grâce dobtenir et faire reusir cet afaire, que je reconnaîtrai la paine qu'aués qu'aves qu'aves (répété) prise et me feré tousjours paraître.

Vostre plus afectionnée amie.

Marguerite.

II

Suscription : A Monsieur de Champagnac (1)[34].

Monsieur de Champagnac, vous mescrivies quayant receu ma lettre, vous ne feres faulte a me venir treuver et laisser a monsieur Robin a levier les xpeditions. Si vous aves bien leu ma letre, vous aures veu que je vous y mandois que ayant heu toutes les expéditions neccessaires pour faire vérifier ce dont a la court de parlemant et a la chambre des comptes et que me les aportissees et continuant en ceste mesme intention. Je vous prie ne partir poinct de la que nayes lordonnance de monsieur de Sully[35] (2) et lacquit patent et me les aportes, car monsieur de Rieux et asses empêche a laultre don sans luy donner cette peyne. Uses en dont ainsi et vous assures du désir que jay de recognoistre la peyne que je vous donne et de me faire tousjour parestre.

Vostre plus afectionnee amie,

Marguerite.

III

Suscription : A Monsieur de Champagnac [36].

Monsieur de Champagnac, le sr de Ste Colonbe[37] me dit hier que le Roi mavoit acordé laurs des veues et montrées postulan an heredité. Avant, Antoine m'a randu autres lettres [ ] Vous m'escrives que le Roi an veut retrancher la postulacion et l'eredité ; toutefois pour l'eredité que M. le gardes sceaux[38] (5) vous a promis de [le] fere passer (?) Ill an faut donc faire estât; mes    ne vauderoit rien sans la postulation de procureur, laquelle il ne nous permit de faire navant les deux, mais        que porte ledit Ste Colonbe avec la mesme postulation a esté acordée. Bandés vous i donc, car je le veux avec la postulation et l'eredité et non autremant. Quan aux duchés et parrentés. je veux bien qui l'anvoiet a     mes non les autres segneuries qui ont desjà resu (?).... car puisqu'il lont resu les noteres et serjens, il reseveront bien ceux-ci et sans cela le parti seroit trop petit. Vous m'escrivés que Mr de Riu an veut proposer un autre ; je lui escris que je le prie me faire avoir cet avis et que je n'an veux point (l'autre.

Arestez vous donc a cet avis et ne saisez (??)    pas (?) d'inportuner et preser que ne Taies obtenu antier avec la postulation et l'eredité et ne vous an despartés plus. L'espérance sur quoi lon me vouloit re (sic) retarde l'acort de__ Cet (sic) un artifise trop grosier.... mofanse bien [davantage a lofre qui me font de faire.... desfance an resevoir de toux pour ampaicher le paiemant de Mr de la ….. Se seroit me faire perdre toute l'esperense et faire que je ne pourei james trouver personne qui me voulut rien prêter. Gardes vous bien d'acepter ses ofres. Ce n'est pas cella que je leur demande ; mes je suplie le Roi m'acorder ses veues et visites, postulant et an hérédité, sauf aux duché et parentés. Seulemant cella ne nuit ni au au (répété) Roi ni au peuple. C'est le plus petit de toux ceux que j'ai fait proposer. Faites an selle instanse que vous l'anportiés et n'an bougés que ne l'aies eu et m'an aportés toutes les expéditions nesesaires et n'an con[servés] aucune.... au Roi, à M. de Sulli, à M. le gardes seaux (sic) et à M. de Vileroi[39], à M. de Riux et de Chatauneuf et de.... Il ni a aparanse qu'il l'aiet (pourait) aucune reson pour refuser la postulation puisque tous les jours, il la mectet an d'autres estas, et pour les justises particulières, les noteres et serjans qui i ont esté, vous lesvet les difi[cultés]. Reslevés i vous donc et n'an despartés aucunemant par neulle autre propotition. Car c'est ma resolution. Et si il lan ait besoin, gi seré mardi et me feré tousjours paraître. Vostre plus afectionnée et perfaite amie,

Marguerite.

[Au bas et d'une écriture postérieure] :

Montozon, commissaire subdélégué.

 

[Et d'une écriture postérieure] :

Lestre de la rené Marguerite.

Adresse : A Messieurs de Chanpagane (sic) et de Sainte-Colonbe.

Je suis très aise, Monsieur de Chanpagnac, que vous aies parlé au Roi et au Conseill et qu'ils vous connoiset ; j'avois à désirer an vous cella seulemant pour mon eutilité. Vous ne me faites aucune response des raisons que je vous avois escrites par Lentignolo, desquelles je vous [es]crivois causer.... Vous ne m'escrives point an avoir alegué (?) aucune. Car quant le Roi vous dit que cella estoit ruiner le peuple, vous lui déviés respondre que contrere, c'étoit le soulager pour ce que la tolérance et inpunité de..., outre plus feroit que cet abus continueroit tousjours ; mes que le faisant randre a ceux qui lavoit pris, qu'à l'avenir les autres qui seroit cella, tous i procederoit fldelemant selon l'ordonnanse qui leur seroit donnée qui seroit soulager le peuple de moitié de ce que lon leur inpose ; si ne l'aves dit, quant ce ne seroit que pour faire connoitre la droiture de mon intantion, vous me feres plaisir de leur faire antandre. Vous m'escrives que le Conseill se sépare jeudi qui est ce jourd'ui. Si cella est, atachés vous à Mr le Gardes seaux et ne le laisez point que n'aions obtenu que chose qui sera nostre.... Si demeure à Fonteneblau, demeures i ausi vous deux; si il revient isi, suive le et revenés et ne saisés de preser que n'aies obtenu l'un ou l'autre. Celui des esleus sans gages, puisque M' Robin an ofre tel parti que m'escrives, je le treuve bon. Insistes sur cetui-là. Parlés an au Roi et à toux et principalemant à Mr le Gardes saux et aux trois que dites avoir esté nommés pour nous ouir, et les supliés que si ils ont anvie de faire quelque chose pour moi, que m'acordet don cetuilà sans [me] donner la paine de les aler inportuner. Mes avisés de vous asurer bien dudit [Ro]bin et faites qu'il m'escrive par mon laquais, presant porteur, ce qu'il an est et [co]mme il veut faire les palemans. Car vous savés que j'ai besoin de toucher prontemant arjant ; pour [ceste] cause, il fauderoit que aiant eu les expedisions du Roi qui faut que fasiés expédier soudain qui me ballat contant le tiers ou le quart de la somme que m'avés escrite. Tretés cela avec lui. Je vous anvoie une lettre pour Mr le Gardes seaux. Balles la lui et lui dites que ma prinsipale esperanse après Dieu est an lui. Je le suplie par ma letre de me faire acorder cet avis de l'esleu sans gages, et qu'avant que le Conseill se sépare, j'an sois expédiée. Randez vous i toux deux. Bandes et an parlés et au Roi et à Mr de [S]ulli (?) et à M. le Gardes seaux et à ses trois que m'escrives et leur represantés conbien d'avis l'on leur a proposé que ceux qui ont esté bons les nous (?)... que.... resouet (?) et conbien j'estimeré nia desfaveur grande, voiant que tous les jours, personnes de toutes calités an obtienet (sic) de sanblables, et que moi qui ai tant donné si libremant et qui ai servi le Roi et la Franse, comme chacun sait, mandie avec tant de paine ce qui se donne a tout le monde et que l'on s'apelle despance trop grande d'avoir eu une maison à Paris qui n'est plus grande ni plus manifique que celle de Gondi[40] ou de Diaceti[41] ; elle est peut-estre an plus bel air, tout cella, dit-elle (?) avec le respaict et la discresion qui faut an telle chose ; mes quoi que ce soit, presés et inportunés : car jan ai besoin et si ce laquais me raporte ancor ceste fois des res[veries?] et des esperanses, asurés vous vous (répété) de mi voir le landemain. Car mon genou est, Dieu mersi, guéri, qui feut la cose que je n'osé antreprandre le voiage. Faites donc un esfort d'obtenir cet avis, ou bien giré soudin et que mon maréchal des logis ne bouge de là, et l'obtenant avisé de vous asurer bien de Mr Robin, et qu'il se resole de faire avalise, et soudin qui nous sera acordé. Aies toutes les expedicions qui désirera afin qu'il ne puise faire aucune dificulté. Ramenés moi donc ce laquais soudin. Jan seres résolus et croies que je n'oublieré james lafection que me tesmoignés toux deux an cella et que si Dieu nous fait la grase de l'obtenir, je vous reconnoiteré an sorte qu'an resterés contans et me feré paraître.

Vostre plus afectionnée et perfaicte amie.

Marguerite.

Ce jeudi 31 mai 1607.

[En marge de la première page, de la même main :] « Je vous prie anc[ore] résolves moi prontemant et dites à Mr de Cavalions que j'ai resu ses letres et que je l'an remersie. » [Au-dessous la signature] :

Montozon.



[1] Commune du Pas-de-Calais.

[2] Fils de Jacques et d'Antoinette de La Tour.

[3] Fils de Gautier et de Marie de Montbron.

[4] Fils de François III et d'Eléonore de Montmorency.

[5] Fils d'Armand et de Jeanne d'Ornézan.

[6] Commune du canton de Domme (Dordogne).

[7] Fils de Charles et de Louise de Cazenac.

[8] Dans la commune de Castelnau, canton de Domme.

[9] Commune du canton du Mas-d'Agenais (Lot-et-Garonne).

[10] Commune et canton de Tonneins (Lot-et-Garonne).

[11] Canton du Lot-et-Garonne.

[12] Commune du canton de Valence-d'Agen (Lot-et-Garonne).

[13] Canton de la Gironde.

[14] id.        id.

[15] Commune de Castelnau, canton de Domme (Dordogne).

[16] Fils de Melchior, maître des eaux et forêts, et d'Henriette de Savoie.

[17] Fils de François duc de Guise et d'Anne d'Esté.

[18] Canton de la Dordogne.

[19] Commune du canton de Marrnande (Lot-et-Garonne).

[20] Canton de la Gironde.

[21]             id.            id.

[22]             id.            id.

[23] Canton de la Dordogne.

[24] Commune de Maisonais, canton de St-Mathieu (Haute-Vienne).

[25] Canton de la Haute-Vienne.

[26] M. Tamizey de Larroque et M. Clément-Simon, dans la Revue des Questions historiques, ont raconté ces trois enlèvements.

[27] Voir Bibliographie générale du Périgord, tome Ier, page 120.

[28] Paris, Jules Renouard, p. 337.

[29] Ces lettres doivent avoir été écrites après le divorce, de la fin de 1599 à 1607.

[30] Causeries du lundi, tome VI, p. 199,

[31] Lettre sur papier, pliée en 10, avec un petit fragment de cachet de cire noire au dos.

Ces lettres ont dû figurer dans quelque inventaire ; elles portent en marge ou au bas la signature de « Montozon, commissaire subdélégué. » Une seule est datée « jeudi 31 mai 1607 ». Il nous a été impossible d'identifier Colin de Linest

[32] Serait-ce Gui de Rieux, seigneur de Châteauneuf, gouverneur de Brest, lieutenant-général en Bretagne, chevalier de l'Ordre du Roi ?

[33] Probablement l'opulent Thomas Robin, soigneur de Belair et de Coulogne, adjudicataire général des gabelles de France, maître d'hôtel et maître des requêtes de la reine Marguerite de Valois. (Moréri,)

[34] Le salut et la signature seuls sont autographes.

Fragment de cachet : Fait avec un chaton de bague, représentant une tête d'homme et une tête de femme accolées. D'une écriture postérieure : « Lestre de la rené Marguerite. »

[35] Le grand ministre de Henri IV qui avait alors toute la charge des finances.

[36] Fragment de cachet représentant une tête, en cire noire. Au-dessous de l'adresse de la main de  la Reine : « J'ai balle 20" a Ste Colonbe pour toux deux. »

[37] Capitaine de la garde de Henri de Navarre, gouverneur de la citadelle de Metz, capitaine du château de Bergerac ?   Œuvres de Brantôme, édit. . Lalanne, III, p. 412.

[38] Etait-ce encore Charles de Bourbon, cardinal de Vendôme et roi de la Ligue, qui tint lui-même les sceaux en 1589 ?

[39] Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroi, secrétaire d'Etat, né en 1542, mort à Rouen le 12 novembre 1617.

[40] Probablement Pierre de Gondi, évêque cardinal de Paris et frère du maréchal duc de Retz, mort le 17 février 1616.

[41] Un Louis de Diaceti, florentin, était venu en France avec Catherine de Médicis et s'y était marié avec une de ses filles d'honneur. (Moréri.)

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