<<Retour

La Chronique de Guitres

(par M. Frédéric BIRET)

 

 

 

Cette chronique, sans doute écrite au XIe siècle, ne nous est connue que par deux copies que Gaignières s’était procurées: une du XVe siècle et une autre du XVIe. Elles font partie d’un recueil n° 17733 du fonds latin conservé à la Bibliothèque Nationale de France.

 

La chronique était connue de l’abbé Lespine et de Courcelles. Ils l’utilisent dans le chapitre concernant la famille Taillefer, pour faire une digression sur la généalogie de la famille Grimoard (Histoire généalogique et Héraldique des Pairs de France, tome XI, 1831):

 

« Fragment sur la Maison de Grimoard, en Périgord.

La maison de Grimoard, en Périgord, est incontestablement une des plus anciennes de cette province. Son nom et la situation de ses premières propriétés ont fait supposer avec assez de probabilité qu’elle tirait son origine des anciens vicomtes de Fronsac de la première race, connus dès le Xe siècle. Dans une vieille chronique de l’abbaye de Guitres, conservée à la Bibliothèque du Roi, on lit que ces vicomtes ont fondé, avant l’an 1000, l’abbaye de Saint-Astier, et bâti les châteaux de Mucidan et de Ribérac. De cette ancienne et illustre race étaient issus Grimoard, évêque d’Angoulême, et Islon, évêque de Saintes, frères d’Aimeric, vicomte de Mucidan, ainsi que le vicomte Grimoard de Fronsac (vivant en 1013), père des comtesses de Périgord et d’Angoulême. »

 

De cette famille dérivent plusieurs branches dont plusieurs damoiseaux de Grignols dont la descendance s’est fondue dans la famille Taillefer, des seigneurs du château de Frateaux (commune de Neuvic), seigneurs de Beaulieu et Maisonneuve (en Saintonge), seigneurs de Jaure et Chassens, seigneurs de Mauriac (commune de Douzillac). Cette famille était alliée avec les plus grandes et anciennes familles du Périgord. Ces informations  généalogiques sont extraites des tomes 51, 59, 64, 79, 87, 144, 177 de la Collection Périgord.

 

Saint-Allais dans son Précis historique sur les comtes de Périgord (1836), utilise cette chronique, en citant l’abbé Lespine, pour mettre en évidence l’ancienneté des seigneurs de Grignols.

 

Charles Grellet-Balguerie a redécouvert cette chronique, et projetait sans doute d’en publier le texte, après avoir publié dans les Archives historiques de la Gironde, tome XXVI, une partie du manuscrit préservé par Gaignières.  Il a également publié, sous le titre Histoires et légendes d'Aquitaine: Légende d'Heudon roi d'Aquitaine (1880), la première partie de la chronique de Guitres.

 

Il a laissé des notes manuscrites à la Société historique et archéologique du Périgord (conservées sous la cote 2J 876 aux Archives départementales de la Dordogne) qui montrent qu’il avait rapproché cette chronique, du conte des Quatre fils Aymon. D’après ses notes, il semble avoir voulu prendre un peu trop au pied de la lettre la légende des fils Aymon. Cela l’a conduit sur quelques fausses pistes et à des inexactitudes chronologiques, notamment dans son essai de restitution d’une généalogie. De plus, un certain nombre de chartes qui pouvaient donner de précieuses informations sur des dates, lui étaient inconnues au moment de sa publication.

 

Il a néanmoins publié sous le pseudonyme d’Angel Fayolle, en 1881 une petite monographie sur l’origine des plusieurs villes du Périgord, où il exploite la chronique de Guitres, sans en donner le texte: Origine des Villes de Ribérac, Mussidan, Saint-Astier, Grignols, etc.

Attention, les positions et opinions de l'auteur émises dans cette monographie sont de sa seule responsabilité. Elles sont à resituer dans le contexte historique de l'époque: la guerre de 1870 est encore fraîche dans les mémoires....

 

Quarante ans plus tard, en 1921, Joseph Depoin, publie la suite de ses Etudes préparatoires à l'histoire des familles palatines. Il publie en entier la chronique de Guitres. Mais à l’aide de chartes et chroniques que Grellet-Balguerie ne connaissait pas, Depoin en donne une meilleure interprétation.

 

Plus récemment, Christian Settipani, dans son ouvrage sur La noblesse du Midi carolingien (2004), reprend dans l’ensemble, les conclusions de Depoin. Il donne néanmoins quelques corrections quand de nouvelles chartes découvertes et publiées depuis 1921, permettent d’apporter des précisions.