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BELVES

 

Documents photographiques actuels à Belvès (Alain Mazeau & Claude Ribeyrol - avril 2008)

 

Coutumes de Belvès extraites de la « Nouvelle revue historique de droit français et étranger », 1899.

 

 

 

COUTUMES INEDITES DE BELVES (DORDOGNE)

 

 

Les coutumes, dont nous donnons ici le texte, sont inédites. Écrites en langue romane, elles méritent d'attirer l'attention et du linguiste et de l'historien du droit.

Le texte nous en est connu par un seul document conservé aux Archives de la Gironde et provenant de l'archevêché de Bordeaux (G, n° 178); c'est un petit cahier en parchemin contenant dans les premières pages un catalogue des habitants inscrits en 1351 dans les listes du consulat de Belvès, et, à partir de la page 20 à 28, se trouve le texte des coutumes.

La petite localité dont nous reproduisons les coutumes, forme aujourd'hui un chef-lieu de canton du département de la Dordogne, dans l'arrondissement de Sarlat: pendant la Révolution, elle fut chef-lieu de district, eut un certain temps un tribunal de commerce; c'est une localité peu importante, située au sommet d'un coteau abrupt, au-dessus de la petite rivière la Nauze, elle est le centre d'un commerce important pour les productions du pays, notamment le bétail et les noix.

Son importance dans le passé paraît avoir été considérable: placée à côté de localités dont la création remonte au XIIIe siècle (Villefranche de Périgord (1261); Beaumont de Périgord (1272); Domme (1282); Montpazier (1284); elle se rattache, par son origine, à un prieuré de bénédictins dont la fondation paraît se placer vers 853(1), il est désigné dans les documents sous les noms de prioratus de bellovidere, de bellovisu, de bellovire (la première forme est la plus usitée). Le prieuré des bénédictins était situé sur l'emplacement qu'occupe aujourd'hui Notre-Dame Sainte-Marie de Montcuq, église paroissiale de Belvès. Il s'élevait sur un mamelon rattaché au plateau boisé qui vers Montpazier et Cadouin, s'étend au nord-ouest de Belvès. La ville de Belvès était sur un autre mamelon au sud du premier, au sommet était le castrum entouré de solides fortifications, et entre le castrum et le prieuré s'était formée une ville privilégiée, avec consulat et organisation municipale; elle occupait l'emplacement que tient actuellement la ville moderne. Elle aussi était entourée de murailles.

Si l'on en croit le récit de Philipparie, notaire ecclésiastique de Belvès, ce serait Bertrand de Goth qui aurait acheté la seigneurie de Belvès: ce qu'il y a de certain, c'est que, en 1307 nous trouvons dans Rymer(2) un échange par lequel Edouard 1er cède à l'archevêque de Bordeaux les castra de Benner (Belvès) de Bygaroke (de Bigarroque) de Cose (Couze), de Monterapto (de Monravel), contre des possessions que celui-ci possédait en Saintonge. Ces possessions nouvelles, l'archevêque les réunit à sa mense épiscopale et à l'église Saint-André de Bordeaux, et Belvès et son territoire restèrent ainsi sous la temporalité et direction des archevêques de Bordeaux, jusqu'à la révolution française.

Les archevêques de Bordeaux furent pour Belvès des seigneurs pleins de bonté, ils confirmèrent ou accordèrent au territoire de grands et importants privilèges, lui donnèrent avec le consulat une organisation municipale, et promirent la conservation des coutumes locales. Aussi sera-t-il vrai de dire avec monseigneur de Béthune, archevêque de Bordeaux au XVIIe siècle « Belvès a toujours passé dans le rang des villes franches, comme, en effet, il n'y en a point dans toute la province du Périgord, qui en ait de plus beaux et de plus anciens titres de son exemption(3) ».

Les titres principaux dans lesquels on trouve constatés les privilèges de Belvès sont les suivants :

 

1° lettres de novembre 1372, du duc d'Anjou, au moment où il venait prendre possession du territoire de Belvès sur les Anglais (fonds Périgord à la Bibliothèque nationale, t. XII, p. 380) ;

2° ordonnance du 16 septembre 1442 de Jean de Bretagne, assurant aux français la possession de Belvès, jusque-là anglais (Archives de la Gironde, copie, G. 196 et fonds Périgord, t. XII).

3° Diverses transactions intervenues entre les consuls de Belvès et les archevêques de Bordeaux et relatives aux privilèges de Belvès:

 

a) la plus ancienne en date, à laquelle se réfèrent toutes les autres est du 10 février 1470 entre Arthus de Montauban, archevêque de Bordeaux (Archives de la Gironde, G. 196, et fonds Périgord, traduction française, autre copie et G. 178).

b) Transaction du 23 août 1530 entre les consuls et habitants de Belvès, et Charles de Gramont, archevêque de Bordeaux (Archives de la Gironde, G. 190).

c) Transaction du 10 juin 1571 entre les consuls et habitants de Belvès, et Antoine Prévôt de Saussac, archevêque de Bordeaux (Archives de la Gironde, G. 178 et G. 196).

d) Arrangement du 25 octobre 1609 entre les consuls et habitants de Belvès, et Monseigneur le cardinal de Sourdis, archevêque de Bordeaux, par lequel ce dernier prend l'engagement de ne pas aliéner la seigneurie de Belvès.

e) Transaction et reconnaissance des habitants de Belvès avec Henri de Béthune, archevêque de Bordeaux, du 11 avril 1673 (Archives de la Gironde, G. 196. 3° et 4° pièces).

f) Transaction de 1727 entre Monseigneur illustrissime et révérendissime François Elie de Voyer d'Argenson et les consuls de Belvès (Archives de la Gironde, G. 196, n° 11).

g) Transaction de 1773 entre l'archevêque de Bordeaux et les consuls de Belvès (Archives de la Gironde, G. 197).

h) Entrée de Monseigneur de Cicé à Belvès en 1788 (Archives de la Gironde, G. 196).

 

Dans d'anciens actes, et notamment dans des actes de 1449 tirés des archives de Cadouin (Collect. Périgord, Bib. Nat.,  t. 46, p. 58), nous trouvons cette mention que les achats sont faits « juxta usus et consuetudines castri et castellaniae de Bellovidere ».

Le texte des coutumes de Belvès, dont les archevêques de Bordeaux à leur première entrée dans la ville, juraient le maintien(4) nous est conservé par une copie en langue romane, occupant huit feuillets du petit cahier en parchemin, provenant des archives de l'archevêché, et aujourd'hui à la préfecture de la Gironde (G. 178 et G. 234: 1782 : mémoires sur les coutumes, les droits et les privilèges des habitants de Belvès).

Le document d'après lequel nous publions nos coutumes est une copie(5) ancienne authentiquée par des notaires ecclésiastiques; ces coutumes, suivant une mention inscrite sur la couverture, en écriture ancienne, ont été approuvées par Pierre Berland, archevêque de Bordeaux le 25 avril 1445.

Le texte est en langue romane, divisé en alinéas, mais sans notation de chiffre; nous le reproduisons en y ajoutant un chiffre pour chaque alinéa, suivant le mode de publication généralement suivi: en parcourant le texte de notre document, on voit bien vite que l'auteur n'a suivi aucun ordre logique et pour la facilité des explications on pourrait grouper ainsi les articles :

 

I) dispositions de droit privé et privilèges particuliers (art. 1, 2, 13, 15).

II) dispositions de la coutume ayant pour objet des dispositions de droit criminel, articles 3, 4, 20, 24, 25 (coups et blessures légères); art. 5 et 23 (meurtre); art. 6, 10, 21, 18 (vol); art. 7 (faux témoignage); art. 8 (adultère); art. 9 (viol); art. 1l, 12 et 28 (violation des règlements de police).

III) dispositions de la coutume qui ont pour objet l'intérêt général ou des dispositions de droit public (art. 14, 16, 17, 22, 26, 27, 29, 30, 32, 33).

 

Cette distribution générale et méthodique indiquée, nous allons reproduire le texte de notre coutume, nous donnerons la traduction, et présenterons sur les articles importants des observations et des rapprochements avec les coutumes de la région ou des régions voisines.

 

 

Enseguen se las costumas del loc de Belver.

In nomine Patris et filii et spiritus sancti. Amen.

A honor de diu et denostre Sor l'Arcivesque de Bordeu.

Aysso son las Costumas de Belver et de la Honor.

 

Trad. « Suivent ici les coutumes du lieu de Belves. Au nom du père, et du fils et du saint-esprit. Amen. En l'honneur de Dieu et de notre seigneur l'archevêque de Bordeaux. Ce sont les coutumes du Belvès et de la seigneurie. »

 

[Art. 1]. — Nulhs hom no sia pres, ni sa causa enparada, dins los dechs del Castel, que drech vulha far ni pusca, si no era per corporal justissa.

Trad.: «Que nul homme ne soit arrêté, ni son bien saisi, dans le territoire de la châtellenie(6), que droit veuille faire et le puisse, à moins qu'il ne soit sous le coup de quelque peine corporelle».

 

Cet article est pour l'habitant un privilège précieux; à une époque où le seigneur, seul maître dans sa seigneurie, pouvait saisir les personnes et les choses, on s'explique que, dans les chartes de commune, comme dans le texte des coutumes, on voulut se protéger contre les saisies arbitraires; on trouve des articles semblables au nôtre dans un très grand nombre de chartes de commune; qu'il nous soit permis de citer l'article 4 des Coutumes de Tournay, confirmées par lettre de Philippe IV (1307) (Ord. des rois de France, t. XII, page 368).

 

«Quod nos vel bajulus noster non capiemus aliquem habitatorem dictae villae, nec vim inferemus, nec saisiemus bona sua, dum tamen velit et fidejubeat stare juri, nisi pro murtro, vel morte hominis, vel plagâ mortifera vel alio crimine quo corpus suum vel bona sua nobis debeant esse incursa vel nisi pro fore factis in nobis vel gentibus nostris commissis»(7).

 

 

[Art. 2] — Lo darrier testamen de tot home et de tota fenna sia tengut, salva la drechura de tot home, et si nolh le sia, que que(8) fachs a conoguda de sos amix et de sos parens propdas.

Trad.: « Le dernier testament de tout homme et de toute femme sera respecté, en tenant compte de la situation juridique de tout homme, et s'il ne peut disposer par testament, il sera fait suivant la décision de ses amis et de ses parents les plus proches ».

 

Cet article nous place en présence de deux hypothèses: ou bien la personne a fait un testament, ou bien elle n'en a pas fait ou ne pouvait pas en faire. Au premier cas, la coutume assure efficacité au testament le dernier en date.

Cette décision a-t-elle pour effet de proclamer la liberté de tester, et faut-il croire que l'héritier institué sera toujours préféré, quels que soient les parents que laisse le testateur, sans qu'il y ait pour ces derniers, ni réserve, ni légitime: il est bien difficile de le croire.

Peut-être que la formule vague Salva la drechura de tot home veut-elle réserver le droit des parents deshérités à faire tomber le testament.

Pour nous, dans le texte, les mots Salva la drechura de tot home, feraient allusion à la condition juridique du testateur: suivant cette condition, on s'explique que le droit de tester puisse être plus ou moins étendu.

A ce point de vue on peut rapprocher de notre texte les dispositions suivantes des coutumes de localités du Périgord ou du midi de la France(9).

 

Au second cas, si le défunt n'a pas laissé de testament ou si même sa situation juridique (s'il était serf par exemple) ne lui donnait pas le droit d'en faire, la distribution de ses biens sera laissée à la décision d'un tribunal de famille composé des amis et des proches parents.

Les règles de la succession ab intestat étaient encore flottantes puisque pour chaque hérédité, et suivant les circonstances, la solution est laissée à la décision d'un tribunal de famille.

D'autres localités présentent des décisions différentes: nous citons ici les coutumes de la Bastide de Saint Louis en Périgord confirmées par Charles IV en mars 1325 (Ord. des rois de France, t. XII, p. 496). D'après lesquelles on constate une organisation de succession ab intestat, et ce n'était qu'au cas où il n'y avait pas d'héritiers connus, et après avoir attendu un certain temps la venue des héritiers, que l'on procédait à la distribution du patrimoine(10).

Le laconisme de notre texte nous met dans l'impossibilité de faire connaître en détail, le système successoral suivi à Belvès et au cas de testament et au cas de succession ab intestat(11).

 

[Art. 3] — Si nulhs hom fer autre irat ab peyra, o ab fust [e n'eis](12) Sanc, do XX S. de Gatge al Sr, adobat lo clamat; et si avia os frach o test, LX. S. 1. d.

Trad. « Si quelque homme en frappe un autre, en colère, avec pierre ou bâton, et qu'il y ait effusion de sang, qu'il donne XX sous d'amende au Seigneur, réparé le dommage ou s'il y avait os rompu, ou tête blessée, l'amende sera de LX sous 1 denier ».

 

Cet article commence la série des dispositions, relatives au droit criminel, aussi plaçons-nous ici des observations générales sur cette matière.

Aujourd'hui on accepte comme vérité absolue, qu'il ne saurait y avoir de délit, qu'au cas où le fait est considéré comme délictueux par la loi pénale; et qu'en cas de délit on ne saurait appliquer que la peine prévue par la loi.

A l'époque de notre coutume, il en était tout autrement, le seigneur, dans l'étendue de sa seigneurie, ayant tous les pouvoirs, était le maître d'envisager un fait quelconque comme constitutif de délit, et lors même que les délits fussent fixés par la coutume, en beaucoup d'endroits, les peines étaient arbitraires(13), laissées à la volonté du seigneur.

C'est pour se protéger contre ce pouvoir arbitraire que les chartes de commune et les coutumes prévoyaient avec le plus grand soin les faits, qui pouvaient constituer des délits, et fixaient les peines à appliquer au coupable.

De là, les nombreuses dispositions de droit pénal que l'on rencontre dans les chartes de coutume et de commune.

Si nous examinons l'ensemble de ces dispositions, nous remarquons:

 

1° que l'homme et la femme sont placés sur la même ligne, et, pour un fait de même nature, encourent les mêmes peines, tandis que, souvent à cette époque, la femme était moins punie que l'homme(14).

2° Que les peines sont généralement pécuniaires, au moins au cas de solvabilité du délinquant, que les peines corporelles sont cruelles et rappellent la peine du talion, encore en vigueur dans quelques coutumes.

3° Enfin que l'on distingue deux conséquences du délit:

a) les dommages-intérêts pour la victime;

b) une peine pécuniaire ou corporelle, pour l'atteinte au repos public, amende dont profitera le seigneur: ce qui entraînera pour ce dernier l'obligation d'un fonctionnaire seigneurial(15) chargé de poursuivre la répression des infractions punissables. Telle fut peut-être la première origine du ministère public.

Notre disposition réprime les blessures légères, et les punit diversement suivant leurs gravités.

Dans un très grand nombre de coutumes l'on rencontre des dispositions analogues à celle que nous trouvons ici(16).

 

[Art. 4]. — Sel que trayra cotel contra autruy iratz gatge XXX S. al Sor, et sin fer et y a Sanc LX S. 1 d. et si fer et noy a sanc, XL S. Sil gatge no pot paguar, perda lo poinh.

Trad.: « Celui qui tire couteau contre un autre, en colère, encourt une amende de 30 sous pour le seigneur; s'il en frappe et qu'il y ait effusion de sang LX sous et 1 denier d'amende; et si la blessure n'entraîne pas effusion de sang 40 sous; si le coupable ne peut payer l'amende, il perdra le poing(17) ».

 

« Et si aquel contra cui era trach n'era por se defendre et no fer, si ferit no era, on fer [si] ferit era en aquela pelega, non es tengut ».

Trad.: « Et si celui contre qui le couteau était dirigé, le tirait pour se défendre, s'il ne frappe pas n'ayant pas été frappé, ou qu'il ait frappé, l'ayant été lui-même, dans cette bataille, il n'est en rien coupable ».

 

Nous trouvons ici l'application du principe de la légitime défense qui, à titre d'excuse légale, enlève au fait toute criminalité.

 

« Et si hom estranhs tra cotel irat contra autre dins los dechs, ho fer ab peyra, deu l'hom retener viou ho mort; et Sel quel rete no es tengutz. Et si nulhs hom fasia perque n'anes, gatges D Sol. al Sor. »

 Trad.: « Et si quelque étranger tirait par colère le couteau contre quelqu'un dans l'enceinte de la ville, ou frappait avec une pierre, le coupable doit être retenu, vif ou mort; et celui qui l'a arrêté n'a commis aucun délit. Et si quelqu'un le faisait évader, il encourrait 500 sous d'amende au seigneur ».

 

Les privilèges stipulés par la coutume profitaient seulement aux habitants de Belvès; contre l'étranger coupable, les peines étaient arbitraires; aussi le seigneur, par une très forte amende sauvegardait-il ses droits à l'encontre de toute évasion.

 

[Art. 5] — « Tot hom et tota fenna que auci autre ab glay o ab vere o a murtre deu esser mes lo viou sobz lo mort, el avers encorregutz al Sor ».

Trad.: « Tout homme et toute femme qui en tue un autre, avec glaive, par empoisonnement, ou par meurtre, doit être enterré, le vivant sous le mort, et ses biens sont confisqués au profit du Seigneur ».

 

Nous remarquons ici, au point de vue pénal, l'assimilation de l'homme et de la femme.

Le meurtre, suivant la loi du talion posée par beaucoup de nos coutumes, entraînait comme peine, la mort pour le coupable: elle était appliquée dans notre coutume sous la forme de l'ensevelissement du coupable vivant sous la victime.

C'est cette peine qui était le droit commun coutumier dans la région(18).

 

[Art. 6] — « Tot hom et tota fenna que pane dels dechs en fora que valha V sols o d'aqui en aval, gatge X S. adobat lo corelhan. El si no pot far, sia levat en l'espillori, sais lo ban del[s] Ortz et de las Vinhas et dels Pratz.

Trad.: « Tout homme et toute femme qui commet un vol des limites au dehors, d'une chose qui vaille cinq sous ou moins, encourt une amende de X sous, indemnisé le plaignant, et si le voleur ne peut payer l'amende, il sera exposé au pilori, sans préjudice de l'application du ban des jardins, des vignes et des prés ».

 

Cet article relatif au vol confirme, pour notre coutume, l'assimilation de l'homme et de la femme.

Pour déterminer les peines du vol, on prend en considération la valeur de l'objet volé, la peine encourue est une amende; l'exposition publique au pilori n'est subie que si l'amende n'est pas payée.

L'application de la peine pécuniaire ou corporelle, n'empêche pas que le plaignant volé, ne doive être indemnisé.

Enfin la disposition de l'article 6 n'empêche pas l'application des règles relatives aux bans des jardins, des vignes et des prés. Or, la transaction de 1470 entre les consuls .de Belvès et l'archevêque de Bordeaux, Arthus de Montauban, nous fait connaître les dispositions relatives aux bans des jardins, vignes et prairies, pour la protection des récoltes.

 

Art. 10. — Quod dicti bajulus et consules facere possint proclamationes, inhibitiones, et prohibitiones cum tuba vel alio modo, cum paenis dum tamen non excedat sexaginta solidos, ne aliquis intret damnificando, ortos, vineas, terras, prata vel segetes aliorum et ad custodiendum praedicta possint custodes deputari et emenda seu gatgium quod ex praemissis eveniet communiter dividetur inter dominum et consules ut suprà.

Art. 11. — Poterunt consules proclamationes et inhibitiones facere de animalibus et personis ne intrent seu damnum inferant in segetibus, vineis, pratis, ortis possessionibus aliorum et emolumenta dividentur ut suprà.

 

II résulte de la combinaison des articles 6, 10, 18, 21, que la coutume ne prévoie que les vols de petite valeur; et les tentatives de vol, et les règlements pour la protection des récoltes.

Les vols de chose ayant plus de valeur étaient punis suivant la volonté du seigneur et de peines beaucoup plus graves, probablement de celles en usage à cette époque.

D'après l'article 23 de la coutume de Villefranche de Périgord, le vol de 5 sous ou au-dessous, fait de jour ou de nuit, est réprimé au moyen de la course à travers la ville, l'objet volé suspendu au cou, avec restitution au propriétaire de la valeur de la chose volée.

Si la chose volée est d'une valeur supérieure à 5 sous, pour la première fois le voleur sera marqué au fer chaud et encourra 60 sous d'amende, et s'il est marqué pour autre fait, il sera pendu, auquel cas ses biens confisqués de façon que, dettes payées, le Seigneur ait 10 livres, et les héritiers auront le surplus(19).

L'article 24 assure la protection des fruits et récoltes.

 

[Art. 7]. — « Tot fals testimoni sia corregatz per la leva(20) et passel hom I graffi en la lengua et gatge C sous al Sor ».

Sous le bénéfice de l'observation de la note.

Trad.: « Tout faux témoin sera puni par la mise au pilori et qu'on lui passe un poinçon à travers la langue et qu'il paie une amende de cent sous au seigneur ».

 

Cette peine se rattachait à l'idée que la peine doit reproduire l'esprit du crime lui-même: le faux témoin a commis un fait délictueux avec la parole, on punit l'organe de la parole.

Même peine, Cout. d'Agen, art. XXI.

« Deu corre la vila ab la lengua traucada ab broqua de fer, et sas causas son encorssas al Senher... ».

 

« Aquela meyssa pena porta quil tra, si sap que aytal sia et per[t] la demanda, et sian forjurat per ung an ».

 Trad.: « Cette même peine encourt celui qui l'a produit en justice, s'il sait qu'il fut faux témoin, il perd la demande et et l'un et l'autre sont privés du droit de témoigner pendant un an »

 

Comp. Cout. d'Agen, art. XXI, suivant laquelle le faux témoin perd « per tot temps vos de testimoni ».

 

[Art. 8] — « Tot hom que sia pres am molherada, deu corre nutz en braguas per la vila, et la fenna en camisas, et l’om gatge L. S. al Sor ».

Trad.: « Tout homme surpris avec femme mariée, doit courir nu à travers la ville en chausse, et la femme en chemise et l'homme paie au seigneur une amende de cinquante sous ».

 

Il faut remarquer que notre coutume est muette sur la manière de constater l'adultère et de l'établir(21).

Courir nu à travers la ville, pour l'adultère et son complice, était le droit commun au moyen âge; dans certaines coutumes on y joignait une amende, comme dans la nôtre(22).

Dans d'autres coutumes, il y avait pour les coupables à choisir entre la peine corporelle et l'amende. Cout. de Villefranche de Périgord, art. 21 « adulter et adultéra... quilibet in centum solidis pro justicia puniatur, vel nudi currant villam et si[t] opcio earumdem(23) ».

Enfin quelquefois, on aggravait l'humiliation de la peine, en attachant les coupables l'un à l'autre: Établiss. de Bor­deaux, art. 53, p. 295 (livre des coutumes) : les coupables d'adultère « ... deven corre la vila nutz, ligades las mans en la petrina, et ligat amdus d'una corda, l'om per los colhons et la molher per los costatz ».

 

[Art. 9] — « Sel que pelega maridada gatge D. S. lo claman adobat; et si pelaga pioucela, si cove l'us à l'autre, prenga la a molher; ol do marit, si pot, a son covenent; o si no pot, perga los colhs; et si la pren o la marida gatge LX S. al Sor. et qui pelega autra fenna gatge XX, adobat lo clamant ».

Trad.: « Celui qui viole une femme mariée paie cinq cents sous d'amende au seigneur, indemnisé le plaignant. Celui qui viole une vierge, s'ils se conviennent l'un l'autre, qu'il la prenne pour femme, ou qu'il lui trouve un mari, si possible, à la convenance de la jeune fille; et, s'il ne peut, qu'il perde les couilles; et s'il la prend pour femme ou lui donne un mari, il encourt 60 sous d'amende au seigneur. Celui qui viole une autre femme paie une amende de XX sous, indemnisé le plaignant ».

 

Des dispositions analogues se rencontraient dans beaucoup de coutumes de cette, époque: la castration, comme peine, se rencontre dans les assises de Jérusalem (Cour des Bourgeois, chap. CXXXIV. — La coutume de Terraube (25 févr. 1285), Revue de Gascogne, t. 39, art. 7, 8, 9, contient des dispositions qui se rapprochent.beaucoup pour le fond de notre coutume; rapprochez les articles 34 et 35 de la coutume de Montossin (Nouv. revue hist. de droit fr. et étr.), 1890.

Art. 8. Lettres de Louis IX (nov. 1265) confirmant la commune accordée aux habitants de Chateauneuf sur le Cher.

Dans d'autres coutumes, ce crime était réprimé par d'autres peines (Cout. de Beauvaisis : Beaumanoir, chup. XXX, 2, 7). Le coupable était pendu. A Tournay, bannissement à temps (Ord. des rois de France, p. 250, art. 23).

 

[Art. 10] — « Si hom ni fenna intra en mayo per panar de nuechs o de dias, sian corregutz adobada la malafacha. Et aicel que l'i trobara, s'il plaguava o l'aucia sus lo fachs, non fos tengut ».

Trad.: « Si homme ou femme entrent pour voler dans une maison, soit de jour soit de nuit, qu'ils soient punis, et le dommage réparé. Et celui qui les aura surpris, s'il les bat ou les tue sur le fait, ne sera tenu à rien ».

 

Dans beaucoup de coutumes, nous trouvons des dispositions analogues, qui toutes ont pour objet de protéger l'intérieur des maisons et d'empêcher les vols ou actes de violence qui pourraient y être commis.

Nous remarquons ici que la peine encourue n'est pas indiquée; elle était prononcée, plus ou moins grave, suivant les circonstances.

Et, comme la découverte de ces étrangers dans les maisons, entraînait souvent une lutte entre ceux-ci et les gens de la maison, il y a excuse légale pour ceux de la maison qui, les trouvant cachés, les auraient blessés ou même tués.

Comme se rapprochant de notre coutume, nous citons la coutume de Montossin, art. 18: Item si algun des habitants del sobredit castel, atrobaba negun home ne deguna fenna de Neytz, pusque la porta sia barrada, et foc sia colcat, et senhor sia colcat et la maynada, quel prenga et quel reder al senhor, et que d'aquel sia feyt aquo que les proshomes ni le bayle conasseran.

Et si aquel se deffendia al prene et hom l'aucidia, aquel que l'auria mort no seria tengut al senhor.

 

Rapprochons Cout. d'Agen, XX (dans le livre des coutumes des Archives de Bordeaux, p. 239).

 

[Art. 11] — «  Qui geta peyra de nuech sus en mayo gatge V sous ».

Trad.: « Celui qui, de nuit, jette des pierres sur une maison  encourt une amende de V sous. »

 

Les articles 11,12 et 28 de notre coutume font allusion aux règlements de police, qui peuvent être faits par les consuls et le bayle et dont l'exécution est assurée par une légère amende.

Toutes les coutumes contiennent des dispositions analogues.

 

[Art. 12] — « Sel qui te falsa mesura ni fals pes gatge VII s. Et aquelas sian regardadas per conseilh de[l]s cavaliers et dels pro[ho]mes ».

Trad.: « Celui qui tient fausse mesure et faux poids encourt une amende de 7 sous, et les mesures sont vérifiées par le conseil des chevaliers et des prud'hommes ».

 

Dans beaucoup de villes du Midi, des poids et des mesures étaient marqués des armes de la ville: on n'en connaît pas pour Belvès. Ce qui est certain, c'est qu'il y avait des étalons de poids et mesures, conservés à l'Hôtel-de-Ville; que celui qui tenait des poids et mesures non justes était frappé d'amende, et la vérification était faite sous la direction des chevaliers et prud'hommes, c'est-à-dire de l'assemblée municipale. Toutes les coutumes ont des dispositions analogues. A Beaumont du Périgord l'amende dans ce cas était de 60 sous(24).

 

[Art. 13] — « Nulhs hom no pusca, ni fenna dar eret à la gleya, ni a mayo d'ordre, si dins ung an et ung jorn no avia fachs redre fiousatier al Sor fiouzier a bona fe ».

Trad.: « Nul homme ne peut, ni femme, donner héritage à une église ou à maison d'ordre religieux, si dans un an et un jour, il n'avait fait désigner un vassal au seigneur suzerain de bonne foi ».

 

Au nom de l'intérêt féodal, on admet à rencontre de l'église et des établissements ecclésiastiques, des incapacités d'acquérir les fiefs(25). Les motifs de ces incapacités sont faciles à déduire:

1° en premier lieu les personnes ecclésiastiques qui devenaient titulaires du fief, avaient souvent des devoirs professionnels incompatibles avec les obligations d'un vassal;

2° en outre, qu'il s'agisse de tenures roturières ou de fiefs, le seigneur, quand ces tenures féodales furent devenues patrimoniales, percevait des droits pécuniaires à chaque transmission héréditaire, ou au cas d'aliénation entre-vifs. Or ces revenus comment les obtenir au cas où le titulaire des tenures était l'église ou maison d'ordre; car, à titre de personne morale, le titulaire ne mourait jamais; et il était d'usage que les personnes ecclésiastiques n'aliénaient leurs tenures à titre onéreux que très rarement.

 

Pour concilier les intérêts des seigneurs et de l'église, on facilita à celle-ci les acquisitions de tenures féodales ou roturières sous les restrictions suivantes:

1° On autorisait l'église ou les maisons d'ordre à acquérir sous condition que dans un délai fixé, un an et un jour généralement, l'église ou la maison ecclésiastique aliénerait la tenure à une personne privée, et si, dans le délai fixé, l'aliénation n'avait pas été faite, la commise était prononcée au profit du seigneur duquel cette tenure relevait(26).

C'est à ce système que se rattache la coutume d'Agen article XXV «... si dins 1 an et 1 mes, noavia venduda (Gleia o maio d'ordre) aquela honor, lo senher del feus, de l'an et mes en la, pot prendre sos feus, et pot lo tenir, et usar, et espleitar, tant longuament entro aquela honors sia venduda a feuater laïc ».

2° Le second système fut de tolérer l'acquisition pour l'Église et la maison ecclésiastique, à la condition que celles-ci, dans un délai fixé, désignassent un homme vivant et mourant qui serait considéré fictivement comme le véritable titulaire du fief et à son décès les droits de relief étaient dus. Ce système paraît être celui de notre coutume. Il est indiqué par Bouteiller dans la Somme rurale I, 84, p. 490, et ce système s'est maintenu longtemps dans certaines coutumes (Bourbonnais, art. 208 ; Bretagne, art. 308).

 

Enfin à partir du XIIIe siècle s'introduit et fut régularisé le système des amortissements, au moyen duquel on sanc­tionna les acquisitions faites par l'Église ou la maison d'or­dre(27).

 

 

[Art. 14]. — « Tot hom et tota fenna que venra al mercat venha et torne salvament ab la sua causa de tot nostre poder, del divendres troscal dimecre que sian messas dichas, si per son propri forfachs no era(28). »

Trad.: « Tout homme et toute femme qui viendra au marché, y vienne et s'en retourne en sûreté avec ses marchandises, dans toute notre juridiction, du vendredi au mercredi, messes dites, à moins que pour son propre forfait il ne fut recherché ».

 

Cette sauvegarde assurée aux marchands, pendant l'aller et le retour, était de nature à attirer aux marchés de Belvès un très grand nombre de marchands; et à l'époque troublée où nous sommes, où chacun se croyait le droit de se faire justice lui-même: c'était un privilège très important, on le retrouve dans un très grand nombre de coutumes. Nous citerons l'article 4 des lettres de Philippe-Auguste (Mantes anno 1188) par lesquelles il accorde un droit de commune aux habitants de Pontoise « qui cumque pro mercato ad castrum venerit, ita omnino quietus ire et redire dimittatur, ut nunquam vel in adventu, vel in reditu ab aliquo disturbetur, nisi sit debitor vel fidejussor, vel nisi forefactum fecit aut fecerit pro quo debeat impediri » (Ord., t. XI, p. 354).

Comp. art. 4, lettres de Phil.-Auguste, 1221, lettres de commune pour Poissy, Triel et Saint-Léger (Ord., t. XI, p. 313); et comp. art. 5. Coutumes de Beauvais, Phil.-Auguste, 1182 (A. Giry, Documents sur les relations de la royauté avec les villes, de 1180 à 131-4), p. 8.

 

[Art. 15] — « Hom ou fenna pot penhorar per son deude et per so no pert son drechs ni deu essor gatgatz ».

Trad.: « Homme ou femme peut saisir les biens du débiteur en garantie d'un droit, et pour cela ils ne perdent ni leurs droits ni n'encourent d'amende ».

 

Le mot penhorar répond au mot latin pignorare; il est en général pris dans la signification de saisir, et ainsi, il faudrait interpréter le texte dans ce sens, que tout créancier peut faire saisir les biens de son débiteur, sans encourir pour cela ni la perte de ses droits, ni une amende. Ce serait ainsi une disposition de crédit public favorable au créancier, qui ferait tomber toutes les entraves mises au droit de saisir, qui venues du droit germain, étaient en vigueur dans quelques coutumes(29).

Dans une seconde signification moins usitée pignorare signifie constituer hypothèque.

Et, cela admis, on devrait interpréter notre texte en ce sens, que le vassal peut grever d'hypothèque son fief ou sa tenure sans l'autorisation du seigneur.

D'après les principes du droit féodal, qu'il s'agisse de concessions féodales ou roturières, à l'origine le vassal et le tenancier ne peuvent ni vendre, ni aliéner le fief ou la tenure: il fallait pour cela l'autorisation du seigneur. C'était dans ce régime qu'on était placé, au moment de la rédaction des coutumes de Belvès, mais on y stipulait pour le vassal ou tenancier le droit d'hypothéquer sa tenure, sans encourir aucune commise (no perts son drechs) et sans encourir aucune pénalité pécuniaire (ni deu esser gatgatz): ce qui pouvait être considéré comme un privilège, par rapport au droit commun : « Notandum etiam est quod nullus terram quam tenet de domino per hommagium potest vendere vel invadiare sine assensu domini speciali(30) ».

 

[Art. 16] — « Tot hom que venha estatgier en la vila sia franxs ung an et ung mes. »

 

(Trad.) : « Tout homme qui viendra se fixer dans la ville soit affranchi de toute redevance un an et un mois ».

 

A ces époques troublées, pendant lesquelles de grandes épidémies, des guerres, faisaient périr une partie de la population, il était d'une bonne politique d'attirer dans la ville les étrangers; les affranchir pendant un certain temps des redevances municipales, auxquelles les habitants du pays étaient astreints, était d'une très bonne politique, ainsi faisaient la plupart des coutumes ou des chartes des communes(31).

Art. 31. De la coutume de Terraube : la franchise ici était de deux années.

 

[Art. 17]. — « Nulhs hom, senhor ni autres, no guide home que aia tort en la vila, senes la voluntat d'aquel cui aura tort »

Trad.: « Nul homme, Seigneur ni autre, ne protège homme qui a fait quelque tort dans la ville, si ce n'est de l'agrément de celui au préjudice duquel il a fait tort ».

 

Ce principe est la conséquence du lien que faisait naître entre les parties le contrat féodal. Si le vassal était tenu à foi et hommage vis-à-vis de son seigneur, celui-ci était tenu de défendre son vassal, de le couvrir de sa protection. Or, si le vassal a été victime d'un méfait, le seigneur qui accorderait au coupable sa protection et sauvegarde, manquerait à ce devoir de protection qui l'oblige vis-à-vis du vassal: il ne peut le faire que du consentement du vassal qui a souffert le pré­judice.

Cette règle était formulée dans beaucoup de coutumes(32).

Le lien que faisait naître entre les membres d'une même commune, l'association communale, devait aussi amener un résultat analogue, comp. art. 16, des Cout. de Saint-Jean d'Angély, Angoulême, conforme à celles de Rouen [Ord. des Rois de France, t. V, p. 668). Si un étranger a fait dommage à quelque bourgeois, et qu'il refuse de le réparer il sera défendu aux bourgeois d'avoir aucun commerce avec lui... » (comp. art. 20, même cout.). Comp. art. 6, Cout. de Beauvais (loco citato, Giry).

 

[Art. 18] — « Nulhs hom no crompe Rauba ni causa panada, que o sapcha; et si o fa[s]ia, si es de bona fama, escape an son sagramen que no o sabia, et reda la rauba ab(33) son captal ».

Trad.: « Que nul homme n'achète robe ni autre chose volée s'il le sait, et s'il le faisait, s'il est de bonne renommée, il échappe à toute responsabilité, sur son serment qu'il ne savait pas que la chose eût été volée, et il rendra la robe ou sa valeur ».

 

Peut-être cet article veut-il dire: que celui qui achète une chose volée, le sachant, est considéré comme voleur, et encourt par suite les peines du vol. Mais, par son serment qu'il ne savait pas que la chose avait été volée, il évite les peines du vol, mais il doit rendre la chose, ou sa valeur (s'il en a tiré profit).

Dans d'autres coutumes on autorisait le receleur de bonne foi à se faire restituer le prix d'achat par lui payé, s'il avait acheté la chose, en foire, ou marché(34).

 

[Art. 19] — « Si hom fa lo forfach per que sia encorregut, sa Molher no pert son maridatge, ni li deutor lor deude, an deven esser paguatz de las suas causas, et s'il Sor ne pot far justissa et no lan fa, no aia gatge ».

Trad.: « Si un homme a commis un méfait pour lequel il doit être puni, sa femme ne perd pas sa dot, ni les créanciers ce qui leur est dû, mais ils doivent être payés sur ses biens, et si le seigneur en peut faire justice, et ne la fait pas, qu'il n'ait pas d'amende ».

 

A cette époque l'amende était payée au seigneur à titre de peine infligée au délinquant: on en avait déduit que les amendes, peines pécuniaires, ne pouvaient être prélevées sur les biens du délinquant, qu'après que ses créanciers auraient été payés, sans quoi ce serait eux qui supporteraient l'amende.

Aussi, dans notre coutume, comme dans beaucoup de coutumes de la même époque, lorsque la confiscation des biens du coupable est encourue par le délinquant, on ne l'applique qu'après le prélèvement de la dot par la femme, et le paiement des dettes du délinquant(35).

Au reste l'amende n'est encourue que comme conséquence de la condamnation: elle n'est pas due s'il n'y a pas eu poursuite suivie d'effet.

 

[Art. 20] — « Si nom fer autre et no ecient en mor, gatge LXV S. 1 den. et cors no sia justiciatz; mas seguon son poder que el aura la justissa o fassa adobar als plus propdas parens, am lo conseilh dels cavaliers et dels prohomes du la vila, que sian esgalhiers à las partidas. El gatge de las armas al Sor LV. S. 1 d.

Trad.: « Si un homme en frappe un autre et sans le vouloir à mort, qu'il encourre LXV sous et 1 denier d'amende et il n'encourt aucune peine corporelle. Mais suivant les moyens qu'il aura, la justice fera régler l'indemnité avec les plus proches parents, avec l'aide et conseil des chevaliers et prudhommes de la ville qui soient égaux en rang aux parties, l'amende de l'âme au seigneur de 55 sous 1 denier ».

 

L'homicide par imprudence était aussi puni d'amendes seulement, sans peine corporelle, pour le coupable. Celui-ci devait indemniser la famille de la victime, et notre texte indique qu'en cas de difficultés le corps municipal interviendra pour déterminer le montant des dommages.

Le coupable encourait une double amende: la première de soixant-cinq sous 1 denier, pour la répression de son imprudence; la seconde de cinquante sous l denier pour le seigneur, à cause du préjudice apporté à l'âme du défunt mort sans préparation religieuse.

 

[Art. 21] — « Totz Hom qui panaria de dias dins la vila de III s. en jos, sia levat on l'Espillori et gatge V sous.

Trad.: « Toute personne qui vole de jour dans la ville de III sous de valeur en dessous, sera mis au pilori et encourt 5 sous d'amende ».

 

Si l'on rapproche les articles 6 et 21, on remarque que notre coutume ne réprime que les vols de petite valeur, en distinguant suivant qu'ils sont faits, en dehors des limites de la ville, ou dans la ville.

Il est probable que pour la ville l'expression totz hom est prise dans le sens général, toute personne, embrassant l'homme et la femme.

On ne mentionne ici que les vols de peu d'importance, les larcins, parce qu'ils étaient les seuls dont la répression était confiée à la juridiction municipale(36).

Les vols de valeur plus considérable relevaient des tribunaux du seigneur: et la coutume est muette sur leur répression. Mais il est impossible d'admettre qu'ils ne fussent pas l'objet de peines beaucoup plus graves.

 

[Art. 22] — « Sil Sor Corilha home si per mech de la vila ni de la honor, ses clamat et ses fort fach conogut, deu penre drechs per son Sor et si Sor no tra, de[u] lo far esgardar a très ajornaments dins tres semanas, seguon lo forfach et seguon las costumas de la vila, et si l'om es defor la honor, sia jutgaz com viadans ».

Trad.: « Si le seigneur poursuit un homme qui se trouve dans la ville ou dans la seigneurie, sans plainte et sans forfait connu; il doit se faire faire droit par le seigneur du coupable, et si celui-ci n'agit pas, le seigneur de la ville doit faire assigner le coupable à trois ajournements dans trois semaines, suivant le forfait et les coutumes de la ville, et si le coupable est étranger à la seigneurie, il sera jugé comme étranger ».

 

L'article suppose une poursuite contre un délinquant, arrêté dans la ville ou dans la seigneurie, sans qu'il y ait eu plainte ni preuve du forfait, le seigneur doit demander au délinquant de faire connaître son seigneur et si celui-ci ne réclame pas le délinquant, le seigneur de Belvès le poursuit suivant les règles fixées par les coutumes de Belvès.

Nous pensons que pour comprendre l'article et l'appliquer, il faut supposer que le forfait a été commis hors la seigneurie de Belvès, et que le délinquant y est poursuivi; car si l'étranger avait commis un forfait à Belvès, on appliquerait la règle que le juge compétent est le juge du lieu du crime. Mais si le crime n'a pas été commis dans la seigneurie de Belvès, on en appelle au seigneur du délinquant, et si le seigneur ne réclame pas le délinquant pour le juger, alors le délinquant est assigné et poursuivi suivant les coutumes de Belvès, et jugé comme étranger(37).

Cette décision est conforme aux préceptes empruntés au droit romain (comp. Novelle Auth., coll. IX, tit. XVII, Novelle CXXXIV, chap. V (Si vero quis, etc.).

Mais ces règles n'étaient pas suivies à Bordeaux, suivant cette coutume (art. 55: Cout. Bordeaux, livre des Coutumes, p. 58)  « …. lo senhor no es tingut de remetre; mas que se deu offerir de far dreit a totz querellanz segont lo for et la costuma de la terra: quar en Bordales no a punt de remission ».

Le dernier membre de phrase de notre article permet de penser qu'on appliquait à l'étranger des peines plus sévères, qu'à l'habitant de la seigneurie, et, suivant le droit commun des pays coutumiers pour l'étranger « no lo deu valer ni for, ni ley, ni costuma de la terra(38) ».

 

[Art. 23] — « Effas de XII ans en aval, ni sancs faichs à trep, qui qui los fassa ses mort, no dona gatga. »

Trad.: « Un enfant de 12 ans et au dessous, et sang fait en jouant, par quelques personnes que ce soit, sans mort, n'encourt pas d'amende. »

 

Pour être punissables, les faits exigent l'intention de nuire chez l'agent: l'enfant de XII ans, et quiconque a fait en jouant, une blessure avec sang, s'il n'y a pas mort, n'encourent pas d'amende.

Si la mort s'ensuit, il y a tout au moins homicide par imprudence et, suivant la circonstance, l'enfant, même au-dessous de douze ans, peut être condamné pour un fait de cette nature.

L'intention criminelle était déjà exigée comme élément essentiel de l'infraction, si bien que le père de famille qui tuait, en colère et sans le vouloir, un des siens, n'encourait aucune peine, s'il jurait qu'il l'avait fait sans le vouloir et qu'il le regrettait(39).

 

[Art. 24] — « Sancs fachs sens peyra et ses fust et ses fer, iradament, gatge V s. »

Trad.: «Blessure avec effusion de sang faite sans pierre, et sans bâton, et sans fer, en colère, entraîne amende de 5 sous.

 

Les blessures, avec effusion de sang, et sans instrument contondant ou tranchant, sont généralement légères, elles font encourir une amende de cinq sous.

 

[Art. 25] — « Tota mostra de sanc trach sia facha dins III dias, et si no era, gatge V s. »

Trad.: « Toute affirmation de blessure avec effusion de sang, doit être établie dans les 3 jours; et si cette preuve n'était pas faite, le plaignant encourait une amende de cinq sous ».

 

Des dispositions analogues se rencontrent dans presque toutes les coutumes de cette époque: on y distingue, et on y réprime différemment les blessures, sans ou avec effusion de sang, et on s'y préoccupe de la manière de justifier do l'effusion de sang (voir les textes cités ci-dessus sous les articles 3 et 4).

 

[Art. 26] — « Nulhs hom que puesca far drech per las suas causas de la vila no done fiansas al Sor, si claman no avia o no era deffalhit de drech far ».

Trad.. « Tout homme qui peut faire raison, au moyen de ses ressources de la ville, ne doit pas de garanties au seigneur s'il n'y a pas de plaignant et qu'il soit capable de se présenter en justice ».

 

Cet article, dont le sens est quelque peu obscur par le vague des expressions drech far, nous paraît se rattacher à l'idée suivante: le seigneur poursuit en justice un habitant de Belvès, il ne peut lui demander aucune garantie (fidéjusseurs ou hypothèques), s'il est solvable, c'est-à-dire s'il est justifié que ses biens sont suffisants pour faire face à ses obligations. Cependant, si un délit justifiait la poursuite, qu'il y eut un plaignant en cause ou que le délinquant eût encouru pour quelque fait l'incapacité de paraître en justice, le seigneur pouvait, malgré la solvabilité du délinquant, demander des garanties particulières: tel serait le sens que nous donnerions à notre disposition.

 

[Art. 27] — « Le Sr ni sos bailes no devo esplechar las terras nils homes dels cavaliers ni dels prohomes, salva sa justissa et sa senhoria ».

Trad.: « Le Seigneur ni son bayle ne doivent imposer ni les terres, ni les hommes, soit les nobles, soit des bourgeois, sauf les droits qu'il tient de sa justice et de sa seigneurie ».

 

Le principe posé par notre article était une protection pour les habitants de la châtellenie: le seigneur ne pouvait les frapper d'aucun impôt réel ou de capitation, tout en conservant cependant l'exercice des droits qu'il tenait de la constitution consulaire, à titre de droits de justice et à titre de droits de seigneurie.

L'importance de la restriction ainsi indiquée se précise par le rapprochement de notre article avec les articles 29 et 30 de notre coutume et de l'article 1 des lettres du duc d'Anjou de 1372 et des articles 5, 20, 6, 8, 9, 10, 12, 24, 23, 27, 28, 17, 19, 26, 30, 29, 31, de la transaction de 1470 d'Arthus de Montauban, modifiée sur quelques points de détail par des transactions postérieures, entre les consuls et l'archevêque de Bordeaux (notamment le règlement de 1550)(40).

Mais il serait trop long de faire connaître la portée exacte des droits réservés au bayle et aux consuls(41).

 

[Art. 28] — « Totz maseliers que vendes carn de trega per porc, ni milhargosa por saua, gatge VII s., si no ausava jurar que no o saubes ».

Trad.: « Tout boucher qui vend chair de truie pour du porc, ou viande ladre, pour saine, encourt amende de sept sous, à moins qu'il n'ose jurer, qu'il ne le savait pas ».

 

Le bayle (représentant du seigneur) et les consuls de Belvès, dans l'intérêt de la localité, pouvaient « ordinare proclamationes et inhibitiones circa venditiones carnium, paniset vini et aliorum victualium prout expediens et utile et paenam opponere transgressoribus, dum tamen non excedat summam sexaginta solidorum... » (art. 8 de la transaction du 10 février 1470 entre Arthus de Montauban et les consuls). Notre article en dehors de tout règlement particulier organise une contravention contre les bouchers, sans préjudice pour eux de l'obligation où ils sont de se conformer à tous les règlements particuliers faits par les bayle et consuls, sur l'approvisionnement et la vente des viandes.

 

[Art. 29] — « Sil baile del Sor a doas partidas en sa ma, per nom de clam, el deu tener cort legal dels cavaliers et dels prohomes, et si a ung asscedor de la vila ab si cala, li do XII den. et s'il a mestiers de fora, las partidas lo paguo seguon que vendra de lonh ni ch'a nom acondumat a dar ».

Trad.: « Si le bayle du seigneur a deux parties en sa présence, pour cause de procès, il doit, suivant la loi, réunir la cour de justice des chevaliers et des prud'hommes et s'il y a avec lui un assesseur de la ville on lui donnera XII deniers, et, s'il faut qu'il se transporte au dehors, les parties le paieront suivant qu'il viendra de loin, et ce qu'en est dans l'usage de lui donner ».

 

Cet article et les suivants se rattachent à l'administration de la justice. Or, nous savons que comme conséquence du droit féodal, le seigneur devait assurer la justice à ses sujets, comme ceux-ci avaient le droit d'être appelés à figurer dans les cours de justice.

Si donc deux parties veulent plaider et s'adressent au bayle, représentant du seigneur, dans la seigneurie, celui-ci a pour devoir de réunir, comme le veut la loi, la cour des chevaliers et prud'hommes de la seigneurie.

Et, s'il y a un assesseur de la ville, le texte fixe ses émoluments. L'article 16 de la transaction entre les consuls de Belvès et l'archevêque de Bordeaux Artus de Montauban, donne en effet au bayle et aux consuls le droit de nommer un assesseur: « Quod possint dicti Bajulus et consules facere et constituere assessorem, scribam et servientes, ad justiciam exercendam et exequendam necessarios qui juramentum praestabunt de fidelitate praestanda domino et consulibus et bene se habere in officio et fideliter gesta referre ».

 

[Art. 30] — « Lo bayles no lève autras messions trosques lo diffiniment del plach, et aladoncas de totz los dias que aura tenguda cort, leve dos S. de quada dia del vencut, et de jorn deffalhit II s.

Et sil plach era tals quel Sr y agues obs et hy veniali asseador fosso paguat d'aquela meteyssa maniera.

El Sr lèves sas messios, al diffiniment del plach, d'aytans dias cum lo plach se plaigara davan luy, rasonablas a si sies de homes a cavàl.

 Et s'il Sr ol bayles, lo jorn que tenran cort, en aysi cum es sobredich, av[i]an d'autres plachs oi Sorsion de dos en sus, aquils plachs ajudessan a paguar cumenalment las messios sobredichas.

Et sil Sr venia per aventura o era en la vila lo jorn quel bayles auria dat, si davan lo Sor no lo avia assignat, lo Sor no y aga messions... ».

Trad.: « Le bayle ne lève aucuns droits jusqu'à l'achèvement du litige, et, à ce moment, pour chaque jour qu'il aura tenu la cour, qu'il lève 2 sous pour chaque jour de celui qui a perdu le procès, et de chaque jour où il aura été fait défaut 2 sous.

Et si le débat était tel que le seigneur y fût nécessaire et que l'assesseur y vienne, celui-ci sera payé de la même manière.

Et le seigneur lève ses droits, à la fin du procès, d'autant de jours que le débat sera poursuivi devant luy, et raisonnables pour six hommes nobles.

Et si le seigneur ou le bayle le jour où ils tiendront la cour, comme il a été dit, vissent surgir d'autres procès de deux en sus, ces procès aideraient à payer, en les réunissant tous, les frais de présence indiqués ci-dessus.

Et si le seigneur venait par aventure ou se trouvait dans la ville le jour que le bayle aurait fixé, si devant le seigneur l'assignation n'avait pas été donnée, le seigneur n'aura droit à aucun droits de présence ».

 

Ces dispositions ont pour objet de protéger les parties contre l'élévation des frais de justice: l'article détermine les droits du bayle et de l'assesseur, suivant les cas; il pose cette règle très sage que si plusieurs procès se produisent devant la Cour, tous concourrent à payer les frais dus.

Si la présence du seigneur était nécessaire, quels droits aurait-il à réclamer? Le texte laisse quelque doute dans sa signification, nous avons pensé que le seigneur devait avoir droit à un émolument six fois plus élevé que le bayle. On tenait compte pour lui de la nécessité de venir de Bordeaux avec sa suite. Mais si le seigneur se trouvait à Belvès, cette allocation exceptionnelle ne lui était pas faite.

Toutes ces dispositions paraissent très raisonnables.

La fin de l'article fait allusion à la nécessité pour le bayle de prêter serment à son entrée en fonctions:

 

« El Bayles de Sr cant penra la baylia, jure las condumas et la drechura del Sor et de la vila à tener leallment, et li asedor de la vila qui seran al coseilh del bayle et del Sr juren asso meys ».

Trad.: « Que le bayle du seigneur, quand il prendra la baylie, jure de tenir loyalement les coutumes et les droits du seigneur et de la ville; et que les assesseurs de la ville qui seront au conseil du bayle et du seigneur jurent de même. »

 

[Art. 31] — «Totz hom estranhs de fora la honor, que sia vengut ni venga estatgiers à Belver parle ab lo Sor carnal ab XII d. per son cors ».

Trad.: « Tout homme étranger à la Seigneurie, et qui est venu ou vienne demeurer à Belves, s'entende avec le seigneur direct pour l'impôt de capitation de 12 deniers ».

 

Cet article se combine avec le privilège de la châtellenie dans laquelle tout homme domicilié dans le territoire de Belvès avait à payer un impôt de 12 deniers, comme compensation des obligations de garde et de guet(42).

L'étranger venant se fixer à Belvès devait se faire inscrire sur la liste de contribution, pour l'impôt de capitation de 12 deniers, dû par tout chef de famille, qui apportait dans la châtellenie focum et larem. (transaction de 1470).

 

[Art. 32] — « Nulhs hom no es tengut que an far drech fora los dechs del castel, per corilhas que lo Sor li fassa, ni Sr de fioutz ni son Sr Carnals ».

Trad.: « Aucun homme n'est tenu de répondre en justice hors les limites de la châtellenie pour les demandes que le seigneur lui adresse, soit le seigneur suzerain, soit le seigneur direct ».

 

Ce privilège, qui consistait pour l'habitant de la châtellenie à ne pouvoir pas être distrait de ses juges naturels était stipulé dans beaucoup de coutumes, à notre époque. Nous citons en note les passages des coutumes de Villefranche de Périgord, et de Beaumont du Périgord(43).

 

[Art. 33] — « Nulhs hom no fos tengut al Sor per tort que Sr del homme fezes, mas passes ab lo Sor de la vila ab la drechura que devia far a son senhor carnal ».

Trad.: « Aucun homme ne soit tenu vis-à-vis du suzerain, pour un tort imputable à son propre seigneur; mais le vassal passe sous la dépendance du seigneur de la ville, avec la situation juridique qu'il avait vis-à-vis de son seigneur immédiat ».

 

Cet article suppose qu'un vassal du seigneur a constitué lui-même des fiefs ou des censives; si dans ce cas, il encourt à la suite d'un méfait, quelque peine ou obligation, vis-à-vis du seigneur, son propre vassal ou tenancier n'est pas responsable de ces obligations ou peines, vis-à-vis du seigneur suzerain, mais il passe, avec ses devoirs et obligations, sous la dépendance du seigneur suzerain, sans que la faute de son seigneur immédiat ait pu aggraver sa situation juridique.

 

Le manuscrit se termine de la manière suivante:

Antedictae consuetudines fuerunt copiatae per me Joannem Labrossa notario sarlatensi et de bellovidere jurato, et correctae cum Guillelmo de Philiparia, notario publico, Die 29 mensis Novembris anno domini millesimo quadringentesimo septuagesimo septimo, extractae a quibusdam litteris in pargameno scriptis et sigillo pontificali dicti domini ut prima facie apparebat cera rubea impressa in alba cauda cordularum rotundarum in pellibus sigillatarum.

 

(Signés) : De Brossa..., De Philiparia, notarius auctoritalibus apostolica et regia, habitator loci de Bellovidere.

 

Telles sont les coutumes inédites de Belvès, sur lesquelles il nous a paru utile d'appeler un instant l'attention, et qui, rapprochées des autres documents cités au début de cette notice, permettent de se rendre exactement compte de la situation des habitants de la châtellenie de Belvès.

 

 

A. Vigie,

Doyen de la Faculté de droit de l'Université de Montpellier.

 

 

 

 

 

(1) Comp. Gallia christi, t. II, col. 1489.

(2) Fœdera, litterae et acta publica, t. I, 2e partie, p. 971.

(3) Requête présentée à M. de Sève, intendant, par M. de Béthune et suivie d'un arrêt du parlement du 23 février 1674, reconnaissant les privilèges de Belvès.

(4) Art. 21, de la transaction de 1470.

(5) La copie est fort défectueuse, elle paraît avoir été faite par quelque scribe ne connaissant pas la langue qu'il écrivait : de là des difficultés de transcription très considérables. Nous adressons nos remerciements à notre collègue et compatriote, M. Chabaneau, qui a bien voulu nous aider dans l'établissement de notre texte et dont la compétence assure à notre transcription une valeur exceptionnelle.

(6) Sur la signification de l'expression, dechs del castel, dans le sens de limites, enceinte (Ord. des rois de France, t. XI, note f., p. 67. Comp. art. 32 de nos coutumes dans lequel la même expression signifie limites de la châtellenie.

(7) Comp. dans les mêmes termes, art. 4. Coutumes de Montchabrier (Périgord) de 1307 (Ord. des rois de France, t. XII, p. 362). Comp. art. 17 de la charte de Montauban, lettres de Charles IV, janvier 1322 (Ord. des rois de France, t. XII, p. 470; disposition analogue dans les coutumes de Villefranche de Périgord, ville voisine de Belvès (Ord. des rois de France [Paris, février, 1357], t. III, p. 204, art. 4); Bordeaux, Le livre des coutumes, p. 421 (5, 6, c) (126) G, p. 429; comp. le Livre des Bouillons, n° XXXII, p. 136; comp. art. 4, Cout. de Beaumont de Périgord, t. XV, p. 446 (Ord. des rois de France), semblables à celles de Valence d'Agen et de Villefranche de Périgord, d'origine anglaise. Coutumes inédiles de Saussignac, Dordogne (t. 24, fonds Périgord, Bibl. nat.) : « ny à la forsa no faren no lors bes saisiren... »

(8) La répétition du mot que n'a aucun sens, il faudrait, ce semble, suivant la signification de la phrase: que sia fachs.

(9) Coutume de Gardomont [territoire de Hautmont] sénéchaussée du rigord (Ord. des rois de France, t. XII, p. 378, lettres de Philippe IV dit le Bel, janvier 1310, les confirmant).

Art. 6. Teslamenta facta ab habitatoribus dictae bastidae in praesentia quatuor testium idoneorum valeant licet desit alia solemnitas legum, dum tamen liberi non fraudentur sua legitima portione.

Coutumes de Saint-Sardos eu Agenais confirmées par lettres de Philippe VI, Paris 1328 (Ord. des rois de France, t. XII, p. 362).

Art. 7. Testamenta valeant, licet non sint facta secundum solemnitatem legum, dum tamen liberi non fraudentur legitima portione; convocato adhoc capellano loci, vel alia ecclesiastica persona, si commode posset venire.

Mêmes dispositions, coutumes de Monchabrier (Ord. des rois de France, t. XII) et Cout. de Beaumont de Périgord, art. 7 (Ord. des rois de France, t. XV, p. 447).

(10) Art. 6. Siquis habitans in dicta bastidà moriatur sine testamento, nec habeat liberos, nec appareant aliqui heredes qui sibi debeant succedere, Bajulus et Consules dictae bastidae bona defuncti, descripta tamen, commendabunt duobus probis hominibus dictae bastidae, ad custodiendum fideliter per unum annum et diem; et si infra eumdem terminum appareat haeres qui sibi debeat succedere, omnia praedicta bona debent integraliter sibi reddi, alioquin bona mobilia nobis tradentur in Pariagio seu commune praedictis.

Dispositions analogues dans les coutumes de Saussignac (Dordogne). Cout. de Montchabrier, art. 6 (Périgord), Ord. t. XII, p. 363; et Cout. de Beaumout du Périgord, art. 6 (Ord. 11. de France, t. XV, p. 446).

(11) Comparez les règles qui étaient suivies dans beaucoup de coutumes de villes du Midi de la France et notamment art. 2, Cout. de Montossin (août 1270) texte publié par l'abbé Douais (Revue historique du droit français et étranger (juillet-août 1890).

(12) Le mot qui est entre parenthèses, est difficilement lisible: il semble être enehs, mais le sens ne saurait être douteux, surtout en rapprochant no­tre texte des articles 4, 24 et 25, notre article vise des blessures légères avec effusion du sang : aussi proposons-nous de remplacer le mot douteux par e n'eis.

(13) Cout. de Tournay (Htes-Pyrénéss) ann. 1307, Ord. des rois de France, t. XII, p. 368), art. 6, 22 etc. : « ad arbitrium nostri judicis et bujuli puniatur si mutilatio membri intervenit 60 S. et vel amplius si nobis placuerit ».

(14) Comp. Beaumanoir, Cout. de Beauvaisis, XXX, § 844 et suiv., édit. Am. Salmon. Loisel, Insti. coutum., I, VI, 2, 30. Le livre de justice et de plet (docum. inédits), XVIII, 24, § 64 « feme se elle forfet de malains forfez, si come de lédanges, de férir, de « sanc, et de chable, et d'amendres forfez, l'amende n'est que la moitié mendre d'Orne ».

(15) Bailhe ou procureur d'office.

(16) Comp. Beaumanoir, Cout. de Beauvaisis, XXX, § 839, 840, édit. Am. Salmon. Art. 16. Coutume de Villefranche de Périgord (Ord. des rois de France, t. VI, 403) « Quicumque alium peruusserit vel traxerit cum pugno, vel palma, vel pede, irato animo, sanguine non interveniente, si clamor factus fuerit, in quinque solidis projusticia puniatur et faciat emendam injuriam passo secundum rationem.

« Si tamen sanguinis effusio intervenerit in viginti solidis percutiens, si clamor factus fuerit, pro justicia puniatur et si gladio vel fuste, petra vel tegula, sanguine non interveniente si clamor factus fuerit, percutiens in viginti solidis pro justicia puniatur et si sanguis intervenerit et fiat clamor, percutiens in sexaginta solidis pro justicia puniatur, et emendam faciat injuriam passo ». Coutumes de Beaumont en Périgord, art. 16 (t. XV, Ord. des rois de France, p. 448), dans les mêmes termes que pour Villefranche de Périgord, rapp. art. 17, Cout. de Montchabrier, Ord. des rois de France, t. XII, p. 364. Comp. Cout. de Saussignac (loco citato).

(17) Rapp., art. 22, Cout. de Villefranche de Périgord: qui Gladium emolutum contra alium irato animo traxerit, in decem solidis projusticia puniatur, emendet injuriam jam passo, et art. 21. Cout. de Beaumont de P. (Ord. des rois de France, t. XV, p; 448, mêmes termes).

Art. 17. Cout. de Montossin (août 1270), Nouvelle revue historique de droit français et étranger (1890, juillet et août).

«Item si algun tradia cotel iradament, contra autre el Senhor ne auria clamor, ne auria perso justicia XX sol.de Malg. et de Scampament de Sanc, si era feyt de ma ho de punh, si era feyta clamor auria X sol. de malg. mas de Scampament de Sanc si era feyt ab cotel, ho ab autre instrument ferit, ho ab fust, ho ab peyra, si al Senhor abia clamor, d'aqui auria LX Sol. de Malg. et ayso fara far dreyt al clamat, a conoguda del bayle et dels prohomes de Montossin. »

Livre des coutumes de Bordeaux, p. 45. Art. 39. Costuma et antic establiment es que, sy aucun home o fempna trey cotel, o spada, o aucun ferrament smolut, contra aucun autre, iradament, guatgera LXV ssoudz, si pot estre proat per II homes de la communia. E ssy no pot paguar, sera mes au pilloureau.

E asso fo ordenat antiquament per rasson quar la vila no era (a) diffamada per los stranis qui an plus strenta ley en lors locx que nos.

(a) Peut-être faut-il corriger le texte donné par l'éditeur des archives de Bordeaux en ne.

(18) Comp. Coutume de Bordeaux (Livre des coutumes, p. 34).

Art. 21. Costuma et usatge es en Bordales que, Sy un home ausy un autre et es corrogut de la mort, que sera rebost tot viu desotz lo mort.... et Etablissement de Bordeaux [Liv. des cout., p. 215). « Establit es que, si aucuns hom ocit aucun autre, ed serra sebelit sotz lo mort; et so es a jutjar per lo major et per la comunia... et puis lo cors deu murtrer es balhat aus justiciers de nostre senhor lo Reys, a far tantost la justicia davant deita.

Comp. Cout. d'Agen (Liv. des coutumes de Bordeaux, p. 236). « ... E del cors d'aquel homicidi diu lo senhor far justicia, so es assaber quel deu far sotz terrar viu sotz lo mort... «.

Comp. art. 17, des Cout. de Villefranche de Périgord (loco citato).

(19) Comp. art. 13 et 14 de la coutume de Montossin et art. 17 et 18, Cout. de Bordeaux (Livre des coût.), p. 32 et 33.

Art. 17. « Costuma es que, sy aucun home es aient en laironisy que sia estat feit de jorns, qui, per lo prumey, es mes au pilloureau, et, per lo segont pert l'aureilha et, per lo tertz es pendut.

« Empero si feit es de nuytz sera pendut per lo prumey o, sy es trobat que aia paguda l'aurelha per autre laironissi, autaben ».

Art. 15. « Coutume d'Agen (livre des Cout. de Bordeaux, p. 235), si le vol est d'une valeur supérieure à 20 sous, la mort; et si, d'une valeur inférieure, marque au fer chaud, et mort, si le voleur a été déjà marqué.

(20) Corregatz per la leva pourrait, à la rigueur, vouloir dire soit puni par la mise au pilori. Les textes précédents ayant dit souvent sia levat à l'expillori, on pourrait admettre cette expression. Mais nous préférerions corriger le texte de la manière suivante sia corregutz perla vila, devra courir, à travers la ville.

(21) Point sur lequel beaucoup de coutumes ont des détails curieux. Comp. Cout. de Montossin, art. 6, rapp. Cout. d'Agen, art. 19; Cout. de Bergerac, art. 87 (Ord. rois de France, t. XII, p. 542).

(22) Comp. Cout. de Terraube (Revue de Gascogne, t. 39, 1898, p. 427), art. 6.

(23) Sic, Bergerac (Ord., t. XII, p. 528), art. 86, et art. 20, Cout. de Beaumont de Périgord, dans les mêmes termes, Ord. rois de France, t. XV, p. 448, et Cout. inédites de Saussignac (Dordogne), fonds Périgord, B.N., t. 24, p. 280-v°, amende de 100 s. ou courir nus «et aysso sia en la election de lor».

(24) Cout. de Beaumont de Périgord, art. 24 (Ord. des rois de France, t. XV, p. 449) même amende de 60 sous à Villefranche de Périgord (art. 25), loc. cit.

(25) Comp. art. 2, des Cout. de Villefranche de Périgord (févr. 1357, Ord. des rois de France, t. III, p. 201; Cout. de Beaumont de Périgord confirmées par Louis XI en 1461 et données par Edouard (prob. en l'année 5° de son règne. Comp. note (a) Ord., t. XX, p. 46). Art. 2. Semblable à celles de Villefranche de P.

(26) Beaurnanoir, Cout. de Beauvaisis, XLV, 33.

(27) Comp. Langlois, Le règne de Philippe le Hardi, p. 106 et suiv. et Ord. de 1275, ord. des rois de la troisième race, I, p. 304.

(28) Le texte donne « Si per son propri for propi fachs no era ». La répétition du mot propri entre les mots for et fachs n'a aucune signification: il y a là une simple faute de copiste dont il ne faut pas tenir compte.

(29) Voir Ducange, Glossarium m. lat. Pignorare, p. 251. Et coutume de Bergerac (art. 23 et suiv.). Ord. des rois de France, t. XII, p. 534.

(30) Gd Coutumier de Normandie, ch. XXIX, p. 95.

(31) Cout. d'Agen (art. 33), livre des Cout. (Arch. de Bord., p. 250) « ... et d'eu estre quitis et frans, aquel an et aquel mes d'ost et de guacha, et de tota messio de la vila, quant, aiusi cum predig es, aura jurat... » A. Agen on faisait prêter serment à l'étranger, avant de l'admettre à se fixer dans la ville.

(32) Comp. art. 55, Des establissements de Bordeaux (Livre des Coutumes: Archives de Bordeaux, p. 296); art. 37, Cout. de Montossin (loco citato), et les citations de Ducange, v° Guidare, guidus. Chart. anno 1230: ex tab. Massi Item quod dominas comes et domina comitissa nullum hominem guidabunt in civitate vel ejus territorio, sine assensu offensi, nec a suis officialibus guidum permittent qui civem Massiliae offenderit in persona vel rebus... Cout. de Solminiac (Auvergne) et Cout. de Martel: Vice cornes Guidare non debet in villa Martelli malefactorem aliquem, nec debitorem, etc..

(33) Nous croyons qu'il faut modifier le texte: ab serait mis pour O be ou pour o.

(34) Comp. Cout. de Bordeaux, art. 18, p. 33, 139, 140 (livre des Coutumes).

(35) Comp. Cout. d'Agen, art. XV (Livre des Cout. de Bordeaux, p. 235), art. 47 Etablis, de Bordeaux (Livre des Cout., p. 291)          « Sa molher et sas deutas pauguadas » et Bordeaux, art. 21 (Livre des Cout., p. 34). Comp. art. 17, Cout. de Beaumont de Périgord (Ord., t. XV, p. 448) « Salvis tamen primo debitis », et Cout. Villefranche de Périgord, art. 23 (loco citato).

(36) Rapprochez de notre disposition les articles 22 et 23 des coutumes de Beaumont de Périgord (Ord. des Rois de France, t. XV, p.448 et 449), suivant lesquelles on prenait en considération la valeur de la chose volée et les circonstances du vol, et Coutumes de Villefranche de Périgord (art. 23 et 24, Ord. des Rois de France, t. III, p. 207).

(37) Rappr. charte de Laon, art. 7 (Ord. des rois du France, t. XI, p. 198), et établ. de Rouen, art. 24.

(38) Cout. de Bordeaux, art. 4 in fine dans le Livre des coutumes, page 49.

(39) Comp, art. 48 des Etablis. de Bordeaux (livre de cout. art. 48, page 292).

(40) G. 196, Archives de la Gironde.

(41) Renvoi à l'histoire municipale de Belvès, en préparation.

(42) Comp. art. 20, transaction du 10 février 1470 entre Arthus de Montauban archevêque de Bordeaux, et les consuls de Belvès.

(43) Comp. art. 5, Villefranche de Périgord, Ordonn. des rois de France, t. III, p. 204.

« Quod ad questionem seu clamorem alterius non mandabunt vel citabunt senescalli dicti domini nostri vel baillivi sui... aliquem habitantem in dicta villa, extra honorem dicte ville ... »

Art. 4. Lettres en faveur de Villefranche de Périgord, février 1357 (Ordon. des rois de France, t. III, p. 111).

« Quod senescallus Petragoricensis et Caturcensis qui nunc est et pro tempore fuerit, assisias suas de cetero his anno quolibet, assignare et tenere aut teneri facere debent in villa predicta, in quibus appellationum causa o dicte ville et honorem ejusdem emergentes, et non alibi invitis partibus, sine debito debeant terminari, ac etiam diffiniri ».

Comp. art. 5, Cout. de Beaumont de Périgord, Ordonn. des rois de France, t. XV, p. 446.

 

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